une force

14 novembre 2022 | novembre 2022 | brouillonne de vie | , , , , , |

il y a en moi une force qui me pousse à ne pas faire ce que je dois, et qui a dominé toute me vie, à ne pas faire ce que je dois et à me haïr. à me haïr et à me supprimer.
(tentative d’articulation : je ne fais pas ce que je dois pour pouvoir me haïr)
c’est la force la plus insidieuse qui soit, la plus dissimulée.
je ne pense pas qu’elle s’exerce chez les autres de la même façon, ni qu’elle se soit exercée également en moi tout au long de ma vie. elle m’a cependant toujours rattrapée.
je pense que je peux exprimer ceci à l’âge que j’ai, à 59 ans (je pense que cette force-même s’y oppose, et que je suis en cette période en position de force vis-à-vis d’elle. )
tout au long de ma vie, je me serai battue pour mettre en place des stratagèmes divers et variés pour la contrer.
ces stratagèmes n’obéissent à rien de connu (de l’ordre de l’ordre, de la morale ou de la discipline). me semble-t-il. (en fait, je ne sais pas grand chose d’eux, je constate que je suis actuellement arrivée à une forme d’équilibre, de balance.)
quand sa menace se fait trop forte, souvent, me semble-t-il, j’écris. en dernier recours. car écrire entraîne une satisfaction de moi-même que je ne peux pas longtemps maintenir. que mon besoin de haine de moi vient rapidement contrecarrer.
(tout cela aujourd’hui, je le connais. j’écris, je ne pourrai pas écrire longtemps, il va falloir que j’oublie, que j’arrête, je ne vais pas rester dans ce confort, d’être celle qui écrit, je dois juste attendre le moment où,je pourrai y retourner. il n’y a là derrière rien d’autre que cette force d’inertie qui… ne veut pas que je puisse m’identifier à quoi que ce soit. c’est pourquoi aujourd’hui, il est temps que j’arrive à tracer les contours, même en creux, d’une identification, de ce que j’appelle une identification, c »est-à-dire quelque chose de l’ordre d’une forme, même en creux, car, à force de me fréquenter, je peux dire que je le sens finalement : il y en a une, de forme, identifiable.)
je voudrais aussi pouvoir l’écrire d’une écriture qui apprenne à faire place à la légèreté, je tiens à dédramatiser ce qui a pourtant toutes les allures d’un drame.
l’écriture n’est pas le seul stratagème, il y en a d’autres.
ce dont je parle, cette force de la haine de soi, de la haine de moi, des haïsseurs de soi, il m’est arrivé de l’attribuer à une maladie, celle répondant au doux nom de mélancolie.
ce nom est-il nécessaire, cette classification?
ce diagnostic.
ce diagnostic m’a emmenée à pouvoir écrire ce que j’écris ici. il n’a pas expliqué. il ne m’a pas expliqué.
par sa prise en compte d’une mortelle haine de soi, faisant partie de son pathologie, qu’il tirait enfin  dans la lumière.

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maintenant, maintenant, ce matin  sept heures, assise dans le canapé dans la maison endormie, je vais dire des choses étranges. la force derrière cette haine de soi, l’intelligence à l’œuvre, la forme d’intelligence à l’œuvre, qui n’est rien de connu, seulement éprouvé, subi, a quelque chose à voir avec la santé, la santé physique. et l’alimentation. là, commence le délire, j’entends les commentaires. c’est de l’ordre de la conviction, de la certitude. signature de plus du délire. et pourtant.
j’écris ici, rompue, couchée sur le dos, cassée. bien plus cassée physiquement que mentalement.
et convaincue que c’est par l’alimentation que je pourrai me soigner. et l’exercice.
(dos cassé, calculs aux reins, ostéoporose, arthrose, etc.)
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or,
il n’y a pas toujours eu la maladie. physique. mentale, toujours.
il faut donc que je tienne compte de ça. la maladie physique est récente, liée à la d’échéance de l’âge.
longtemps le corps a été plus fort (que les excès).
n’a pas eu sa part dans le débat, s’est tu.
et si c’était maintenant qu’il déchoit, qu’il s’entend, se fait entendre, maintenant qu’il arrive à capter l’attention, qu’il est entendu, répondu.
que ce soit au moment où ses forces déclinent, qu’elles ne sont plus prises comme allant de soi, qu’elles se mettent à exister. ce qu’il en reste. qu’elles ne sont plus « naturelles », négligeables. la force silencieuse à l’œuvre jusque là.
et que ce soit en commençant à faire attention, que j’ai commencé à rentrer dans une forme de dialogue avec mon corps, que j’ai commencé à le soigner, à me soigner.
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faux.
il y a toujours eu mon corps. sa manifestation. son écoute. ses perturbations. moins dans la maladie que dans l’angoisse. sa manifestation dans l’angoisse.
la maladie physique a peut-être servi à mettre des mots, à établir des lois, à détecter des causes et des effets, avec l’effet d’apaisement connu.
d’apaisement de l’angoisse.
//–
alors, mauvaise piste ?
il y a eu le corps haï.
il y a tellement eu le corps haï.
Je l’oubliais.
Je me suis haïe (et adorée) d’abord par le corps.
la mauvaise image, l’outre.
ainsi fut ma jeunesse.
l’outre pleine. l’outre débordante. l’outre à viscéralement haïr. du dedans.
et son image. jamais la bonne, insaisissable. manquante, absente. en moi provoquant l’effroi.
j’écrivais : adorée. y eût-il l’adoration? c’est lacan qui dit ça (l’homme adore parce qu’il croit qu’il l’a).
l’incompréhensible, c’est qu’il y a eu ce sentiment, cette conscience d’être belle. et son contraire. il y a eu ce sentiment de triomphe. étrange, non. oui, de triomphe. de grandeur. de joie, de confort, physique. en particulier, lorsque je marchais dans la rue. de conquête.
(cela arrivait dans les moments de nécessité, où je n’avais pu échapper à une obligation sociale et où il fallait ça pour me faire sortir de chez moi, le rendre possible. je n’en fais pas l’aveu sans honte. mais, sans avoir atteint cet état-là de confiance physique en moi, je ne serais pas sortie. tous les jours il n’en allait pas comme ça. je ne parle pas des sorties usuelles pour l’école ou le boulot. des occasions, je parle. les grandes. est-ce que je dis la vérité? jusqu’à un certain point oui, parce que je me souviens l’avoir déjà analysé, écrit, à un moment où ce sentiment pouvait encore exister. je me souviens de ma grande complicité avec mes jambes, entente, jouissance, joie. et celle de ma taille élevée qu’élevaient encore des talons hauts. mais pour affronter du monde, il fallait ça. aucune simplicité possible. du grand apprêt, harnachement. et alors, flotter.)
//–
c’est que longtemps je n’ai eu de présence au monde possible que par la séduction. d’autre présence, intelligence, vie.
//–
quand la séduction m’a quittée
il a fallu tout réinventer
j’ai dû apprendre à compter sur moi par où je n’avais jamais compté
soulagement à la fois que mort
or quelque chose de la haine de soi s’accomplissait et n’était plus à accomplir en corps.
probablement je suis encore moins sortie dans le monde
tout en le trouvant plus facile
car : invisible, devenue.
//
enfin donc, corps: première matière de la haine de soi.
et aujourd’hui : première matière de la connaissance de soi, de la guérison de soi.
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j’ajoute: il y a eu (à l’aube de la fin du monde, du corps) la pratique du tai chi, la rencontre d’un corps qui ne doive pas se réduire à l’image, qui prenait consistance, corps, vie, via une pratique physique et la connaissance intime de trajets, de circuits que la médecine chinoise y inscrit/lit. une connaissance du dedans, un dessin interne, neutre, de seule circulation, flux, jouissance. une nouvelle géographie, une nouvelle cartographie.
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beaucoup est dit.

retour à la haine de soi.
qui a peut être toujours à voir avec le devoir et le faire.
qui maintient dans le devoir et l’impossible faire (l’impossibilité du fer).
Ça ne sonne pas bien.
ce n’est donc probablement pas juste.
Je vais donc en rester là pour aujourd’hui.

mardi 22 novembre

22 novembre 2022 | novembre 2022 | brouillonne de vie | |

mardi, 8h17, rendez-vous tout à l’heure avec psy.
On m’a volé mon vélo, faut que j’y aille à pied. en même temps, il commence à faire froid. F part ce soir au Japon, ça va faire bizarre, long. première fois qu’il part seul depuis qu’on se connaît. un peu peur qu’il soit empêché de revenir. c’est si loin, il s’est passé tellement de choses dans le monde, avec la pandémie et tout ça.
lui aussi, a peur. dit qu’il déconne quand il est seul. était étonné que je puisse vraiment aimer être seule. je lui disais mon soulagement, quand j’étais seule, sortir de la surveillance.
beaucoup de rêves cette nuit. aucune souvenir.

mercredi 23 novembre

23 novembre 2022 | novembre 2022 | brouillonne de vie | |

7h52
F parti hier soir, sur l’avion maintenant. avons pris verre à côté, zut j’oublie le nom, il a pu prendre des huîtres. ensuite, il s’est décidé à prendre un taxi pour l’aéroport.
il y a un accès WhatsApp dans l’avion !
réveillée il y a peu, il ne dormait pas. là, je crois qu’il va se rendormir.
J’ai pris une Ricoré. j’hésite à lancer une séance de chi. fait-il froid ? j’ai allumé la lumière dans la chambre, eh oui, je suis seule.
8h42 vais tenter chi
3eme cours, du 21 octobre, le petit circuit
11h29
salle d’attente du Dr Ying Yang. au centre une table basse carrée en verre légèrement fumé structurée de tubes métalliques à section carrée et comportant 2 étages, toutes les revues propres à ce genre d’endroit étant posées au rez-de-chaussée et visibles grâce à la transparence du premier, vierge de tout objet. d’où je suis il me semble qu’il s’agit essentiellement de Paris March ayant servi et dont le stock n’était plus renouvelé de longue date (la guerre en Lybie, Johnny en vie). s’y trouve également un guide touristique lonely planet que j’hésite à retourner pour en vérifier le pays d’analyse. L’équateur! il a suffi que je me baisse un peu pour le découvrir. on appelle mon nom.

le jeudi 24 nov. 2022, 10:55

24 novembre 2022 | novembre 2022 | brouillonne de vie | |

10h55
au lit. réveils nocturnes avec mini blablatages avec F à Tokyo. rendormie. réveillée très fatiguée.
là, vais faire leçon 4 de PB, cours du 28 octobre, chi belt et nettoyage.
je veux essayer de rattraper tous les cours.
avant ça, j’ai travaillé une heure pour le site de F.
il va y avoir une lessive à faire, cet aprem.
et téléphoner pour kiné mère, 2 x par semaine !
et essayer de voir quand retour à Brux.
et puis, Noël…
et le cadeau de l’Avent de Rosa-Louise…
acheté du papier hier, grandes feuilles.
pas eu le temps de.
trouver nouvelles lunettes.
vite

Pacifiction – Tourments sur les îles
— (désordre et beauté)

29 novembre 2022 | novembre 2022 | brouillonne de vie | |

mardi 29 nov. 2022, 08:45

ah finalement vu le film que je voulais voir, d’Albert Serra, Pacifiction – Tourments sur les îles, formidable, vraiment, très différent, une horreur dans un lieu paradisiaque, c’est bateau à dire, mais. ah, la France quand même, d’un rance, d’une saloperie, Pacifiction, c’est magistral dans la dénonciation de la perversion, de la perversité du colonialisme, de ce que c’est la main mise sur un pays, sur une population, sur des corps, indigènes, la beauté, ladite nature, la splendeur, le tout bafoué, et ça parle tellement d’aujourd’hui aussi, avec les sous-marins nucléaires cachés partout, les décisions prises on ne sait où, les sacrifices à faire, la bonne conscience. et les minorités silencieuses, les minorités ici très silencieuses (dieu nous garde), comme le sexe finalement, en corps, en peau stp, en couleurs, en plumes même, les oiseaux de feu qui dansent dans les boîtes de nuit sous les approbations discrètes de blancs bon teint lunettes fumées de bleu qui les poussent alors tendrement au meurtre. rendons grâce à la soyeuse obligeance.

c’est fascinant, ça montre et on voit. on assiste. c’est somptueux, on comprend. l’image se montre plus crédible que tous les discours. ne parviennent que des bribes de conversation, ces paroles qui le dépassent d’un homme qui lui aussi assiste, du bout du rouleau, De Roller. (Shanna beauté baisse les yeux, sourit, approuve. elle dit : c’est cool.)

enfin, c’est un film drôle. subtilement méchamment. d’autant qu’on a vu cet été Macron faire du jetski.  les gens rient, ça pouffe malgré soi, en petit hoquets,  ça grince, y a du sable dans les dents. à force de reconnaître. tout ce qui nous déborde et ne cesse de déborder. l’été qu’on a passé, tout le trop chaud, les feux, le silence, avant ça le confinement, les airs de fin de monde. l’attente, la suspension qui n’en finit plus, la suspiscion, le noir. l’état de veille permanent.

(alors bien sûr que à la fin c’est long, cln, c’est la nuit, ça erre, ça tourne, en spirale probablement, ça remonte de très profond, ça sonde, ça voit rien, toujours rien, c’est qu’on n’en n’est toujours pas sorti.)

dans la rue, je voudrais, et que personne ne sache rien de toi
— mardi 29 nov. 2022, 9:42

29 novembre 2022 | novembre 2022 | brouillonne de vie | , , |
je voudrais que tu marches dans la rue seule, vite, qu’il fasse presque froid, que ta bouche s’ouvre un peu, que tu souries malgré toi. un sourire qui ne cesse, qui se perpétue. c’est la rue qui lève ce sourire, c’est ta marche. acquiescement. je voudrais qu’à l’endroit de ton sexe ce soit un peu chaud, un peu douloureux et  que personne ne sache rien de toi. il y a une musique dans ta tête, qui pourrait te tirer des larmes. une musique ancienne. une musique des anges. tu penses soudain à ta mère. tu t’arrêtes. maman. tu te rends compte que tu es essoufflée. le cœur bat la chamade.
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