samedi 28 janvier, 9h25

Publié le Catégorisé comme brouillonne de vie Étiqueté , , , ,

9:25 Hier, 3 gouttes + hhc (trop fort)

Dans le noir de la chambre

Étranges pensées cette nuit. Et sentiment de corps délocalisé. Je ne m’en suis pas rendue compte tout de suite, seulement quand j’ai décidé de m’éloigner de mes pensées en me concentrant sur le corps. J’ai découvert que mon corps n’était pas là où je m’attendais qu’il soit. Je l’attribue au HHC.

Je voulais faire l’exercice « lourd ». C’est un exercice qui consiste à penser « lourd », le mot seulement, la mot vide, et à envoyer cette pensée dans le corps, partie par partie, une à une, en essayant de n’en oublier aucune. De le remonter par exemple, depuis les pieds jusqu’à la tête –  les orteils, les pieds, les mollets, les genoux, les cuisses, etc.  Je me suis rendue que je devais « chercher » chacune des parties de corps visées. J’avais en fait voulu commencer par « fesses » et j’ai découvert une sensation très étrange (très ample, très écrasé, d’ores et déjà, étalé, bassine, bassin plutôt débordant). Ce que je faisais était probablement utile, mais je devais déjà me trouver dans un  état de relaxation passablement avancé. Je me suis alors concentrée sur les parties du corps qui touchaient le matelas,  mais quand j’ai voulu trouver le dessus du corps, je ne le trouvais pas, ça ne correspondais pas. Le dessus de la cuisse n’était pas en face de son dessous. Et c’est sans parler de l’intérieur. J’ai continué cependant. En me raccrochant au « tantien », au centre du corps, que je sentais précisément. J’ai essayé soit de retrouver sensation « normale », soit de me laisser aller dans la sensation anormale. Je me suis alors retrouvée avec des pensées assez raisonnables, il me semble.

Je pensais à la solitude, à ma solitude, et je me demandais ce que je pouvais faire. Sans trouver. Je me suis vue, perpétuellementassise dans mon fauteuil, dans mon canapé, mon coin de canapé, et n’en sortant pas. Je me suis demandée ce que je pouvais trouver pour en sortir.
J’ai eu des pensées inquiétantes quant à l’avenir et à la pension, et au fait sur je pourrais me retrouver seule et sans argent et à la rue.
En temps normal, je ne peux penser qu’au suicide comme recours.
J’essayais d’envisager autre chose.

Je pensais à ce qu’il m’est impossible de faire, tout ce qu’il m’est impossible de faire.
Je pensais à ce qu’il m’est impossible de faire parce que j’attendrais de ma mère qu’elle le fasse pour moi (le maintien nécessaire de cette dépendance) et l’angoisse qui me prend dès que je prends son rôle (d’elle qui m’aide). Et la peur de rater.
Cette relation de dépendance est désangoissante pour moi.
Sortir de ce rôle, de ce schéma, c’est l’angoisse.
Il arrive pourtant que j’y arrive.
Mais c’est peut-être plutôt quand F n’est pas là.
Comme lorsqu’il était à la clinique.
Je pensais à l’inhibition, à ce que j’avais lu hier sur la nature inconnue de ce qui mobilise tellement le mélancolique dans son « travail de deuil », travail qui évoque la façon que j’ai de me consacrer à ma maladie. Je me consacre à quelque chose, mais  à quoi ? Qui paraît vital. Or dès que je m’éloigne d’un certain effort, de construction peut-être, comme lors des voyages, alors l’angoisse me prend. La certitude est que je ne dois pas me lâcher, que je dois me maintenir dans un effort, dans l’analyse. Comme ce que  je fais maintenant, en écrivant le matin, ou ce que j’aurais fait si j’avais été artiste.

Être artiste m’aurait offert une identité, et cette identité est inacceptable.
Il s’agirait de trouver son identité à l’intérieur de cette identité manquante, absente, de trouver son identité dans cette quête là. Et dès que je sors de la quête, angoisse.

Mais quel rapport avec ma mère. Et l’identité trouvée dans ma dépendance à elle.
Cette identité la maintient à distance, nous met dans un rapport. Qui vaut mieux que l’absence de rapport, que l’identique, que le même.
Donc, le maintien de ce rapport, de cette dépendance, évoque encore le travail que je dois accomplir, celui décrit plus haut.

Maintenir cette dépendance, afin de n’être pas engloutie par l’identité à elle, l’être elle, qui serait un trou. Puisque la dépendance nous donne un rôle à elle et à moi.
Tout en cherchant à trouver une identité viable qui me permette de sortir de son sillage.

J’élucubre ça maintenant. Mais cette nuit, par rapport au fait que je ne pouvais pas être ma mère et donc faire ce qu’elle faisait, et par rapport au fait qu’elle avait toujours agi  dans le service à l’autre, dans le sacrifice, dans le  mépris de sa propre personne, je pensais que je pouvais sortir de là, peut-être, puisque telle est ma volonté, en poursuivant et consacrant mon travail de restitution de valeur et de dignité aux tâches à raz du réel auxquelles elle se consacrait. C’est-à-dire d’en consacrer la grandeur au contraire de ces tâches.

Et donc d’abandonner l’idée de dés-identification d’une mère, pour se maintenir uniquement à la hauteur du réel.

(Or, ce réel et ses exigences ne vous engloura-t-il tôt ou tard ?)

J’ai déjà écrit ça.
J’ai déjà trouvé cette solution.
L’idée, cette nuit, était de trouver à me dégager de l’angoisse où me plonge n’importe quel faire.
Je n’ai de solution que par ce que j’appelle le réel. De toutes façons. Je n’ai que le raz du réel.
C’est ma limite possible à moi. Ce serait.

Je ne suis pas, jamais, sortie d’une certaine famille. Je n’ai pas grandi. Je suis toujours ramenée en arrière.

Me lever, saluer Jules.

 

Par Iota

- travailleuse de l'ombre

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