Que d’ambiguïté dans les choses exaltées. Nous les méprisons un peu. (p. 9)
C’est presque comique le nombre de manières dont on peut se sentir diminué. (p. 25)
le monde à distance d'une lettre
Que d’ambiguïté dans les choses exaltées. Nous les méprisons un peu. (p. 9)
C’est presque comique le nombre de manières dont on peut se sentir diminué. (p. 25)
JE pense que les différents modes d’expression : pose, geste, acte, son, mot, graphisme, création d’objet…, résultent tous d’un même ensemble de mécanismes psycho-physiologiques, qu’ils obéissent tous à une même loi de naissance. L’expression élémentaire, celle qui n’a pas de but communicatif préconçu, est un réflexe. A quel besoin, à quelle impulsion du corps obéit-il ?
Retenons parmi les réflexes provoqués par une rage de dents par exemple, la contraction violente des muscles de la main et des doigts, dont les ongles s’enfoncent dans la peau. Cette main crispée est un foyer artificiel d’excitation, une « dent » virtuelle que détourne en l’attirant, le courant de sang et le courant nerveux du foyer réel de la douleur, afin d’en déprécier l’existence. La douleur de la dent est donc dédoublée aux dépens de la main ; son expression, le « pathos logique », en serait la résultante visible.
Faut-il en conclure que la plus violente comme la plus imperceptible modification réflexive du corps, de la figure, d’un membre, de la langue, d’un muscle, serait ainsi explicable comme tendance à désorienter, à dédoubler une douleur, à créer un centre « virtuel » d’excitation ? Cela est certain et engage à concevoir la continuité désirable de notre vie expressive sous forme d’une suite de transports délibérants qui mènent du malaise à son image. L’expression, avec ce qu’elle comporte de plaisir, est une douleur déplacée, elle est une délivrance.
Je pensais que j’étais bien réveillée, je m’étonnais même de ce que j’étais si bien réveillée. J’ai pensé : « Oui, c’est incroyable, tout va bien, aucune étrange sensation, je sais qui je suis, (donc) je peux monter au premier étage ». Et je montais au premier étage. J’étais toujours au lit, je n’avais pas encore ouvert les yeux, couchée sur le dos. Et le premier étage où je montais se situait à l’intérieur de mon corps. Avec le rez-de-chaussée côté lit, niveau peau, et le premier, à mi-corps, en coupe horizontale à l’intérieur du corps, longue étendue au plafond bas que je voyais s’allonger presque jusques aux pieds. Et je me croyais très bien réveillée.
Avant cela, en rêve, nous vivions près de Marseille, sur la côte, nous avions quitté Paris. J’avais invité Jules à passer quelques moments sur la plage avant l’école sur le temps de midi pour profiter des premiers rayons de soleil de l’année. Nos voisins de Paris étaient là aussi, notre voisine d’étage également venue sur la plage. Je lisais le Elle. Il y avait de plus en plus de monde sur la plage, avec de nombreux paravents, comme sur la mer du nord.
Plus tard, Jean-François ou Jean-Pierre nous rejoignait.
Je venais de dire à l’oreille de quelqu’un, que je pensais être Jules, que là, vraiment, je ne regrettais plus du tout Paris, que j’étais vraiment heureuse d’habiter là. La personne me demandait qui j’étais, en flamand. Je me rendais compte de mon erreur et cherchais Jules pour lui raconter l’anecdote. Je racontais l’histoire à l’oreille et voulais qu’il la redise à Jean-Pierre, avec qui il se trouvait, toujours à l’oreille.
J’étais donc très heureuse de pouvoir être là, en maillot, avec Jules, comme si c’était notre jardin.
Le fait que je sois montée à l’étage à l’intérieur de mon corps paraît avoir à voir avec ce livre que je lisais hier, étonnant, Petite anatomie de l’image de Hans Bellmer, qui voudrait étudier l’humain au départ du corps, d’une sorte de pensée du corps, de ses attitudes, de ses projections, de son imaginaire. Une tête penchée dans le creux d’une épaule venant par exemple signifier une caresse au sexe.
Et le rêve lui, semble venir dans la continuité du texte que je retravaille en ce moment, d’avril 2011, où je dis qu’il me semble acquérir un corps à Donn. Et où je me demande s’il s’agit du fait que je puisse sortir dans le jardin facilement, sans avoir à m’habiller, y échappant au regard, au devoir d’image. Je retravaille à ce texte pour le moment, ne sachant pas très bien ce que je fais et craignant de ne pas y arriver.
Je n’arrive pas à me faire à l’idée que je n’aurai rien fait de ma vie. Que je ne laisserai rien derrière moi. Que je ne me survivrai pas. Ça n’aura pas cessé de me tracasser, cela. Je n’aurai pas cessé d’essayer de faire quelque chose, d’essayer d’œuvrer. Ça m’aura pris tout mon temps. Toute mon énergie. Je n’ai jamais pu vivre pour le présent. Sauf avec l’enfant. C’est ça qui a fait du bien. Maintenant, lui aussi commence à s’inquiéter de demain. Je me demande si c’est comme cela pour les autres aussi ? Je ne suis pas triste. J’aimerais renoncer. Ne pas devoir vivre pour après la mort. Cette lutte insensée. Et je me demande ce qu’il resterait, alors ? Ce que je ferais ? Serais-je plus heureuse ? Mes proches seraient-ils plus heureux ? Je cherche toujours un sens à tout ça. Avec l’idée qu’alors je le communiquerais au monde et qu’il s’en porterait mieux.
Et il sera dit que j’ai vécu comme ma mère, femme au foyer.1 Puis, plus rien, l’oubli.
Confusément réveillée ce matin dans le souvenir du principe de réalité. Très simplement venu là comme s’il ne m’avait jamais quittée. Son concept. Allons, me dis-je, vraiment de ma vie n’ai-je rien fait d’autre que de m’inquiéter de la postérité, n’aurais-je travaillé, voulu œuvrer, que dans l’appréhension que tout ce que j’ai vécu, in fine si attachant, soit oublié, disparaisse ? Une fois remise de cet instant-de-voir, ce propos supportait d’être nuancé et repartais-je à la recherche des grandes raisons de ma vie.
Le principe de réalité n’est-il pas cela qui régit nos vies, à quoi je n’ai jamais su me plier, auquel j’ai cherché par tous les moyens d’échapper ? Ce qui pourrait expliquer que mon expérience soit si difficilement transmissible, que je doive rester muette et l’inconfort de ça, basée qu’elle est sur une insoumission forcée au principe de réalité. Ne devrais-je enseigner à l’enfant sa dure existence, y a-t-il lieu de le mettre en garde, rien ne sert-il de l’effrayer ? Comment lui donner des armes dont je ne dispose pas ? A moins que je ne trouve le moyen de le lui présenter d’une façon non-effrayante , quand il m’aura toujours plongée dans une angoisse à laquelle je n’ai pu que me soumettre mais qui m’a donné l’imagination nécessaire pour le contourner. Et comment le justifier, ce contournement du principe de réalité, quand il est peut-être à la base de toute éducation. – Qui es-tu ? – Celle-là qui n’a rien, qui reçoit.- Cela n’est pas conforme au principe de réalité !- Mais le contourne. Et me serai-je obstinée, par mon travail, lecture, écriture, analyse, à trouver les mots qui donnent meilleure figure à cette non-conformité. Je ne suis pas une rebelle. L’eussé-je été, j’aurais pu revendiquer ma différence. Publiquement, il m’a fallu m’en défendre.
Avant que d’y retourner vérifier chez Freud, brièvement, qu’ai-je retenu du principe de réalité, 20 voire 30 ans après l’avoir lu ? En un mot, et évitant de m’avancer plus avant, je dirais les papiers. Le monde des papiers, la paperasserie. Bien sûr, il faut confronter cela à ce qu’il en est pour Freud. Mais, l’angoisse insurmontable, en ce qui me concerne, c’est là qu’elle trouve sa cause. Les impôts, les factures, les enveloppes à ouvrir, le courrier à lire, les comptes à faire; plus loin, les rendez-vous à prendre, les coups de fil à donner, etc.
Alors, pourquoi a-t-il fallu que je retourne ce matin à ce concept freudien auquel je n’ai jusqu’à présent jamais beaucoup pensé, dont je n’ai jamais beaucoup usé ? Mystère. Sans doute étais-je tentée de rapprocher d’un concept existant quelque chose qui chez moi ne s’inscrit qu’en creux et qui remettait en cause l’idée de n’avoir vécu, travaillé, que pour la postérité. Car il y a un travail, actuel et difficile, qui consiste à vouloir éviter que l’enfant soit confronté aux difficultés auxquelles j’ai été confrontées. Puis, probablement, y a-t-il eu ce rêve dont je souviens maintenant de quelques bribes :
« J’allais me mettre au travail. Je cherchais à me remettre au travail. ( C’est ça le principe de réalité, non ? Ce sera de là qu’il est revenu.) Il était exigé que j’aille voir tous les commerçants de mon arrondissement qui était curieusement le onzième, tous les clients potentiels, soit tous les habitants, et que je recueille leurs données administratives. Il me semble que cela était exigé par une comptable, dans le cadre de la reprise de mes activités rémunératrices. Frédéric me l’avait déjà dit mais je n’avais pas voulu le croire. J’avais alors été voir cette vieille comptable, dont Frédéric préférait qu’on ne la consulte plus, afin qu’elle me conseille et éventuellement remette mes papiers sur les rails, aussi des impôts. J’avais alors songé que je pourrais, plutôt que de recueillir toutes ces adresses, rapidement faire un site professionnel où je renseignerais dans mes clients tous ceux pour lesquels j’ai travaillé dans une agence en Belgique. Il s’agissait un peu d’un curriculum vitae ( voilà, c’est ça, le principe de réalité, le curriculum vitae, voilà ce que c’est aujourd’hui, le principe de réalité ) et je m’effrayais du trou qu’il comportait depuis mon arrivée en France. »
Désireuse de retrouver ce qu’est le principe de réalité, suite à ces pensées de réveil de l’autre jour, je relis Freud. C’est un vrai plaisir. Quelques extraits :
Sigmund Freud, Essais de psychanalyse, Première partie – Au-delà du principe de plaisir (pbp – Petite Bibliothèque Payot)
augmentation / diminution quantité d’énergie
Aussi nous sommes-nous décidés à établir entre le plaisir et le déplaisir, d’une part, la quantité d’énergie (non liée) que comporte la vie psychique, d’autre part, certains rapports, en admettant que le déplaisir correspond à une augmentation, le plaisir à une diminution de cette quantité d’énergie.
[… ici un morceau de phrase que je ne comprends pas1 ]
il est probable que ce qui constitue le facteur décisif de la sensation, c’est le degré de diminution ou d’augmentation de la quantité d’énergie dans une fraction de temps donnée. (p.8)
Autrement dit, chaque fois que j’hésite à sortir, c’est parce que je crains l’augmentation de la quantité d’énergie qui risque de s’ensuivre. Et mon caractère casanier obéit-il strictement au principe de plaisir. Me disais-je lisant, parallèlement lointainement effleurée d’un doute ou plutôt d’un étonnement : n’arrive-t-il pas que l’augmentation d’énergie plutôt soit l’indice d’un plus de plaisir, voire soit recherchée pour elle-même ? Je pensais aux fêtes ou à l’excitation des enfants, sans arriver à être plus précise. S’agissait-il de cas particulier, qu’est-ce qui les distinguait alors ? Car, je le sentais bien, ce rapport est exact et l’augmentation d’énergie est appréhendée comme un déplaisir, comme un danger. Dans cette veine, je n’ai pu m’empêcher de penser à l’excitation sexuelle, la montée du plaisir, l’horizon de l’orgasme. Quel rapport alors à l’angoisse ? Ne m’avait-il déjà semblé apercevoir un lien entre la jouissance et l’angoisse ? Ces questions se superposaient, fragiles, n’osant clairement s’énoncer. Et qu’est-ce qui protège les enfants, par exemple, de la curiosité ? Je ne pouvais m’empêcher de pressentir que la crainte de l’augmentation d’énergie puisse être un frein à la curiosité, à l’ouverture à l’inconnu. Puis, de quoi s’agit-il dans cette énergie, quelle est-elle? Celle du Ça? des pulsions? de ces pulsions qui sont constantes ? Le moins de crainte des enfants tient-il à ce qu’ils ne distinguent pas encore bien leur monde du monde extérieur. Et qu’il soit partout dans leur monde? Tandis qu’au fur et à mesure qu’ils grandissent, ils apprennent à se distinguer du monde, à reconnaître le monde extérieur? La difficulté tient à la nature de l’énergie et à la nature de ce qui cause son augmentation ou sa diminution.
Gustav Fechner
Nous ne pouvons cependant pas demeurer indifférents devant le fait qu’un savant aussi pénétrant que G. Th. Fechner concevait le plaisir et le déplaisir d’une manière qui, dans ses traits essentiels, se rapproche de celle qui se dégage de nos recherches psychanalytiques. p.8
principe de constance
Les faits qui nous font assigner au principe du plaisir un rôle dominant dans la vie psychique trouvent leur expression dans l’hypothèse d’après laquelle l’appareil psychique aurait une tendance à maintenir à un étiage aussi bas que possible ou, tout au moins, à un niveau aussi constant que possible la quantité d’excitation qu’il contient. C’est le principe du plaisir formulé dans des termes un peu différents, car, si l’appareil psychique cherche à maintenir sa quantité d’excitation à un niveau aussi bas que possible, il en résulte que tout ce qui est susceptible d’augmenter cette quantité ne peut être éprouvé que comme anti-fonctionnel, c’est-à-dire comme une sensation désagréable. Le principe de plaisir se laisse ainsi déduire du principe de la constance ; en réalité, le principe de la constance lui-même nous a été révélé par les faits mêmes qui nous ont imposé le principe du plaisir. La discussion ultérieure nous montrera que la tendance de l’appareil psychique, dont il s’agit ici, représente un cas spécial du principe de Fechner, c’est-à-dire de la tendance à la stabilité à laquelle il rattache les sensations de plaisir et de déplaisir.( p. 9)
monde extérieur et principe de réalité
Le premier obstacle auquel se heurte le principe de plaisir nous est connu depuis longtemps comme un obstacle pour ainsi dire normal et régulier. Nous savons notamment que notre appareil psychique cherche tout naturellement, et en vertu de sa constitution même, à se conformer au principe du plaisir, mais qu’en présence des difficultés ayant leur source dans le monde extérieur, son affirmation pure et simple, et en toutes circonstances, se révèle comme impossible, comme dangereuse même pour la conservation de l’organisme. Sous l’influence de l’instinct de conservation du moi, le principe de plaisir s’efface et cède la place au principe de réalité qui fait que, sans renoncer au but final que constitue le plaisir, nous consentons à en différer la réalisation, à ne pas profiter de certaines possibilités qui s’offre à nous de hâter celle-ci, à supporter même, à la faveur du long détour que nous empruntons pour arriver au plaisir, un déplaisir momentané.
les impulsions sexuelles
Les impulsions sexuelles cependant, plus difficilement « éducables », continuent cependant encore longtemps à se conformer uniquement au principe du plaisir, et il arrive souvent que celui-ci, se manifestant d’une façon exclusive soit dans la vie sexuelle, soit dans le moi lui-même, finit par l’emporter totalement sur le principe de réalité, cela pour le plus grand dommage de l’organisme tout entier. (p. 10 et 11.)
– Qui es-tu ? – Celle-là qui n’a rien, qui reçoit.- Cela n’est pas conforme au principe de réalité !- Mais le contourne.
Alors, ce serait-là ma devise.
On voit bien qu’elle n’a rien de présentable. Que ce n’est pas ce qui s’inculque. Et que vaut une devise que l’on garde cachée.
The Act of killing
« Reply #1 on: Yesterday at 02:58:06 pm »
» rawhful 2 months ago
I just saw this film today. It is one of the darkest, most intense films I have ever seen. One of the best documentaries ever made in my opinion. The tone of the film is both arresting and surreal, and it plunges the depths of human cruelty in a way that is completely unique. «
« Dans cette scène, l’un des criminels explique aux autres que s’ils acceptent de jouer dans mon film, leur vrais visages vont être dévoilés, la vérité sur leurs crimes va être révélée et les Indonésiens vont enfin avoir la confirmation de ce qu’ils savent déjà, à savoir que le gouvernement leur ment depuis 1965. Après ce film, il n’y a pas de retour en arrière possible, les génocidaires savent qu’ils vont passer pour les salauds mais ils assument. Le film va leur permettre, en rejouant devant ma caméra les meurtres qu’ils ont commis, de remettre un couche de fiction sur la vérité qui les hante toutes les nuits. The Act of killing est sans doute le film le plus populaire en Indonésie. Les projections officielles sont interdites, bien évidemment, mais tout le monde l’a vu lors de séances sauvages qui ont lieu quotidiennement sur grand écran devant cinq cents personnes. Les langues se délient. La peur change progressivement de camp. Les Indonésiens savent que le roi est nu. » Joshua Oppenheimer, http://www.telerama.fr/cinema/the-act-of-killing-trois-extraits-commentes-par-son-realisateur-joshua-oppenheimer,96089.php
« C’était comme si on tuait dans l’allégresse ». C’est l’histoire mais du point de vue des tueurs, des bourreaux, pas des victimes. Ils sont les « gangsters », les « hommes libres ». Ils jouent leur propre rôle et ils jouent le rôle de leurs victimes. Ils se disputent sur la signification des mots cruauté et sadisme. Ils disent qu’ils sont plus cruels que dans les films, beaucoup plus, et beaucoup plus cruels que les communistes. « Moi, je les regardais mourir. – Tous, tu les as tous regardé mourir. » Ils tournent des scènes avec des habitants d’un village qui jouent les victimes, dont ils sortent presque aussi choqués que les figurants. Ils rient, ils font des blagues atroces, dansent, mettent en scène leurs cauchemars, crient action ou coupez, apostrophent le metteur en scène, « Josh! », sont maquillés, ferment les yeux de la tête décapitée qu’ils n’avaient pas fermés et qui les hantent, se pavanent ou se convulsent de dégout à l’idée de ce qu’ils ont fait. Ils voulaient qu’on sache la vérité.
Re: The Act of killing
« Reply #3 on: Yesterday at 04:18:35 pm »
mmm, je me demande pourquoi tu as voulu le voir ;)
ça me fait penser au film de manoel de oliveira sur la procession religieuse dans le petit village des années 60… j’ai encore oublié son nom
Re: The Act of killing
« Reply #5 on: Yesterday at 05:49:44 pm »
non, tu sais, ça ne ressemble à rien de connu. ce sont des criminels, des hommes qui ont commis des actes de grande cruauté, de sadisme comme ils disent, qui ont torturé, tué, violé – « je les prévenais, je leur disais : tu vas connaître les pires moments de ta vie et moi je vais connaître le paradis », qui sont restés impunis et qui font un film, qui les bouleverse. j’ai plusieurs fois eu envie de sortir, tellement c’est insupportable, je suis restée, me disant que la suite peut-être apporterait un élément d’apaisement. je n’ai pas eu tort.
Re: The Act of killing
« Reply #6 on: Yesterday at 06:08:09 pm »
J’en avais déjà entendu parler ici :
http://www.critikat.com/The-Act-of-Killing.html
Ça m’avait plutôt convaincu de me tenir à distance.
Re: The Act of killing
« Reply #7 on: Yesterday at 07:43:17 pm »
je pense que cette critique est injuste. malheureusement, je me rends compte que je suis mal placée pour en parler, quand il s’agit d’écouter des criminels, ayant souffert d’avoir moi-même eu un oncle criminel, assassin. bien sûr, il me semble là que je tire une corde des plus suspectes, dramaticollantes, pour justifier d’avoir été touchée par ce film, mais tant pis. de mon point de vue, et c’est le seul qui compte à mes yeux, je ne suis pas très courageuse non plus.
ce film m’a bouleversée. et j’ai été heureuse d’apprendre, de la « bouche » d’oppenheimer, évidemment, ça aussi, c’est suspect, qu’il avait bouleversé l’indonésie. on voit dans ce film faire des gens qui ne savent pas ce qu’ils font, ce qu’ils cherchent, et cela nous laisse pantois. brandir le mot sacro-saint mot « spectaculaire » est compréhensible, on est souvent dans le grotesque, on hallucine face à ce qui paraît bêtise à l’état pur, mais on sait à chaque instant que ce spectaculaire, ce grotesque, cette bêtise répondent de choses dont nous ne savons rien, de crimes inhumains, qui n’ont jamais, jusque là, trouvé à être qualifié comme tels, dont les perpétreurs ne savent sur quel pied parler. je crois que ce qui leur a manqué, c’est d’un procès. ce sont tout de même des gens très particuliers, qui ont fait commis ces crimes et qui sont aujourd’hui toujours craints, toujours proches du pouvoir. pour moi, c’est peut-être un peu comme s’ils avaient pris en charge leur propre procès, et que, au moins pour certains d’entre eux, ils se soient reconnus coupables. la « représentation » est une grande chose, c’est une chose qui révèle et qui soigne, me dis-je. et qui soigne aussi ceux qui ont vu ce film, qu’aujourd’hui tout le monde a vu en indonésie. je dis ça, tout en regrettant les mots que je signe ici-même. tout en me disant words words words. et ce n’est toujours pas ça. de même que je ne devrais pas me laisser à la facilité d’ajouter que mon oncle, passé aux assises, a remercié ses juges, a remercié le ciel d’être passé en jugement : pour une fois, a-t-il dit, justice a été faite. ce film, il faut le voir, ou ne pas le voir. anyway, il y a peu de choses, à mon sens, qui feront jamais qu’on sera à la hauteur de la réalité. je me vois moi, condamnée à vivre en deçà de la grandeur humaine, et j’aurai, jusqu’au bout, l’impression que les mots me manquent tandis que quelque chose cloche en leur royaume. mais ce film, pour moi, c’est du beau boulot, une belle chose humaine. que d’autres le voient comme une saloperie. au fond, c’est possible aussi. ce qui m’a toujours fait peur c’est qu’on peut faire dire n’importe quoi aux mots, quand de ce film on sort pantois(e). et tant pis pour la critique cinématographique. et la critique tout court, d’ailleurs. c’est un art, qu’à mon sens, les français prisent beaucoup trop. :))