psychanalyse

symptôme femme, symptôme d’un autre corps

[ 17 janvier 2006 / 9 novembre 2011 ]

ça continue:

Le symptôme femme par contraste, c’est d’être symptôme d’un autre corps.  […] C’est par ce tour de s’accomplir comme symptôme et de s’offrir que Lacan peut dire de Joyce qu’il se tient pour femme à l’occasion, tout en sachant bien qu’il ne choisit pas la voie du “pousse à la femme” comme “Le président Schreber”, il n’est pas femme de Dieu. Il choisit “le dire à la pointe de l’inintelligible”.
La morale de l’histoire, de Joyce avec Lacan, c’est de savoir le poids du corps propre, une jouissance de la langue à exclure le sens.
« LOM du XXI siècle », Marie-Hélène Roch, Onicar? digital

avoir ~ LOM cahun corps et nan-na Kun

[ 17 janvier 2006 / 9 novembre 2011 ]

LOM, LOM de base, LOM cahun corps et nan-na Kun. Faut le dire comme ça : il ahun… et non: il estun… (cor/niché). C’est l’avoir et pas l’être qui le caractérise. Il y a de l’avoiement dans le qu’as-tu? dont il s’interroge fictivement d’avoir la réponse toujours. J’ai ça, c’est son seul être. Ce que fait le f…toir dit épistémique quand il se met à bousculer le monde, c’est de faire passer l’être avant l’avoir, alors que le vrai, c’est que LOM a, au principe. Pourquoi? Ça se sent, et une fois senti, ça se démontre.
(…)
L’S.K.beau c’est ce que conditionne chez l’homme le fait qu’il vit de l’être (=qu’il vide l’être) autant qu’il a – son corps: il ne l’a d’ailleurs qu’à partir de là. D’où mon expression de parlêtre qui se substituera à l’ICS de Freud (inconscient, qu’on lit ça) : pousse-toi de là que je m’y mette, donc.
(…)
Avoir, c’est pouvoir faire quelque chose avec.
Lacan, Jacques, Autres écrits, « Joyce le Symptôme », pp. 565-566 (Actes du 5ème Symposium James Joyce, Paris 16-20 juin 1975),

AVOI (a-voi), s. m.
Terme de brasserie. Donner un avoi, faire couler d’une cuve dans une autre.
ÉTYMOLOGIE :
Peut-être de l’ancien verbe avoyer, mettre en voie.

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(pulsion, silence et n’importe quoi :: les textes)

[ 1 février 2006 / 8 novembre 2011 ]

Il (Freud) nous dit quelque part que le modèle idéal qui pourrait être donné de l’auto-érotisme, c’est une seule bouche qui se baiserait elle-même, – métaphore lumineuse, éblouissante même, comme tout ce qui se trouve sous sa plume, et qui ne demande qu’à être complétée d’une question. Est-ce que dans la pulsion, cette bouche n’est pas ce qu’on pourrait appeler une bouche fléchée – une bouche cousue, où nous voyons, dans l’analyse, pointer au maximum, dans certains silences, l’instance pure de la pulsion orale, se refermant sur sa satisfaction.

En tout cas, ce qui force à distinguer cette satisfaction du pur et simple auto-érotisme de la zone érogène, c’est cet objet que nous confondons trop souvent avec ce sur quoi la pulsion se referme – cet objet, qui n’est en fait que la présence d’un creux, d’un vide, occupable, nous dit Freud, par n’importe quel objet, et dont nous ne connaissons l’instance que sous la forme de l’objet perdu petit a. L’objet petit a n’est pas l’origine de la pulsion orale. Il n’est pas introduit au titre de la primitive nourriture, il est introduit de ce fait qu’aucune nourriture ne satisfera jamais la pulsion orale, si n’est à contourner l’objet éternellement manquant.

Lacan Jacques, Le Séminaire, Livre XI, Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, 1964, p. 164.

de duve, la présentation de l’objet

[ 11 février 2006 / 8 novembre 2011 ]

l’impossibilité du ferde Duve encore. je ne me souviens plus bien. l’exposition en 2000 aux Palais des Beaux-Arts de Bruxelles,  dont il a été le commissaire, Voici – 100 d’art contemporain,  que  j’ai tant aimée. dont j’ai offert à droite et à gauche le catalogue.

que dans l’œuvre d’art contemporain il s’agisse plutôt d’une présentation de l’objet – plutôt que de l’œuvre d’art comme lieu d’une énonciation,  « ouverture, fenêtre » sur le monde, déploiement de l’istoria (avec le sujet dans le tableau, en son point d’horizon).

serions passés d’un savoir dans le fantasme au « savoir » de la pulsion, à l’in-dit).

s’agirait alors d’un montrer, ce qui au cadre du discours échappe (je me souviens mal, je me souviens mal).

impossibilité du feret lui, thierry de duve  décrit le « n’importe quoi » des artistes comme modéré par  la condition d’un faire montre, d’une présentation – index pointé sur – un certain objet / objet certain – lequel, quoiqu’on en aie, aurait ce pouvoir d’orienter la pulsion. l’objet, par l’artiste, nous est présenté : il est là. cet objet est celui qui échappe à l’égalisation, la démocratisation des valeurs. (en fait, là, je crois totalement que j’invente, j’invente par rapport à ce que développe TdD dans Voici ).

devant la télévision pas beaucoup de cet objet fait entendre sa voix. (sinon, de ce qu’il en est de lui comme rien qui vaille // sinon, de ce qu’il en est de lui quand, captif de la pulsion, il fait valoir son rien qui vaille //
sinon, de ce qu’il en est de lui quand, captif de la pulsion, il fait valoir sa tendance, à elle, à éviter la castration c’est-à-dire  la loi c’est-à-dire le désirimpossibilité du ferla castration la loi le désir étant : il y a du manque à dire ce qui se joue entre les sexes, manque qui ne se se révèle que du moment qu’un dire s’essaye. la pulsion répond de ce manque.  son silence même en répond. 
(le mutisme est du sujet, le sujet est celui qui parle. le silence, de l’objet. )

la pulsion est cela qui relativise.

(il y a – y-a t’il  ? – un objet –  de base – comme LOM – de base – ka un corps – –  qui ne serait pas n’importe lequel mais qui pourrait se faire représenter par n’importe quoi. dont n’importe quoi pourrait tenir lieu.)

impossibilité du ferla pulsion est jouissance de l’affinité du réel et du signifiant. leurs accointances.

« S barré poinçon grand D » écrit d’abord Lacan parlant d’elle. sujet barré poinçonné à la demande.

la demande c’est le signifiant.

il n’y aurait pas eu jouissance de la pulsion s’il n’y avait eu le signifiant.

la jouissance de la pulsion est celle de ce qui récupère après la perte de la jouissance initiale, après la perte de la Chose.

c’est le plus-de-jouir.

la pulsion se satisfait du plus-de-jouir, jouit de la perte. et elle n’en sait rien. car elle ne sait rien. (là où ça sait, où ça sait l’arrachement, là, ça souffre.)( c’est ça le plus-de-jouir : plus positif côté pulsion, plus négatif, côté désir, côté sujet). (c’est très simple).

le plus-de-jouir c’est l’objet même.

il y a plus-de-jouir tant qu’existe la possibilité du dire.

la possibilité du dire existe tant que dure la vie, lettrumain.

comme possible le dire peut-être infime : 1.

c’est l’in-dit. 1-dit.

c’est l’un sans dire.

1, le dit Un, de la marque, du coup. la barre, le cri. le grand incendie. le nourrisson est le crit qui sort de lui. tu crois qu’il pleure, il naît. il naît trumain.

(ainsi, la pensée procède-t-elle du plus-de-jouir dans la mesure où elle procède de la possibilité du dire.)

le dire sort de la potentialité et rentre dans l’impossibilité.

lacan dit : faire entendre qu’il s’agit d’un impossible et non pas d’impuissance. il dit ça à un moment, je ne sais plus où. (et il ne s’agit pas non plus de ramener l’interdit, ajoute-t-il, il s’agit de trouver son chemin pour aller vers, à la rencontre de l’impossible.)

Thierry de Duve dit : l’artiste contemporain nous montre, a cette générosité de nous montrer, nous mettre en présence de l’objet (puisque le dire est impossible ). C’est un objet dont il s’est détaché, comme sujet, et qu’il nous montre. Vois-là.

le dire est un faire. qui se fait dans l’écriture, qui se fait dans l’art, qui se fait sur le divan, qui se fait dans la vie. et le faire est impossible (ce qui fait parler Duchamp  de « L’impossibilité du fer »). (le faire est impossible depuis que ce sont les machines qui le font et que Dieu n’est plus là pour dire ce qui est bien,  ce qui est mal. plus personne ne sait. c’est ce que m’a dit Thierry de Duve, grâce ici lui soit rendue.)

Lacan : il n’est d’éthique que du bien-dire. Un dire qui vise en même temps qu’il touche à l’impossible. (un compte-rendu de jouissance, un moment, une passe – car ce qui est sûr : c’est que la jouissance ça, ça passe très bien).

Dans la pulsion, le sujet poinçonné à l’universalité, faisant corps avec elle.
Dans le fantasme, le sujet poinçonné à la particularité faisant corps avec elle.

noir sur blanc, pensées en italique :: le pas sur le tout

[ 5 mars 2006 / 5 novembre 2011 ]

Lacan formules sexuation dans Encore

Vie étirée entre l’écran du jour et l’écran du soir et tous les deux sont très petits. Il est de ma nature d’être enfermée. Note sur l’angoisse de l’orgasme. Petite note sur l’adhérence à ce fantasme selon lequel il faut signifier à l’autre, au partenaire amoureux, qu’il y a à redire à son désir. Je ne trouve pas le mode du mien dans la mesure où je ne le supporterais calqué sur aucun (pas tout x phi de x :: je privilégie le pas sur le tout). Et puis il y a l’insupportable qui  consisterait à consentir à son désir, de l’autre, à dire oui à son mode, sa modalité. Ce mode, cette modalité, mienne également cependant (il n’existe pas de x tel que non-phi de x). Enfin, toujours: rester l’Autre. Je t’aime. C’était, l’émission des pensées du matin. Et pourtant, tout cela est faux. Et pourtant, tout cela est faux. Le monde tourne.

symptôme et sinthome

[ 2 mai 2006 / 6 novembre 2011 ]

je suis payée pour lire :

Cette différence, propre à Lacan, du symptôme et du sinthome, nous montre bien pourquoi nous avons aussi besoin de deux termes comme ceux de désir et de pulsion. Le désir a ses intermittences tandis que la pulsion a sa constance. Il y a du côté du désir tout un jeu de masques et il est incessamment travaillé par une négativité interne, si je puis m’exprimer ainsi, alors que, du côté de la pulsion, nous avons une positivité plus ou moins grande.

Du côté symptôme et vérité, tout repose sur le manque. Du côté sinthome et jouissance, il n’y a pas de manque.

Du côté du symptôme, c’est la répétition de la rencontre manquée, une répétition de l’évitement, tandis que du côté du sinthome, c’est la répétition de ce qui soutient le sujet dans l’être, et pourquoi tout lui est bon. Ce n’est qu’en termes économiques qu’on pourra ici parler de plus et de moins.

Le court-circuit consiste à s’apercevoir que le « il n’y a pas » fait problème dans la perspective du sinthome. Comment penser un « il n’y a pas » du côté qui est tout positivité ? Cette pensée du manque, qui ne répond pas au canon de la seconde perspective, en quelque sorte nécessite qu’on raisonne à la place sur le trou. Le court-circuit consiste à s’apercevoir que la première leçon des nœuds que trafiquait Lacan est de montrer, de donner figure à ce qu’un trou n’est pas un manque.

Conclusion des Leçons du sinthome (Journées ECF 2005), Jacques-Alain Miller

rêve, le cargo demi-tour (2)

[ 8 mai 2006 / 6 novembre 2011 ]

bon, je n’ai pas encore trouvé sur internet d’image de l’agrafe par le sinthome
mais:

L’œuvre (de Joyce) avait-elle besoin d’être publiée ? Pas nécessairement. Le sinthome oui, le nécessitait. Que Joyce ait voulu sa publication, c’est une question qui a pu rendre perplexe Lacan. Dès lors, elle est une agrafe ( elle fait le quatrième) qui épingle le symptôme comme social, lui laissant enfin une entrée. C’est ce que Joyce appelle son tour de farce. Son dire magistral est plutôt pour Lacan tour d’écrou qui libère et serre en ses tours la réserve, montrant ainsi qu’un nouage est possible sans père, à cette condition bien sûr de s’en être chargé. A la force du dénouage et renouage, le sinthome (écrivons-le de sa dernière écriture), élève la condition d’artiste à ce paradigme: se faire fils nécessaire.
« LOM du XXI siècle », MH Roch

(suite…)

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SOUVENIR DU SEMINAIRE DE MARIE-HELENE BROUSSE

[ 16 mai 2006 ]

Notes prises au séminaire du 15 mai 2006.
Séminaire d’Étude 1 de l’ECF, animé par Marie-Hélène Brousse.
Commentaire du texte de Jacques Lacan sur “Les noms du père”

Question de Marie-Hélène Brousse: pourquoi faut-il que Lacan doive ramener l’Eglise quand il en vient à parler des Noms-du-Père? Quel est le lien, le rapport de cet Autre qui est Dieu au Nom-du-Père? Comment, pourquoi l’objet a va-t-il le faire retourner aux Pères de l’Eglise?

Néanmoins, quels que soient les prestiges de la dialectique hégélienne – quels que soient ses effets, via Marx, par lequel elle est entrée dans le monde, achevant ainsi ce dont Hegel était la signification, à savoir la subversion d’un ordre politique et social fondé sur l’Ecclesia, l’Eglise – quelle que soit ici sa réussite – quelle que soit la valeur de ce qu’elle soutient dans les incidences politiques de sa réalisation, la dialectique hégélienne est fausse. Elle est contredite par l’attestation des sciences de la nature que par le progrès historique de la science fondamentale, à savoir les mathématiques.
Jacques Lacan, Des Noms-du-Père, Editions du Seuil, Collection Champ freudien, janvier 2005, pp. 74-75.

Pourquoi Lacan dit-il qu’elle est fausse, la dialectique hégélienne, alors que tout de même, c’est "rentré dans le monde", ça fonctionne bien, c’est solide – thèse/antithèse/synthèse. Alors pourquoi Lacan dit-il qu’elle est contredite par les avancée de la science et en particulier des mathématiques? Parce que de synthèse, il n’y en a pas, et que la science, elle, s’en passe parfaitement, de la synthèse. Ce n’est pas par la synthèse que progresse le savoir scientifique. Une thèse s’avère-t-elle fausse, elle est jetée, ça devient un déchet. 1 démonstration mathématique n’espère pas de synthèse dialectique : y a de la perte. Et le fonctionnement de petit a, c’est pareil, il n’est pas dialectique.

Discours, lui, obéit à la dialectique hégélienne. Il y a tout un pan du désir qui est fondamentalement dialectique.

Hegel pense qu’à un moment donné, à force de 1, 2,3, de thèse/antithèse/synthèse, tout sera intégré, on atteindra le savoir absolu. Marx s’en foutait du prolétariat, mais pensait que le prolétariat allait pouvoir faire la synthèse définitive. L’Eglise elle aussi récupère, fait la synthèse, quand elle promet, par exemple, la vie éternelle.

Ce Lacan des Noms-du-père et du séminaire l’Angoisse, c’est du « Lacan contre Lacan », qui se prononce contre la dialectique, qui oppose Kierkegaard à Hegel.

Comme l’a vu tout aussitôt le contemporain du système de Hegel, qui était alors le Système tout court, comme l’a vu, chanté, marqué Kerkegaard, l’angoisse est ici le signe ou le témoin d’une béance existentielle. J’apporte le témoignage que la doctrine freudienne est celle qui en donne l’éclaircissement.
Ibid., p. 75

Pourquoi cette opposition ? C’est qu’il y a l’angoisse : la perte est définitive, Lacan y insiste, et c’est tant mieux pour vous. (C’est d’ailleurs quand l’objet revient, l’objet perdu réapparaît, qu’il y a l’angoisse, que l’angoisse émerge, l’objet doit rester perdu). Hors de la perte, point de salut. La science (qui laisse la perte à la perte, qui n’essaie pas de la récupérer, de la faire entrer dans aucun travail de synthèse) a sonné le tocsin du savoir absolu, du rêve des Lumières.

Aujourd’hui, ce qui est venu remplacer l’Encyclopédie, ce sont les moteurs de recherche. Seulement là, de thèse / antithèse / synthèse, il n’y en a pas. Voilà le tout, démerdez-vous. Le savoir en ligne, en réseau ne fait pas ordre, c’est le contraire du savoir absolu. Et il n’y a pas de subversion pas de désir sur le net : tout y est.

Kierkegaard est opposé à Hegel, parce que lui prend en considération l’angoisse, l’angoisse en tant qu’elle fait signe d’une béance existentielle. La dialectique ne laisse pas place à la béance, ça marche ça roule, on ne peut pas l’arrêter, sauf avec l’angoisse.

La dialectique peut-elle casser des briques?
René Viénet, Tu Guangqi
La dialectique peut-elle casser des briques?, 1987

La dialectique, la rhétorique, procède éminemment de la métaphore. La science pas du tout, c’est un discours sans métaphore (éventuellement, procède d’une nomination). MHB se réfère à un livre de Bachelard, dont je n’ai pas noté le titre, qui montre, en long et en large qu’avec la métaphore, la science n’approche pas le réel. Tant qu’elle en est passée par des métaphores, elle a loupé le réel (exemple de la queue de comète, de l’éponge).

Situationnistes avaient fait film : La dialectique peut-elle casser des briques?

 

Freud nous ramène là au coeur de ce qui était pour lui l’illusion. Il l’appelait selon le mode de son temps, qui est celui d’un alibi, la religion. Je l’appelle, quant à moi, l’Eglise.
Ibid., p. 75

Freud parlait de religion (l’avenir d’une illusion) et ici, Lacan parle de l’Eglise. Question de MHB, pourquoi ce changement de terme ? Ça ne peut être sans raison.

C’est que Lacan sort de la problématique de Freud, sort du père. Petit a vient faire concurrence, concurrence épistémologique au père. L’Eglise, c’est la religion sans le père. C’est la police sans le nom.

Aujourd’hui discours ordonne un mode de jouissance qui ne relève pas du père. Le signifiant-maitre n’est pas forcément le père.
(On peut dire de petit a qu’il concoure au discours)

xxxx
Barbara Kruger
Untitled (I shop therefore I am), 1987

Rien que le capitalisme ne puisse récupérer. (Aucune subversion possible à la télévision, rien qu’elle ne puisse avaler). Souvenir de MHB, s’était promenée à Londres pendant soldes, entrée dans magasin, frappée par grandes banderoles qui affichaient ces textes, auxquels personne d’ailleurs ne prêtait attention:

"I shop, therefore I am", "Buy me, I’ll change your life", et puis quelque chose qui disait "Tu peux m’acheter, de toutes façons, ce n’est rien, IT’S NOTHING !"

L’objet petit a est devenu rentable. (Note de moi-même, oui, mais est-ce que ce n’était pas de sa nature même, est-ce ce qu’il n’était pas prédestiné à ça, enfin, de toujours, à être récupéré, à être rentable. c’est bien de là qu’il vient, non, de l’objet de Marx, de la plus-value ?)

L’Eglise, elle, elle tient contre Marx, elle tient contre le capitalisme, contre la consommation. Le capitalisme n’a écorné en rien le pouvoir des Eglises. (Terroristes produits du capitalisme).

La question c’est : que devient le père quand on a comme boussole l’objet a.

Oblativité, mode de défense contre demande la mère.

Orgasme – moment de séparation, de clivage, où se révèle le clivage entre la jouissance et le désir. Que la jouissance et le désir n’ont rien à voir ensemble. Moment de cette béance, où se révèle qu’il n’y a pas de lien dialectique entre le désir et la jouissance.

Par contre, c’est un niveau génital que l’enseignement de Freud, et la tradition qui s’en conserve, nous situent la béance de la castration.
Les psycho-physiologistes contemporains de Freud en réduisent l’obstacle à ce qu’ils ont appelé le mécanisme de la détumescence fausse, tandis que Freud, lui, depuis le début de son enseignement, articule ce qui, de l’orgasme, représente exactement la même fonction que l’angoisse, quant au sujet. J’ai cru devoir vous le montrer l’année dernière. L’orgasme est en lui-même angoisse, pour autant que le désir est à jamais séparé de la jouissance par une faille centrale.
Qu’on ne nous objecte pas ces moments de paix, de fusion du couple, où chacun peut même se dire, de l’autre, bien content. Nous analystes, allons y regarder de plus près, pur voir ce qu’il y a, dans ces moments, d’alibi fondamental, d’alibi phallique, où la femme se sublime, en quelque sorte, dans sa fonction de gaine, mais où quelque chose qui va plus loin reste infiniment au-dehors.
Jacques Lacan, Ibid., pp. 79-80

[… à compléter, donc]

catégorie: psychanalyse

de l'angoisse et du non-dialectisable

[ 22 mai 2006 ]

Comme je relis, me demandant qu’en faire, ces notes prises, là au séminaire de MHB, le 15 de ce mois, je reprends en main, ce séminaire des Noms-du-Père, je lis, p. 70:

Dans l’angoisse, vous ai-je dit, le sujet est affecté par le désir de l’Autre, d(A) ici au tableau. Il en est affecté d’une façon immédiate, non dialectisable. C’est en cela que l’angoisse est, dans l’affect du sujet, ce qui ne trompe pas.
Jacques Lacan, Des Noms-du-Père, Editions du Seuil, Collection Champ freudien, janvier 2005, p. 70

Et je rapprocherai seulement cette note, de celle sur l’orgasme, déjà reprise ici:

[…] Freud, lui, depuis le début de son
enseignement, articule ce qui, de l’orgasme, représente exactement la
même fonction que l’angoisse, quant au sujet. J’ai cru devoir vous le
montrer l’année dernière. L’orgasme est en lui-même angoisse, pour
autant que le désir est à jamais séparé de la jouissance par une faille
centrale.

Jacques Lacan, Ibid., p. 80

Etre affecté par le désir de l’Autre, en être affecté de façon non-dialectisable, en tant qu’au-delà de ce désir, toujours peut venir à danser, à s’apercevoir le spectre de cette béance, de cette faille qui sépare désir et jouissance, creusée par le désir de l’Autre lui-même quand il vient à se dire (chute où rien ne tombe). et en tant qu’à se dire le désir de l’Autre creuse lui-même le gouffre de ce qui ne trouve pas sa place dans son énoncé.

catégorie: psychanalyse

pas top, des règles de la circulation et de la jouissance des biens matériels

[ 3 juin 2006 ]

L’OMS a défini la santé mentale comme l’absence de trouble. Le DSM qui permet la mondialisation du traitement hygiéniste des masses humaines décline quatre catégories de troubles de la conduite : conduite agressive, fraude et vol, violation des règles établies, destruction des biens matériels. Avec cette définition du trouble, la santé mentale devient le respect des règles établies de la circulation et de la jouissance des biens matériels. Ces catégories sont celles des experts français lorsque, à l’occasion, ils publient un rapport sur la santé de l’enfant et de l’adolescent. L’utilisation de la génétique y fait sa triste réapparition : des populations dites à risque montreraient une « susceptibilité génétique » au TOP (Trouble Oppositionnel de Provocation). S’y ajoute le formatage rééducatif qui aujourd’hui inclut l’utilisation d’images de synthèse. On prétend qu’elles donneraient un support pour reconditionner non seulement les conduites mais la pensée : récemment un congrès à Laval était censé montrer l’universalité sans reste des TCC, capables de tout normaliser par déconditionnement puis reconditionnement. Exemple était donné de cas de vétérans US de la guerre d’Irak poursuivis par l’idée de la réalisation imminente de l’apocalypse. Leur pensée aurait été reformatée après qu’ils aient été reconditionnés à trouver non dangereuses pour eux-mêmes des images de missions guerrières. Peut-être aurons-nous bientôt, grâce aux images de synthèse, un protocole de traitement pour gaulois phobique que le ciel ne lui tombe sur la tête ?
Pascal Pernot, Lettre ouverte à Sigmund Freud, La lettre mensuelle 249

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la charge affective en moins

[ 21 décembre 2006 ]

de l’allègement de la charge affective,

de nombreuses choses je vis
qui débarrassées sont
de leur
« charge affective ».

une histoire triste,

Ernst retrouve alors le souvenir suivant : très petit, au moment de la mort de sa sœur, il a commis une chose grave pour laquelle le père l’a battu. Il a alors fait une terrible colère et injurié son père, mais ne connaissant pas d’injures il lui a donné tous les noms d’objets qui lui passaient par la tête : « Toi lampe ! toi serviette ! toi assiette ! » Le père déclare : « Ce petit là deviendra ou un grand homme ou un grand criminel. » A partir de ce moment, son caractère se modifie : il était coléreux, il devient lâche.

de l’imaginaire,

Toute pensée obsessionnelle, qui donne lieu à quelque construction, si loufoque soit-elle, sera toujours liée à la sexualité. La névrose obsessionnelle comporte un érotisation de la pensée.

La formule chez l’obsessionnel comporte toujours une équivalence qui introduit une valeur phallique. Le phallus imaginaire est la véritable unité de mesure. (cfr. le rêve, « mais oui, on peut tout à fait dire que c’est imaginaire »- mais l’ai-je raconté ici?)

L’obsessionnel démontre que la pensée est un parasite, un placage, un cancer dont l’humain est affligé ; la parole parasite le corps à titre de pensée, la pensée affecte le corps. C’est ce que dit Lacan dans le Séminaire XVII, l’Envers de la psychanalyse, p. 176 : « La pensée n’est pas une catégorie. Je dirai presque que c’est un affect. Encore ne serait-ce pas pour dire que c’est le plus fondamental sous l’angle de l’affect. »

de la pensée,

la pensée est privée.

la danse,

la danse est un plaisir et doit le rester.

moi,

je ne sais pas ce que c’est le phallus imaginaire.

Les livres ou la vie (1)

[ 1 mars 2008 / 21 novembre 2008 ]

Le brouillard ayant envahi mon esprit, brouillard blanc où je distingue quelques panneaux lumineux, dont celui qui comporte les mots « IMRE KERTÉSZ », je décide, sans en savoir plus, de racheter aujourd’hui Être sans destin, prêté déjà, et que je ne risque pas de revoir avant longtemps. Le racheter, le relire, à cause de la forte impression qu’il m’a faite dont ne me reste qu’un souvenir flouté.

A propos d’I. K., me serait-il possible en ce moment d’en dire plus ? Se concentrer.

L’écriture.

J’aurai le lisant compris que j’accordais à l’écriture, aux livres, bien plus d’importance qu’à « la vie ». (Je ne rapporte ici que ce que j’arrive à en rapporter, de ce que j’aurai alors compris, maigre moisson, constatai-je, maigre moisson, au regard des souvenirs dont je suis sûre : ce que j’avais cru comprendre alors m’avait laissée bouleversée, pendant des semaines.)

Cet autre souvenir : je demande à D, dont c’est la spécialité, si elle me croit atteinte de bovarysme. À mes explications, elle répond que c’est certainement là l’un des noms de ma maladie. Je lui demande quoi faire. Elle me dit que je ne peux rien faire d’autre que de l’accepter.

Je me souviens également avoir été saisie par la nécessité de prendre cet amour qui se révélait de moi, de façon éclatante, au sérieux. Cet amour pour les livres, pour l’écriture, il me fallait l’assumer, le revendiquer. Il ne s’agissait plus de laisser dans l’ombre, une ombre honteuse. Le porter au grand jour.

C’est intéressant.

Il allait s’agir de faire en sorte que soit la vie qui soit atteinte par les livres. Il faudrait que le sérieux des livres se propage par contagion à la vie. Il ne s’agirait plus de vivre une vie amputée du sérieux des livres. Je ne peux m’empêcher de songer ici à la formule de Lacan concernant l’aliénation. La mienne s’écrirait : « Les livres ou la vie ». Que vous choisissiez l’un ou que vous choisissiez l’autre : vous n’aurez jamais les deux. Vous n’aurez jamais que l’un amputé de l’autre. Telle en tout cas me sera apparue ma vie à ce moment-là, sa difficulté : amputée des livres. Dans les livres, j’étais sans la vie, dans la vie, j’étais sans les livres.

ou les livres ou la vie

Les livres amputés de la vie

La vie sans les livres

Comment le dire : j’aime le sérieux et la passion des livres et je reproche à la vie de ne jamais rien m’offrir de pareil. Et m’est-il apparu que simplement, ma vie serait-elle écrite, je l’aimerais. Passionnément peut-être même. Pourquoi je me force aujourd’hui à cet exercice.

Et raison pour laquelle je me suis sentie autant emportée, emballée, quand j’ai écrit ce mail à XY. Je lui parlais là de la seule façon dont il me semble valoir la peine de parler. Plus exactement, je m’adressais à lui, de la seule façon… Les intérêts que je mettais en jeu étant les seuls ceux qui m’intéresse. Mon compagnon, F., y vit à redire : « Tu ne peux pas ainsi t’adresser à un concurrent ». Je lui répondis que ma décision se trouvait là, ne renoncer à m’adresser à quiconque dans mon style à moi, dans ce qui était important pour moi. Bien sûr, il est bien possible qu’il ait eu raison, et que si cet homme me répondit de façon charmante, c’était probablement pour m’amener à lui fournir les renseignements dont il avait besoin pour que le travail qu’il avait à faire, de reprendre mon boulot, pût se faire à moindre coût. Qui donc mieux que moi pouvait défaire ce que j’avais fait.

Les livres ou la vie (2) – choc

[ 2 mars 2008 / 12 décembre 2008 ]

Que ces lectures, se figure-t-on, m’ont causé un choc :

Lacan Jacques, Séminaire XI, p. 191

Si dans ce cercle, celui de gauche, il y a cinq objets, et si, dans l’autre, il y en a encore cinq, – les additionner, ça fait dix. Mais il y en a qui peuvent appartenir aux deux. S’il y en a deux qui appartiennent à chacun des deux cercles, les réunir consistera en l’occasion à ne pas redoubler leur nombre, il n’y aura dans la réunion que huit objets. Je m’excuse de ce qui peut paraître là enfantin à rappeler, mais cela est fait pour vous donner la notion que ce vel que je vais essayer de vous articuler ne se supporte que de la forme logique de la réunion.

Le vel de l’aliénation se définit d’un choix dont les propriétés dépendent de ceci, qu’il y a dans la réunion, un élément qui comporte que, quel que soit le choix qui s’opère, il a pour conséquence un ni l’un, ni l’autre. Le choix n’y est donc que de savoir si l’on entend garder une des parties, l’autre disparaissant en tout cas.

Topologie, Problèmes, Seymour Lipschutz, p. 3

La réunion de deux ensembles A et B, notée A B, est l’ensemble de tous les éléments appartenant à A ou à B, c’est-à-dire

A B = { x : x A ou x B }

Les livres ou la vie (3) – et le vel

[ 3 mars 2008 / 8 septembre 2009 ]

Il y a donc les livres, il y a donc la vie. Ce dont je souffrirais – la perte de ce qui leur serait commun, à la vie, aux livres. Cela justement à quoi je tiendrais le plus, MISère.

Se rappeler qu’il s’agit là d’une formule de l’aliénation (ou/ou, soit l’un/soit l’autre, et quand l’un, l’un sans l’autre, l’un moins l’autre, et quand l’autre, l’autre sans l’un, moins l’un : VEL), l’aliénation selon Lacan (dans le séminaire XI). Se souvenir que les chapitres concernant l’aliénation sont suivis d’au moins un chapitre sur ce qu’il appelle la SÉParation – où je trouverais la délivrance.

(
plus tard, se rendre compte que je ne sais pas ou plus ce que signifie le mot VEL. sur internet, je trouve:

Cette comédie pour nous recouvre simplement l’absence encore dans la logique d’une négation adéquate. J’entends de celles qui seraient propres à ordonner un vel, je choisis vel et non pas aut en latin, d’un vel à poser la structure en ces termes : ou je ne suis pas, ou je ne pense pas – dont le cogito cartésien donnerait l’intersection. Je pense que des logiciens m’entendent et l’équivoque du mot « ou » en français est seule propice à brocher là la structure de cette indication topologique : je pense , là où je ne puis dire que je suis. Où, là il me faut poser dans toute énoncé le sujet de l’énonciation comme séparé de l’être par une barre. Plus que jamais, évidemment, ressurgit là non l’intuition, mais 1’exigence de l’être. Et c’est ce dont se contentent ceux qui ne voient pas plus loin que le bout de leur nez.
Jacques Lacan, Préface à l’ouvrage de Robert Georgin, Cahiers Cistre, 1977, Lacan, 2me édition, Paris, l’Age d’homme, coll. « Cistre-essai », 1984, pp. 9-17.

vel dès lors nouvelle recherche, dictionnaire latin/français :

vel, adv. [abréviation d’une ancienne forme de l’impér. velle : veux-tu? si tu veux] : – 1ou, ou bien, si l’on veut. – 2même, et même, ne serait-ce que. – 3 – Virg. Hor. et, et encore, en outre, de plus. 4 – (si tu veux une précision), ainsi, par exemple. – 5avec un superl. : peut-être, sans doute; sans contredit, vraiment.
– vel … vel… : ou… ou…, ou… ou disons…, soit… soit…
– vel (potius) : ou plutôt.
– vel dicam : ou que je dise plutôt, ou plutôt.
– vel (vero) etiam : ou même, ou bien encore.
– vel praepono : je préfère même.
– vel maxime : même au plus haut point.
– vel minima sentire : percevoir même les plus petites choses.
– vel sternas licet, Cic. : tu peux même ronfler.
– vel hoc ipso intellegi potest : on peut comprendre, ne serait-ce que par ce fait.
– suaves accipio litteras : vel, quas proxime accepi… : je reçois des lettres exquises, la dernière, par exemple…
– domus vel optima Messanae, notissima certe : la maison peut-être la plus riche de Messine, en tout cas la plus connue.
– vir vel elegantissimus : l’homme vraiment le plus élégant.
– mores quidem populi Romani quantum mutaverint vel hic dies argumento erit, Liv. 39, 51 : combien ont dégénéré les moeurs des Romains, en tout cas ce jour-là le prouvera (ce jour à lui seul le prouvera).

et si je recopie un extrait de la définition de mon dictionnaire latin, ça donne :

1 adv. ou, si vous voulez; ou; a) [donne à choisir une expression entre plusieurs ] : … le souverain bien dérive de la vertu, ou [si vous voulez] repose dans la vertu mêmenous l’avons [je vous laisse le choix de l’expression] ou rejeté ou renvoyé ou

(mon dictionnaire, je trouve plus parlant. serais-je vraiment blabla, j’irais maintenant chercher le mot latin aut. « minutieuse » ou « studieuse », sont les mots qu’on peut-être pourrait mettre à la place de « blabla » dans la phrase précédente. si je ne les y mets pas, c’est je suppose qu’ils ne conviennent pas. )

au matin, invasions de pensées

[ 15 mars 2008 / 24 novembre 2008 ]

d’abord un rêve, qui a curieusement trait à un texte écrit il y a quelques temps et que je viens de rendre public sur disparates.

intitulé enfermée dans la chambre (venue aux faits), la publication de ce texte m’avait parue impossible et, bloquée, j’avais fermé le blog. récemment, au moment de créer ce blog-ci, j’ai rouvert disparates au public et j’ai laissé le texte, sans trop réfléchir et sans même le relire, sans vouloir le relire.

le rêve de cette nuit touchait directement à ce que j’y  » révélais », des trucs dont je vois mal qu’ils puissent se dire ailleurs que dans l’intimité d’un cabinet d’analyste, quand seulement ils y arrivent.

il se trouve également que les faits que j’y raconte, je doute qu’ils puissent influer encore sur ma vie aujourd’hui, je ne peux pas le croire, je ne comprends seulement pas qu’ils continuent de me poursuivre. c’est pourquoi j’avais fermé disparates. je racontais là quelque chose qui en devient une histoire, qui est devenu une histoire, une histoire à laquelle semblent me ramener certains de mes symptômes actuels, sans que j’accepte de reconnaître le lien qui les lie, pour la raison que ce lien me parait trop facile. traumatisme conséquences. petite histoire conséquences. ( la question devient donc: puisqu’un lien persiste, ne fût-ce qu’au travers de mes rêves, quelle est la nature de ce lien?)

( actuellement, je peux (il est dans mes possibilités de) croire que l’enjeu du rêve tourne autour :

  • du sexe tout de même quand même bien sûr et d’abord, comme si ça n’était pas d’ailleurs toujours ça,
  • de ce qui supporte de s’écrire (et dont il semble que l’inconscient aime à s’emparer) : les petites histoires, ce qui supporte de devenir une petite histoire, avec des personnages, des protagonistes, des méchants, des bons, un bourreau, sa victime – le fantasme ou son « horreur du vide« ,
  • du quoi faire de ce qu’on dit, a dit, dirait à un psychanalyste,
  • du trop grand prix que j’accorde à mes pensées, que je n’arrive pas à dévaluer. ce serait elle qui les aime, les petites histoires.)*

( je refuse de me faire enculer, l’homme prend une autre femme alors. ils le font. je suis à l’extérieur du bâtiment ( c’est un bâtiment d’école, les dames de marie, à bruxelles, école qu’aurait fondée mon arrière-grand oncle, raison pour laquelle on m’y avait inscrite, j’avais déjà re-rêvé de ce bâtiment dans le rêve également repris dans le texte susmentionné), où ils sont, le font, je vois un professeur arriver, je les préviens, attention, attention. ils sortent, mais : drame, il y a drame, grand drame, très grand drame, le professeur s’en occupe, de la femme ( la tout juste enculée) en grand danger, que s’est-il passé : elle, la femme, est atteinte d’une maladie qui l’empêche absolument d’être enculée, sous peine d’en mourir. elle me dit que si elle s’est laissée faire, c’est qu’elle l’aimait (!) j’essaye de convaincre l’homme qu’il ne doit plus jamais le faire, mais ce n’est pas sûr que j’y arrive.)

* il m’apparaît que je n’ai pas grand chose vraiment à faire avec l’écriture : je suis seulement trop encombrée de pensées, pensées qui « NE CESSENT PAS DE S’ECRIRE » – ainsi que j’ai essayé de le traiter par le passé dans to be or (dont on aura quelques traces dans ce texte : l’a-pensée, que ma paresse m’a poussé à rechercher, histoire de n’avoir pas une fois de plus à réinventer la roue.)

c’est pourquoi il faut que je trouve le moyen de pouvoir renoncer à mes pensées, dont il faut bien dire, aussi encombrantes soient-elles, qu’elles me passionnent, que je les trouve passionnantes, que je ne trouve pas grand chose qui puisse leur faire concurrence, mais dont le motif est HONTEUX, donc, puisqu’il y s’agit de croire et de faire croire que TOUT pourrait s’écrire, alors qu’on sait bien, tous autant qu’on est, que le rapport sexuel ne s’écrit pas. d’où il découle que l’effort que je fais, que je ferais, d’écrire dans ce blog, est un HONNETETE, puisque j’y mets à l’épreuve une CROYANCE, laquelle ne devrait en sortir que VAINCUE ( terrassée)**- moi de même par la même occasion. j’ajoute : de croyance ne voulons pas, nous conviennent seules les certitudes. ( je suis à peu près persuadée qu’autour de tout cela, j’avais déjà tourné aussi bien dans disparates que dans to be or, ça ne servit donc à rien, puisque je ne peux m’empêcher d’y revenir. sommes-nous donc condamnés à tourner en rond, condamnés?)

autre autre autre question annexe : mais que faire de tout cet or ces pépites qui s’accumulent dans l’intimité d’un cabinet d’analyste quand d’analyste on ne se destine pas (plus?) à embrasser la profession? question CRUCIALE s’il en est.

** je ne dis pas qu’ils ne soient pas nombreux de-par-l’internet, à y arriver, à écrire, sans en sortir, de cette illusion qu’on-pourrait-tout-écrire et sans s’en sortir très bien, et même très très bien; quant à moi : non, je ne veux pas, m’en sortir, non, c’est vaincue que je me veux, c’est vaincue que je dois être (et même incessamment sous peu, car je commence à en avoir un peu marre).

( la suite du rêve, vous la voulez? non, eh bien vous devriez, la voilà : je trouve en fait que cet homme, qui a été coucher avec cette autre femme, aurait mieux fait de rester avec moi, j’avais pensé qu’éventuellement ça me donnerait plus de prix, à ses tendres yeux, si je refusais de me faire enculer, mais on dirait bien que non. je pense que s’il apprenait que j’ai un enfant, son intérêt pour moi augmenterait, je cherche mon enfant, mais je ne le trouve plus, d’ailleurs en fait, ce n’est pas mon enfant que je cherche, mais mon chat, ma chatte, Mélusine, mais je ne la trouve plus, je la cherche partout dans l’énorme grenier ( grand-maternel), il y a d’autres chats, mais d’elle, il n’y a pas. je m’inquiète pour sa vie.) je cause encore un coup avec celle donc qui d’être enculée mourrerait, qui me dit que ce n’est peut-être pas de cette maladie-là qu’elle est malade, mais d’une autre, comment vérifier. je cause, prends par le bras un homme encore autre, grand, massif, on s’embrasse, il m’entraîne à sa suite vers un autre grenier, plus petit, où se niche un nid d’amour, il veut faire l’amour avec moi, je lui explique que ce n’est pas possible parce que j’ai déjà fait l’amour avec un autre ce jour-là, et que ça me ferait une mauvaise réputation, laquelle d’ailleurs déjà me poursuit, il me dit que ça n’a pas d’importance. je pense qu’il sera secrètement triste de coucher avec moi, moi couchant avec lui comme s’il était n’importe qui. il essaye de m’entraîner donc dans un lit qui est le mien, qui se trouve en haut d’une échelle, échelle de laquelle je faille tomber dans le vide, mais non. c’est la fin du rêve, l’homme est dans le lit, m’attend, résolu, moi, je suis en haut de l’échelle, non-tombée.)

éventuellement, j’ajoute, petit passage par Kertész : ce qui m’aura époustouflée, renversée, le pas qu’il entonne et dans lequel j’aurai voulu m’insinuer : sa réponse, via l’écriture, à l’impératif que comporte, à mes yeux, le réel, d’en rendre compte.

il fut un temps où j’imaginai cette image, probablement scandaleuse, impossible : les grilles façon camp de la mort, dans lesquelles il y aurait ces mots, non pas « Arbeit macht frei » ou « Jedem das Seine » mais « Il n’y a pas de rapport sexuel ».

je veux donc dire que je peux pas croire au « traumatisme » que rapporte ces rêves, mais que je crois à celui qui implique que le rapport sexuel ne pourrait s’écrire (ne cesse pas de ne pas s’écrire). raison ici raisonnante, à laquelle mes rêves ne semblent pas vouloir plier.

la jouissance de l’Autre?

[ 18 mars 2008 / 30 novembre 2008 ]

puis-je ou devrais-je dire à mon fils, 3 ans, qui me demande pourquoi je chante, ou qui m’enjoint de ne plus chanter : « tu sais pourquoi tu ne veux pas que je chante ? parce que les signes de la jouissance de l’Autre sont parfois difficilement supportables, tant on la suspecte de receler une volonté maligne, mauvaise à votre endroit ». j’y pense, me souviens, des propos de lacan sur le racisme (c’est la jouissance de l’Autre, qu’on ne supporte pas), que je mélange avec le Che Vuoi ?

(il y a longtemps que je ne lis plus lacan. je l’ai lu pendant quelques années, très fort. aujourd’hui, je n’y arrive plus.)

extraits du dernier cours de jacques-alain miller (19 mars 2008)

[ 24 mars 2008 / 30 mars 2010 ]

l’analyse se sert de la métaphore paternelle pour résoudre la question de la jouissance, elle se sert de la métaphore paternelle et disons de son bataclan conceptuel habituel pour tamponner l’énigme de la jouissance et la faire virer au sens, mais ça n’est […] qu’une duperie. avoir recours à la métaphore paternelle ça n’est qu’une duperie au regard de l’énigme d’une jouissance qui exclut le sens.

alors, c’est là où Lacan, sur la fin de l’analyse, n’a pu dire que ceci […] que la fin de l’analyse, c’est une construction de l’analysant. c’est le sens de sa question : qu’est-ce qui pousse quiconque à s’hystoriser de lui-même surtout après une analyse ? qu’est-ce qui pousse un analysant à narrer son analyse, à en faire un récit qui ait du sens, surtout après une analyse – ce qui veut dire que l’analyse devrait lui avoir appris ce qui, de la jouissance, exclut le sens.

donc pourquoi tramer un récit qui rendrait compte, dans le sens, de la fixité de la jouissance ? […]

ca laisse ouvert un ordre de récit qui est néanmoins concevable à condition de préserver sa propre incomplétude. le récit de passe, tel que Lacan le fait miroiter sans en donner les coordonnées, c’est un récit qui doit comporter essentiellement le caractère de l’allusion, de ce qui n’est pas dit en plein, ni en direct, mais un récit qui traduit le contournement de ce qui, au gré du sens, apparaît comme un vide.

« On » demande à l’enfant de retenir.

[ 13 avril 2008 / 12 décembre 2008 ]

On demande à l’enfant de retenir. Il est nécessité à retenir trop longtemps, à ébaucher l’introduction de l’excrément dans le domaine de l’appartenance au corps, à en faire une partie du corps, qui est considérée, pour au moins un certains temps, comme à ne pas aliéner. Puis, après cela, on lui dit de lâcher, toujours à la demande. La demande a là aussi une part déterminante. Cette partie que le sujet a tout de même quelque appréhension à perdre, se trouve dès lors un instant reconnue. Elle est élevée à une valeur toute spéciale, elle est au moins valorisée en ceci qu’elle donne à la demande l’Autre sa satisfaction, outre qu’elle s’accompagne de tous les soins que l’on connaît. Non seulement l’Autre l’approuve et y fait attention, mais il y ajoute toutes ces dimensions supplémentaires que je n’ai pas besoin d’évoquer – dans d’autres domaines, c’est de la physique amusante-, le flairage, voire le torchage, donc chacun sait que les effets érogènes sont incontestables. Ils deviennent d’autant plus évidents quand il arrive qu’une mère continue à torcher le cul de son fils jusqu’à l’âge de douze ans. Cela se voit tous les jours.

Tout cela semble indiquer que ma question initiale n’est pas tellement importante, et que nous voyons très bien comment le caca prend aisément la fonction de ce que j’ai appelé, mon Dieu, l’agalma. Que cet agalma soit ici passé au registre du nauséabond ne serait que l’effet de la discipline dont il est partie intégrante. Cependant, tout cela ne vous permet en rien de rendre compte d’une façon qui nous satisfasse de l’ampleur des effets qui s‘attachent à la relation algamatique de la mère à l’excrément de son enfant, si nous ne mettions pas ces faits en connexion avec les autres formes de a. L’agalma n’est concevable que dans sa relation au phallus, à son absence, à l’angoisse phallique comme telle.

Jacques Lacan, Séminaire X, L’angoisse, Les cinq formes de l’objet petit a, De l’anal à l’idéal, Seuil, p. 349.

Par quelle voie l’excrément entre-t-il dans la subjectivation?

[ 13 avril 2008 / 12 décembre 2008 ]

Par quelle voie l’excrément entre-t-il dans la subjectivation ? Eh bien, il y entre par l’intermédiaire de la demande l’Autre, représentée en l’occasion par la mère.

Jacques Lacan, Séminaire X, L’angoisse, Les cinq formes de l’objet petit a, De l’anal à l’idéal, Seuil, p. 348

En revanche, c’est au niveau anal qu’il a pour la première fois l’occasion de se reconnaître dans un objet.

[ 13 avril 2008 / 12 décembre 2008 ]

En revanche, c’est au niveau anal qu’il a pour la première fois l’occasion de se reconnaître dans un objet. Mais ici, n’allons pas trop vite.

Quelque chose en cet objet tourne. il s’agit de la demande de la mère. Elle tourne Garde-le. Donne-leEt si je le donne, où est-ce que ça va ? L’importance déterminante des deux temps de la demande, […]

En quoi ces deux temps sont-ils importants? En ceci que le petit tas en question est obtenu à la demande, et il est admiré – Quel beau caca! Mais le second temps de cette demande implique qu’il soit, si je puis dire, désavoué, parce que ce beau caca, on apprend tout de même à l’enfant qu’il ne faut pas garder trop de relations avec lui, si ce n’est par la voie bien connue, que l’analyse a également repérée, des satisfactions sublimatoires. S’il s’en barbouille – chacun sait que c’est avec cela qu’on le fait -, on préfère tout de même lui indiquer qu’il vaut mieux le faire avec autre chose, […]

Dans ce premier rapport avec la demande de l’Autre, nous nous trouvons donc au niveau d’une reconnaissance ambiguë. Ce qui est là, c’est à la fois lui, et ça ne doit pas être lui, et même plus loin, ça n’est pas de lui.

Nous progressons, les satisfactions se dessinent, et nous pourrions bien voir là l’origine de l’ambivalence obsessionnelle. Nous pourrions l’inscrire dans une formule, celle-ci, ( a ◊ $ ) où a est la cause de cette ambivalence, de ce oui-et-non. C’est de moi, ce symptôme, mais néanmoins ce n’est pas de moi. Les mauvaises pensées que j’ai […]

Seulement, je vous fais remarquer que cette structure fondée sur la demande laisse hors de son circuit ce qui doit nous intéresser si la thérorie que je vous expose est correcte, à la savoir la liaison au désir. On peut donc penser que l’introduction d’une autre dimension, externe, étrangère, celle du désir, et nommément du désir sexuel, fera passer au second plan, balayera ce que nous avons ici d’un certain rapport où le sujet se constitue comme divisé, ambivalent, en relation avec la demande de l’Autre. En fait, il n’en est rien.

Nous savons déjà pourquoi le désir seul ne le balaie pas, loin de là. C’est que, par sa duplicité même, l’objet vient à pouvoir symboliser merveilleusement, au moins par l’un de ses temps, ce dont il s’agira à l’avènement du stade phallique, à savoir […]

Jacques Lacan, Séminaire X, L’angoisse, Les cinq formes de l’objet petit a, De l’anal à l’idéal, Seuil, p. 350, 351.

journal

[ 21 avril 2008 / 7 janvier 2009 ]

déclaration
bientôt j’aurai terminé ma première déclaration tva. c’est-à-dire : il faut que je la termine, il faut que je le fasse, que je saute le pas.

/ voix basse : que je saute le pas /

je peux le faire en me répétant que c’est facile (c’est ce que f. m’a répondu quand je lui ai demandé s’il savait pourquoi s’occuper de démarches administratives était si angoissant. il m’a répondu qu’il ne savait pas, parce que pour lui c’était facile. je me suis dit mais bon sang, mais c’est bien sûr. c’est facile. je continue cependant de nous croire nombreux, à trouver ce genre de choses angoissantes. probablement pas pour les mêmes raisons que moi.

fin de l’a faire
je déteste quand les choses se terminent. qu’elles se fassent, qu’elles soient faites.

guérison
mais là, je ne souffre pas. je suis guérie.

ma pauvre mère
je peux aujourd’hui faire les choses que ma mère plutôt aurait dû faire pour moi, aurait fait pour moi. ma mère, faisait tout pour moi. je l’ai déjà dit, elle s’occupait des basses tâches et me réservait les hautes. évidemment, c’est toujours facile d’accuser sa mère. ou son père. c’est toujours facile. mais là, je ne l’accuse pas. je reconnais m’être largement arrangée de ce qui l’arrangeait. il ne faudrait pas croire non plus que ce puisse être là la seule explication, je n’y crois d’ailleurs personnellement pas complètement puisque ce sont des choses que je sais depuis fort longtemps, et qui n’ont néanmoins pas changé, ou que je suis obligée, en période de trop grande angoisse, de me remémorer régulièrement.

/ elle, due aux actions hautes. /

sur mon bureau f, a rajouté une facture, je vois.

bien, je ferais mieux de m’y remettre.

11:37
paradis de l’enfer
oui, car alors que c’est « l »enfer », terminer ce truc, « l’en-faire », je vais certainement faire tout pour en prolonger les instants. les instants d’enfer. on finirait par croire que c’est l’angoisse que je chercherais à prolonger. cela m’a effleurée, je l’avoue, quelquefois. l’angoisse comme jouissance. mais c’est difficilement crédible et je ne supporterais pas d’être seule à affirmer chose pareille. pourquoi donc, trainai-je à ce point. prolongeai-je. éternisai-je. mais j’éternise faute de le pouvoir, passer le pas. faire, avoir fait. je n’irais pas jusqu’à dire l’acte, je dirais l’action, l’action accomplie autant appréhendée que pourrait l’être la jouissance sexuelle. il y a des endroits où tout se confond. se fond. se confond. il y a des femmes, me disait-il qui ont peur de la jouissance sexuelle. des femmes qui ont peur de la jouissance sexuelle. alors le faire, le moment de faire, l’en-faire, comme le désir, et le fait, voilà, c’est fait, l’action accomplie comme la jouissance. la limite mise en désir (et dans quelles conditions, et dans quelles conditions). alors tout pour, le désir et rien pour. une jouissance du désir, une jouissance de l’enfer, qui se met en place, parce qu’il est peu de moments, a fortiori quand ils sont à répétition, qu’ils se prolongent, qui ne se voient contaminés par elle. comme j’ai pu dire : il n’y rien de ce que je fais que je n’aime, parce que c’est moi qui le fait. c’est encore une chose que j’ai pu dire. j’ai fait de la comptabilité cette semaine, enfin la semaine dernière, ma foi, c’était fort amusant. suffit de s’y mettre. tant qu’on est dedans, c’est ok. c’est dehors, quand ça sort, où juste avant. « désir de retenir » disait lacan parlant du désir de l’obsessionnel, entendez, retenir le caca ; car si ça sortait, l’Autre s’en satisferait.

11:49
maintenant, je ferais bien de vérifier que je n’ai rien oublié.

12:33
trouver un stylo. retourner mon sac. me faire une tasse de café. est-ce que j’appelle l’expert-comptable ou pas? me souvenir de jules qui il y a quelques mois encore, à peine, disait « faire, faire » … quand il voulait qu’on fasse quelque chose.

12:49
refaire un café. tout est prêt sauf le doute. à propos : 1/ électricité 2/ free. y aller ? foncer ? tête baissée ? et puis tout oublier ?

12:56 téléphoner au comptable. prétexter d’un rv à prendre. où est le numéro de téléphone et quel agenda ouvrir?

13:09 votre correspondant est en ligne pour le moment. téléphoner à f.

13:43 et les chèques? ils sont où, les chèques?

13:59 l’agrafeuse?

14:22 la lumière était blanche. en revenant de l’hôtel des impôts, je me suis acheté du riz basmati. j’adore le riz basmati.

15:10 c’est fini.

 

journal (où il sera plutôt question de l’hystérie, cette fois)

[ 24 avril 2008 / 15 novembre 2008 ]

à faire ( petit a faire)
10:49 j’aurai beau faire, ma vie n’est faite que de choses à faire. je me demande si les autres c’est comme ça aussi. d’une pauvreté. jules est là. j’ai mis un vieux disque à moi, Beethoven (pathetique sonata pour piano). c’est très rare que je mette de la musique. et surtout de la musique à moi. tiens, une griffe. quand jules était petit petit, bébé, je lui mettais parfois un disque à moi. ça m’inquiétait tellement alors que je ne puisse pas lui apprendre, léguer ça, que moi j’avais reçu de mes parents, qui avait baigné mon enfance, que je connais par cœur, mais. ces musiques que je connais bien, dont je ne connais jamais les auteurs. sur le bout de la langue. musique en perte d’auteur. le problème, c’est qu’à chaque fois ça le faisait atrocement pleurer, les musiques que je lui mettais. enfin, là, il est assis dans une caisse et il écoute.

les noms d’auteur
11:13 la caisse s’est renversée. maintenant, c’est l’autre face. je n’ai jamais su vraiment, je veux dire avec certitude – j’ai toujours pensé qu’il y aurait un jour moyen d’être sûre, de savoir avec certitude -, je n’ai jamais su, compris, pourquoi je n’arrivais pas à retenir les noms des auteurs. les noms des auteurs, les dates, les noms des pays, toutes ces choses utiles dans la conversation. j’ai longtemps pensé que c’était une affaire de femmes, que c’est les femmes, qui ne retenaient pas ce genre de choses. je me suis un temps « battue » pour trouver le moyen de faire la conversation avec ce qui n’est pas les noms, les noms propres et les dates, mais ça a été en vain. je pensais donc, que c’était affaire de femmes, d’hystérie. voilà.
d’une part que les femmes se refusent de savoir ce genre de choses, enfin, les hystériques, au nom d’une chose sans nom justement, leur secret, trésor, vérité, qui ne tolérerait aucun nom ; d’autre part qu’elles soient dans le désir, tout de même, d’un autre qui le détienne, le connaisse, le leur donne, ce nom, de ce qu’elles se refusent à nommer. qu’il y ait un maitre qui sache. (j’ai l’impression d’écrire mes mémoires, on trouvera cela néanmoins dans n’importe quel bon manuel de psychanalyse). à ce schéma classique, s’ajoutait ce trait, le fait que mon père soit artiste. artiste qui ne se sera pas vraiment fait un nom, auquel éventuellement même il aurait fallu en fabriquer un, mais père suffisamment sacré par et pour moi pour que je n’aille pas dans ses traces / sur ses pas / ni surtout que je ne le dépasse surpasse, quel que désir que je pusse en avoir – parce que si je le sacrai sacré, je le désacralisais aussi bien et plus souvent malheureusement qu’à mon tour et non sans souffrance, ressentiment. vous pouvez donc mettre cela aussi sur le compte du « sans foi de l’hystérique ». le manque même de foi m’empêche de croire / retenir le moindre nom, propre, d’auteur, de créateur. tandis que, le désir toujours est là, reste, qu’il y en ait au_moins_un qui.
pour ce qui est de la géographie et de l’histoire, ça n’est pas moins clair, c’est simplement plus global. c’est le savoir dans son ensemble qu’il convient là de considérer, le savoir qui tient / attient au signifiant qui est considéré comme suspect, en tant qu’il ne colle pas à la vérité, elle sublimée, magnifiée (et faisant la matière même de la séduction, du pouvoir de séduction- sinon). et c’est la nécessaire fabrication, d’un autre, d’un homme par exemple qui sache, beaucoup, énormément, qui aille jusqu’à connaître, le les mots de ce qui n’en n’a pas.

l’histoire, ayant ceci de plus, qu’elle touche au temps. alors qu’une bonne vérité, convenablement rêvée, ne saurait être qu’intemporelle. comporte la croyance, le désir de l’intemporel. cet intemporel qui fait le réel de l’inconscient, mais aussi celui du signifiant. non qu’un signifiant ne puisse appartenir à une époque, mais, en soi, dès qu’il naît, il est de sa nature d’être comme de tout temps. vous ne me croirez pas, je le sens.

nous pourrons pareillement dire de l’in-savoir de la géographie qu’il touche au savoir de ce qui n’est ni là ni ailleurs, de ce qui est incorporel. dont la nature du signifiant et de l’esprit se rapprochent, et qui pourtant fait le secret du corps de l’hystérique.

voilà, cela fait très longtemps que je sais ces choses et je pensais que ça me permettrait de pouvoir tout de même sortir des domaines des savoirs impossibles pour aller vers les possibles. eh bien non, faites-moi écouter beethoven, je ne retrouverai pas son nom, alors que je connais sa musique par cœur et par corps et par hors corps (et dans la conversation ça ne le fait toujours pas, et pour se faire des amis, ça ne le fait toujours pas non plus).

bises,

les actes que je réussis et le deroxat (qui me réussit)

[ 10 mai 2008 / 26 novembre 2008 ]

11: 55
samedi matin donc, hier pris un xanax quand m’a semblé que m’énerverais trop. ce matin, un deroxat donc. que dire sinon que ces médicaments sont d’une efficacité extraordinaire. ce soir, le deuxième deroxat.

hier, finalement envoyé le mail à l’analyste, expliquant m’excusant de mon absence au rendez vous de mardi. on verra ce qui en résulte. difficile de développer ça davantage, trop incroyable (que d’avoir oublié ce rendez vous m’ait envoyée aux portes de.

18:12
flûte, ou ouf, me rends compte que je n’ai pas envoyé hier le mail que je pensais avoir envoyé ! décidément !

catégorie: psychanalyse| mots-clés:

jean livre sterling

[ 9 juin 2008 / 1 décembre 2008 ]

lors de la dernière séance, où j’avais bcp pleuré, l’analyste devant s’absenter m’avait demandé que je l’appelle la semaine suivante tous les matins, à huit heures. était-ce parce que je lui avais dit que j’avais l’impression de n’être pas prise au sérieux, de n’avoir  pas été prise au sérieux, ici, par les analystes de paris ? était-ce pour cela ? pour me prouver le contraire ? pour me réengager dans le processus analytique?

ce que cette semaine de « séances téléphoniques » a donné. j’ai du mal à me souvenir.

lors du premier coup de fil, j’avais commencé disant qu’il serait peut-être bon d’interroger pourquoi très vite ça avait été ça : l’analyse ou la mort1. et quel était, quel serait, pourrait être le lien entre la psychanalyse et les camps de la mort, Auschwitz.

Sieg Maandag, jeune Juif hollandais survivant, marchant sur un chemin bordé de cadavres, à Bergen-Belsen, vers le 20 avril 1945. il y a eu le rêve:

des jambes, des corps couchés, alignés. une douche passée par dessus, une douche dont le jet est très fort, qui déplace les chairs – la cellulite.
celui qui manipule la douche qui dit : regardez, ça bouge, ça bouge.

douche : je pense aux camps (jet gaz/eau).
cellulite : je pense à cellule, enfermement, je pense oncle jean.

je dis à l’analyste, au téléphone, « vous ai-je dit que pendant la guerre mes grands-parents ont sauvé une famille juive, cachée dans leur grenier ? » je dis leur nom : Sterling. je dis que c’est le père Sterling qui a appris la peinture à mon père.

en raccrochant, je me demande pourquoi j’ai raconté ça,  pourquoi j’ai donné ce nom, « Sterling »?

fatiguée, troublée, dans la volonté de repenser à tout ça, je me recouche  ; il est un peu après huit heures. je réalise que j’ai omis de dire qu’ils étaient partis, finalement, les sterling, qu’ils avaient eu peur de mon oncle, jean.

mon oncle jean. peur qu’il les livre aux Allemands.

je me souviens alors d’un rêve fait au cours de l’analyse avec D., où je le payais avec des « livres sterling« . là, tout se précipite dans ma tête (déchainement) :

mon oncle, qui voulais voulait écrire un livre, aurait livré sterling aux allemands, aux camps (« jean livre sterling »). je précise ici que les sterling ont survécu, et que le fils s’est inscrit à l’académie de dessin où mon père était directeur.

alors, écrire, livrer, l’impossible livre; écrire trahir; livrer aux camps de la mort.

après les livres de Imre Kertesz, la seule chose que j’étais parvenue à écrire : « après ce livre ce qui écrit Auschwitz : écrire devient possible. redevient possible »

les jambes – les corps – la douche – la livre de vie, la livre de chair. « ça bouge, ça bouge… »

Notes:
  1.  avec ça que j’étais arrivée pour ma « demande de passe », des années auparavant, dans cette certitude que le choix d’être analyste, c’était un choix de vie, le choix de vivre ; et puis, bien avant cela, il y avait eu ce dont j’ai déjà parlé ici : j’étais arrivée en analyse à la suite de la lecture du livre de pierre rey, espérant qu’elle débouche sur ça : ou devenir analyste, ou écrire un livre, comme pierre rey, ou me tuer, et me réussir, comme le gros []

pomme, pommeau

[ 11 juin 2008 / 24 novembre 2008 ]
la cane de jeanne

la cane de jeanne

conclusion de la séance d’hier : je ne sais pas quoi faire de ma vie, je ne sais plus du tout. curieusement, m’en sens libérée. loin de ces lourdes histoires auschwitziennes et autres « lacan-dla-mort » (le plaisant docteur g. me dira plus tard : « après les camps, la libération, c’est logique, c’est logique»).

je dis à l’analyste que l’image du rêve des « corps allongés morts passés à la douche » m’avait fait pensé, après-coup, à une photo de cadavres alignés, retrouvés à Auschwitz ; cette image qui maintenant s’impose. il me parle de cette cadavérisation dans le rêve comme d’une défense contre le grouillement de la vie (« ça bouge, ça bouge! »)

à propos du rêve surtout, cela qui dédramatise, ce que je n’avais pas vu et dont l’analyste s’est étonné  ( ou a fait semblant de s’étonner) : le pommeau de douche ≈ le pommeau du téléphone !!! ( ce coup de fil que je m’étais vue invitée à lui passer tous les jours).

NB: se défendre contre la jouissance / s’il est possible de comprendre pourquoi elle est serait s’avère si HORRIfiante.

écrire debout

[ 16 juin 2008 / 24 novembre 2008 ]

13:29

à cdz, il le faut, que je lui dise que je me cache de tout, de tous, en ce moment, et surtout du travail.

et surtout du travail,
amen

je voudrais un bureau auquel je puisse travailler debout, et un tout petit ordinateur ( un écritoire ancien, un meuble à écrire debout).

me lever de ce bureau. marcher dans l’appartement ( échapper aux habitudes des lieux, aux assises anciennes : impossible – mais pas complètement) ( sur mon bureau une revue intitulée : « la force du même »). me lever.

13:43
également: changer de lumière.

13:54
voyez-vous, auschwitz même, dans mon cas, est une défense ( pour le dire simplement).

vendredi avec jules : bhv de l’hôtel de ville ( recherche cadeau f.) , puis notre-dame ( « non, je ne veux pas rentrer, ça fait peur »). pénétrons une autre église, où l’on chante en latin ( c’est Église Saint-Nicolas-du-Chardonnet,  » fief d’un mouvement catholique traditionaliste »). jules veut s’asseoir. les gens se lèvent. c’est un mariage, les robes sont longues et les chapeaux sur toutes les têtes des dames. à jules, je ne dis, explique rien, si ce n’est qu’il s’agit d’un mariage, il dit oui oui, il parle tout bas. je l’entraîne vers la sortie. plus loin, il va foncer pour pénétrer dans un espace précédé de l’enseigne qu’il ne sait évidemment pas lire :  » mémorial de la déportation« . je lis sur l’insigne de la dame qui l’arrête dans son élan, qu’elle est de la  » défense nationale ». elle me demande son âge et si il a déjà vu un cimetière. je lui dis que oui. je sens les larmes me monter aux yeux. dans ce cas, me dit la dame défense nationale, il peut y aller. jeune homme, lui dit-elle en se tournant vers lui, avez-vous un téléphone portable sur vous, non, répond-il, avez-vous un appareil photo, non répond-il, bien, vous allez descendre ces marches, mais attention, vous ne pourrez plus parler, plus faire de bruit, ne vous approchez pas de la herse. plus tard, nous monterons manger des gâteaux en haut, tout en haut de l’institut du monde arabe. jules prend des photos. avant de prendre le bus pour rentrer, nous passons par les plaines de jeu du jardin des plantes. je suis très fière de jules, de sa façon de se déployer, de ses courses, de ses cris, de sa gaieté, des enfants qu’il amène à sa suite. au retour, nous croisons un héron cendré, jules lui dit qu’il s’appelle jules et s’indigne de ce qu’il ne lui réponde pas. je lui dis que l’animal est sauvage et qu’il ne parle pas. il a peine à me croire.

Les photos de Jules  :

on est partion se relève, on a fini le goûterchien-caca, \ma poussettevuearrivée sur la terrasse

qu’Auschwitz donc, est un autre encore des noms que prend ma défense. couverture , voile.

« défense », le terme est de l’analyste la semaine dernière, parlant du rêve, de la cadavérisation comme d’une défense contre l’horreur de la vie, le grouillant de la jouissance.

14:22 je voulais dire qu’auschwitz couvre seulement l’horreur, celle qui n’en n’a pas, de nom. une représentation.

14:32 mercredi: le cours de miller, le dernier cette année (la lettre que je ne lui ai pas écrite).

(14:41 en fait, c’était le contraire : d’abord le mémorial de la déportation, ensuite l’église de la rue des bernardins.)

fil

[ 10 septembre 2008 / 1 février 2009 ]

mercredi 11:23 dois travailler bsolument jourd’h FL (= le psychanalyste) hier : vous savez du vent, c’est très concret (je vous ai raconté du vent, et vous m’avez écoutée) / arrivée à l’heure mais disant : failli pas venir . – ah oui , c’est d’autant plus intéressant que c’était hier, lundi, que vous deviez venir . la concrétude du vent je pense à mon nom / vous. je vous ai raconté du vent, et vous m’avez écoutée àlaréflexion pas du tout comment dirais-je non fina pas dut lâche

catégorie: psychanalyse

notes prises au cours de miller (11.06.08)

[ 6 octobre 2008 / 9 mars 2016 ]

« Tout le monde est fou, c’est-à-dire délirant »1

assertion de Lacan proférée de nulle part, depuis la nullibiété : la place de plus personne.

cette année, j’ai été ça : plus-personne

j’ai accepté d’être traversé par l’occasion, fidèle à ce qui me tombait dans la tête, comme tout analysant qui se respecte

« plus-personne », voilà un personnage

nom du sujet  avec l’accent de son rapport natal avec la jouissance.

plus-personne : c’est le porte-parole de lacan

pathétique de ce dans quoi Lacan a cheminé.

enseignement – payer de sa personne, pas seulement de son sujet – se vocifère depuis personne

la voix – ce qui vient en surnombre de la « relation » de l’analyste à l’analysant

sujet – le rond brûlé dans la brousse de la jouissance, la brousse qu’est l’objet a comme voix.
la voix va toujours plus loin que l’objet a, toujours soupçonnable de n’être qu’un semblant.

le sujet est heureux :
ce que freud a déguisé sous la forme du « principe de plaisir » lequel faisait COUPLE d’opposition avec le principe de réalité.

couple
principe de plaisir/principe de réalité

« le sujet heureux puisqu’il ne peut rien devoir qu’à l’heur »2  → ne peut rien devoir qu’à la fortune → la contingence / soit ce qui arrive et qui n’était pas écrit

« tout heur lui est bon pour ce qui le maintient, soit pour qu’il se répète » → de l’ordre de ce qui ne cesse pas de s’écrire.

ce qui n’est pas écrit et qui arrive, la contingence, l’heur SERT la répétition

PP (principe de plaisir) et PR (principe de réalité) fonctionnent ensemble

PR dominé par PP – et c’est la vocifération, le sujet est heureux

est-ce que c’est vrai est-ce que c’est faux ? — vocifération pas de cet ordre-là  → interprétation

discours analytique

exception dit : je suis la varité

la passe
mariage hyménée où la jouissance convolerait avec la vérité / Lacan a entretenu ce rêve jusqu’à en revenir

le discours analytique ne prétend pas à la vérité

resituer la passe dans la varité

dans une analyse on va de vérité en vérité et
les vérités deviennent des erreurs et les erreurs deviennent des méprises…

secret de la chute de petit a : fait l’objet d’1 prise / qu’on pourrait lâcher

discours analytique n’a rien d’universel – √x → construit un effet de pousse-à-la-femme

savoir ne vaudra jamais que pour un et pour un seul

√x  → ∃ !

« tout le monde est fou » et on rêve toujours

G tous les hommes sont mortels
Socrate est un homme
P Socrate est mortel

Réunion du Général et du Particulier

1 homme désire la mort –> universalisé sous les espèces de la pulsion de mort mais ça n’advient que sur le mode du 1 par 1

le psychanalysant rêve, c’est-à-dire tient à la particularité de son symptôme

« Moi, la vérité je parle » surgeon de « Moi, la folie je parle » d’Erasme, son  Eloge de la folie.

Notes:
  1. lire à ce propos : 1/ cet entretien avec Jacques-Alain Miller ( n’est plus sur le site de http://www.elp-debates.com/, il s’agissait d’un entretien de jacques-alain miller publié par le Monde.) 2/ Peut-être à Vincennes, 22 oct. 1978
    « Comment faire pour enseigner ce qui ne s’enseigne pas ? voilà ce dans quoi Freud a cheminé. Il a considéré que rien n’est que rêve, et que tout le monde (si l’on peut dire une pareille expression), tout le monde est fou, c’est-à-dire délirant.
    C’est bien ce qui  se  démontre au premier pas vers l’enseignement.
    Mais reste à le démontrer : pour cela n’importe quel objet est bon, il se présente toujours mal. C’est-à-dire qu’il faut le corriger.«  []
  2. « Le sujet est heureux. C’est même sa définition puisqu’il ne peut rien devoir qu’à l’heur, à la fortune autrement dit, et que tout heur lui est bon pour ce qui le maintient, soit pour qu’il se répète. » Lacan J., Télévision (1973), Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 526. []

Interview de Jacques-Alain Miller, Psychologies Magazine, octobre 2008, n° 278

[ 8 octobre 2008 / 10 mars 2010 ]

Interview de Jacques-Alain Miller, Psychologies Magazine, octobre 2008, n° 278
Propos recueillis par Hanna Waar

Psychologies : La psychanalyse enseigne-t-elle quelque chose sur l’amour ?
Jacques-Alain Miller : Beaucoup, car c’est une expérience dont le ressort est l’amour. Il s’agit de cet amour automatique, et le plus souvent inconscient, que l’analysant porte à l’analyste et qui s’appelle le transfert. C’est un amour factice, mais il est de la même étoffe que l’amour vrai. Il met au jour sa mécanique : l’amour s’adresse à celui dont vous pensez qu’il connaît votre vérité vraie. Mais l’amour permet d’imaginer que cette vérité sera aimable, agréable, alors qu’elle est en fait bien difficile à supporter.

P : Alors, c’est quoi aimer vraiment ?
J-A Miller : Aimer vraiment quelqu’un, c’est croire qu’en l’aimant, on accédera à une vérité sur soi. On aime celui ou celle qui recèle la réponse, ou une réponse, à notre question : « Qui suis-je ? »

P : Pourquoi certains savent-ils aimer et d’autres pas ?
J-A Miller : Certains savent provoquer l’amour chez l’autre, les serial lovers, si je puis dire, hommes et femmes. Ils savent sur quels boutons appuyer pour se faire aimer. Mais eux n’aiment pas nécessairement, ils jouent plutôt au chat et à la souris avec leurs proies. Pour aimer, il faut avouer son manque, et reconnaître que l’on a besoin de l’autre, qu’il vous manque. Ceux qui croient être complets touts seuls, ou veulent l’être, ne savent pas aimer. Et parfois, ils le constatent douloureusement. Ils manipulent, tirent des ficelles, mais ne connaissent de l’amour ni le risque, ni les délices.

P : « Être complet tout seul » : seul un homme peut croire ça…
J-A Miller : Bien vu ! « Aimer, disait Lacan, c’est donner ce qu’on n’a pas. ». Ce qui veut dire : aimer, c’est reconnaître son manque et le donner à l’autre, le placer dans l’autre. Ce n’est pas donner ce que l’on possède, des biens, des cadeaux, c’est donner quelque chose que l’on ne possède pas, qui va au-delà de soi-même. Pour ça, il faut assurer son manque, sa « castration », comme disait Freud. Et cela, c’est essentiellement féminin. On n’aime vraiment qu’à partir d’une position féminine. Aimer féminise. C’est pourquoi l’amour est toujours un peu comique chez un homme. Mais s’il se laisse intimider par le ridicule, c’est qu’en réalité, il n’est pas assuré de sa virilité.

P : Aimer serait plus difficile pour les hommes ?
J-A Miller : Oh oui ! Même un homme amoureux a des retours d’orgueil, des sursauts d’agressivité contre l’objet de son amour, parce que cet amour le met dans la position d’incomplétude, de dépendance. C’est pourquoi il peut désirer des femmes qu’il n’aime pas, afin de retrouver la position virile qu’il met en suspens lorsqu’il aime. Ce principe, Freud l’a appelé le « ravalement de la vie amoureuse » chez l’homme : la scission de l’amour et du désir sexuel.

P : Et chez les femmes ?
J-A Miller : C’est moins habituel. Dans le cas le plus fréquent, il y a dédoublement du partenaire masculin. D’un côté, il est l’amant qui les fait jouir et qu’elles désirent, mais il est aussi l’homme de l’amour, qui est féminisé, foncièrement châtré. Seulement, ce n’est pas l’anatomie qui commande : il y a des femmes qui adoptent une position masculine. Il y en a même de plus en plus. Un homme pour l’amour, à la maison ; et des hommes pour la jouissance, rencontrés sur Internet, dans la rue, dans le train…

P : Pourquoi « de plus en plus »
J-A Miller : Les stéréotypes socioculturels de la féminité et de la virilité sont en pleine mutation. Les hommes sont invités à accueillir leurs émotions, à aimer, à se féminiser ; les femmes, elles, connaissent au contraire un certain « pousse-à-l’homme » : au nom de l’égalité juridique, elles sont conduites à répéter « moi aussi ». Dans le même temps, les homosexuels revendiquent les droits et les symboles des hétéros, comme le mariage et la filiation. D’où une grande instabilité des rôles, une fluidité généralisée du théâtre de l’amour, qui constraste avec la fixité de jadis. L’amour devient « liquide », constate le sociologue Zygmunt Bauman1. Chacun est amené à inventer son « style de vie » à soi, et à assumer son mode de jouir et d’aimer. Les scénarios traditionnels tombent en lente désuétude. La pression sociale pour s’y conformer n’a pas disparu, mais elle baisse.

P : « L’amour est toujours réciproque » disait Lacan. Est-ce encore vrai dans le contexte actuel ? Qu’est-ce que ça signifie ?
J-A Miller : On répète cette phrase sans la comprendre, ou en la comprenant de travers. Cela ne veut pas dire qu’il suffit d’aimer quelqu’un pour qu’il vous aime. Ce serait absurde. Cela veut dire : « Si je t’aime, c’est que tu es aimable. C’est moi qui aime, mais toi, tu es aussi dans le coup, puisqu’il y a en toi quelque chose qui me fait t’aimer. C’est réciproque parce qu’il y a un va-et-vient : l’amour que j’ai pour toi est l’effet en retour de la cause d’amour que tu es pour moi. Donc, tu n’y es pas pour rien. Mon amour pour toi n’est pas seulement mon affaire, mais aussi la tienne. Mon amour dit quelque chose de toi que peut-être toi-même ne connais pas. » Cela n’assure pas du tout qu’à l’amour de l’un répondra l’amour de l’autre : ça, quand ça se produit, c’est toujours de l’ordre du miracle, ce n’est pas calculable à l’avance.

P : On ne trouve pas son chacun, sa chacune par hasard. Pourquoi lui ? Pourquoi elle ?
J-A Miller : Il y a ce que Freud a appelé Liebesbedingung, la condition d’amour, la cause du désir. C’est un trait particulier – ou un ensemble de traits – qui a chez quelqu’un une fonction déterminante dans le choix amoureux. Cela échappe totalement aux neurosciences, parce que c’est propre à chacun, ça tient à son histoire singulière et intime. Des traits parfois infimes sont en jeu. Freud, par exemple, avait repéré comme cause du désir chez l’un de ses patients un éclat de lumière sur le nez d’une femme !

P : On a du mal à croire à un amour fondé sur ces broutilles !
J-A Miller : La réalité de l’inconscient dépasse la fiction. Vous n’avez pas idée de tout ce qui est fondé, dans la vie humaine, et spécialement dans l’amour, sur des bagatelles, des têtes d’épingle, des « divins détails ». Il est vrai que c’est surtout chez le mâle que l’on trouve de telles causes du désir, qui sont comme des fétiches dont la présence est indispensable pour déclencher le processus amoureux. Des particularités menues, qui rappellent le père, la mère, le frère, la sœur, tel personnage de l’enfance, jouent aussi leur rôle dans le choix amoureux des femmes. Mais la forme féminine de l’amour est plus volontiers érotomaniaque que fétichiste : elles veulent être aimées, et l’intérêt, l’amour qu’on leur manifeste, ou qu’elles supposent chez l’autre, est souvent une condition sine qua non pour déclencher leur amour, ou au moins leur consentement. Le phénomène est la base de la drague masculine.

P : Vous ne donnez aucun rôle aux fantasmes ?
J-A Miller : Chez les femmes, qu’ils soient conscients ou inconscients, ils sont déterminants pour la position de jouissance plus que pour le choix amoureux. Et c’est l’inverse pour les hommes. Par exemple, il arrive qu’une femme ne puisse obtenir la jouissance – disons, l’orgasme – qu’à la condition de s’imaginer, durant l’acte lui-même, être battue, violée, ou être une autre femme, ou encore être ailleurs, absente.

P : Et le fantasme masculin ?
J-A Miller : Il est très en évidence dans le coup de foudre. L’exemple classique, commenté par Lacan, c’est, dans le roman de Goethe2, la soudaine passion du jeune Werther pour Charlotte, au moment où il la voit pour la première fois, nourrissant la marmaille qui l’entoure. C’est ici la qualité maternante de la femme qui déclenche l’amour. Autre exemple, tiré de ma pratique, celui-là : un patron quiquagénaire reçoit les candidates à un poste de secrétaire : une jeune femme de 20 ans se présente ; il lui déclare aussitôt sa flamme. Il se demande ce qui lui a pris, entre en analyse. Là, il découvre le déclencheur : il avait retrouvé en elle des traits qui lui évoquaient ce qu’il était lui-même à 20 ans, quand il s’était présenté à sa première embauche. Il était, en quelque sorte, tombé amoureux de lui-même. On retrouve dans ces deux exemples les deux versants distingués par Freud : on aime ou bien la personne qui protège, ici la mère, ou bien une image narcissique de soi-même.

P : On a l’impression d’être des marionnettes !
J-A Miller : Non, entre tel homme et telle femme, rien n’est écrit d’avance, il n’y a pas de boussole, pas de rapport préétabli. Leur rencontre n’est pas programmée comme celle du spermatozoïde et de l’ovule ; rien à voir non plus avec les gènes. Les hommes et les femmes parlent, ils vivent dans un monde de discours, c’est cela qui est déterminant. Les modalités de l’amour sont ultrasensibles à la culture ambiante. Chaque civilisation se distingue par la façon dont elle structure le rapport des sexes. Or, il se trouve qu’en Occident, dans nos sociétés à la fois libérales, marchandes et juridiques, le « multiple » est en passe de détrôner le « un ». Le modèle idéal de « grand amour de toute la vie » cède peu à peu du terrain devant le speed dating, le speed loving et toute floraison de scénarios amoureux alternatifs, successifs, voire simultanés.

P : Et l’amour dans la durée ? dans l’éternité ?
J-A Miller : Balzac disait : « Toute passion qui ne se croit pas éternelle est hideuse. »3 Mais le lien peut-il se maintenir pour la vie dans le registre de la passion ? Plus un homme se consacre à une seule femme, plus elle tend à prendre pour lui une signification maternelle : d’autant plus sublime et intouchable que plus aimée. Ce sont les homosexuels mariés qui développent le mieux ce culte de la femme : Aragon chante son amour pour Elsa ; dès qu’elle meurt, bonjour les garçons ! Et quand une femme se cramponne à un seul homme, elle le châtre. Donc, le chemin est étroit. Le meilleur chemin de l’amour conjugal, c’est l’amitié, disait en substance Aristote.

P : Le problème, c’est que les hommes disent ne pas comprendre ce que veulent les femmes ; et les femmes, ce que les hommes attendent d’elles…
J-A Miller : Oui. Ce qui objecte à la solution aristotélicienne, c’est que le dialogue d’un sexe à l’autre est impossible, soupirait Lacan. Les amoureux sont en fait condamnés à apprendre indéfiniment la langue de l’autre, en tâtonnant, en cherchant les clés, toujours révocables. L’amour, c’est un labyrinthe de malentendus dont la sortie n’existe pas.

Propos recueillis par H. W.

Notes:
  1. Zygmunt Bauman, L’amour liquide, de la fragilité des liens entre les hommes (Hachette Littératures, « Pluriel », 2008) []
  2. Les souffrances du jeune Werther de Goethe (LGF, « le livre de poche », 2008). []
  3. Honoré de Balzac in La comédie humaine, vol. VI, « Études de mœurs : scènes de la vie parisienne » (Gallimard, 1978) []
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le corps, l’image et l’inhibition

[ 24 octobre 2008 / 7 janvier 2009 ]
affiche de Naked Lunch de Cronenbergje copie/colle:



L’inhibition a un double versant : dépendante du corps, de ses fonctions et de son image, elle semble liée à l’imaginaire. En tant qu’elle indique une limite et un arrêt dans la symbolisation, elle touche au réel. Elle résonne donc avec tout ce qui chez le sujet ne peut trouver un appui dans la représentation. […] Elle est donc ce qui produit de nouvelles représentations à partir de l’imaginaire du corps. L’arrêt même du sujet, dans l’inhibition, lui sert à se « faufiler » sous forme d’image pour figurer, prendre place là où il ne devrait pas être parmi les signifiants.
Dès le début des années soixante, Lacan situe l’inhibition et le désir à la même place.
La Sagna P., Revue la cause freudienne n° 68,   « L’inhibition à savoir ».

quant à la correspondance

[ 14 novembre 2008 / 21 novembre 2008 ]

je peux hélas affirmer aujourd’hui que je n’ai, jusqu’à présent, cherché d’autre correspondant que celui qui pût m’offrir, en miroir une image – dont le corps fût de lettres.

ce qui m’est apparu à la lecture du texte de la sagna sur l’inhibition publié dans la cause freudienne dont j’ai récemment repris ici un extrait.

(ma jambe n’en devient pas belle pour autant.)

l’art constipé (et le sens n’est pas ce qui donne du sens à la vie)

[ 18 novembre 2008 / 12 octobre 2009 ]

( infinitisation des processus)
j’avais récemment, ce qui ne m’arrive JAMAIS, faute de savoir de quel nom signer, fait un commentaire, et même deux,  à un article d’un certain André Rouillé, sur ParisArt, intitulé « Refonder l’art: des choses au processus ». le premier, par fatigue, je le résumai d’une courte phrase :  » vous confondez l’art et la constipation ». le second, écrit dans l’étonnement que le premier ait été publié, fut plus étoffé  :

( objet ≠ marchandise)
A partir de quel moment une chose devient-elle une marchandise ?
( dans la mesure où cet article proposait à l’art de sortir de  la marchandisation en ne produisant plus d’objet,  en s’en tenant aux seuls processus)
( la chose freudienne)
— Pensez-vous vraiment qu’il faille qu’une chose soit matérielle pour qu’elle en soit une ? N’est-ce pas précisément LA chose (freudienne, pulsionnelle) qui est à l’œuvre dans ce que vous indiquez devant faire le futur terrain de l’art ? la pulsion sans tête sans rime ni raison ou plutôt avec rime mais sans raison, la pulsion qui s’arrange de n’importe quel objet et si bien consonne avec la pulsion consommatrice sans loi – mais avec foi
( de la représentation à la présentation)
La représentation: il y a bien longtemps que l’art a quitté le terrain de la re-présentation. De Duve écrit là-dessus de fort belles choses. est passé de la représentation à la présentation ( de l’objet).
( le diable, la cause)
— Ne simplifions pas. Que diable, l’objet n’est pas le diable. La chose, la cause.
10 nov. 2008

( éthique de la séparation)
si je reprends ceci ici, c’est pour être retombée sur un vieux billet, de 2006, à propos de ce même sujet, qui m’a beaucoup obsédé en son temps et  auquel j’avais beaucoup réfléchi dans to be or ( mon premier blog). dans ce texte j’ajoutais l’idée que la séparation d’avec l’objet est une question éthique. j’écrivais : « ( d’éthique: d’un rendre compte de l’objet, sans se confondre avec lui, en s’en séparant« . je partais alors certainement de mon expérience de la psychanalyse, la notion de « séparation » chez lacan, ainsi que de ma lecture du texte de de Duve ( dans Voici – catalogue de l’exposition du même nom qui eut lieu à bruxelles).

entre-temps, mes obsessions se sont déplacées, celles-là se sont apaisées, même si je ne me suis pas encore vraiment formulé l’idée qui aura permis cette rémission.

… tout dernier enseignement de Lacan, met en cause l’interprétation de la psychanalyse comme expérience de vérité et semble introduire la psychanalyse comme expérience de satisfaction. La satisfaction n’apparaît pas, n’apparaît plus comme un obstacle à la découverte de la vérité. En particulier, la satisfaction du symptôme n’apparaît plus comme un obstacle à la découverte de la vérité. Mais c’est la satisfaction elle-même qui apparaît comme une fin.
Jacques-Alain Miller

( d’une possible réconciliation)je ne suis moi-même, toujours pas sortie du processus. il est certain que je suis la première constipée. or, et, la tentation est telle, de rester dans le processus, de ne pas lâcher l’objet, que j’ai fini par m’apaiser me disant qu’il y avait lieu également de se réconcilier, tant que faire se peut, avec la jouissance, pulsionnelle. et de continuer à tâcher de faire du symptôme, une force. de croire cela possible. et d’admettre que le symptôme en sache plus que moi.

( se faire l’objet)
il n’y a pas d’arrangement entre le désir et la jouissance. ou au contraire, il n’y a que des arrangements. se confondre avec l’objet, c’est une jouissance aussi, la pire, parfois. l’analyste, par contre, lui, va se situer volontairement à la place cette place d’objet, à la place du déchet. c’est depuis cet endroit que s’éprouve le désir de l’analyste. mais c’est une parenthèse. une parenthèse peut-être d’importance, parce que les analystes nous apprennent beaucoup, et sont probablement les seuls à le faire, sur le comment y faire avec le désir, la jouissance, le réel.

ailleurs, encore sur le net, j’ai posé la question suivante : s’il n’y a pas la vérité, où est-ce que pourtant la chose connaît cette grâce d’être univoque. mal dit. si tout est insensé, écrivais-je, si rien n’a de sens, comment se fait-il, qu’il y en ait une pourtant, de chose, c’est un acte de foi, là, de ma part, qui y en ait un, de sens, de n’en n’avoir suprêmement aucun. non. ce n’est pas encore comme ça qu’il faut poser la question.

( une certitude soupçonnée)
j’écrivais :  » – et le seul endroit où il y a du sens c’est encore du non-sens – mais là : c’est bien. » en quoi consiste ce « bien » dont je parle là – je ne sais pas. le non-sens est peut-être partout dans la mesure où tout, n’importe quoi,  peut à un moment donné être manipulé dans des discours, et prendre tantôt telle ou telle valeur – on se situe là à un niveau symbolique, et cette chose que je veux pointer, eh bien, ce serait celle qui d’aucun discours ne s’arrange. le hic. celle qu’aucun discours ne peut d’aucune façon inclure. du bavardage, encore, et je m’en excuse.

( notre temps)
il y a quelque chose dans notre époque qui porte à la constipation, à l’obsessionnalisation;1 cela m’est apparu très clairement, à l’époque, à la lecture de je ne sais plus quel séminaire de lacan où il dresse le graphe du discours de l’obsessionnel. si l’on s’en tient à ce graphe, et d’ailleurs simplement au graphe du désir,  la chose est claire  S de grand A barré n’est pas supporté, est esquivé. le manque dans l’Autre, dans le signifiant, est constamment nié. c’est quoi ce manque dans l’Autre ?

( ce que je sais / quelle autre façon pour le savoir?)
je vais vous le dire : moi je le sais. à force de m’y cogner, je le sais. et ce sera tout pour aujourd’hui.

Opérer ce léger déplacement.
Ne plus craindre son temps.
« Ne pas craindre soin temps est une question d’espace ».
Dans le squatt. Dans l’orgie. Dans l’émeute. Dans le train ou le village occupé.
A la recherche, au milieu d’inconnus, d’une free party introuvable. Je fais l’expérience de ce léger déplacement. L’expérience
de ma désubjectivation. Je deviens
une singularité quelconque. Un jeu s’insinue entre ma présence et tout l’appareil de qualités qui me sont ordinairement attachées.
Dans les yeux d’un être qui, présent, veut m’estimer pour ce que je suis, je savoure la déception, sa déception de me voir devenu si commun, si parfaitement
accessible. Dans les gestes d’un autre, c’est une inattendue complicité.
Tout ce qui m’isole comme sujet, comme corps doté d’une configuration publique
d’attributs, je le sens fondre. Les corps s’effrangent à leur limite. A leur limite,
s’indistinguent. Quartier suivant quartier, le quelconque ruine l’équivalence. Et je parviens à une nudité nouvelle,
à une nudité impropre, comme vêtue d’amour.
S’évade-t-on jamais seul de la prison du Moi ?

Tiqqun

Notes:
  1.   à propos de l’obsessionnel et l’équivalence des valeurs, voir également : https://disparates.org/format-standard/2006-12-21/nevrose-obsessionnelle-equivalence-valeur/ []

« du nom à la nomination »

[ 1 décembre 2008 / 1 février 2009 ]

Le nom dont il s’agit dans le propos de Lacan, c’est le nom propre, celui qu’il tient de l’Autre, celui qu’il a dans l’Autre. C’est le nom qui lui est conféré dans l’Autre par le Nom-du-Père. C’est le nom comme donné et comme reçu. C’est un nom qui a été donné au sujet, qui le précède. Il s’agit alors, dans cette perspective, de le révéler dans l’analyse. Il s’agit de savoir comment le sujet a entendu dans lalangue le nom qui lui a été donné dans la langue de l’Autre. La particularité de ce nom, de cet entendu, de ce malentendu est de se corréler à un plus-de-jouir qui témoigne du registre dans lequel le sujet jouit de lalangue. Son nom se corrèle à l’objet a dans ses incarnations diverses et, selon la clinique du cas, toujours en quelque façon composé. Ce qui s’écrit S1-a. La coalescence du signifiant et de la jouissance a son lieu électif dans le nom propre. C’est ce dont la clinique analytique témoigne à l’envi. Que ce nom soit celui de l’état civil ou son nom dans sa famille, un surnom, un diminutif, un sobriquet, parfois la façon dont le sujet s’est lui-même nommé quand il a commencé à parler, ce nom imprime une marque indélébile, d’être une marque de jouissance.

[…]

Dans cette perspective, la fin de l’analyse est une nomination, à partir du symptôme, en dérivation du symptôme, et en même temps en rupture avec le symptôme. C’est bien un acte, une rupture d’avec l’Autre. C’est l’invention, par le parlêtre, du sinthome comme nom propre.

Du Nom à la nomination, Jean-François Cottes, Lettre mensuelle n° 253, décembre 2006

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Pause (mais en guise de réponse, tentative

[ 5 décembre 2008 / 9 mars 2016 ]

que le futur nous détermine dans le mesure où on ne peut rien en savoir – ce qu’il comporte de réel (trou dans le savoir) (un impossible formé seulement de possibles – le possible c’est une difficulté pour moi aussi (ils sont toujours nombreux et impliquent un choix et le choix est comme un sacrifice – j’ai l’impression de parler avec dans  la voie voix de mon adolescence… caramba, les possibles m’ont tuée)

me suis seulement fait essentiellement fait la réflexion que j’étais toujours tournée vers le passé / coupée apeurée du futur

alors que le futur comporte la « possibilité de la contingence » du hasard – lui / au-delà de mes propres nécessités (de mes lois liées au passé), et donc susceptible de les délier

(même si récemment, miller disait que non,1 )

peut-être bien que le projet s’accorde avec le désir

et qu’il s’agit de tourner l’impuissance le sentiment d’impuissance, en reconnaissance/admission de l’impossible

mais le projet s’est aussi  trop souvent lourdement accordé avec l’idéal, et la face surmoïque de l’idéal est paralysante

arrivant en analyse j’ai cru, je croyais, qu’il n’y avait pas de hasard, c’était ma lecture alors de l »a « la lettre volée »)

or,

jamais un coup de dés n’abolira…

ce qui m’apparaît à l’instant même

bon, je dois retourner travailler là-bas, http://musicalpainting.com/ mais ça je traîne ça je traîne ça je traîne.

Notes:
  1.   “le sujet heureux puisqu’il ne peut rien devoir ne peut rien devoir qu’à l’heur”  → ne peut rien devoir qu’à la fortune → la contingence / soit ce qui arrive et qui n’était pas écrit

    “tout heur lui est bon pour ce qui le maintient, soit pour qu’il se répète” → de l’ordre de ce qui ne cesse pas d’écrire.

    ce qui n’est pas écrit et qui arrive, la contingence, l’heur SERT la répétition

    PP (principe de plaisir) et PR (principe de réalité) fonctionnent ensemble

    PR dominé par PP

    voir https://www.disparates.org/delta/2008/10/notes-prises-au-dernier-cours-de-miller-11-juin-08/

    []

2235 (abracadabra; comment j’ai tout bien nettoyé aujourd’hui)

[ 31 janvier 2009 / 30 mars 2010 ]

la cigarette me manque incroyablement, depuis un jour ou deux. frédéric est au concert. jules dort. je suis dans mon bureau avec la bouteillede vin blanc portugais pétillant. j’ai bien aimé ces trains, regardez http://theartofmemory.blogspot.com/2009/01/trains-in-cinema-part-5.html. regardez ! et puis, il y a ça, qui n’est pas mal. c’est une adresse provisoire. je ne suis même pas sûre d’être autorisée à la diffuser. mais bon. pour le moment, c’est là:  http://bram.org/textdynamics/cnes/index-ecritures.php après, ça serahttp://bram.org/textdynamics/cnes/index.php.  à explorer. pour ma part, il faut encore que je m’habitue à lire sur écran. j’ai du mal. les gens que je commence à connaitre, ça va, je veux dire ça va, j’arrive à les lire facilement, l’intérêt m’aide.

note : il y a mieux à faire que de s’acheter des slips en dentelle qui gratte pour rererereséduire gaëtan : s’acheter des s lips qui ne grattent pas (néanmoinsen dentelle). il ne reste rien de l’animal en nous. c’est vrai que je dispose de quelques unes tout de même de certitudes. mais est-ce que je me sers un ostre verre?

[ bon, j’ai changé le template. c’est sobre. le titre aussi. sobre. sobriété. (template, je m’y suis décidée à cause de ça :  http://www.smosch.com/, car ça, positivement, ça me fait rêver et on peut rêver et je n’ai rien contre les bourgeois moi les bobos et je n’aime pas le design mais tout cela vous a un air, de netteté, d’adéquation. de précision. qui me fait. en vrai, même comme bobo, je suis ratée.   mais j’aime bien regarder. est-ce que j’ai l’air au moins un tout petit peu smosch, maintenant. ) ]

ça me fait penser que je lisais hier soir le dernier cours de jam, la vérité d’une analyse : qu’elle soit ratée.1 je vous dis ça c’est entre nous de vous à moi c’est à dire nulle, rien, part, je me demande si c’est pas ce gars-là que je devrais appeler. car il me fait un effet boeuf de l’effet.

je ne suis plus sur facebook, sinon, j’aurais pu vous dire à quel concert frédéric est. minitel? oui oui, c’estça. j’ai dit : hm, j’ai déjà vu. eux, les gens du groupe, je les trouve sympas, faut les réinviter, mais. les concerts. àvraidireaussiseulequejesoispendantoutelasemaine j’apprécie lessoiréesseule pendant le week end; ça me rappelle le passé. j’écris les mots tout attachés pour qu’on entende que je pense très vite et tout attaché mais comme ça devient moins lisible je crains que les gens ne sautent et/ou ralentissent au contraire le rythme de leur lecture. ceci est écrit très vite, car je tape très vite à la machine. j’écris aussi les mots tout attaché pour faire formule 1), car j’aime parler avec des formules, j’aime les formules (car je suis formuller). les formules c’est magique c’est des mots de fée et ça ne veut rien dire mais ça marche. or malheureusement je n’ai pas le sens moi de la formule si bien que je suis obligée d’en passer par de semblables artifices. des belles formules : là : http://mfx.dasburo.com/art/truisms/ truismes de jenny holzer:

the unattainable is invariable attractive the new is nothing but a restatement of the old sometimes things seem to happen of their own accordmurd a relaxed man is not necessarily a better man disgust is the appropriate response to most situationsextreme behavior has its basis in pathological psychology politics is used for personal gaincrime against property is relatively unimportanter action causes more trouble than thoughthas it disgust is the appropriate response to most situationssmost people are not fit to rule themselves sexu most people are not fit to rule themselvesal sideideals are replaced by conventional goals at a certain ageselflessness is the highest achievementeating too much is criminalholding back protects your vital energies it’s better to study the living fact than to analyzelow expectations are good protection history freedom is a luxury not a necessity fathers often use too much forcepursuing pleasure for the sake of pleasure will ruin you extreme behavior has its basis in pathological psychologyit is heroic to try to stop timedon’t place to much trust in expertsa man can’t know what it is to be a motheroccasionally principles are more valuable than peopleoccasionally principles are more valuable than peoplethe most profound things are inexpressibleyou must know where you stop and the world beginsdreaming while awake is a frightening contradictionviolence is permissible even desirable occasionallyunquestioning love demonstrates largesse of spiritgiving free rein to your emotions is an honest way to livebeing sure of yourself means you’re a foolexpressing anger is necessaryanimalism is perfectly healthypain can be a very positive thingsometimes science advances faster than it shouldstasis is a dream statethreatening someone sexually is a horrible actrandom mating is good for debunking sex mythsself-awareness can be cripplingchasing the new is dangerous to societyin some instances it’s better to die than to continue starvation is nature’s wayyou should study as much as possibleyour oldest fears are the worst oneswar is a purification riteambivalence can ruin your lifeignoring enemies is the best way to fightpotential counts for nothing until it’s realizedunique things must be the most valuablemonomania is a prerequisite of successdecadence can be an end in itselfambition is just as dangerous as complacencyaction causes more trouble than thoughtfake or real indifference is a powerful personal weapondeviants are sacrificed to increase group solidaritydecency is a relative thingit’s important to stay clean on all levelspeople who don’t work with their hands are parasitespeople are boring unless they are extremistsremember you always have freedom of choicethere are too few immutable truths todayanimalism is perfectly healthyanimalism is perfectly healthyhere’s nothing except what you sensekilling is unavoidable but nothing to be proud ofredistributing wealth is imperativeredistributing wealth is imperativethere are no absolutesa solid home base builds a sense of selfold friends are better left in the pastmen are not monogamous by naturedying and coming back gives you considerable perspectivehumor is a releasestrong emotional attachment stems from basic insecuritypeople who go crazy are too sensitiveself-awareness can be cripplingrecluses always get weakpush yourself to the limit as often as possiblepeople are responsible for what they do unless they are insanesolitude is enrichinghiding your emotions is despicableto volunteer is reactionaryautomation is deadlymonomania is a prerequisite of successmurder has its sexual sidechildren are the hope of the futurehabitual contempt doesn’t reflect a finer sensibilityexpiring for love is beautiful but stupidanything is a legitimate area of investigationstupid people shouldn’t breedkeep something in reserve for emergenciesa single event can have infinitely many interpretationsit is man’s fate to outsmart himselfstasis is a dream stateworrying can help you prepareto volunteer is reactionarya sense of timing is the mark of geniusspending too much time on self-improvement is antisocialelaboration is a form of pollutionthe idiosyncratic has lost its authorityany surplus isbeing alone with yourself is increasingly unpopular immoralrepetition is the best way to learnautomation is deadlyautomation abuse of power comes as no surprisedependence can be a meal ticket

[extraits de truismes de jenny holzer,

bises

Notes:
  1. bon, les mots exacts c’est : Et la passe du parlêtre, ça n’est pas le témoignage d’une réussite, c’est le témoignage d’un certain mode de ratage. mais je ne suis pas sûre qu’il récuserait ma formulation. []

demain

[ 10 mars 2009 / 30 mars 2010 ]
Oui, je me tiens sur un bord, sur le bord de mon ignorance. Je pourrais me tenir dans le confort de mon savoir, qui après tout n’est pas rien, qui s’est accumulé, au fil du temps, dans l’agrément de mon expérience comme analyste, et pourtant c’est du bord de mon ignorance que je parle, à la pointe de ce qui m’interroge, moi. Extrait du précédent cours

« L’ Orientation lacanienne »
2008-2009
Cours de Jacques –Alain Miller
Choses de finesse en Psychanalyse

image
Sandro Botticelli
“Vénus et les Grâces offrant des présents à une jeune fille”, fresque de la villa Lemmi, à Florence

À 13h45, à l’amphithéâtre Paul-Painlevé,
dans les locaux du CNAM, 292,  rue Saint-Martin, 75003 Paris.
Voici l’ensemble des dates prévues.
Mars :11, 18, 25
Avril : 1er, 8 – Mai : 6, 13, 20  – Juin : 3, 10
(From ecf-messager)

(où il est question de l’abjection)

[ 7 juillet 2009 / 30 mars 2010 ]

la journée d’hier s’est extrêmement bien terminée (une fois que j’ai eu fini d’écrire ici, et que je sois allée à mon rendez-vous psy).

réveillée ce matin en sursaut à quatre heures et demi en pensant à « l’abject ».  à « l’abjection » dont parle miller1 dans son dernier cours de cette année, comme d’un concept auquel lacan tenait particulièrement. à cette lecture je m’étais demandée où se se situerait l’abject dans ma vie, où je situerais l’abject dans ma vie..

Notes:
  1.  » […] et ne me fit qu’une seule recommandation (à propos de l’index des Ecrits) : ‘Ca doit commencer par le mot abjection’. […] et Lacan voulait que ce soit l’alpha sinon l’oméga de son enseignement. […] D’une façon générale, la jouissance a ses racines, plonge dans l’abjection. Quels sont les antonymes de ce mot ? La dignité. L’honneur. […] Dans l’expérience analytique, ce qui concerne le plus intime de la jouissance prend toujours la forme de l’aveu de ce qui mérite d’attirer mépris, opprobre, comme l’indique le dictionnaire, l’abjection étant l’extrême degré de l’abaissement. Le sujet du signifiant, celui de la parole, n’y touche, ne consent à s’avouer son rapport avec qu’en témoignant que la répulsion accompagne, est inséparable de l’attirance invicible qu’il éprouve dans ce rapport. » Jacques-Alain Miller, cours du 10 juin 2009 []

« Comment devient-on analyste »

[ 12 septembre 2009 / 20 juillet 2010 ]

commentondevientanalysteje lis le journal des journées (de l’école de la cause freudienne, en vue de leurs journées d’automne, qui se tiendront le premier week-end de  novembre, sous le titre « comment devient-on analyste? »).  on trouve ce journal des  journées sur le site de l’ecf, là: http://www.causefreudienne.net/agenda/evenements/journal-des-journees-de-l-ecf .  ce que je vous donne ici, c’est dans le journal n° 7, mais tous valent la peine. c’est court drôle clair plein d’allant. c’est signé jacques-alain miller.

Extrait du Journal 7
Jean-Pierre Klotz : Eplucher le « on »

« Comment devient-on analyste », ce n’est pas comment untel, ou comment je, ou comment nous, ou comment chacun, le devient, c’est comment on le devient. On, pronom dit indéfini en français, suivi du singulier du verbe, malgré le sens collectif (« nous devenons ») à lui spontanément transféré. Il ne prête à la conformité (« que fait-on ? » pour dire « que nous faut-il faire ? ») que par identification.
C’est donc du « on » que se fait l’analyste, un on dépouillé de ses oripeaux, le on singulier de chacun, le on extime, le on « petit a« , le on contre lequel on se bat, qui infiltre, empêtre, et dont on ne se dépêtre jamais complètement. Mais on peut y tendre, s’y intéresser « singulièrement ». Devenir analyste, se déplacer, et éplucher le « on ».

j’ajoute que je m’y suis inscrite. ( et je songe plutôt à  « comment ne devient-on pas analyste? (après une petite vingtaine d’années d’analyse) » ça a l’air simple comme ça. pourtant.)

Ajout du 12 oct. : je viens de demander à me faire rembourser. m’y poussent diverses considérations   1/ si je ne veux pas devenir… pourquoi aller à un congrès qui va chanter les grâces du devenir… 2/ l’angoisse profonde qui m’a saisie à la lecture de certains passages du susnommé  Journal.  je suis encore bien trop sensible quand il s’agit de l’école et de  ses analystes,  pour lesquels, par certains endroits,  ma passion se mitige, ce que mon caractères, par d’autres endroits, à moins que ce ne soient les mêmes, mon caractère entier donc a du mal à supporter.

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journal n° 9, extrait (my suffragette-attitude)

[ 13 septembre 2009 / 25 septembre 2009 ]

JAM : Pas du tout, on ne peut pas jouir sans entraves, on ne jouit que par les entraves (signifiantes). Un mot d’ordre, s’il y en avait un, ce serait plutôt « Bien-dire ».

journal 9, my suffragette-attitude/2

[ 13 septembre 2009 ]

– MARION. Les temps changent. Un jeune patient m’a réglée sa séance en carte Pokémon. La carte a un
pouvoir de 70 sur 100. Elle se nomme Le Créfadet. “Il dort au fond d’un lac pour maintenir l’équilibre du
monde.” JAM : Un analyste joue en effet le Créfadet pour un sujet – quand il ne peut pas faire mieux.

plutôt que de faire limite par l’interdit, faire lien avec la jouissance

[ 20 septembre 2009 / 20 juillet 2010 ]

Comment un psychanalyste, grâce au transfert, parvient-il à  « faire de la jouissance une fonction » qui permette au sujet de « retrouver, dit Lacan, son essence réelle », pour mettre en route le désir.

Jean-Robert Rabanel […] deux mode de civilisation, […] : « le premier, que nous connaissons bien, consiste à faire limite par l’interdit, et le second, beaucoup plus difficile car il nous faut l’inventer, est celui de faire lien avec la jouissance« .

Elisabeth Leclerc-Ravazet, Faire de la jouissance une fonction1

Notes:
  1. Je publie aujourd’hui, 20 octobre, de vieux brouillons que je ne veux pas jeter. Je ne sais plus d’où sortent ces citations. À mon avis d’une revue. La petite girafe, même. Sur les enfants. Probablement E. Leclerc-Ravazet, y cite-t-elle JR Rabanel…  []
catégorie: psychanalyse

à propos de la séparation pour l’enfant

[ 20 septembre 2009 / 30 mars 2010 ]
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Dans son Séminaire L’angoisse, Lacan parle de la séparation en tant que, pour l’enfant elle est séparation d’avec ses enveloppes, les caduques. En venant au monde, il perd une part réelle de lui-même, et, comme sujet, c’est bien ce avec quoi il aura à se débrouiller dans la vie. Cette part à jamais perdue. J.-A. Miller la qualifie de « perte de vie du corps« . Ainsi la jouissance n’est pas promise car ce qui préside à l’entrée du petit d’homme dans le monde des êtres parlants, c’est une perte fondamentale, irréparable, qui porte sur le vivant, sur le corps. C’est grâce au symbolique que le sujet va pouvoir circonscrire cette perte pour en faire un manque, un manque d’objet. C’est là l’essence de l’objet a lacanien. Ce rapport au manque d’objet va sceller le destin du sujet, le poussant soit à courir après, soit à ne pas vouloir savoir qu’il est perdu, soit à y renoncer.

« Faire de la jouissance une fonction »
Elisabeth Leclerc-Ravazet
La petite Girafen° 28, L’enfant et ses objets, Institut du Champ freudien

catégorie: psychanalyse

Le mode selon lequel s’opère cette perte réelle de vie laisse des traces indélébiles de jouissance chez le sujet.

[ 20 septembre 2009 / 24 septembre 2009 ]
Erik Dalzen - Faint, Christian, 2009

Erik Dalzen - Christian, 2009

A cet égard, l’angoisse donne le signal de différentes modalités de rapport à l’objet. Le mode selon lequel s’opère cette perte réelle de vie laisse des traces indélébiles de jouissance chez le sujet. Ces traces, toujours identiques à elles-mêmes, sont au principe de la répétition, et c’est pour cela qu’elles sont en lien avec le symptôme. Savoir reconnaître ces traces, puis savoir y faire avec la jouissance – telle est l’éthique de la psychanalyse – passe par une élaboration signifiante qui met en jeu le rapport à l’Autre. Entre le sujet et l’Autre, nous retrouvons ce « petit bout perdu » qui va constituer l’objet que le sujet place dans l’Autre.

« Faire de la jouissance une fonction »
Elisabeth Leclerc-Ravazet
La petite Girafen° 28, L’enfant et ses objets, Institut du Champ freudien

Ca ne prévient pas, ça arrive, ça vient de loin

[ 23 septembre 2009 / 25 septembre 2009 ]
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Erik Dalzen - Coffee Maker, 2007

Donc, on peut dire qu’avec la question des identifications on découvre, dans un trajet analytique, le fait qu’on ne peut pas soutenir par une identification une position féminine. Que toute la dynamique des identifications passe nécessairement par le système signifiant, et passant par le système signifiant, réinscrit, on peut dire, le féminin du côté phallique, du côté emblème.

[…]

Le passage que Lacan va faire, on va dire la révolution lacanienne, c’est d’envisager donc de nouveau la question du féminin, mais cette fois à partir de la question de la jouissance; non pas à partir de la question de l’emblème, de l’insigne ; non pas à partir de la question du fétiche, de la mascarade ; non pas à partir de la question des identifications, mais à partir de la question de la jouissance.

[…]

Vous connaissez peut-être l’histoire de Médée dans la mythologie grecque. Médée est donc une femme, qui, – je simplifie l’histoire – par amour pour un homme, Jason, tue son père, peut-être même son frère aussi et s’en va avec lui, se met à son service, l’aide dans ses tâches diverses et variées et a deux enfants de lui. Dans leur pérégrination, à un moment donné, ils arrivent dans un royaume et là, Jason tombe amoureux de la fille du roi et entend l’épouser, et donc laisser Médée, abandonner Médée, considérant que, finalement, elle est un peu trop sorcière pour lui.

Alors, qu’elle va être la réponse de Médée ?

[…] Naturellement, Médée dit très clairement que elle ne va pas le tuer. Non, elle va faire autre chose. Elle va sacrifier, on va dire, tuer les deux enfants de Jason qu’elle a eu avec lui, donc ses deux propres enfants. Pourquoi ? Parce que les enfants d’un homme, les enfants qu’une femme a avec un homme, c’est-à-dire la mère en elle, situent cet homme à partir de sa descendance, et donc inscrivent, si vous voulez, cet homme dans la chaîne symbolique de filiation, dans la famille à partir du nom, à partir du nom du père. Donc, ce qu’elle va chercher, si je puis dire, à ébranler par vengeance c’est précisément le nom de Jason. Le nom de Jason, en tant que ce nom, est ce qui pourrait lui succéder et ce qui le représentera, si je puis dire, dans l’avenir, dans la filiation qui continuera à, en quelque sorte, le rendre existant. Donc, elle tue ses deux propres enfants pour taper, si je puis dire, dans l’ordre symbolique, pour ébranler l’ordre symbolique, et allant encore plus loin, alors que Jason lui demande les corps de ses enfants pour les enterrer, c’est-à-dire pour mettre un nom sur une tombe, elle lui refuse les deux corps des enfants qu’elle emmène avec elle – dans l’histoire mythique on dit qu’elle les emmène sur un char – pour aller rencontrer un nouvel amour, un nouveau partenaire. Donc, elle ne lui laisse même pas, si vous voulez, le nom de l’enfant qu’il a eu avec elle, et elle lui signifie que ce qu’elle fait là… – c’est évidemment sur le versant de la haine et de la haine symbolique, c’est-à-dire d’une haine qui vise le sujet et non pas qui vise la personne, puisque comme je vous l’ai dit elle lui laisse la vie sauve – Elle lui laisse la vie sauve pour, en quelque sorte, décompléter le fonctionnement symbolique dans lequel il est totalement inscrit.

[…]

Pour résumer, je dirais donc que cette jouissance féminine à laquelle l’enseignement de Lacan aboutit vers la fin est une jouissance autre, c’est une jouissance, donc, qui n’est pas une jouissance liée à un organe, qui n’est pas liée aux représentations et à l’ordre signifiant, qui est donc au-delà du sens sexuel ou du sexe comme sens. C’est, par conséquent, la problématisation d’une position féminine au-delà de la fonction paternelle. C’est-à-dire le féminin quand il n’est pas pris totalement dans la fonction Nom-du-Père, fonction dont Lacan considère avec Freud, qui lui l’énonce en termes d’œdipe, qu’elle est le centre et le pivot du fonctionnement symbolique. Donc une jouissance pas totalement symbolisable qui échappe au processus de symbolisation.

[…]

Donc, on peut dire que pour Lacan, il y a un au-delà de l’Œdipe et que c’est à partir de l’au-delà de l’Œdipe – ce qui veut pas dire sans l’Oedipe, vous sentez bien – Il y a un au-delà de l’Œdipe qui permet de définir quelque chose de l’ordre du féminin, simplement cela ne se définit pas en termes de pouvoir, cela ne se définit pas en termes de groupe, cela ne se définit pas en termes d’emblèmes et d’identification. Cela ne se revendique pas non plus. Voilà… La jouissance féminine, ça ne se revendique pas, ça arrive. Ça arrive d’une part, et puis ça s’agit d’autre part, mais tout ce qui est du côté de la revendication fait immédiatement tomber du côté phallus.

Bien voilà…

Marie-Hélène Brousse,  » Qu’est-ce qu’une femme ? »

Que nul n’entre dans le XXIe siècle s’il n’est hypomane…

[ 6 octobre 2009 / 1 avril 2010 ]

Are Mokkelbost (b-o-r-g.org), Entity 12

La communication immédiate caractérise l’époque, pour le meilleur et pour le pire. Elle a du bon : augmentation de notre puissance d’agir, liberté croissante, agilité, faculté permanente de faire salon, mise en commun des ressources intellectuelles, la vie quotidienne vécue à plusieurs… enfer ou paradis… […]

Le pire ? Pas de doute, c’est une tyrannie. La contemplation, la méditation, la mélancolie, l’acédie, la dépression, l’otium, le loisir, la lenteur, les langueurs, le flâner, le musarder, le baguenauder, le glander, non pas seulement le dimanche de la vie de la triade sacrée Hegel-Kojève-Queneau, mais même le sacro-saint Week-end franchouillard, et, par dessus le marché, « les sanglots longs des violons de l’automne… » – toutes ces institutions augustes de la pensée, et de la sensibilité fléchissent sous les assauts incessants du signifiant toujours dispo. Que nul n’entre dans le XXIe siècle s’il n’est hypomane…

L’appareil dit nomade, ou portable, si serviable, corvéable à merci, jamais un mot plus haut que l’autre, a fait son nid dans notre cervelle, il y a pondu ses oeufs, il y est désormais accroché comme une tique à la peau d’un chien. Alléluia ! un nouvel organe nous est poussé, Notre cher et vieux In-der-Welt-sein s’en trouve chaviré de façon irréversible. Quelque chose du rapport du Dasein à l’espace et au temps, resté intouché depuis l’origine, a été pollué, qu’aucune écologie ne nous rendra pur. Des constantes anthropologiques parmi les plus assurées, ont désormais la danse de Saint-Guy.

Le monde de la longue durée n’a pas disparu, non. Il n’est pas englouti comme l’Atlantide, non. Il est toujours là, oui. Il survit, il vivote, il papote, il tremblote, il est passé au rang de patrimoine. Il fait l’objet de tendres nostalgies, il est le ressort de résistances féroces, mais tout le monde sent bien que c’est une cause perdue, comme la monarchie héréditaire et l’Algérie française. Tout doucement, il sort de l’actualité, il s’efface, fade away… Bientôt, demain, tout à l’heure, il sera hors service, honoré, muséifié. Tel le Roi d’Egypte, c’est « Le vierge, le vivace et le bel aujourd’hui » qui triomphe au son des trompettes d’Aîda.

Rien à voir avec l’éternel présent du « Sonntag des Lebens », où l’on se prélassait aux frais de la princesse. Quelle princesse ? Prinzessin Geschichte, la princesse Histoire, venue à bout de course, et retirée des affaires du monde. La vieille coquette entretenait dans sa thébaïde un gigolo fourbu, Herr Geistes, qui passait son temps à siroter des apéros dans un petit caboulot, en racontant les bobards de ses hauts faits. Enfin Georg Wilhelm Friedrich Hegel vint. Il prit au sérieux le vieux cabot, et se fit son amanuensis, comme le furent pour Socrate, Samuel Johnson et Napoléon, Platon, Boswell et Las Cases. Sur une île déserte, qu’emporterais-je plus volontiers ? La Phénoménologie de l’Esprit, ou Casanova, l’Histoire de ma vie ? Plus de concepts d’un côté, de femmes de l’autre. Au fond, avec la Bible, on a les deux. Voilà pourquoi ce bouquin a tant de fans.

Notre présent à nous est parcouru des secousses instantanées. Valéry disait déjà de Bossuet : « il spécule sur l’attente qu’il crée, tandis que les modernes spéculent sur la surprise ». L’instant impensable, impalpable, et informe, ne règne, ni ne triomphe, car, pour ça, il faudrait encore qu’il durât. Il fulgure. Il n’a pas plus de réalité dans le temps que le point dans l’espace. L’instant est dématérialisé, et, nous qui vivons au rythme du signal instantanée, il nous dématérialise à sa suite. La séance avec Lacan, telle que je l’imagine, n’était pas « courte », elle était instantanée, dématérialisante.

Ah ! mais… voilà pourquoi ce grand appétit de « Journées », de raouts, de fêtes – de rencontres, dit Z* : apporter son corps, trouver des corps…

Jacques-Alain MillerExtrait du Journal des Journées n°32 du mardi 6 octobre

Il n’y a pas d’accord possible entre la chaussure et le pied.

[ 16 novembre 2009 / 20 novembre 2009 ]

[… ] « Le gnomon du psychanalyste ».
Voilà un homme qui ose poser le problème de ce que c’est que devenir
un analyste quand on est un homme ! Comment faire, quand on est un homme,
pour devenir une femme, puisque l’analyste a une position de femme ?
Lacan utilise le terme de gnomon p. 877 des Écrits.

Je rappelle dans quel contexte. La division du sujet est un point-noeud, dit Lacan. Elle se
noue à un manque – le manque du pénis de la mère. D’où le mathème que Lacan
propose : (-j) / $. Le pas-de-savoir $ est articulé au pas-de-pénis (-j).

Pas-de, Leonardo l’a fait remarquer, c’est non seulement le manque, mais
aussi le pas que l’on fait.

[… ]

(L’actrice américaine Robin Wright Penn, qui vient de se séparer de
Sean, a confié à un journaliste que le point d’appui (le gnomon, pourrait-on
dire) dont elle se sert pour composer les personnages variés qu’elle
joue, ce sont les chaussures. Qu’ils soient bien ou mal chaussés est
quelque chose de très important pour elle. « Faire chaussure », selon
l’expression de Lacan, elle s’y emploie, donc, car c’est ce qu’elle prend
particulièrement à cœur.)

[… ]

Une femme, dans l’auditoire, l’a
souligné
: « Trouver chaussure à son pied, c’est impossible. Il n’y a pas
d’accord possible entre la chaussure et le pied. »
Une faille, de lui, la
sépare, elle. Le chausse-pied, aussi habile soit-il, n’en peut mais.

Leonardo, cependant, l’a précisé – c’est une femme qui lui a permis
de faire le saut par dessus la faille, c’est-à-dire de quitter le fantasme
de continuité de la commune mesure, dans lequel le chausse-pied est captif.

Extraits du  Journal des Journées n° 57

///

Le mot Gnomon est un mot latin qui veut dire aiguille de cadran solaire, venant du grec Gnômôn qui désignait une règle ou ce qui sert de règle. Par dérivation un gnomon est le nom du plus simple cadran solaire : un bâton planté verticalement dans le sol, ou même encore plus simple : l’homme lui-même.

The gnomon is the triangular blade in this sundial

The gnomon is the part of a sundial that casts the shadow. Gnomon (γνώμων) is an ancient Greek word meaning « indicator », « one who discerns, » or « that which reveals. »

It has come to be used for a variety of purposes in mathematics and other fields.

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le cours de jacques-alain miller reprendra en janvier 2010

[ 16 novembre 2009 / 30 mars 2010 ]

Janvier : 13 20  27
Février : 3 10  17
Mars : 17  24  31
Avril : 7 14
Mai :  5 12 19 26
Juin : 2  9
Le lieu n’est pas encore fixé.

Théâtre Dejazet.
41, Boulevard du Temple – 75003 Paris (métro République).
14h00 – 15h30
Accueil à partir de 13h15.

la politique du symptôme, la politique de l’autruche

[ 17 novembre 2009 / 27 mars 2010 ]

« Cet engagement-là relève d’une décision politique, non pas de la politique du symptôme qui est la politique de l’autruche : avoir pris acte d’un réel, mais en même temps refuser d’en tirer les conséquences. Et, en particulier, croire qu’il y en a un, au moins un, qui le fera pour nous. La politique du symptôme – politique du pire parce que c’est celle du père – comporte la croyance à l’Autre : qu’il soit gentil ou méchant, détesté, ignoré ou aimé, est secondaire au regard du fait de le faire consister. L’affect – colère, tristesse, etc., naît en ce point-là où l’Autre se remet à exister. Le trop dont on pâtit – le pathos -, c’est le moment où au lieu de consentir à lâcher sur la jouissance, le sujet préfère faire consister l’Autre et se faire croire qu’il existe. Un nouveau tour est alors nécessaire pour cesser d’y croire, et retrouver la voie du partenaire inhumain – partenaire symptôme des uns et partenaire ravage des autres – plutôt que la voix d’un Autre qui intime l’ordre de jouir du silence de la pulsion de mort. »
Agnès Afflalo, Journal des Journées n° 58

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je m’accrochai à la statue d’un ange dans le cimetière

[ 20 novembre 2009 / 30 mars 2010 ]
 » […] J’entrai dans son bureau, et elle s’intéressa à deux interprétations dans ma cure. A l’âge de 5 ans, un jeune homme qui était pour moi comme un père, mourut le mien venant d’émigrer en France.  Après l’enterrement, je m’accrochai à la statue d’un ange dans le cimetière, et refusai de partir. Pendant longtemps, dans une analyse précédente dont j’ai parlé au cours des Journées, cela avait été interprété comme la peur de la mort. Une scansion de Jacques-Alain Miller a inversé l’interprétation et fait apparaître le désir d’y rester ou plutôt sa jouissance, la pulsion de mort.  »

Francesca Biagi-Chai : Le voile soulevé – Journal des Journées n°60

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(l’in-dé-ci-se-pression)

[ 23 novembre 2009 / 26 mars 2010 ]
« Un des coups imparables du rateur d’élite, c’est l’indécision. Il est à tenter souvent et aussi tôt que possible, car le dispositif analytique c’est comme la portée de chatons : il faut le noyer avant qu’il prospère… Dépression et indécision sont les deux mamelles du ratage. L’indécisepression ! C’est l’indécisepression qui permet de durer dans l’intenable. Pour tout faire rater, l’indécisepression n’est jamais à court d’inspiration.»
Extraits du livre de Bernard Cremniter, « Comment rater sa psychanalyse »
– hm, me reconnais tout à fait en rateuse d’élite  –
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passe, fin d’analyse et satisfaction

[ 25 novembre 2009 / 30 mars 2010 ]

J.-A. Miller nous dit que « le passant de la doctrine classique (celle de la passe de la Proposition de 1967) est supposé témoigner d’un savoir, (…) alors que, à la fin de son enseignement, ce passant-là ne peut témoigner que d’une vérité menteuse. » (Cours du 21 janvier 09)

Deux modalités de la fin de l’analyse sont présentes dans l’enseignement de Lacan :

  1. « La passe classique », c’est celle qui pense l’inconscient comme savoir. A la fin de l’analyse, ce dont témoigne l’analysant, c’est d’un temps qui va du début à la fin de l’analyse comme clôture de l’expérience.
  2. « La passe du dernier enseignement de Lacan » porte sur l’inconscient, non plus comme savoir mais comme jouissance. « Lacan a d’abord cherché à enserrer cette jouissance dans l’objet a. Puis il a, dans le séminaire XX, introduit un espace amorphe, où il a mis un grand J, pour démentir qu’on puisse l’enfermer ainsi ».
    (Cours du 14 janvier 09)

D’un côté nous avons l’inconscient transférentiel, le sujet supposé savoir, la vérité et la structure de fiction qu’elle soutient.
De l’autre nous avons l’inconscient réel, la jouissance opaque, le sinthome, la satisfaction de la fin d’analyse. « La question est moins de savoir ce qui a été extrait de jouissance, ce qui a été extrait du fantasme, en termes d’effets de vérité, en termes de savoir, que de dire la satisfaction que j’ai réussi à extraire de mon mode de jouir. Car mon mode de jouir est ce qu’il est. » (Cours du 11 février 09).
A la certitude de la fin de l’analyse dans la passe classique, fait place la satisfaction.

Une question et une ouverture.

Que signifie cette satisfaction ? De quoi est-elle l’indice ? Qu’est-ce qui peut satisfaire l’analysant au point qu’il veuille témoigner de cet allègement, de l’irréductible de son mode de jouir qui aurait perdu pour lui sa valeur de prison ?
Il me semble que de tels témoignages, élucidant ce moment particulier où l’analyse conduit un analysant à extraire de sa jouissance, une telle satisfaction lui permettant de vivre avec son sinthome, nous n’en avons pas de savoir préalable. D’autre part, dès lors que cette satisfaction ne se démontre pas, il me semble que la fin de l’analyse n’est plus affaire de temps logique, mais de décision du sujet. La logique de la clôture de l’analyse n’est plus liée à l’expérience de la chute du Sujet Supposé Savoir, ni à la traversée du fantasme, elle est liée à « la nouvelle alliance que le sujet peut faire avec sa jouissance ». (Cours du 1° avril 09)

[…]

La procédure de la passe devrait être ce lieu où se travaillent ces questions de fins d’analyse. La question de la passe pourrait sérier ces sorties, tenter de repérer la place qu’occupe un sujet dans la responsabilité qu’il a de son analyse, du ratage que constitue le temps du déchiffrage. Il s’agirait alors de repérer la transmission qu’il peut faire de l’abord de son rapport à la jouissance, et de la façon dont il s’est distancié de son mode de jouir, des effets sur lui, de ce que Lacan a renommé comme cause du langage, la jouissance. Et de nouer ces temps de l’analyse qui ne sont pas opposables, mais au contraire, fixés par les signifiants de jouissance qui l’ont constitué comme parlêtre.

Journal des Journées n° 62, La passe n’est plus une, Hélène Bonnaud

LETTRE À ÉLISABETH ROUDINESCO

[ 26 novembre 2009 / 26 mars 2010 ]

Bien chère Élisabeth,

À la fin de l’article que vous consacrez au Sinthome dans Le Monde de cet après-midi, vous me recommandez « un peu d’humilité ». Voilà qui est fort de café.

Qui parle ? De quel magistère tombe pareille admonestation ? De cette même tribune du Monde où j’ai été crucifié des années durant, au point que je m’estimais heureux d’être passé sous silence, puisque mon nom n’y figurait jamais que pour être bafoué.

Notre amie Catherine Clément loue quelque part ma « capacité de résistance ». Certes. Imaginez-vous, chère Élisabeth, que pour tenir bon quand on est piétiné durant un quart de siècle par tout ce que la France compte de luminaires médiatiques dès que l’on bouge un cil, il faut un brin d’orgueil. Je suis grandiloquent ? Précisément, j’aime cette phrase de Montherlant pour sa grandiloquence : « Je n’ai que l’idée que je me fais de moi pour me soutenir sur les mers du Néant. » C’est dans Service inutile, que Camus aimait.

À dire vrai, il y avait surtout l’idée que je me faisais de Lacan, et qui est fort distincte de celle que vous répandez. Je n’ai pas lu, vous le savez, la biographie que vous lui avez consacrée, mais il m’étonnerait que le rôle que vous m’y faîtes jouer soit à ma convenance. Sur Lacan, l’homme, et sur mes rapports personnels avec lui seize ans durant, j’ai gardé le silence. Je ne l’ai rompu, ce silence, qu’à votre bénéfice, quand vous m’avez interrogé pour votre Bataille de cent ans. Je commence à peine à en dire un peu plus, et déjà je vous impatiente, vous me gourmandez : « Il aurait pu s’abstenir, écrivez-vous, de trop célébrer son propre parcours autobiographique ».

On aurait pu s’attendre à ce qu’une biographe de Lacan encourage la bouche qui s’ouvre. Mais non, vous lui offrez, obligeante, le secours d’un bâillon : « Tais-toi donc. » Là, c’est Baudelaire qui s’évoque : « Tais-toi, ô ma douleur, et tiens-toi plus tranquille. » Si je suis votre douleur, chère Élisabeth, comme vous avez été longtemps la mienne, eh bien, permettez-moi de vous dire que vous n’avez pas fini de souffrir.

Tout à rebours de vous, notre amie Catherine m’invitait hier soir à commencer par parler de moi quand j’aurai bientôt à tenir au public quelques propos sur la psychanalyse. Excusez-moi, c’est son conseil que je suivrai, et non point celui que vous me cornez aux oreilles depuis votre haut-parleur du Monde.

Votre invitation à l’humilité se motive, dîtes-vous, de ceci, qu’« un peu d’humilité est nécessaire à la rigueur ». Cette belle maxime frappée à mon intention, je suis tout prêt à en faire mon profit, mais est-elle juste ?

La rigueur, dîtes-vous. Pourquoi l’humilité serait-elle nécessaire à la rigueur ? Pourquoi non l’orgueil ? L’orgueil est beaucoup plus nécessaire à la rigueur que l’humilité. Il se pourrait même que l’humilité fût tout à fait nuisible à la rigueur.

La rigueur est la rigueur. Elle est la même, que l’on soit arrogant ou que l’on soit amène. On peut être fou aussi bien, cela n’y fait rien. Qui est plus rigoureux qu’un psychotique ?

Pourquoi devrais-je recevoir de vous, chère Élisabeth, je vous le demande, des leçons de rigueur agrémentées de l’injonction d’avoir à me taire ? Vous écrivez, quelques lignes avant votre belle maxime, que, dans les annexes du Sinthome, figure, avec la conférence de Lacan à la Sorbonne, une présentation de celle-ci par Jacques Aubert. C’est inexact : les notes de l’éminent joycien portent sur l’ensemble du Séminaire. Vous écrivez que « Lacan projette sur Joyce son propre roman familial ». Où avez-vous vu cela ? Lacan relève que sa biographie recoupe celle de Joyce en quelques points : il est lui aussi issu d’une famille confite en dévotion, il a entendu Joyce rue de l’Odéon. Rien à voir avec une projection, terme qui a un sens précis en psychanalyse, et qui désigne une opération dont Lacan s’est toujours gardé. Lacan n’a nullement « participé » au colloque de la Sorbonne avec MM. Un tel et Un tel : il est venu faire la conférence d’ouverture, et puis il est reparti. Je le sais : je l’accompagnais, avec Judith. Mon Dieu ! je parle de moi. Vous voyez dans Le Sinthome un exemple de « la folie verbale du dernier Lacan », qui le tiendrait éloigné « d’une approche cohérente de l’œuvre et de la vie de Joyce ». Tiens donc ! On peut tout contester de l’approche de Lacan, sauf sa cohérence justement. Il utilise Joyce à ses fins propres, et l’érudit pourrait y trouver à redire, mais il mettrait en cause son présupposé, non sa déduction. Il se trouve de plus que l’érudit de référence applaudit le bel effort du psychanalyste. Vous parlez de sa « quête éperdue d’une saisie de l’indicible ». Pourquoi pas ? Mais c’est du Roudinesco, ça, non du Lacan.

Cela fait beaucoup en quelques lignes, chère Élisabeth, quand on dispense à tout vent une leçon d’humilité et de rigueur. Tout compte fait, je vous laisse l’humilité et garde la rigueur.

Il est vrai que la mienne, de rigueur, n’a pas l’heur de vous plaire. Des cinquante pages de ma « Notice de fil en aiguille », vous jugez qu’on y trouve « quelques commentaires utiles ». Oui, et nombre qui sont inutiles, sans doute. Mais tout est là : il y a une « urgence de l’inutile », comme le dit Sollers. Il est vrai que son nom, si présent dans ce Séminaire et dans mon commentaire, brille par son absence dans votre papier.

Bien entendu, vous ne sauriez tout dire dans l’espace restreint que vous concède le Monde des livres. Alors, vous choisissez. J’ai tout loisir de m’étaler dans l’espace immatériel de l’ALP, alors je ne choisis pas, et mon enflure incommode votre sentiment de la décence. Muet, j’étais parfait. Vous aviez toute latitude de me cribler de vos flèches, je ne pipais mot. Excusez-moi si saint Georges a depuis peu ma préférence sur saint Sébastien. Vous êtes en proie à un dragon dont il faut que je vous délivre, et qui vous fait parler d’une voix où je ne reconnais pas la charmante et valeureuse Élisabeth qui m’a montré le chemin, et à Jean-Claude Milner, dans le combat contre l’évaluation.

Milner n’a pas le même penchant que vous pour l’humilité. Son essai Existe-t-il une vie intellectuelle en France ? s’appelait, avant que je ne lui propose ce titre, Contre l’humilité. Il y voyait « le crime contre l’esprit ». On nous incite beaucoup à l’humilité ces temps-ci. Ce n’est pas la vox populi, non, c’est la culture de l’évaluation qui s’exprime ainsi. On prescrit à tous l’obéissance, on proscrit les fortes têtes, et ce prurit de penser par soi-même plutôt que par expertise collective. Pour les « sociomanes », comme les appelle Sollers, tout ce qui n’est pas humble est anti-social. Cela veut dire qu’on a toujours tort de se révolter.

Je n’entrerai pas ici dans la grande controverse de l’humilité. Les Anciens connaissaient-ils l’humilité ? S’ils en avaient la notion, en avaient-ils la pratique, ou est-ce une vertu seulement chrétienne et surnaturelle ? Il y a là un effet dialectique : avoir le sentiment de sa petitesse devant le Très-Haut serait plutôt de nature à vous rendre intrépide devant tout mortel. C’est le secret de la nuque raide des Juifs, c’est le principe de la résistance intraitable des protestants, c’est le ressort de la rébellion catholique, celle qui a donné en France et Pascal et Péguy et Mauriac, tout à l’opposé de ce conformisme évaluateur où se sont abîmés les héritiers du personnalisme, qui ne vous aiment pas plus qu’ils ne m’aiment. Car si vous n’êtes pas toujours rigoureuse, chère Élisabeth, vous n’êtes jamais humble. Cette idée ferait rire tous ceux qui vous connaissent, ou même qui vous lisent. Cela vous vaut des adversaires qui, souvent, sont les miens aussi.

Il y a un terme qui manque dans cette lettre, et qu’il faut que j’introduise avant de l’interrompre. C’est celui de magnanimité, qui fut un idéal des Grecs — megalopsuchia — et des Romains — magnanimitas, néologisme de Cicéron — avant de venir en héritage au christianisme. Qui n’a pas l’âme ravie en lisant le portrait du magnanime dans l’Éthique à Nicomaque, ne saurait goûter Corneille ni Stendhal. J’aime assez là-dessus la synthèse de saint Thomas, telle que l’exposait jadis le Père Gauthier contre le Père Noble. Le Père Noble disait que « l’homme humble n’aborde pas les grandes entreprises parce qu’il sait en être incapable. Le magnanime va aux grandes choses, parce qu’il connaît ses moyens ». L’humilité serait pour les médiocres, la magnanimité pour les grandes âmes. Le Père Gauthier, lui, conciliait : magnanimité dans les affaires humaines, mais, dans le rapport à Dieu, aveu par l’homme de son néant.

Lacan, pourtant si versé dans Aristote, n’était pas magnanime. Il voyait là l’une de ces façons de se pousser du col qui ne l’impressionnaient pas. Ce cynique supérieur avait pourtant reconnu en moi une vertu qui vous échappe, chère Élisabeth, et dont je reconnais volontiers qu’elle n’est pas très en évidence ces jours-ci : la modestie. J’ai poussé ça jadis jusqu’à vouloir « ne compter pour rien ». Du coup, on en a pris à son aise avec moi, et sans doute en ai-je tiré une obscure jouissance. Sur ce, dîtes-vous bien que je ne suis plus le stoïque qui servait de punching-ball. Le cave se rebiffe. J’essaye autre chose.

Ce nouveau système comporte que je ne laisse rien passer, même pas cette petite épingle dont vous m’avez piqué aujourd’hui, en guise de flèche du Parthe, après avoir dit pour la première fois qu’une transcription de moi vous agréait. Je voudrais continuer de mériter vos éloges.

Considérez que j’ai répondu à votre correction fraternelle par une autre. Vous savez que je suis à vos côtés pour l’essentiel. Je vous embrasse avec affection.

Jacques-Alain

Ce 7 avril 2005

10.02.10 // Y A PAS D’ARRANGEMENT //

[ 11 février 2010 / 9 septembre 2011 ]

repris une bonne part des tweets copiés/collés par @midite et publiés sur son blog au fur et à mesure que se tenait le cours de jacques-alain miller. à elle donc revient le mérite de ce travail. qu’elle en soit ici, une fois de plus, remerciée.

je les reprends ici, parce que ça me plaît de lire les lectures/auditions/écritures/notes/tweets de chacun.

@Dafpsy et @Timecerise ont tweeté en direct.

Les tweets de @fources et de @eugeniainparis ont été envoyés après le cours.

Luc GarciaTimecerise JA Miller arrive !

Au seuil de ce cours intitulé Vie de Lacan, évocation des vie de Plutarque. Tradition corps des grands hommes

Les grands hommes, ce sont les magnanimes 1. Ethique à Nicomaque. Est-il décent de faire de Lacan un grand homme.

Je sens qu’il ne faut pas essayer. Ce qui fait résister, c’est un dit de Baudelaire.

Projet de préface de Baudelaire : « le grand homme est bête ». On résiste à faire de Lacan ceci.

Baudelaire : lien entre la grandeur que l’on assigne et la bêtise. Une punition de Dieu

Appelons le l’homme multitude, miroir de la multitude. Les vies exploitent tj la structure du stade du miroir. Le grand homme est une fonction

du grand nombre. Sa figure fonctionne comme un + gd dénominateur commun. Représente à chacun, qu’il n’est que ce que vous êtes

mais en mieux, en plus. Tension du vouloir être lui, du vouloir être comme lui.

Je voudrais que ce que j’appelle Vie de Lacan soit dispensé de cette tension. Le grand homme, c’est l’homme mesure. L’homme auquel

on se mesure. Au moment de le trouver mieux, on établit avec lui une relation de commune mesure. C’dans l’élément de la commune mesure

que surgit dans les coordonnées celui qui s’avère plus. C’est en cela qu’il est exemplaire. Il ouvre l’espace imaginaire de l’imitation.

Si le grand homme est plus, Lacan est trop. Il y a à distinguer le plus et le trop.

Comment les distinguer alors qu’il y a sans doute une partie commune entre les deux. On n’a pas le même rapport avec l’un et avec l’autre

Avec le plus, on entretient une relation de commune de mesure.

Daphné Raynaud Dafpsy c’est vous qui supportez la mesure par rapport l’exces est indexé

Luc GarciaTimecerise Avec le trop, c’est vous qui supportez la mesure. Le trop fait surgir, émerger, apparaître, en chacun, sa propre limite.

Il fait apparaître votre « pas plus loin ». Il suscite une intolérance. Et Dieu sait si Lacan, porté aux nues par un petit nombre a suscité

au plus grand nombre, une intolérance. Mesuré à l’aulne de ce qui s’appelle la société, ce porté aux nues était bien réduit.

Je voudrais – jam – dégager l’effet sur chacun. Lacan manifestait pour chacun, pour vous, ce qui est la limite du supportable.

J’ai pu rassembler dans l’intervalle quelques anecdotes sur Lacan. Mais ces anecdotes, rapportées, étaient autant des anecdotes sur Lacan

Daphné RaynaudDafpsy la position de lacan ds sa vie à savoir d’incarner pour l’autre un impossible à supporter

Luc GarciaTimecerise que des anecdotes sur les personnes qui les rapportaient ! La position de Lacan dans sa vie, à savoir d’incarner un impossible à supporter.

Daphné RaynaudDafpsy l’impossible à supporter c la definition clinique du reel selon lacan

Luc GarciaTimecerise L’issue s’est manifestée par la haine ou l’amour. Pas d’indifférence. L’impossible à supporter, la definition clinique du réel.

Daphné RaynaudDafpsy ds vie de lacan lacan est un des noms du réel

toutes les anecdotes donnent le sentiment de l’inimitable

Luc GarciaTimecerise Dans vie de Lacan, c’est un des noms du réel. Sortie du champ de l’imitation. Des anecdotes, quand elles s’accréditent, donnent sentiment

de l’inimitable. Il n’y a pas de sens commun du réel. Un des noms du réel, c’est évidemment une hypothèse régulatrice.

Daphné RaynaudDafpsy comment cela s’est il traduit ds sa vie?

ct quelqu’un qui ne voulait pas entendre raison

Luc Garcia Timecerise A quoi avait-on à faire quand on avait à faire avec Lacan ? C’était quelqu’un qui ne voulait pas entendre raison. Bien des fois, j’ai joué

auprès de lui le rôle de Philinte auprès d’Alceste. Il, Philinte, se fait le messager du calcul d’opportunité, de l’ordre du monde.

Quelques, j’ai été écouté par Lacan. Dans tous les cas, son premier mouvement à l’endroit du discours voulant lui faire entendre raison

Daphné Raynaud Dafpsy g ete ecouté par lacan mais ds tous les cas son premier mvt a l’endroit du discours voulant lui faire entendre raison était un non

Luc Garcia Timecerise était un NON. La sagesse, c’est changer ses désirs plutôt que l’ordre du monde. Entendre raison : se conformer.

Daphné Raynaud Dafpsy … Aucune chance d’obtenir son assentiment, l’attitude lacan ct de tenir la place du reel. Il vs laissait la raison et la réalite

Luc Garcia Timecerise L’attitude Lacan, c’était de tenir la place du réel. Il vous laissait à vous la raison et la réalité. Sa postulation, c’était l’attitude

Timecerise inflexible. Ne pas accommoder à toute transaction. S’établir dans opposition polaire entre réel et raison. Le réel n’entend pas raison.

Daphné Raynaud Dafpsy se dérober à tout tempérament et de s’établir ds une opposition polaire entre reel et raidon. Le réel n’entend pas raison.

Dafpsy plus souvent qu’a son tour lacan obtenait que la realite se conforme à son desir

Luc Garcia Timecerise C’est un fait que plus souvent qu’à son tour, pour Lacan, la réalité se conformait à son désir. Surdité à la voix de la raison.

Daphné Raynaud Dafpsy vie de lacan, homme du desir

Luc Garcia Timecerise ça n’invite pas à le dessiner en grand homme mais en homme de désir.

Daphné Raynaud Dafpsy l ‘enseignement supposait qu’on en ait payé le prix ds sa vie, qu’on en ait saigné d’enseigner

Dafpsy le désir (lacan) est un des noms du reel

Luc Garcia Timecerise Dans son enseignement, ce qu’il a appelé le désir, ce qu’il s’est efforcé de construire sous ce nom, le désir est un des noms du réel.

Daphné Raynaud Dafpsy p690 Les Ecrits

Luc Garcia Timecerise Le désir, il le décrit, p. 690 E, comme paradoxal, déviant, ératique, excentré, voire scandaleux. Eh bien, reparcourant cette série

Daphné Raynaud Dafpsy le desir est une figure du trop, trop par rapport a la mesure que l’on peut prendre ds le besoin

Luc Garcia Timecerise d’adjectifs, correspond à la vie de Lacan.

Daphné Raynaud Dafpsy il y a le moment où l’on dit c assez. En impliquant le concept de besoin lacan établit le désir ds la position du trop

ce trop a tjrs hanté la sagesse

marjorie metayer marge44« Demontrer ds le desir le caract. paradoxal, déviant, erratique, excentré, voire scandaleux, par où il se distingue du besoin »p.690

Luc Garcia Timecerise Lacan établit le désir dans sa position du trop. Le trop qui a hanté les sagesses. La sagesse, c’est une invitation à la sagesse. Le secret

Timecerised’une sagesse, c’une idée du trop. Le trop, c’est l’envers de la sagesse. Se suivent comme son ombre.

Daphné Raynaud Dafpsy lacan laisse entendre qd p 690 il rajoute c meme la un fait trop…

Dafpsy la fable de la fontaine, rien de trop.

marjorie metayer marge44 c meme là un fait trop affirmé pour ne pas s’ê imposé de toujours aux moralistes dignes de ce nom » p. 690

Daphné Raynaud Dafpsy rien de trop c un precept

Luc Garcia Timecerise Rien de trop, c’est un précepte. Le meden agan, c’est une injonction. L’énoncé d’un devoir, la prescription d’un effort.

La vie de Lacan demanderait à être lue comme celle d’un homme de désir qui n’a jamais aspiré à être un sage.

Daphné Raynaud Dafpsy la vie de lacan dderait a etre lu comme celle d’un homme de desir

Dafpsy lacan… contre l’opinion commune

Luc Garcia Timecerise Lacan s’est montré paradoxal, au sens etymologique.

Les grecs faisaient de la démesure un peché contre la divinite.

La demesure empiete sur la souveraineté des Dieux.

Lacan est de ceux qui de très peu nombreux qui sont inscrit en faux de cette doxa.En cela, il est juste de dire qu’il s’est montré paradoxal

Daphné Raynaud Dafpsy la deviance etait ds la vie de lacan manifeste ds son refus permanent de la norme, refus qui inspirait jusqu’à son vetement

Luc Garcia Timecerise Refus de Lacan de la norme, jusque dans ses vetements. On a parlé de son dandysme. C’etait un original vestimentaire. Un precurseur.

Luc Garcia Timecerise Les cigares ne ressemblant à ceux de personne, après le noeud papillon, la chemise mao faite sur mesure… Il y avait là le refus de passer

Daphné Raynaud Dafpsy cigare tordu, noeud papillon, chemise Mao faite sur mesure… Jusque ds les petites choses refus de passer inaperçu

Luc Garcia Timecerise inaperçu. C’est là qu’il faut savoir le supporter. Ne pas passer dans la foultitude. Intensifier le paraître.

Lacan était ostentatoire et attentait aux semblants communs. Attitude primordiale de ne pas se fondre dans le paysage, mais de faire tache.

Daphné Raynaud Dafpsy il y av una attitude primordiale de ne pas se fondre ds le paysage mais de faire tache. Desir d’attirer l’attention.

Luc Garcia Timecerise Il attirait l’attention sur des mots de Freud passés inaperçus.

Daphné Raynaud Dafpsy un coté m’as tu vu sauf su’on l’av vu et entendu

Luc Garcia Timecerise Cette ostentation marque aussi bien son style d’enseignement. Incessants points d’exclamation !

Luc Garcia Timecerise Auditoire soumis à une surexitation conceptuelle.

Daphné Raynaud Dafpsy enonciation faite d’incessants points d’exclamations

Daphné Raynaud Dafpsy argumentations qui se donnaient à voir et à entendre ds le registre de l’ostentation

Luc Garcia Timecerise Lorque ce fut lu, des arguments sont apparus construits, mais ils étaient pris au départ pour des éructations oraculaires.

Timecerise Il ne répugnait pas à sidérer l’auditoire pour lancer l’avancée de sa pensée.

Daphné Raynaud Dafpsy il appelait siderer l’auditoire si ct a ce prix qu’il pouvait faire tomber d’un croche pied un prejugé

Dafpsy il y a ds l’enseignement de lacan des moments voyous, faire baisser la garde à l’autre et le mettre KO et faire avancer ce qu’il

Luc Garcia Timecerise Volonté de faire le trou coute que coute, en ne s’inquiétant pas de devier par rapport a la norme logique. Il y avait des moments voyous.

Daphné Raynaud Dafpsy …faire passer

il projetait la semblance de ce qu’il assigne au reel qd il dit le reel est sans loi

Luc Garcia Timecerise Il projetait la semblance de ce qu’il assigne au réel quand il dit le réel est sans loi.

Daphné Raynaud Dafpsy lacan se donnait droit à sa fantaisie

Luc Garcia Timecerise Lacan se donnait droit à sa fantaisie. Faire place à sa propre singularité. Sans motiver. Parce que motiver, on peut toujours le faire.

Daphné Raynaud Dafpsy motiver on peut tjrs le feire, chez lacan il y av ces moment d’eruptions imotivées qui engendraient la surprise ey d ‘allegement..

on découvre un cancer quelques jours apres la dissolution de l’Ecole

les medecins voulaient operer il disait non

parce que c ma fantaisie

c’etait bien vu de sa part car lorsqu’il fut operé,…, il n ‘echappa pas de cette operation.

cette fantaisie était sans doute plus sage que la sagesse des autres

Luc Garcia Timecerise Des passages qu’il est difficile de twitter, sauf gacher ce que Jacques-Alain Miller nous transmet avec délicatesse et finesse.

Daphné Raynaud Dafpsy le mvt psy, association internationale, il s’est arrangé pour s’excentrer et s’en trouver excommunié

il est flou sur l’image, il ne se conforme pas à cette présentation souriante

la jouissance prend le reel comme immobile, invariable. Le désir n’est qu’un semblant, il n’attrape rien, principe hysterique, l’insat

Luc Garcia Timecerise Le désir dont la loi est ce n’est pas ça a pour objet « rien » qui est.

Le désir n’est que la métonymie du manque. Le désir ne se conclut jamais que sur rien.

Daphné Raynaud Dafpsy le desir n’a pour objet rien qui n’est. Le desir n’est que le manque multiplié par des signifiants successifs

Luc Garcia Timecerise La prise du désir n’est que celle du désêtre. En cela, il y a une gonfle du désir. Un « ce ne sera jamais ça ».

La 1ere fois que je me suis adressé à Lacan, dit Jamiller, je le questionnais sur le manque ontologique dont il parlait.

L’ontologie psychanalytique commente le manque, la castration, la barre. Il y a une ontique qui est ouverte par la ref à la jouissance.

Daphné Raynaud Dafpsy parce que ds le langage de freud on designait comme le pt de vu economique, la jouissance est voilee par le desir

le terme que lacan a fait monter ds son dernier enseignement, le sinthome comme mode de jouir

Luc Garcia Timecerise Lacan était adéquat à son trop, il le portait, il pouvait l’exiber. Le sinthome comme mode jouir pour qualifier ce autour de quoi gravitent

désir, fantasme et satisfaction.

Qu’est ce qui apparaissait de son mode de jouir ?

Son mode de jouir se mettait en scene par choquer l’autre, le scandaliser.

Daphné Raynaud Dafpsy qu’est ce qui apparaissait de son mode de jouir? Ds son rapport a k’autre son mode de jouir: choquer, le sidérer

Luc Garcia Timecerise Pousser l’autre dans ses derniers retranchement. ça peut passer par accueillir ses premiers, pates de velours

Daphné Raynaud Dafpsy le pousser ds ses derniers retranchements

Luc Garcia Timecerise La pate de velour etait ostentatoire. Courtoisie si extreme qu’elle etait inquietante. Une delicatesse même soulignée.

Daphné Raynaud Dafpsy une delicatesse elle meme soulignee, une fois l’oiseau ds sa cage… Alors arrivé au dernier retranchement…

l’interpretation qui debusque ds le discours de l’autre son je ne veux pas dire

dejouer la defense de l’autre, la defense en deça du refoulement, pas au niveau du signifiant avec lacan

Cécile Favreau midite @dafpsy @timecerise Vos tweets sont copiés-collés au fur et à mesure sur midite’s blog!

Daphné Raynaud Dafpsy mode de jouir pour lacan (defense chez freud)

cette operation: prendre l’autre un par un et non pas ds le grand nombre, on ne peut pas fzire ça avec une multitude

Luc Garcia Timecerise Prise de l’autre au un par un, on ne peut faire ça, ce forçage, avec une multitude. Lacan n’a nullement joui d’etre chef d’Ecole, à 63 ans

C’est son mode de jouir à lui qui a ete force.

L’iPa, sortie de la cuisse de Freud, avait prononcé une censure à sa déviance. Lacan fut précipité en position de chef d’école.

Daphné Raynaud Dafpsy En 1951 il est enseignant à la demande de ses analysants

il prend pas sa vie pour un destin

le sort commun (enseignant)

il faut admettre le caractère hasardeux, le sort commun. La vie se déroule ds le registre de la contingence.

Luc Garcia Timecerise son mode de jouir n’indiquait pas qu’il était pour enseigner. Caractère hasardeux dont c’est le sort commun.

Daphné Raynaud Dafpsy un acte ds une vie prend valeur de réel

Luc Garcia Timecerise Un acte, c’est ce qui dans une vie prend valeur de réel par rapport à quoi la vie s’ordonne, avec conséquence inattendue

Daphné Raynaud Dafpsy il n’avait fait que se laisser traverser par des forces qui le dépassaient et qui l’ont mis a sa place

Luc Garcia Timecerise Il a pu dire qu’il n’avait pu que se faire traverser. Il a tenu la rampe et a tenu la corde. De contingence est sortie necessité.

Luc Garcia Timecerise Le mode de jouir n’apparaît pas lié à la multitude. La direction d’Ecole n’était pas son sinthome.

Daphné Raynaud Dafpsy il a tjrs eu le même recul romantique que baudelaire meme si il dit qu il ne faut pas céder a cette rêverie romantique

Luc Garcia Timecerise Même recul par rapport au nombre que celui romantique de Baudelaire. Chez Lacan un aristocratisme confinant à l’unicité.

Daphné Raynaud Dafpsy la loi du coeur: un moment de la subjectivité, un tout seul se dresse contre l’ordre du monde

Luc Garcia Timecerise Figure de la loi du coeur, de Hegel, le moment de l’exception, lorsqu’un tout seul se dresse contre l’ordre du monde. Figure malheureuse.

Daphné Raynaud Dafpsy seul contre tous

son mode de jouir est plus sollicite par le nombre, l’enseignement, le dirigé

Luc Garcia Timecerise celle du seul contre tous. A y tomber on n’échappe pas au contrecoup social. Son mode de jouir est là sollicité.

Daphné Raynaud Dafpsy démontrer a tous son unicité

Luc Garcia Timecerise Le sinthome de Lacan consonne avec le seul contre tous. Passion, partagée avec Alceste de montrer son unicité, dans l’isolement de la victime

Daphné Raynaud il a su se garder des contre-coups sociaux et ainsi ne pas faire trop de vague

Luc Garcia Timecerise Il a su s’en protéger, des contre coups sociaux. Applaudissements.

Daphné Raynaud Dafpsy Qui nous fait un massage à la main!!!! J’en peux plus!!!! Whaooo

Dafpsy @Timecerise t’es un chef toi!!!

Notes:
  1. Qui a des sentiments noble généreux, qui pardonne. []

Le sujet est heureux et il ne s’en aperçoit pas,

[ 25 mars 2010 / 30 mars 2010 ]

en raison de son attachement à des idéaux, à des images idéales. La cure analytique a pour effet de détacher le sujet de ces idéaux, elle lui permet de prendre ses distances tant à l’endroit du moi idéal, c’est-à-dire de l’image exaltée de sa personne, de sa puissance, éventuellement incarnée par un autre, que de l’Idéal du moi et des valeurs qui situent sa position. Une analyse conduit le sujet à donner la préférence à la jouissance sur l’idéal.

J’explique que le résultat d’une analyse est de donner le pas à petit a sur l’Idéal,

et donc l’Idéal est plus petit que l’objet a. Le sujet est conduit à donner la préférence, la dominance à l’objet a, sur l’Idéal. Tout le monde pense qu’il s’agit de donner le pas à l’Idéal parce qu’il a un grand I majuscule, pas du tout, c’est le petit, ça traduit une certaine inversion.

La prévalence de l’objet a, de la jouissance sur l’Idéal,

qui est un effet de la cure analytique, marque la société contemporaine, c’est sans doute une contribution de la psychanalyse à la société contemporaine ; en tout cas c’est ce qui fait que la psychanalyse est homogène à la société contemporaine.

La masturbation de Diogène, masturbation publique, avait une valeur subversive,

celle de montrer que ce qui compte, c’est la jouissance, pure et simple, et qu’on ne peut pas faire mieux comme monstration que l’Autre n’existe pas. L’Autre n’existe pas, en tout cas je n’en ai pas besoin. L’usage non copulatoire du phallus à des fins de jouissance solitaire est l’envers de la sublimation, laquelle suppose au contraire que l’Autre apprécie, reconnaisse, jouisse de ce que vous avez à lui présenter comme objet, production. Les analystes se répartissent entre cynisme et sublimation, les uns situant la fin de l’analyse sur le versant cynique, d’autres sur le versant sublimatoire. La sublimation introduit la fonction de la jouissance de l’Autre, alors que Diogène démontre que la seule véritable ou réelle est la jouissance du corps propre.

L’incidence politique dont il s’agirait pour le psychanalyste,

si elle peut se définir comme subversive, subversive des idéaux sociaux, n’est en tous les cas pas progressiste. L’idée qu’il n’y a pas de mieux, qu’il y a toujours une part perdue et donc si on gagne quelque part on perd sur un autre tableau, pas de progressisme.

Il y a beaucoup de considérations de la politique de Lacan au sens de la politique générale,

qui s’inscrivent dans l’ordre de la protestation romantique contre l’esprit bourgeois, et même contre l’esprit des lumières, puisque c’est avec les lumières que s’est faite la promotion des valeurs knave, la promotion des valeurs du commerce, de l’échange jusqu’à « l’enrichissez-vous ! » de Guizot, le libéralisme, le laisser faire, le culte du marché. Il y a eu une protestation romantique contre cette tendance du monde contemporain.

Le knave, c’est le coquin, le valet,

ce sont les termes que l’on retrouve chez Stendhal pour qualifier les excès de la Monarchie de Juillet, si vous relisez Lucien Leeuwen, ce sont des mots stendhaliens pour qualifier ceux qui défendent les intérêts en place, ceux qui se vouent à la défense de l’ordre du monde et des privilèges. Ceux-là se moquent du fool en lui montrant qu’en faisant l’ange, il fait la bête, alors qu’eux préfèrent faire la bête tout de suite. Eux ont le savoir que plus ça change, plus c’est la même chose, donc qu’il ne vaut pas la peine de rien changer, puisque ce ne sera jamais que reproduire du même. C’est une position vile, sans noblesse, ignoble au sens propre.

Lacan, ce qui le distingue de la protestation romantique,

c’est son absence radicale de nostalgie pour les traditions perdues. Et il se distingue par son adhésion à l’esprit des lumières, qu’il mentionnait dans la prière d’insérer des Écrits.

Oui, le père est un semblant, oui on peut s’en passer, oui la psychanalyse n’est pas une religion du père,

on peut s’en passer mais « à condition de s’en servir ». Ce principe vaut pour tous les semblants sociaux, on peut s’en passer, on ne vous demande pas d’ adhérer, mais à condition de s’en servir dans l’ordre politique. Cela définit un cynisme à la Voltaire, qui laissait entendre que Dieu est une invention bien nécessaire à maintenir les hommes dans la bienséance.

C’est une thèse, politique, que la société tient par ses semblants, ce qui veut dire : pas de société sans refoulement, sans identifications, et surtout sans routine ((curieux, non, ce choix du mot de “routine” ? )) . La routine est essentielle. La terre fondamentale qui fonde la politique de Lacan, c’est la disjonction du signifiant et du signifié. On ne saurait pas ce que veut dire quoi que ce soit s’il n’y avait pas une communauté ayant ses routines pour montrer la voie. C’est ce que Lacan énonce dans Encore. C’est la routine qui fait que le signifié garde le même sens. Ce sont nos préjugés qui nous font une assiette, nous permettent de nous tenir. ((ou voilà pq qd tu remets trop et si souvent en cause mes préjugés, je ne me tiens plus… ))

Et puisqu’il y a des semblants, choisissons les meilleurs pour vivre et laisser vivre.

Donc, tolérance, live and let live, ou pour le dire avec Virgile Trahit sua quemque voluptas, choisir les semblants qui permettent à chacun de jouir à la façon qui lui convient sans trop déranger le voisin.

Extraits de La Conférence de Nîmes par  Jacques-Alain Miller

comme il m’a semblé hier au cours de jacques-alain miller

[ 1 avril 2010 / 20 juillet 2010 ]

qu’il préférait que son cours de cette année ne soit pas diffusé sur internet , et comme il me l’a d’ailleurs confirmé par email,  j’ai retiré les notes de cours que j’avais publiées ici et ne continuerai plus à les publier. j’ai cru comprendre également que ce cours fera l’objet d’une publication ultérieure, par ses bons soins…

lacan-le-séparé (mercredi 31 mars 2010)

[ 3 avril 2010 / 23 mars 2012 ]
Je me disais cette semaine que c’était sans doute une chance que Lacan n’ait pas joué dans sa vie à l’homme bon et qu’il ait affiché au contraire une certaine dureté de cœur ; qu’il ait pu déclarer qu’il n’avait pas de bonnes intentions ; qu’il ait volontiers paradé comme un être d’exception.En somme il n’a pas payé ce que, dans un autre contexte, j’appelai l’impôt hypocrisie, celui qui est réclamé par la société, par l’ordre collectif. Il n’a pas ménagé les apparences, les semblants. Par exemple il ne s’est pas gêné dans ses textes dits théoriques, comme dans son Séminaire, à prendre à partie ses adversaires. Il les a moqué cruellement, piétinés, voire injuriés. Il n’avait pas de bonnes manières. Et si cela lui a valu une certaine considération, fondée sur la crainte de ce qu’il pourrait rétorquer, autrement dit on s’est tenu à carreaux, cela n’a pas été sans le confiner dans un certain isolement, un splendide isolement, comme on a pu dire d’un certain pays, à l’intérieur de ce qu’il est convenu de nommer la « République des Lettre », à laquelle il se prévalait de ne pas appartenir.

C’est le sens effectif de son rappel constant qu’il s’adressait aux psychanalystes, à entendre pas aux hommes de lettres qui de ce fait même, de son vivant au moins, et à partir d’une certaine date où il est sorti de l’hôpital – Sainte -Anne pour ne pas le nommer – pour venir à l’École normale supérieure, dans une salle ouverte où il a gagné une exposition publique pour son discours dont les ondes sont parvenues jusqu’au fond, de la communauté supposée des penseurs et des écrivants pour lesquels il a représenté une menace, une inquiétude, un souci. Le tout, je le souligne parce qu’on lui impute depuis sa mort d’avoir régné, le tout sans l’aide de ce qu’on appelle les médias.

À ma connaissance, Lacan a fait une fois la couverture d’un magazine, c’était dans les années 50 au moment où il s’était extrait de la Société psychanalytique de Paris, où prenait son essor la Nouvelle société française de psychanalyse où il voisinait avec quelques autres noms et à cette date, en effet, on lui concéda cette place en raison de certaines affinités de réseaux.

C’était, pour le nommer, L’Express de Jean-Jacques Servan-Schreiber et de Françoise Giroud où il avait ses entrées au point que lorsque ce couple qui animait cet organe de presse se sépara , ladite Françoise Giroud, comme elle l’a elle -même rapporté dans des Mémoires, vint trouver Lacan comme analyste ; plus exactement c’est lui, qui, informé de son désarroi de femme abandonnée , vint la repêcher et l’a rétablie, l’a remise sur pieds – au témoignage de ladite  – grâce aux séances auxquelles elle se prêta pendant quelque temps.

Mais enfin, ensuite, à ma connaissance toujours, Lacan n’eut pas la faveur du peuple médiatique. La sortie de ses Écrits fit quelques remous mais le contre l’emporta beaucoup sur le pour. Et lorsqu’il fut question d’une émission de télévision,dontnous avons le reste dans l’écrit qui porte ce titre , et où j’étais, moi, dans la position d’intervieweur, si ça fut diffusé sur les antennes, c’est à la suite d’un sévère bras de fer avec les responsables de la télévision française.

Hormis ces épisodes, on peut dire qu’on ne dérangea point Lacan dans la discrétion où il se maintenait. Et, en dépit de sa notoriété, je ne vois pas d’objection à le reconnaître dans le portrait qu’il fait du psychanalyste en saint, en saint selon Baltasar Gracián, à savoir quelqu’un qui ne fait pas de vague.

Lacan a fait sans doute quelques vagues dans la psychanalyse . Mais en regard de la puissance qu’auraient pu prendre ces vagues, la puissance d’ouragan dont il était, si je puis dire gros, il s’en est vraiment tenu au minimum.

Mais enfin il n’a pas ménagé les semblants d’hypocrisie sociale ; il a levé le drapeau du sans pareil, et c’est ainsi qu’il a lui-même ouvert la voie à la diffamation de sa personne. Je lui attribue cette responsabilité et je dis qu’après tout, c’est sans doute une chance.

Je le dis parce que j’ai été amené cette semaine à penser à ce qui fut le destin de Freud, et à le comparer. On pourrait faire ça d’ailleurs plus systématiquement.

J’évoquais, pour commencer cette année, les Vies de Plutarque, qui sont des vies parallèles. S’il y avait un parallèle à faire concernant la vie de Lacan , ce serait évidemment avec Freud et de Freud, il en est allé différemment.

Freud n’a pas reculé à se dire sans pareil dans son rapport à la psychanalyse. Et lui a marqué la plus grande vigilance à l’endroit de ce qu’il tenait pour des déviations de l’orientation qu’il donnait à la pratique qu’il avait inventée.

Il a assumé , d’une façon classique mais radicale, la charge de chef d’École. C’est-à-dire qu’il est allé à favoriser l’émergence d’une orthodoxie, il l’a organisé sous la forme d’une association internationale dont il attendait qu’elle dise, après lui, le vrai sur la psychanalyse, chose à quoi Lacan n’a pas le moins du monde prêté.

Et pour qu’on ne s’y trompe pas, son dernier acte a été de dissoudre son École. Il y en a eu un surgeon,une fois qu’il a eu raison de l’École freudienne de Paris qu’il avait porté sur les fonds baptismaux en 1964, qu’il prêta la main à l’École de la cause freudienne – oui, certes en gardant ses distances, en disant qu’il l’adoptait. C’était dire que ça n’était pas la sienne comme la précédente et il n’eut l’occasion de la présider qu’unpeu moins d’une année.

On ne peut pas dire qu’il ait, comme Freud, songé à se perpétuer sur le mode du collectif. Freud qui, en effet, se présente lui aussi comme sans pareil, a toujours maintenu dans ses écrits, à la différence de ce que fera Lacan, ce que j’appellerai un ton de bonne compagnie.

Affichant sa modestie à l’endroit des faits, si pré cis qu’il ait été dans la critique des déviations, si on compare ce qu’il en est chez Lacan , on ne peut pas se défendre de trouver la manière de Freud certes parfois tranchante, aussi, mais un rien douce reuse. Et on doit constater que , progressivement, les honneurs ont afflué vers Freud : les prix, la reconnaissance internationale : rien de tel avec Lacan. Il fut vierge de tout prix et toujours environné d’une certaine suspicion, jamais tenu pour être de bonne compagnie.

Freud s’est trouvé de façon insistante et ample peint comme une sorte de saint laïc, pas un saint à la mode de Baltasar Gracián, mais un saint de vitrail, même si ce sont surtout les protestants anglo-saxons qui se sont attachés à le peindre ainsi.

La biographie autorisée d’Ernst Jones n’a pu s’écrire, évidemment, qu’au prix de passer sous silence un certain nombre de données afin de présenter un Freud impeccable, d’une moralité irréprochable.

Ne jugeons pas, c’était sans doute la condition pour que la psychanalyse puisse se répandre aux États-Unis d’Amérique comme elle l’a fait après la Seconde guerre mondiale. Sans doute ne pouvait-elle le faire qu’au prix d’une simplification et d’une déviation , au gré de Lacan, de la doctrine freudienne et aussi d’une imagerie pieuse qui a été abondamment répandue.

Je n’arrive pas à me défendre de l’idée que cette idéalisation de la figure de Freud répondait à son vœu. Cette idéalisation a entraîné , inévitablement, logiquement, des contrecoups agressifs et depuis plusieurs décennies ; maintenant il y a une meute qui scrute chaque jour de la vie de Freud, chaque histoire de cas, chaque lettre de sa correspondance, chaque rêve de la Traumdentung, pour révéler la vilenie du personnage.

Ça a déclenché tout un effort pour le peindre comme un sale type qui dupa son monde. J’évoque ça parce que vous verrez prochainement que ça a des surgeons français.

Je ne vous dis pas d’acheter l’ouvrage en question, qui est extrêmement ennuyeux et qui ne vaut pas tripette, mais je vous signale en passant que, paraît-il, vous en trouverez des extraits dans un magazine qui s’appelle Le Point et qui sera en vente non pas demain mais le jeudi suivant.

C’est un organe qui publie parfois ma prose -je dois dire je le fais à titre de délassement -et vous trouverez normalement dans ce numéro le commentaire rapide que j’ai apporté à cette fantaisie burlesque qui dépasse les limites du bon sens bien qu’elle prétende être écrite au nom du sens commun et de ce que l’auteur appelle de façon ineffable la « raison raisonnable et résonnante ». Il faut bien constater que cette référence ne le met pas en mesure d’avoir la moindre idée de ce que peut être l’inconscient freudien et encore moins l’expérience qui s’en déprend.

Lacan, lui, n’a rien fait dans le sens de cette idéalisation de sa personne. Et, pour le dire dans les termes qu’il a lui-même élaboré s, on ne le voit pas du tout aspirerà la position dite de grand I, d’Idéal du moi. Au contraire, il a plutôt trouvé à se repérer, à repérer sa position sur l’écriture que nous lui devons de petit a.

Il a conçu son destin comme celui d’une pierre de rebut, et c’est de cette pierre de rebut qu’il a fait précisément une pierre d’angle, le soutènement de son discours.

Si j’avais à chercher à le qualifier sur le mode où il qualifie James Joyce, en s’inspirant des formules du type Jésus la caille, ce qu’il nous faut transcrire pour Joyce le sinthome, je dirai pour Lacan, enfin aujourd’hui -je dis aujourd’hui parce que je pense à ça au fur et à mesure, je peux le dire d’une semaine sur l’autre, c’est pourquoi, d’ailleurs, j’ai demandé que ces propos que je vous tiens ne passent pas direct sur Internet parce que tout ça est potentiellement explosif et je ne tiens pas à ce que ça fasse des vagues, je tiens à pouvoir continuer tranquille.

Donc, aujourd ‘hui, dans cette veine, ce qui me vient, c’est Lacan le séparé. C’est que, en Lacan, le sans pareil a viré au séparé . Et ceux qui, reconnus comme des lacaniens, l’ont suivi et le suivent encore aujourd’hui dans cette séparation.

Songeons à ce signifiant, ce mot que Lacan a lâché lorsqu’il est revenu à enseigner. Il y a en effet un Lacan reborn, une renaissance de Lacan en janvier 1964, ayant mis fin à son Séminaire , il y a une fin. Après le Séminaire de L’Angoisse , il a entamé le suivant sur Le Nom du père, il a donné la première leçon, que j’ai publiée, et il annonce ensuite que ce séminaire , il ne le fera pas, en raison précisément de ce qu’il appellera au mois de janvier suivant son excommunication .

Ce signifiant, il faut dire a marqué,a roulé et Lacan ne l’a pas lâché au hasard , faisons-lui cette confiance. Ce signifiant met en évidence ce que j’appelai Lacan le séparé .

Et sa notoriété grandissante, dans les années qui ont suivi, n’a pas effacé les traces de cette séparation d’abord d’avec la communauté internationale des psychanalystes.

Et, au fond, la scansion était forte à la fin de l’année 63 , et donc il faut accorder tout son poids à ce signifiant majeur que Lacan amène lorsqu’il renoue le fil mais après une coupure et dans cette excommunication s’exprime la vérité de sa position, si elle est bien celle que j’ai reconnue la dernière fois dans cette mention des enfants perdus de la culture chrétienne.

L’écho est immédiat avec cette excommunication , même si elle concerne dans l’exemple que Lacan prend, un juif, Spinoza. Spinoza dont nous savons qu’il fut une passion du jeune adolescent et dont le nom revient aussi bien au début de la thèse de psychiatrie de Lacan puisqu’elle s’inaugure par une citation de Spinoza et pas n’importe laquelle.

Donc j’ai dit que Lacan a admis, a consenti à cette vérité de sa position subjective d’être en rupture de ban, exclu du collectif. Et ce qu’il en fait aussitôt, dans ce Séminaire qui débute en janvier 64, c’est ceci : il s’inscrit en faux contre le tropisme religieu x de la psychanalyse.

Le fait d’être excommunié, selon son expression , lui fait apercevoir ce qu’a de religieux l’organisation internationale de l’orthodoxie voulue par Freud et lui fait mettre en question le désir de Freud.

Le Séminaire des Quatre concepts fondamentaux -relisez-le dans cette optique -c’est une identification, une isolation du désir de Freud et la dénonciation dans le désir de Freud d’un culte du père.

En toutes lettres, Lacan, dans ce Séminaire , le Séminaire de sa renaissance, ce Séminaire où il a rejoint – c’est mon hypothèse -la vérité de sa position subjective, ce Séminaire promet une nouvelle alliance avec la découverte de Freud , une nouvelle façon de prendre la psychanalyse.

Et cela se marquera de façon évidente dans la marche même de son Séminaire à partir de là ; les Séminaires précédents, les dix premiers, et on peut y ajouter ceux qui n’ont pas été recueillis, les deux qui eurent lieu en 51 et 52 sur l’Homme aux loups et sur l’Homme aux rats, si je ne me trompe, étaient consacré s à des écrits de Freud.

Le Séminaire était annoncé comme commentaire de textes freudien s. À partir de 1964, ce n’est plus le cas, ça n’est pas toujours apparent mais parfois oui, parfois non, mais chacun de ses Séminaires,en fait,annonce,met à l’affiche un ou deux textes de Freud dont Lacan ne donne pas le commentaire littéral mais qui sont là à supporter ses élaborations et souvent ce que Lacan énonce s’éclaire en revenant aux textes de Freud et on s’aperçoit de la formule freudienne que Lacan glose, amplifie, et dont il fait voir des aspects méconnus.

À partir de 64 , ce n’est plus le cas. En 64, il donne une sorte de panorama, de condensé , en quatre concepts, de la pensée de Freud . Il donne ce condensé en termes éminemment lacaniens et puis plus jamais nous n’aurons le même type de référence à Freud. C’est, au contraire, les éléments de sa propre construction que Lacan met à l’affiche pour les reconsidérer dans son Séminaire.

Et donc, en même temps qu’il rejoint la séparation, qu’il l’assume et qu’il repart à zéro, puisqu’il estime que rien de ce qu’il a fait jusqu’alors ne doit lui mériter l’attention de ses auditeurs, mais que c’est ce qu’il développera à partir d’alors qui pourra fonder sa compétence , c’est dans la performance actuelle qu’il fondera sa compétence.

Donc c’est un départ à zéro et qui est évidemment une prise de distance par rapport à Freud, une interprétation du désir de Freud, même si Lacan dira plus tard, précisément dans sa Télévision qu’il n’est pas question d’analyser Freud.

Mais les démentis de Lacan doivent être entendus à leur place. C’est que lui-même s’est beaucoup avancé dans cet ordre non pas anecdotique -il ne s’est pas occupé de savoir par quelle voie Freud rejoignait éventuellement sa belle-sœur en catimini -aujourd’hui on nous fait le plan de la maison pour nous expliquer comment il s’y prenait ; il faut bien dire, ce qui n’indigne personne ­mais en scrutant les énoncés de Freud.

C’est l’occasion de s’apercevoir que cette distance travaille l’enseignement de Lacan d’emblée.

La métaphore paternelle, certes, c’est la traduction du complexe d’Œdipe et une traduction extraordinairement efficace qui met en place de façon extrêmement économique les propos de Freud à ce sujet ; c’est une traduction en terme s signifiants, et on a, à l’époque , trouvé sensationnelle cette reconfiguration linguistique de l’Œdipe et l’expression de signifiant du Nom du père qui portait ces échos dans toute la tradition judéo-chrétienne.

Mais peut-être faut-il s’apercevoir déjà ce qui avait déjà là, et que l’essentiel n’était peut-être pas, du point où nous en sommes maintenant, il me semble que ça peut se dire , le signifiant mais bien plutôt la notion de fonction à entendre dans un sens sinon mathématique mais, disons, para­mathématique, comme Lacan l’utilise à l’occasion dans son texte de « l’Instance de la lettre » où figure la formule de la métaphore avant qu ’il ne l’ait utilisée aux fins de retraduire le complexe d’Œdipe.

Qu’est-ce que c’est qu’une fonction ?

Une fonction suppose un ensemb le de départ, appelons-le « x » et des éléments que nous garderons quelconques en leur mettant, en leur assimilant la lettre petit « x ». Et une fonction , c’est le nom d’une opération qui s’empare d’un de ces éléments « x », quelconque et l’associe à une valeur y d’un second ensemble de telle sorte qu’on puisse écrire « f de x égale y ».

XY

f

 

 

f (x) = y

Et donc sélectionne : disons que la fonction sélectionne une certaine valeur dans l’ensemble « y » et on appelle cet élément « y » l’image de la fonction « f de x».

Qu’est-ce que j’ai à transformer pour faire de cette fonction une fonction au sens de Lacan ? J’ai à dire que l’élément valeur se transcrit pour Lacan comme un résultat, comme un effet et, en l’occurrence, comme un effet métaphorique.

Cet effet métaphorique, quand il s’agit de la fonction du père , cet effet métaphorique, on peut dire , est toujours le même. Il consiste dans, disons, le refoulement du désir de la mère.

DM

Ce qui qualifie la fonction du père, c’est d’avoir cet effet-là, ce qui peut nous conduire à écrire plutôt qu’un signe égal une flèche pour désigner l’effet.

 

 

f (x) =y

DM

Mais l’important, ce que je souligne maintenant, c’est que l’usage même du terme de fonction comporte que l’élément « x » soit quelconque dans cet ensemble.

Quelconque veut dire, en l’occurrence, qu’il n’est pas nécessairement attaché à ce qu’on appelle le père . La scission essentielle, telle que je peux le dire aujourd’hui, ça n’est pas celle qui transforme le père en Nom du père, en signifiant, c’est que cette transformation ouvre à la désignation du père comme fonction et que la fonction paternelle peut être assurée, c’est-à-dire avoir le même effet « y » de répression de ce qu’on appelle ici le Désir de la mère et qu’à d’autres occasions on appellera la jouissance, peut avoir le même effet en s’emparant d’éléments « x » différents du Nom du père.

Et donc le seul fait de retranscrire le complexe d’Œdipe en termes de métaphore paternelle dégage comme telle la fonction paternelle et ouvre le champ où cette fonction peut parfaitement opérer avec d’autres éléments que le Nom du père de la tradition.

Cette formalisation est déjà grosse de ce que nous appelons la seconde clinique de Lacan, qui est en fait déjà autorisée par ce schéma.

D’autres éléments que le Nom du père peuvent venir en position de satisfaire à l’opération dite fonction paternelle.

Et comment est-ce que ça ne serait pas déjà dans la perspective ou l’horizon de Lacan, alors que, dans son texte des Complexes familiaux, de 1938, il signalait, comme je l’ai jadis souligné, le déclin de l’imago paternel.

Au fond, d’emblée, et je crois pouvoir dire , dès cette date, Lacan anticipait ce que nous voyons opérant aujourd’hui, ce que nous voyons, ce qui se manifeste aujourd’hui, à savoir que, pour un sujet, d’autres éléments que le Nom du père peuvent fonctionner qui lui permettentde constituer son nom.

Et pour ce qui est de l’anticipation de Lacan , de ce qui dé jà chez lui travaille à côté du chemin tracé par le désir de Freud, il y a sous une forme encore équivoque mais déjà en 38, la mise en cause de la prévalence du principe mâle qui, à l’époque, encore a une prégnance qu’il a depuis perdue ; songeons qu’au moins en France, à cette date , le droit de vote n’est pas reconnu aux femmes par exemple et elles n’ont pas accès à un certain nombre de droits, sinon via la puissance maritale.

Eh bien à cette date déjà, Lacan s’intéresse à ce qui pourrait renverser la prévalence du principe mâle. Il explique que la préférence qui est donnée dans la société à ce principe mâle a pour envers ce qu’il appelle l’occultation du principe féminin sous l’idéal masculin et il évoque la possibilité que le poids même de ses superstructures pourrait venir à en renverser la barre.

Il dessine donc une inversion où le principe féminin, comme il s’exprime, pourrait se trouver venir à prendre le pas sur l’idéal masculin. Et il donne donc une grande place, juste avant la Deuxième guerre mondiale -à ce qu’il appelle dans les termes de l’époque et dans les termes d’Adler après tout, la protestation virile de la femme où il voit comme la conséquence ultime du complexe d’Œdipe .

Alors, soyons honnêtes, il investit cette considération avant tout dans une clinique de l’homosexualité. Il ne l’évoque pas, au moins clairement, au niveau de la société mais ça dessine tout de même comme un pressentiment d’une certaine féminisation des valeurs culturelles qui s’imposent dans les sociétés développées du XXIe siècle.

Et de plus, contre Freud , à partir de Freud mais contre Freud , contre le désir de Freud, Lacan est celui qui procédera à une déoccultation du principe féminin. Il le fera essentiellement en terme de fonction, non pas de fonction paternelle mais de fonction phallique et en montrant que la même fonction phallique structure deux valeurs de jouissance distinctes, que s’agissant de phi, la même fonction phallique sélectionne non pas toujours le même «y» mais au fond deux «y» distincts c’est-à-dire deux valeurs de jouissance distincte s, ce qui demande d’insérer la fonction phallique dans une proposition quantifiée c’est-à-dire où il y a les quanteurs universels et le quanteur existant.

X Y

f

 

 (x)

Donc je peux m’appuyer là-dessus ; simplement, c’est un excursus pour revenir à ceci que l’effort de Lacan, aussi bien concernant le père, la fonction paternelle, que le phallus, la fonction phallique, introduit de la logique dans la jouissance.

Je dirais que cette introduction de la logique dans la problématique de l’Œdipe comme dans la problématique sexuelle, on ne peut pas s’empêcher de dire, à partir du moment où on prend la perspective Vie de Lacan, qu’elle procède de cette prédilection adolescente pour Spinoza parce que Spinoza et précisément le Spinoza du Livre III de L’Éthique, Spinoza , en effet, procède selon l’ordre de la démonstration qui est pour lui l’ordre géométrique parce que le seul exemple à sa portée alors de la démonstration rigoureuse , c’est Euclide.

Mais on peut dire que ça n’est pas une entière nouveauté que de procéder logiquement concernant ce que j’appellerai rapidement le domaine théologique. Ce qui est vraiment un effort saisissant et inédit, dont je suppose que c’est celui-là qui a retenu le jeune Lacan, c’est qu’il y procède dans la vie affective. Et je crois qu’on en a l’écho au début de la thèse de Lacan sur la paranoïa puisqu’il choisit de mettre en exergue une proposition de Spinoza qui est extraite du Livre III de L’Éthique qui est consacré aux affects, à la vie affective, et c’est même la proposition terminale de ce Livre III.

Je peux vous en donner la traduction en français que propose Pierre Macherey : « Pour chaque individu, un affect quelconque présente une disparité par rapport à celui qu’éprouve un autre individu, dans la même mesure où l’essence de l’un diffère de l’essence de l’autre ».

Ceci mit en tête d’une thèse sur la paranoïa oppose clairement deux singularités. Le verbe important de cette proposition qui est traduit par « présente une disparité », c’est le verbe « disparate », qui n’a pas son équivalent exact en français : « discre pate » qui a donné « discrépense ».

Au fond, ça indique que l’affect de l’un discrepate est séparé, diffère, se distingue, est dispare par rapport à l’affect d’un autre dans la mesure exacte où l’essence de l’un n’a rien à voir avec l’essence de l’autre ; que chaque individu – ne prenons que cela -a son essence à lui et que le rapport de l’un à l’autre est un rapport de discrépense.

Donc ça met l’accent sur quoi ? Sur le fait que les individus -traduisons les sujets – discordent, présentent une disparité essentielle qui ne peut pas être effacée en fonction de leur essence.

Et Macherey, dans son commentaire , note que le verbe se retrouve dans des passages où discrepate renvoie précisément à des situations d’affrontement.

Autrement dit c’est une proposition qu’on pourrait condenser dans la formule : « tu n’es pas mon semblable » ou encore mieux : « tuez mon semblable », avec l’orthographe t­u-e-z et on le retrouve dans des passages de Spinoza où il est question, en effet, de guerre et d’extermination.

Évidemment, c’est une citation qui convient spécialement à une thèse sur la paranoïa et qui met en évidence la matrice paranoïaque du stade du miroir et qui implique que cette situation est primordiale et que la concorde ne peut résulter que de la surimposition d’une fonction tierce.

Je veux dire : la singularité implique la discrépense des sujets de telle sorte qu’il faut une référence tierce pour qu’il y ait compossibilité, qu’il y ait communauté. On peut dire que Lacan, dans son premier enseignement ou dans les bases de son enseignement, n’a pas cessé de chercher cette instance tierce .

Il a donné à ça une certaine ordonnance en distinguant le niveau imaginaire de la discrépense des sujets et l’ordre symbolique supposé permet la coexistence.

Il faut bien dire que c’est aussi bien ce qu’il a cherché dans l’apologue du maître et de l’esclave que Kojève avait prélevé chez Hegel, que Lacan a investi dans l’expérience du stade du miroir qui avait déjà été signalé par Darwin et par Henri Wallon et qui a continué de l’accompagner tout au long de son enseignement.

La citation de Spinoza , c’est déjà une invitation -je l’évoquais la dernière fois -à mesurer l’absolue altérité des préoccupations de celui qui passe.

C’est là que s’enracine ce que j’appellerai chez Lacan, donc, sa position de sans pareil dont, au fond, il n’a cessé de chercher comment l’étendre à chacun. Et ce qu’il a appelé la passe, dont il a donné comme une démonstration, qu’il a présentée sous une forme pseudo -mathématisée, encore fidèle à cette filiation spinoziste, la passe traduit son inspiration , son vœu ou son rêve à étendre la position de sans pareil à chacun.

Mais on ne doit pas seulement, me semble-t-il, l’assigner en avant comme un but mais voir que cette position, qui isole chez chacun le sans pareil, est d’une extrême convenance à l’expérience psychanalytique en tant qu’elle met en question, qu’elle ébranle les identifications.

C’est-à-dire que cette expérience fait glisser de «je suis le même»à un « je diffère », « je suis dispare », que cette position de sans pareil nourrit une extrême attention aux détails, parente de celle à quoi invite Freud et qui prépare ce goût que Lacan dit que Clérambault, pour lui, donnait à l’enveloppe formelle du symptôme.

Le choix, Lacan l’a présenté sous une forme théorique en opposant l’aliénation et la séparation précisément. Ce qu’il appelle aliénation, c’est en particulier l’identification qui vous place là où vous assigne le discours de l’Autre, qui vous assigne là où ça parle de vous et qui, par-là même, vous appelle à être comme sujet alors qu’avant vous n’étiez rien, par hypothèse, donc identification constitutive du sujet mais à l’enseigne de l’Autre si je puis dire, où l’appel vient de l’Autre, vient du discours de l’Autre.

Ce que Lacan appelle séparation et que j’ai commenté maintes fois dans son détail que je prends là de plus loin, ce qu’il appelle séparation, eh bien c’est une autre façon d’être , c’est une autre façon de venir à être et qui doit plus son statut au discours de l’Autre.

C’est le sens du jeu de mots qu’il indique quand il présente la séparation à partir du latin séparer c’est separare et il fait varier une lettre et il sépare se et parare ; donc il passe de separare à se parare ce qui veut dire s’engendrer soi-même.

C’est de ce côté -là qu’il indique l’issue. L’aliénation, c’est la réponse à l’appel de l’Autre à être , à ce que le sujet soit, tandis que la séparation du côté de la part perdue, c’est un « s’engendrer soi-même ». D’une certaine façon, ce que j’évoquais de la coupure de 1964 pour Lacan est de cet ordre . Ses dix premiers Séminaire s, ses douze premiers Séminaires, il a été aliéné à Freud, il a répondu à l’appel du discours de Freud, et c’est là qu’il a trouvé sa place, comme sujet de l’énonciation dans la psychanalyse.

Et à partir du moment où il a été rebuté, évincé, chassé, où il est devenu la pierre de rebut du discours de la psychanalyse, dans le moment de l’excommunication, nous avons la séparation de Lacan et aussi l’accent mis sur un certain « s’engendrer soi­même » à partir de ce qu’il se promet d’énoncer cette fois-ci à distance de son enseignementantérieur.

Autrement dit la conséquence ultime de la position de sans pareil telle que Lacan l’articule, elle n’est pas au niveau du signifiant-maître , elle n’est pas au niveau de je ne sais quelle mégalomanie sinon au niveau de l’objet petit a et précisément, l’objet petit a, c’est la conséquence ultime du sans pareil précisément parce qu’à la différence du signifiant, l’objet petit a ne s’articule pas.

Le signifiant s’articule, il s’articule toujours à un autre signifiant tandis qu’il y a toujours un autre, le deux se retrouve et tandis que l’objet petit a ne s’intitule pas mais il choit.

Alors, il ne s’articule pas mais Lacan n’a pas résisté à l’articuler tout de même quand il a promu ses quatre discours et où il a fait tourner quatre éléments. On peut toujours dire : il y a S1, S 2, se sont des signifiants, il y a S barré et c’est quand il n’y a pas de signifiant, c’est la trace de ce qu’il n’y en a pas, et que petit a vient en plus et qu’il est hétérogène.

Mais, évidemment, dans ce schématisme, l’objet petit a est homogénéisé par le fait qu’il tourne avec les trois autres éléments. Et donc je crois que du fait même que Lacan l’a enchâssé , a enchâssé ce terme dans une articulation, il ne pouvait plus répondre à ce qui chez lui est le vœu du sans pareil.

Si j’ai à trouver le dernier nom du sans pareil chez Lacan , je crois que c’est ce qu’il a appelé le sinthome et que le sinthome, c’est ce qu’il a laissé d’une façon saisissable comme, au­delà de l’objet petit a, la conséquence terminale de cette position de sans pareil qui me semble l’avoir animé et qu’il a retrouvée dans ses constructions, singulièrement du côté de la position féminine.

Si Lacan a pu jouer avec sa construction logique de la position féminine , s’il a pu la donner comme exemplaire e t même paradigmatique de la position de l’analyste , c’est dans la mesure où la position féminine lui semblait avoir par excellence le régime de la discrépense et que, alors que la position virile conduit comme naturellement à l’aliénation , la position féminine conduit à la séparation.

Et c’est ainsi que je rend compte de ce moment que j’évoquais la dernière fois où je reconnaissais Lacan se comptant au rang des enfants perdus de la culture chrétienne et que j’annonçai, il fallait bien faire un sort au moment maurrassien de Lacan.

J’ai depuis lors relu la référence unique que nous en avons par écrit et qui est donc la lettre de la seconde épouse du fils d’Alphonse Daudet, Mada me Léon Daudet, qui signe de son surnom, Pamp ille, à Charles Maurras, en 1924 , et qui nous présente le jeune Lacan ; il a 23 ans, au moment de ce qu’on peut appeler sa révolte bourgeoise ; c’est l’équivalent de ce qui a été pour moi -le moment qui s’est prolongé plus longtemps que pour lui ­mon moment gauchiste.

À cette époque d’ailleurs et trace en a été gardé – je l’évoquerai -il me conseillait à moi qui avait à l’époque, un peu plus âgé de 23 ans, àpeine,Lacan se présentait lui-même , ça m’avait frappé, comme un révolté. Et s’il m’avait épinglé de révolté bourgeois, très clairement, il ne s’en exceptait pas puisqu’il me disait : j’ai moi une autre façon de passer ma révolte. Et il me semble que le moment maurrassien de Lacan, c’est le moment de sa révolte bourgeoise.

Alors on sait par la dame qu’il essaye par elle d’avoir une entrevue avec Charles Maurras, chef de l’Action française. Elle en fait un portrait qui tient en quelques mots mais elle indique qu’il demande ça depuis plusieurs semaines. On imagine l’insistance de Lacan, elle le dit cultivé et intelligent mais elle répète deux fois « présomptueux» et il est sensible qu’il n’a pas de trouble de l’estime de soi (rires) et elle indique qu’il est récemment conquis à nos idées et pense naturellement que son adhésion a une grande importance et qu’il pourra faire beaucoup.

Donc on a ici un jeune homme qui ne doute de rien , qui affiche une certaine puissance, une certaine puissante d’auto-affirmation, et elle indique ça donc -quand je l’ai lu ça m’a tout de suite fait penser à Claudel -je crois qu’il va partir prochainement pour le Sénégal et qu’il interrompt ses études de médecine pour partir pour le Sénégal et il désirerait vivement que vous lui don niez une direction intellectuelle pour la propagande royaliste qu’il veut entreprendre (rires). Voilà la crise de révolte Lacan à 23 ans. Royaliste !

C’est un rêve de Lacan, je ne sais pas s’il a rencontré Maurras, jamais de sa vie il n’a évoqué le nom de Maurras devant moi, je ne crois pas qu’il y en ait la moindre trace écrite ; il n’est jamais partit au Sénégal, à ma connaissance, mais enfin il a dû avoir envie et cette qualité de royaliste , pour moi, s’inscrit dans sa recherche du grand Autre. C’est une figure en quelque sorte pathétique de cette aspiration. D’un côté à défricher des terres vierges, à partir à l’aventure et il passera cette révolte là dans la psychanalyse. Là, il sera à son Sénégal.

Et d’autre part il se livrera à une construction du gra nd Autre qui va bien au-delà de l’adhésion à l’Action française. Notons que ce n’est pas du tout in compatible avec l’état d’enfant perdu de la culture chrétienne, au contraire, puisque Maurras lui-même était athée et que s’il prônait le catholicisme , c’était au titre de gardien de l’ordre social, sans la foi. Ce qui vaudra d’ailleurs à l’Action française d’être excommuniée en 1926. J’emploie le mot « excommuniée », en fait j’ai vérifié que les membres de l’Action française à partir de 1926 ont été interdits de sacrement par Pie XI dans un écrit qui a été retentissant, en tout cas qui a été condamné par le catholicisme et il n’est pas possible que dans l’excommunication de 1964, il y ait eu comme un écho de cette proscription ancienne.

En tout cas l’adhésion momentanée de Lacan au maurrassisme lui vaudra les salutations par écrit du psychanalyste et linguiste Pichon commentant ses Complexes familiaux et disant que Lacan venait du meilleur monde et avait les meilleures idées, qui s’attachent à la Nation et donc il y a eu autour de Lacan cette réputation qui a duré, qu’il pensait bien.

Quel statut donner à ce moment? Heidegger, qui a donné son adhésion au nazisme , et lui qui en a fait énormément dans le genre, et qui a laissé énormément de traces, et qui a beaucoup d’ambition dans cet ordre et qui n’en est revenu que très difficilement, avait eu ce mot charmant pour qualifier ce moment, dans un média allemand, dans une interview au Spiegel, il avait dit que c’était une « bourde » de sa part.

S’agissant de Lacan, il faut constater que c’est une adhésion qui n’a pas laissé d’autres traces que ce billet-là pour l’instant, qu’on ne lui connaît pas d’action dans cet ordre et je suis porté à croire qu’il n’était pas, lui, très enclin à des actions collectives et ça n’a pas laissé, à ma connaissance, d’écrit.

Et donc, si j’ai à l’interpréter, je dirais que c’est la révolte d’un enfant perdu, de quelqu’un qui se pense à cette date comme un enfant perdu, qui d’emblée tout de même rêve de l’exil et peut être foncièrement un exilé ; qu’il se voit déterminé par sa culture chrétienne et qu’il passera du temps à s’en défaire, et qu’on peut le lire dans ses Séminaires même comme encore un effort pour se déprendre de cette culture ; j’y lis aussi un appel à l’Autre sous les espèces évidemment dérisoires du roi de France et aussi ses attaches à une position antimoderne, proprement réactionnaire, dont j’imagine, dont je suis porté à croire que c’est sa postulation vers la

science qui lui permettra de s’en déprendre .

Ce que j’ai ici illustré du nom de Spinoza , c’est la postulation constante de Lacan dans la direction de la science qui, effectivement, représente ­pour le dire au plus simple -l’instance tierce la plus évidente dans la compétition des singularités de discrépense .

Je crois qu’il faut tout de même mettre Maurras, Maurras comme maître oublié et renié , au rang de ces maîtres que Lacan trouvera et que Maurras sera peut-être comme métaphorisé par Clérambault, métaphorisé par Kojève lecteur de Hegel et, après 1945, par Lévi-Strauss et par Jacobson et, évidemment, celui qui sera pour Lacan et pour toute sa vie celui devant qui, même en rechignant, on s’incline, comme s’il lui était nécessaire de reconnaître la primauté d’un Autre, ce maître traqué, maître scruté, maître en partie renié, cet Autre primordial et qui apporte à sa pensée son soutien et ce qu’elle peut supporter de concorde, à savoir Freud.

À la semaine prochaine.

Applaudissements.

Exercice #1 Comment renoncer à sa paranoïa. Quelle façon trouver?

[ 8 avril 2010 / 23 juillet 2010 ]
  • je relis le cours de jacques-alain miller du 17.02 – au moins ce qu’il en ressort, du cours de cette année, c’est que le moi peut être très (je ne trouve pas le mot, sur le bout de la langue) (fécond? productif? prodigue? créateur? inventif?) / c’est vrai que lacan dans mon souvenir lointain, datant de ma lecture, première lecture de lacan, des IV concepts,  le présente d’abord comme qq chose à quoi il faut renoncer / le
  • wo es war soll ich werden // pas sans retour
  • le moi tient à soi (à sa singularité)
  • comme je ne vais pas me mettre à fonder une école
  • et donc, paranoïa, avant d’y renoncer, l’avoir vécue. connue, reconnue.
  • passé de seul à le seul
  • matérialiser son « contre tous »
  • « Ma solitude, c’est justement à quoi je renonçais en fondant l’Ecole »
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[ 14 mai 2010 / 23 juillet 2010 ]

… et c’est précisément parce que le savoir est troué que peuvent venir faire bouchon les noms propres.
extrait cours jam – 12 mai 2010

nom propre : jacques-alain miller, nom propre : jacques lacan,

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