dimanche 5 mars 2006

noir sur blanc, pensées en italique :: le pas sur le tout

Lacan formules sexuation dans Encore

Vie étirée entre l’écran du jour et l’écran du soir et tous les deux sont très petits. Il est de ma nature d’être enfermée. Note sur l’angoisse de l’orgasme. Petite note sur l’adhérence à ce fantasme selon lequel il faut signifier à l’autre, au partenaire amoureux, qu’il y a à redire à son désir. Je ne trouve pas le mode du mien dans la mesure où je ne le supporterais calqué sur aucun (pas tout x phi de x :: je privilégie le pas sur le tout). Et puis il y a l’insupportable qui  consisterait à consentir à son désir, de l’autre, à dire oui à son mode, sa modalité. Ce mode, cette modalité, mienne également cependant (il n’existe pas de x tel que non-phi de x). Enfin, toujours: rester l’Autre. Je t’aime. C’était, l’émission des pensées du matin. Et pourtant, tout cela est faux. Et pourtant, tout cela est faux. Le monde tourne.

dimanche 11 mars 2007

du transfert de la certitude de l’angoisse à la certitude de l’acte

Angoisse constituée, angoisse constituante

[…]

La seule théorie qui nous intéresse, c’est la théorie de la pratique. S’agissant du Nom-du-Père, s’en passer s’en servir veut dire exactement, c’est au moins ce que je propose ici, se passer d’y croire, tout en s’en servant comme d’un instrument.

Le hiatus de la croyance et de l’usage ne recouvre pas mais déplace celui de la théorie et de la pratique. Le hiatus de la croyance et de l’usage, à vrai dire, est essentiel au structuralisme, à toute approche structuraliste. Ce hiatus est au principe même de ce que Lévi-Strauss appelait « le bricolage », qui consiste à réutiliser, à recycler comme on dit, les produits maintenant déshabités des croyances d’un autre âge. Et le hiatus de la croyance et de l’usage est essentiel dans la pratique analytique pour autant que c’est à cesser de croire à son symptôme que le sujet a chance de pouvoir s’en servir. Par exemple pour le raconter, ce qui lui vaut à l’occasion, quand il le raconte bien, d’une façon captivante, d’être nommé AE.

Le chapitre à ouvrir est ainsi celui de l’usage des symptômes. On dit « guérir » – on ajoute, dans un récent best seller, c’est dur de le constater, « guérir sans la psychanalyse » – quand on ne voit dans le symptôme qu’un dysfonctionnement à réparer, alors qu’une psychanalyse, au contraire, permet au sujet de faire usage de ce qui reste d’inguérissable de son symptôme.

On dit, enfin nous disons, « désangoisser », et à juste titre sans doute, car l’angoisse, comme disait Lacan, est une affaire foireuse, une affaire qui fait foirer ce que, pour le sujet, il s’agit de faire, ce qui fait foirer ses agendas, les choses qu’il a à faire. Mais il ne s’agit là, dans ce « désangoisser », d’aucune guérison, d’aucun effacement de l’angoisse, et je dirais même plus précisément, il ne s’agit d’aucun retour à zéro de l’angoisse. Le désangoissement du sujet, si je puis dire, ouvre sur les transformations de l’angoisse et il me semble que c’est ce qu’ont montré les travaux de ces journées que j’ai pu écouter. Ce désangoissement ouvre sur les transformations de l’angoisse, sur le transfert de la certitude qu’elle recèle à l’acte qu’elle est seule susceptible d’autoriser.

L’angoisse, j’entends l’angoisse qui foire et qui fait foirer, on doit en effet s’en passer, mais c’est à condition de s’en servir. De se servir de l’objet qu’elle produit comme d’un instrument propre à nous faire franchir ce qui entrave ce que nous avons à faire. L’angoisse dont il s’agit de se passer, c’est – comme l’a indiqué François Leguil dans le premier exposé de ces journées – le développement de l’angoisse, son Entwicklung, son embrouille foireuse dont le sujet reste captif et qui inhibe l’acte. Cette angoisse-là est certitude refusée, anticipation et refus de la certitude que produirait l’acte.

L’angoisse dont il s’agit au contraire de se servir est celle qui fait signe du réel. L’angoisse qui fait signe du réel, il ne s’agit pas de la ramener à zéro, c’est-à-dire de la ramener à l’homéostase, pour la simple et excellente raison que c’est impossible, que l’angoisse est ici le nom du moment où, dans le néant de tous les objets du monde, est produit le plus de, cet objet excédentaire qui est en infraction au regard de toute loi de l’objectivité et que nous appelons petit a.

Nous distinguons deux statuts de l’angoisse que je pourrais appeler, pour simplifier, l’angoisse constituée et l’angoisse constituante.

L’angoisse constituée, c’est l’angoisse dont les descriptions nourrissent ces traités de psychopathologie que l’on voudrait faire ingurgiter aux prétendants au titre de psychothérapeute. C’est l’angoisse labyrinthique, sans limites, dont le sujet se condamne à parcourir le cercle infernal qui le retient de passer à l’acte. C’est cette angoisse, me semble-t-il, que Lacan se proposait de symboliser par la lettre aleph, première de l’alphabet hébreu, et qui est précisément celle que Cantor avait choisie pour désigner l’infini, dont il montrait aux mathématiciens le bon usage dans leur discours. C’est une angoisse qui est répétition, avec vocation d’aller à l’infini.

L’angoisse constituante, c’est l’angoisse productrice, elle soustraite à la conscience. Elle produit l’objet petit a, comme nous disons, dans son paradoxe essentiel, c’est-à-dire elle le produit comme objet perdu. C’est pourquoi on ne peut le désigner comme objet de l’angoisse, qu’en passant par la négation : « elle n’est pas sans objet ». Ce qu’il faut bien voir, c’est qu’il n’y a pas l’objet et puis sa perte, mais que l’objet a se constitue comme tel dans sa perte même. Si on admet une partition commode, on peut alors dire que c’est à situer l’angoisse constituante que s’attache le séminaire de l’angoisse, le Séminaire X. L’angoisse est la voie d’accès, privilégiée, à l’objet petit a comme rien.

Disons que l’angoisse constituée correspond à la prise de cet objet rien dans le fantasme. A quoi le sujet se trouve alors suspendu, paralysé, dans un fading infini, où il fait l’expérience douloureuse de sa propre division. C’est ce qui a été décrit comme le phénomène de l’angoisse, dont je distingue ce que Lacan nous permet de reconstituer d’une structure. L’objet rien est ici dans le phénomène de l’angoisse la cause d’un désir mortel tourné vers le sujet.

C’est le même objet rien qui peut devenir la cause de l’acte, acte qui comporte toujours un moment de suicide, un moment de mort du sujet. L’objet rien, autour duquel gravite le phénomène de l’angoisse, du moins dans cette construction, dicte le deuil qui est à faire de tous les objets, ce deuil où se creuse la place d’où le sujet pourra assumer l’acte analytique. (…)

Extrait de l’intervention de Jacques-Alain Miller lors des dernières Journées d’automne de l »ECF pour présenter le prochain Congrès de l’AMP en 2006: Le nom-du-père, s’en passer, s’en servir.

mardi 8 septembre 2009

dans l’embrasure

vendredi 21 août 2009 – matin, heure digitale : 9:51.

Dames de Marie

Cette nuit, rêve encore des Dames de Marie – cours de Chimie/Bio avec prof. contre laquelle NOUS NOUS révoltons.
Entre 2 cours, nous réunissons, nous plaignons. sommes dans l’encoignure1 l’embrasement2 l’embrasure3 d’une porte (sortie).

moi + les filles contre prof
révolte
entre 2
j’écris embrasure, mais est-ce vraiment le mot que je cherche?

Je dis :  » Et tu te rends compte, ce livre, d’Annie Ernaux, qui se passe pendant ses études secondaires, j’en ai lu seulement quelques lignes : insupportable ! insupportable! cette angoisse des examens ! n’ai pas pu continuer. »

angoisse, insupportable de l’école (racontée dans un livre)

Finalement, nous retournons en classe, c’est la fin de l’année, les examens sont finis mais nous avons encore cours (et je me demande pourquoi).
Nous attendons l’annonce des résultats.
C’est la dernière année. 6ème. Après, fini les Dames de Marie.

angoisse, insupportable c’est fini mais ça continue.
angoisse des résultats.
c’est la dernière année, l’année que j’aurai redoublée pour n’avoir pas voulu passer certains examens.

Il y a Nathalie F.

Nathalie n’était déjà plus aux Dames de Marie. Nous avions fait de la danse ensemble. Plus tard, elle a été danseuse chez Béjart.

Elle est très triste, amoureuse. Je crois que je suis moi amoureuse d’elle. Je suis près d’elle, c’est agréable, elle est triste, je triste aussi. Elle s’approche de l’homme dont elle est amoureuse, il est avec deux autres hommes. Elle lui saute dessus, il est furieux, il s’en va.

je l’aime, elle une femme, elle aime, elle, un homme, qui lui en éprouve de la fureur contre elle

Mais l’un de ses amis revient et prend emporte deux books de Nathalie (books de présentation de travaux graphiques. Nathalie pas graphiste : Mireille, l’était.) Nathalie reviendra ensuite, radieuse, parce qu’elle a trouvé du travail grâce aux books. L’homme est maintenant amoureux d’elle et moi je suis très très triste.

si BOOK/livre/présentation –> alors travail –> alors amour possible
amour d’un homme dont je suis en fait moi amoureuse

Entre-temps, comme voulons retourner au cours, sommes arrêtées dans la cour, parce que très en retard. On nous dit : « C’est pas possible ! On va toutes vous faire redoubler!  » PANIQUE   REDOUBLER
il y a un bus qui est cassé. il faut le faire remplacer. nous disons qu’on ne peut pas nous demander ça maintenant, sinon on va se faire encore plus remarquer (comme étant celles qui cassent le matériel même si de ce crime nous sommes innocentes), et sommes encore plus sûres d’avoir à redoubler.   BUS CASSE
Finalement, pouvons retourner en classe. Mais la prof avec qui nous avions eu des problèmes (et qui en fait un prof qui ME détestait) est partie. Elle en a eu assez. Elle est remplacée par un petit homme.   femme (qui me détestait) remplacée par un homme (insignifiant).

 

( un homme vient à la place d’une femme)

(et c’est ici que dans le rêve ça passe de NOUS à JE)

Je ne trouve pas de place pour m’asseoir. Je n’arrive pas à prendre de notes. Je me demande à qui je vais pouvoir emprunter des notes ( beaucoup par le passé rêvé de ça, il est vrai que j’avais en réalité beaucoup à le faire, compléter mes notes: je n’allais jamais au cours. les filles au fond n’étaient pas très sympa avec ça. ça devait les énerver que je n’aille pas au cours et que je cherche à ne ne pas en payer les conséquences. d’habitude, je demandais à nathalie, mais je n’étais jamais sûre d’en avoir de complètes. je veux dire que nathalie non plus, ma meilleure amie, ne se montrait pas très « volontaire ». et je n’osais pas trop insister.
le schéma était toujours le même:  » dis, tu me prêterais tes notes? tu peux me les apporter ? – oui oui bien sûr ». et puis, les notes ne venaient jamais. )
  pas de place parmi les filles, plus de place, à cause de mes absences ; pas de place, pas de notes.
demande de notes qui n’aboutit pas. comme le début d’une parano
sentiment d’exclusion.
filles et moi nous séparons.
J’essaie de suivre le cours sans prendre note. Debout.
C’est là que je trouve une place auprès de Nathalie. Il y a toutes ces inquiétudes à propos du redoublement. Une fille revient en disant qu’elle a trouvé une place. Je ne sais pas exactement de quoi. C’est lié à l’école et à l’école de Régentes. (ma mère, « régente »). Je me dis mais enfin, nous ne sommes « qu’assistantes-psycho » (!!!)
  L’autre trouve du travail. Régente ! comme ma mère = ma mère a du travail
avoir du travail = avoir une place

 

moi exclue du travail

les filles sont un peu jalouse. une sœur (là, c’est de la vraie romantisation de la part du rêve, parce que des sœurs, aux Dames de Marie, des nonnes, il n’y en avait plus, ou plus qu’une, qui d’ailleurs n’enseignait pas. circulait vieille sans rien faire dans l’école, souriante.) elle lui dit qu’elle a gagné, réussi son année, qu’elle aura donc le travail. Il s’agit de nouveau peut-être de cette Anne-Marie ou Annamaria, celle qui me proposait de se marier avec moi dans le rêve les filles l’école lacan.   que dire de cette anne-marie annamaria, c’est une fille très très loin de moi, dont je ne suis pas l’amie. pour qui j’éprouve du respect, sans plus. qui est très « moyenne », sans éclat, sans rien qui ne dépasse, extrêmement sage, en apparence. qui fait tout ce qu’il faut faire. et à qui finalement, les choses réussissent, même si ce n’est pas de façon brillante. elle est gentille.
Puis, il y a l’histoire de Nathalie et de ce type dont elle est amoureuse.    
Le rêve finit donc assez tristement pour moi. Je suis seule.   JE SUIS SEULE ( barrée des autres filles,
du travail,
d’une place,
de l’amour.)
Et je ne sais pas si je vais redoubler à cause de ce prof qui me déteste, dont je raconte même qu’elle m’a exclue du cours ( et d’ailleurs, c’est même pas sûr qu’elle ne m’ait pas, viré du cours. non, ce n’est pas elle, c’est cette autre prof, qui elle m’aimait. qui m’a exclue de son cours. ha ha. le prof. qui ressemblait à marguerite duras, quand j’y pense.)   prof qui ne m’aime pas = prof qui m’aime
prof = celle qui sait
prof m’exclut
celle qui m’aime/me déteste.
prof femme remplacée ensuite par prof homme, insignifiant.
~

 

Est-ce que tous ces rêves c’est là pour indiquer que le plus dur du mois d’août, c’est ça: septembre qui vient. La rentrée?

les examens de passage. en septembre. celui que je n’ai pas voulu passer sous prétexte que je ne connaissais pas tout.

celui de math où je disais à la prof qu’il ne fallait pas me faire passer, parce que si j’avais tiré au sort l’autre question, je n’aurais pas su répondre, parce que cette démonstration-là je ne savais pas la faire, ou si je la savais, très bien, je n’aurais pas voulu la faire, parce que je ne la comprenais pas.

  j’aurais voulu tout (savoir) or pas-tout –> donc, pas digne de passer examens, de réussir

 

vous savez, les gens disent : « perfectionniste ».

~~~~

Annick vient tout à l’heure, pour le week-end. Je veux auparavant acheter un, des cadeaux pour F, son anniversaire dimanche. J’ai l’impression que je n’aurai pas le temps de travailler, ennuyant.

Notes:
  1. encoignure

    n.f. encoignure [ɑkɔɲyr] (de coin)

    Angle intérieur formé par deux murs qui se rencontrent: Placer un meuble dans une encoignure (coin).Remarque Dans ce mot, -coi- se prononce [kɔ], comme dans cogner.
    On peut aussi prononcer [ɑkwaɲyr] où -coi- se prononce normalement. []

  2. embrasementn.m. embrasement LITT.1. Action d’embraser; grand incendie: L’embrasement d’une forêt. 2. Grande clarté rougeoyante: L’embrasement du ciel au soleil couchant. 3. Agitation qui conduit à de violents troubles sociaux: Cette loi a engendré de nombreux embrasements dans le pays (effervescence).

    []

  3. embrasuren.f.embrasure Ouverture pratiquée dans un mur pour recevoir une porte ou une fenêtre: Le chat se tient dans l’embrasure de la fenêtre (encadrement).

    []

dimanche 20 septembre 2009

Le mode selon lequel s’opère cette perte réelle de vie laisse des traces indélébiles de jouissance chez le sujet.

Erik Dalzen - Faint, Christian, 2009
Erik Dalzen – Christian, 2009

A cet égard, l’angoisse donne le signal de différentes modalités de rapport à l’objet. Le mode selon lequel s’opère cette perte réelle de vie laisse des traces indélébiles de jouissance chez le sujet. Ces traces, toujours identiques à elles-mêmes, sont au principe de la répétition, et c’est pour cela qu’elles sont en lien avec le symptôme. Savoir reconnaître ces traces, puis savoir y faire avec la jouissance – telle est l’éthique de la psychanalyse – passe par une élaboration signifiante qui met en jeu le rapport à l’Autre. Entre le sujet et l’Autre, nous retrouvons ce « petit bout perdu » qui va constituer l’objet que le sujet place dans l’Autre.

« Faire de la jouissance une fonction »
Elisabeth Leclerc-Ravazet
La petite Girafe n° 28, L’enfant et ses objets, Institut du Champ freudien

mardi 5 avril 2011

du temps gelé, de la guerre, du point g
— (de la lecture, de ma mère)

Il y a deux jours, je rêve d’un amoncellement, d’un empilement vertical de « caddies » au dessus duquel je vais me percher, me réfugier, extrême précarité, je tente de diriger les mouvements des caddies, qui sont vifs, accélérés, imprévisibles, avec mon corps.

Cet empilement de « cas »  (les « cas » de « caddies ») désignant pour moi le « K » du « K-rante » (40) du 40-45 / date de la guerre / à laquelle je dis, à la suite de ma lecture de R. Warshasky,  que « mon temps s’est figé« .

Date à laquelle, depuis laquelle, l’histoire ne peut pas se faire. Qui ne s’intègre pas à la suite des nombres à laquelle pourtant elle appartient. 1Cela, je l’avais autrefois dit à mon analyste, le premier, qui l’avait balayé: « Mais non, … »

En sixième latine, sixième latine A, je dessine à la professeur d’histoire et de latin, Mme Chapeau, qui le demande, une ligne de temps où j’inscris 4 dates:

40-45 ; 0 ; 33 (âge de la mort du christ).

J’ajoute ensuite 14-18 parce qu’effectivement je connais cette date (qui vient doubler 40-45).

Dessous cette ligne,  j’explique que l’histoire ne peut être prise, considérée, comme une suite de dates, que l’histoire c’est passionnant, mais que cette passion ne tient pas dans les dates.

Aujourd’hui, aurais-je à dessiner une ligne du temps, elle serait la même.

Identifiée, passionnément… crucifiée… à la guerre (40).
Promise, dans le prénom de ma mère, à la lecture du point G.

LUTGARDE 
« art du G lu, art de lire le point G » 

G qui est de guerre, dit de guerre par mon père, de jouissance silencieuse en ma mère.

On voit qu’il y a là comme un lien entre le G de quarante et celui du prénom de ma mère. C’est un  lien, fait il y a bien longtemps, inoublié, en analyse, au départ d’un rêve où il était question d’un G (le GSM, le téléphone), et du point G (à propos duquel j’avais entendu un émission radiophonique).

Ce raccord, ce raccourci, je l’ai refait récemment, au sortir d’un cours de Miller, comme il avait évoqué la fixation et la jouissance féminine 2Les notes du cours concerné:
I Avant : désir interdit –> jouissance
II Ensuite : la jouissance est pensée au-delà – positivée comme celle d’un corps qui se jouit. C’est un événement de corps – ça s’oppose à l’interdiction, ça n’est pas articulé à la loi du désir.
Le choc, la contingence, le pur hasard, ça n’est pas dialectique, mais objet de fixation, non pris dans la loi du désir.
C’est comme ça, par ce biais, que Lacan a pu rencontrer la jouissance féminine – la part qui existe sans subir l’interdiction, qui n’est plus centrée sur le Penisneid, fonction négative, qui n’est pas prise du côté dialectique, de l’Aufhebung ça efface le « perdre pour retrouver » (un enfant, c’est encore mieux que l’organe qui manque). Ça ne se transmute pas en maternel.
Faut voir comment ça fonctionne du côté homme.
Au 2 mars…
  quand je me suis souvenue d’une sensation d’enfant. Lorsque, soi-disant malade, feignant la maladie, diagnostiquée cependant par une médecin d’angine blanche, je pouvais passer la journée dans le lit de mes parents, à la place de ma mère. Quelquefois alors je me mettais à entendre le temps ralentir, s’allonger. Mon corps lui-même s’allongeant, par différentes parties, élastique, s’étirant à volonté et à l’infini – et tout cela, dans cette lenteur entendue. J’étais à la place de ma mère. Dont je pourrais dire qu’elle est pourrait être ma place de sinthome aujourd’hui – c’est ce que j’entends au cours de Miller, l’inertie du sinthome.

Ah oui, le lien du G de la guerre de quarante, au G, comme point de jouissance ?

Je passe sur un rêve que j’ai fait qui me désigne explicitement dans la répétition du quarante, comme double même d’elle, de ma mère double dont j’ai coutume, auquel il ne faudrait pas que je me tienne, dont la culpabilité cependant m’a enfin quittée, ce qui explique que je puisse enfin avancer, sortir de la seule répétition du double, du double du double, pour répéter, réitérer seulement l’Un (sans double) -, dans la répétition d’un 40 d’abord, d’un 4 ensuite, au cours d’rêve qui se passe, pour partie au moins,  au moyen-âge, dans une moyenne d’âge (40).

Mais, le temps gelé : est-ce qu’on l’entend déjà dans ce que j’ai écrit jusqu’à présent? Ou cela doit-il être davantage précisé?

Dire : l’angoisse ne me saisit plus qu’en présence de ma mère. La pétrification. J’ai été vers ça, dans les derniers temps de mon analyse, l’envie, le désir, de lever ça, pour pouvoir rétablir un contact avec elle, un contact qui rende mieux justice à l’amour que j’ai pour elle. L’angoisse vis-à-vis de l’école (ECF) s’étant quant à elle atténuée. Au point que je puisse me demander même si elle n’a pas complètement disparu, c’est à tester, et si elle n’a pas trouvé à être remplacé par un désir, devenu tactique, ou qui se voudrait tel (je me découvrirais des ambitions sans nom, inavouables…), l’école n’étant pas de l’approche la plus facile. Et puis elle demanderait à ce que je quitte mon lit – où, heureusement, je peux encore réfléchir fortement, et établir mes plans d’action (hé hé hé).

La guerre, Le point g, Ma mère.

« 40 », c’est le dit, disais-je, de mon père: pas un jour où il ne nous parlait de la guerre et des juifs. Pas un jour. Pas une personne qu’il ne rencontrait, qu’il n’abordait, en ne lui parlant de la guerre. L’extraordinaire, c’est qu’il aurait eu toujours quelque chose de nouveau à raconter. C’était toujours autre chose. L’extraordinaire, c’est que ça faisait lien, que ça le faisait vraiment parler avec la personne qu’il rencontrait, que ça faisait point de rencontre, et que mon père était considéré comme très sympathique. Mes frères également, mes 2 frères, parlaient avec lui, de la guerre, nous, ma mère et moi, nous nous taisions. Et bablabli et blabla bla, je n’y arriverai pas, pas aujourd’hui, et c’est BASTA.

Questions diverses

1/

Quid de la relation :

désir de l’analyste – (jouissance du) sinthome

Cette jouissance du sinthome, n’est-ce pas quelque chose qui s’atteint se rejoint au-delà de la possibilité « d’être analyste »? il existe du sinthome là où il n’y a pas nécessairement d’analyste?

Ce que je voudrais interroger également : un point où désir et jouissance se rejoignent, trouvent à s’accorder.

2/

« Mais si on tient que le sujet ne se réduit pas, dans sa fonction la plus essentielle, au psychologique, son exclusion hors du champ du nombre s’identifie à la répétition, ce qu’il s’agit de montrer. »

(Jacques-Alain Miller, « La suture »)

Exclusion hors du champ du nombre –> répétition –> sinthome?

ou prise en dehors de la suite du nombre –> répétition –> sinthome ?

3/

« De même, l’existence d’un objet ne lui vient que de tomber sous un concept, aucune autre détermination ne concourt à son existence, si bien que l’objet prend son sens de sa différence d’avec la chose intégrée, par sa localisation spatio-temporelle, au réel. » (Ibid., « La suture »)

4/

« Par où vous voyez la disparition qui doit s’effectuer de la chose pour qu’elle apparaisse comme objet – qui est la chose en tant qu’elle est une. »    (Ibid. )

 concept –> disparition de la chose / apparition de l’objet = la chose en tant que Une = cet objet donc qui vient à exister

Nota bene:

A/ sur le « plus un », la réitération, et l’addiction : dirait-on (j’ai oublié ce à quoi j’avais pensé ce matin)

« une cigarette encore, donne-m’en une, la dernière » (ferré) – un verre de plus, le dernier, un tweet de plus, un clic de plus, un chips de plus

un en plus, le même, je réitère donc j’addicte

les accointances du sinthome et de l’addiction – difficile d’admettre le n’importe quoi du sinthome, le n’importe quel Un, du moment qu’il est Un, du sinthome – surtout si l’on pense à la « racine du refoulé » – qui n’est pas n’importe quoi, qui ferait la différence. relire à propos de l’addiction le cours de Miller, le dernier (9), et l’avant dernier (8).

B/ cet Un de la fixation bloque la pulsion (dit Miller) – dans mon cas, bloque au redoublement, ça double, ça se bloque, et ça redouble  – ma mère, encore, épelant le nom (du père)  disait : « M – U – double L – E – R »  (où l’on voit que le double n’est pas la répétition, la réitération.)

que me pardonnent tous ceux que j’ai doublés, mais je continuerai dorénavant de la faire,  et probablement pas sans jouissance, parce qu’il ne s’agit plus seulement de doubler. il y a de L tout seul, ou du G tout seul ou du cas tout seul soit de l’un, tout seul. sans Autre.

Notes en bas de page

  • 1
    Cela, je l’avais autrefois dit à mon analyste, le premier, qui l’avait balayé: « Mais non, … »
  • 2
    Les notes du cours concerné:
    I Avant : désir interdit –> jouissance
    II Ensuite : la jouissance est pensée au-delà – positivée comme celle d’un corps qui se jouit. C’est un événement de corps – ça s’oppose à l’interdiction, ça n’est pas articulé à la loi du désir.
    Le choc, la contingence, le pur hasard, ça n’est pas dialectique, mais objet de fixation, non pris dans la loi du désir.
    C’est comme ça, par ce biais, que Lacan a pu rencontrer la jouissance féminine – la part qui existe sans subir l’interdiction, qui n’est plus centrée sur le Penisneid, fonction négative, qui n’est pas prise du côté dialectique, de l’Aufhebung ça efface le « perdre pour retrouver » (un enfant, c’est encore mieux que l’organe qui manque). Ça ne se transmute pas en maternel.
    Faut voir comment ça fonctionne du côté homme.
    Au 2 mars…
jeudi 30 août 2012

carla et la souplesse

comment le dire, ce rêve, et que je ne m’en sois pas étonnée plus tôt ( non, je m’en suis étonnée plus tôt, mais je ne me suis pas encore formulé cet étonnement)…

je revenais de voir ma mère hospitalisée, il y avait eu ce drame des toiles aussi. il me devenait, il est devenu, de plus en plus impératif que je règle ce problème d’angoisse quand je suis avec elle, ce trou où je bascule et cette rage qui me prend, cette rage, colère, haine.

à quoi l’attribuais-je cette angoisse? mais bien plus à un trop grand amour de moi pour ma mère, quelque chose que je voulais rapprocher de ce que lacan avance de l‘angoisse qui surgit quand l’objet cause du désir se rapproche trop, l’objet réel. faut-il que je vérifie les termes de cela, dans le séminaire sur l’angoisse? et je voyais la mère bien plutôt comme le premier objet d’amour, remplacé ensuite par le père (à un moment de « déception »? à quel moment Freud lui situe-t-il cela? ) et donc que mon père réapparaisse et que reviennent des termes (phalliques, de pouvoir) de mon amour pour lui, de mon identification à lui, m’étonnaient et m’intriguaient. comme si cela n’avait pas été analysé de fond en comble. et si cela revenait, les termes de ce retour pouvaient-ils différer?

ce qui s’était auparavant avancé dans le rêve du fil de fer, c’était la part que j’aurais pu prendre dans le fait que mon père m’aie préférée, que je l’aie imaginé ou fantasmé, ou que cela aie été réel – à certains endroits. je l’ai haïe pour ce fil de fer (qui faisait tenir du faux là où ça manquait, des fausses dents, révélant et cachant ce manque, y palliant) que j’ai pourtant désiré dans ma bouche.

[quelle bouche ai-je eue, ai-je pour ma part eue. ]

ce dont j’étais déjà assez convaincue, c’est que fondamentalement, ce qui m’angoissait, en sa présence, n’était rien que je puisse lui imputer, en dehors de ce fait, « naturel », qu’elle était une femme. et c’est bien pour cela que je voulais que cela cesse. cela n’était pas juste. elle m’effrayait et n’y était pour rien, je devais pouvoir cesser de lui reprocher son être de femme, sa « baillance ».

or, à chaque fois que je la revoyais, cela revenait, ce désespoir et cette rage, et cela se reportait sur cette façon qui lui est propre, et je l’espère pas à toutes les mères, autrement je deviendrais à mon fils, moi-même, un jour, insupportable, de vouloir tout donner, donner tout, de me réduire à néant à force de vouloir prévenir mes désirs, comme si elle ne supportait pas mon propre manque et toujours venait à s’offrir pour le combler. et que cela, je le veuille. 

je pensais que cela était effectivement un « défaut » chez elle, un péché, une tare, qu’elle ait ainsi sacrifié son désir à celui de l’autre. et que l’angoisse que je ressentais était le sien en présence de mon propre manque qu’elle s’offrait à combler, qu’elle ne supportait pas. qu’elle ait sacrifié son désir à celui de mon père, sacrifié son désir pour servir le désir de l’autre.

sa haine d’elle -même est immense, il faut que je le dise ici. et cette haine lui vient-elle de faillir à cela, faillir à combler. ou lui vient-il de ce que « l’amour c’est donner ce qu’on n’a pas à celui qui n’en veut pas » – et que non vouloir lui soit trop triste?

nous avions en quelque sorte convenu elle et moi qu’elle ne changerait pas, qu’il fallait que je l’accepte, qu’elle ne cesserait de vouloir s’occuper de l’autre – car j’ai bien souvent essayé de parler avec elle de tout ça, pour justement, que cela change.

et aujourd’hui que ce n’est plus elle qui peut tout nous apporter, mais elle qui est manquante, et nous qui pouvons aller vers elle, lui faire quelque offrande, la situation est devenue supportable.

(mais je ne pourrai ici développer tout ce que j’ai sur le cœur à propos de ma mère.)

bien sûr elle est seule, bien sûr elle a besoin de notre amour, bien sûr, ou moins sûr, est-elle soulagée, maintenant, de n’avoir plus à être l’épouse de son artiste de mari, et à porter cette responsabilité à laquelle elle craint/craindrait d’avoir failli (le spectre éloigné de la perte des toiles).

elle, est la faiblesse même.

qu’est-ce qui donc dans ma lecture du livre sur le vide m’a frappée au point de provoquer ce rêve, et qu’est-ce qui de neuf, d’inédit s’y révèle, viendrait s’avancer?

cette faiblesse de ma mère, faiblesse dite dans ce texte comme « méthode » du pouvoir. faiblesse et souplesse. faiblesse, à laquelle j’ai eu tôt fait moi-même de m’identifier –  cela je l’ai reconnu à cette carla transformée en « femme de ménage » penchée sur le sol, elle que je suis devenue, à quoi je me suis condamnée pour avoir cru ou voulu que mon père me préfère à elle. et alors, hier, me rappelant et complétant le récit de mon rêve de ce terme de « glaneuses« , du nom du tableau auquel je pensais et de son auteur : « Les glaneuses », de Millet, quelque chose d’autre s’est mis à me titiller.

Millet, Miller, cela va presque sans dire, donc Millet aussi du côté du psychanalyste. et les glaneuses et les restes. les glaneuses se contentant des restes, se contentant, c’est-à-dire, en jouissant. aux autres tout, à elles les restes, le meilleur.

et les restes sont également mon objet. ce n’est que des restes que je m’occupe. et les restes sont bien ce qui occupe l’analyste, ce qui l’intéresse.

la faiblesse est là la force, et la souplesse, le corps plié en deux.

 

 

 

 

vendredi 17 mai 2013

le trou dans le cv

Confusément réveillée ce matin dans le souvenir du principe de réalité. Très simplement venu là comme s’il ne m’avait jamais quittée. Son concept. Allons, me dis-je, vraiment de ma vie n’ai-je rien fait d’autre que de m’inquiéter de la postérité, n’aurais-je travaillé, voulu œuvrer,  que dans l’appréhension que tout ce que j’ai vécu, in fine si attachant, soit oublié, disparaisse ? Une fois remise de cet instant-de-voir, ce propos supportait  d’être nuancé et repartais-je à la recherche des grandes raisons de ma vie.

Le principe de réalité n’est-il pas cela qui régit nos vies, à quoi je n’ai jamais su me plier, auquel j’ai cherché par tous les moyens d’échapper ? Ce qui pourrait expliquer que mon expérience soit si difficilement transmissible,  que je doive rester muette et l’inconfort de ça, basée qu’elle est sur une insoumission forcée au principe de réalité. Ne devrais-je enseigner à l’enfant sa dure existence, y a-t-il lieu de le mettre en garde, rien ne sert-il de l’effrayer ? Comment lui donner des armes dont je ne dispose pas ? A moins que je ne trouve le moyen de le lui présenter d’une façon non-effrayante , quand il m’aura toujours plongée dans une angoisse à laquelle je n’ai pu que me soumettre mais qui m’a donné l’imagination nécessaire pour le contourner. Et comment le justifier, ce contournement du principe de réalité, quand il est peut-être à la base de  toute éducation. – Qui es-tu ? – Celle-là qui n’a rien, qui reçoit.- Cela n’est pas conforme au principe de réalité !- Mais le contourne. Et me serai-je obstinée, par mon travail, lecture, écriture, analyse, à trouver les mots qui donnent meilleure figure à cette non-conformité. Je ne suis pas une rebelle. L’eussé-je été, j’aurais pu revendiquer ma différence. Publiquement, il m’a fallu m’en défendre.

Avant que d’y retourner vérifier chez Freud, brièvement, qu’ai-je retenu du principe de réalité, 20 voire 30 ans après l’avoir lu ? En un mot, et évitant de m’avancer plus avant, je dirais les papiers. Le monde des papiers, la paperasserie. Bien sûr, il faut confronter cela à ce qu’il en est pour Freud. Mais, l’angoisse insurmontable, en ce qui me concerne, c’est là qu’elle trouve sa cause. Les impôts, les factures, les enveloppes à ouvrir, le courrier à lire, les comptes à faire; plus loin, les rendez-vous à prendre, les coups de fil à donner, etc.

Alors, pourquoi a-t-il fallu que je retourne ce matin à ce concept freudien auquel je n’ai jusqu’à présent jamais beaucoup pensé, dont je n’ai jamais beaucoup usé ? Mystère. Sans doute étais-je tentée de rapprocher d’un concept existant quelque chose qui chez moi ne s’inscrit qu’en creux et qui remettait en cause l’idée de n’avoir vécu, travaillé, que pour la postérité. Car il y a un travail,  actuel et difficile, qui consiste à vouloir éviter que l’enfant soit confronté aux difficultés auxquelles j’ai été confrontées. Puis, probablement, y a-t-il eu ce rêve dont je souviens maintenant de quelques bribes :

« J’allais me mettre au travail. Je cherchais à me remettre au travail. ( C’est ça le principe de réalité, non ? Ce sera de là qu’il est revenu.)  Il était exigé que j’aille voir tous les commerçants de mon arrondissement qui était curieusement le onzième, tous les clients potentiels, soit tous les habitants, et que je recueille leurs données administratives. Il me semble que cela était exigé par une comptable, dans le cadre de la reprise de mes activités rémunératrices. Frédéric me l’avait déjà dit mais je n’avais pas voulu le croire. J’avais alors été voir cette vieille comptable, dont Frédéric préférait qu’on ne la consulte plus, afin qu’elle me conseille et éventuellement remette mes papiers sur les rails, aussi des impôts. J’avais alors songé que je pourrais, plutôt que de recueillir toutes ces adresses, rapidement faire un site professionnel où je renseignerais dans mes clients tous ceux pour lesquels j’ai travaillé dans une agence en Belgique. Il s’agissait un peu d’un curriculum vitae ( voilà, c’est ça, le principe de réalité, le curriculum vitae, voilà ce que c’est aujourd’hui, le principe de réalité ) et je m’effrayais du trou qu’il comportait depuis mon arrivée en France. »

mercredi 26 juin 2013

Quelle croyance pour l’inconscient?

la troupe d’un autre monde (rêve du 21 au 22 juin)

« A la piscine avec de nombreux amis, des hommes, que je trouve assez séduisants et c’est réciproque. Je nage sous l’eau. Beaucoup de monde. Arrivée d’une drôle de troupe, tribu, qui vit sous une large tente hexagonale, une yourte. Ils s’installent dans le fond de la piscine, ils sont à l’abri de l’eau et continuent de vivre normalement, interdisant l’accès de la tente aux nageurs. Ils prennent beaucoup de place.

– Au réveil, certains indices de la suite du rêve me donneront l’impression qu’il s’agit avec cette troupe de l’inconscient et de ses habitants. –

Panoramique ger

Ils ont un chef, cérémonieusement, servi par tous les autres. On ne sait d’où ils viennent. Tout signale que leurs coutumes sont très anciennes. Leurs vêtements ont un air folklorique. On ne comprend pas leur langue. Il est d’abord cru qu’ils sont juifs, des juifs venus d’une région du monde lointaine, inconnue, appartenant à un autre temps, ancestral.

Quand ils sortiront de la piscine, je m’approcherai d’eux. Par les bords d’abord puis de l’intérieur.

Leur gigantesque tente posée sur des roues, ils circulent dans la ville, leur extravagant attirail évoquant une parade de cirque ou de gitans. Je me mets à craindre pour eux quand ils s’approchent de quartiers à forte population maghrébine, ce qui pourrait leur attirer des ennuis s’ils sont juifs.

Je m’approche d’eux et interviens. Peut-être pour soigner un petit. À qui je fais peut-être manger quelque chose quand il refusait d’encore se nourrir. Je m’attire donc leur bienveillance. Je me suis servie pour l’aider de la psychanalyse ainsi que de manières de faire qui n’ont rien à voir avec leurs coutumes, dont ils ne savent rien.

Ils arrêtent leur périple et s’installent, un peu en catastrophe, probablement sous mon influence, dans une usine désaffectée d’un coin de la ville où je crains que leur présence ne leur attirent de graves ennuis, toujours en raison du fait que je les crois juifs. Je continue d’intervenir dans leurs coutumes, les initie au monde extérieur. De leur côté ils m’initient à leurs chants et à leurs danses.

C’est là que Frédéric intervient pour me dire que c’est bien moi ça, que c’est incroyable ce que j’arrive à faire, qu’il n’aurait jamais cru que quelque chose d’intéressant puisse sortir de coutumes religieuses (puisque nous pensons que ce sont des juifs, des « juifs anciens »).

Ils décident de vraiment s’adapter (au monde d’extérieur) et choisissent… de faire la vaisselle (je pense que jusque là, ils ne nettoyaient rien, vivaient et d’ailleurs survivaient très bien, sans rien nettoyer). Ensemble ils apportent donc leur vaisselle à l’évier1 où les attend une vaisselle qui n’est pas la leur, assez importante, débordante même, mais qu’ils semblent prêts à vouloir faire, même si je songe que ce n’est probablement pas à eux de faire ça.

Il se passe alors quelque chose qui les pousse à se montrer aux fenêtres2 . Au fond, je crois les avoir initiés au fait qu’ils étaient malvenus, qu’ils couraient du danger. Mais là, ils semblent curieusement vouloir affronter ce danger, soit dans une sorte de courage, soit pour le vérifier, dans un doute par rapport à ma croyance en ce danger. Ils se montrent donc tous aux fenêtres.

Je crains énormément pour eux. Je crains qu’ils ne soient abattus, qu’ils ne se fassent tirer dessus. Je crains une attaque, une invasion de leur hexagone. Et là, au fond, il ne se passe vraiment rien. Il se passe quelque chose de l’ordre d’un rien sidéral. Je crois qu’ils sont vus, regardés de l’extérieur, et que cela se passe dans un moment de sidération, de blanc, d’intervalle, de silence, d’arrêt.

Après ça, il est sûr que ce n’était pas des juifs, mais tout autre chose, d’une langue absolument inconnue. Je me réveille. »

quelle croyance pour l’inconscient?

Je pense qu’il s’agit avec ce rêve de la question de mon rapport à l’inconscient, la question que j’essaie de me poser de ce qu’il faut que j’en fasse, de ce qu’il en est. Et principalement de ce qu’il en est dans ce que j’en fais ici, dans ce blog, et de l’importance que j’y accorde dans ma vie.

S’agit-il d’une croyance que j’entretiens ? S’agit-il d’un croire à l’inconscient ? Faut-il que je me détache de cette croyance ? Que j’y renonce, et renonce à tout ce sens ? Est-ce au sens qu’ici je m’accroche ? Ne fais-je rien d’autre que cela ? Ce sens que comporte une religion, même quand il s’agit d’une religion maudite (qui n’en n’est pas moins mot-dite), religion du rebut, à quoi la religion juive peut s’apparenter de par sa (souvent) tragique histoire.

Que dire de ce que j’apparente dans le rêve l’inconscient au juif, voire la psychanalyse à la judaïté, que je les conçoive comme rejetés et en « dans-G »3 , en danger. Ce n’est pas sans raison, ni sans raison raisonnable. Le réel est jouissance, l’objet a est rebut. S’agit-il dans ce que je fais avec le récit de mes rêves,  d’actes de foi ou d’actes « tout court » ? Le rêve semble pencher pour l’acte de foi. Qu’il vient contredire. Réel, l’inconscient provoque la sidération. Sidération, arrêt, réveil.

J’ai fait ce rêve suite à deux lectures.

« angoisse constituée, angoisse constituante »

L’une de Jacques-Alain Miller sur l’angoisse, un texte autrefois publié ici intitulé « Angoisse constituée, angoisse constituante« . Où il est question de déloger le réel de son habitacle d’angoisse et de le reloger dans l’acte.

La certitude du réel de l’angoisse devenue celle de l’acte, s’extrayant de la place où elle s’était figée dans le fantasme, où elle entretenait une angoisse infinie, une angoisse en désir d’infini, notée aleph, qui est inhibition et refus de la certitude qu’implique le réel auquel elle touche.

Passage de la croyance d’une angoisse dite constituée à la certitude de l’angoisse dite constituante, constituante de l’acte.

La croyance, située donc du côté de l’angoisse constituée, est croyance au fantasme où est venu se réfugier le réel lié à l’angoisse, où il s’est trouvé une petite histoire qui permet de le soutenir comme appartenant au sens, ici opposée à la certitude à laquelle consent l’angoisse constituante. Cette certitude étant folle, c’est-à-dire non liée au symbolique ou à l’imaginaire, d’une langue étrangère qui ne peut entraîner que sidération et dont un acte peut seulement procéder. Ce que les membres de la troupe de mon rêve semble pouvoir seulement démontrer… en se montrant.

Quelle conséquence pour moi ? Je dois dire que je n’y trouve aucun éclaircissement, moi qui me retrouve à nouveau à noter ce rêve, pouvant seulement constater qu’il me semble avoir raison de « croire » à l’inconscient, de « croire » aux interprétations qu’il a la générosité de me livrer la nuit. De « croire » qu’il sait. Que la certitude est de son côté. Cette certitude pour autant me pousse-t-elle à l’acte ? Ou me maintiens-je au contraire dans l’inhibition, cette inhibition « frontière du réel ». Faut-il que je cesse tout cela ?

L’inhibition a un double versant : dépendante du corps, de ses fonctions et de son image, elle semble liée à l’imaginaire. En tant qu’elle indique une limite et un arrêt dans la symbolisation, elle touche au réel. Elle résonne donc avec tout ce qui chez le sujet ne peut trouver un appui dans la représentation. […] Elle est donc ce qui produit de nouvelles représentations à partir de l’imaginaire du corps. L’arrêt même du sujet, dans l’inhibition, lui sert à se « faufiler » sous forme d’image pour figurer, prendre place là où il ne devrait pas être parmi les signifiants.
Dès le début des années soixante, Lacan situe l’inhibition et le désir à la même place.
La Sagna P., Revue la cause freudienne n° 68,   « L’inhibition à savoir »

J’ai toujours « cru » à l’inhibition, toujours cru qu’il devait y avoir quelque chose à en tirer, je me suis sue inhibée, complètement, et j’ai compris que je n’avais pour le moment d’autre chemin que de suivre, me tenir à cette lisière, cette rampe de l’inhibition. Le blog est ce moyen. Le blog, ce blog, est écriture de l’inhibition. Rien ne s’y conclut jamais. Le prisonnier ne quitte jamais la pièce. Mais il témoigne tant qu’il peut de l’existence de l’inconscient, dont je ne peux cesser de chercher à me faire apôtre.

« le croyant et la dupe »

L’autre texte que j’ai lu hier, est celui sur lequel je suis tombée par hasard dans mon ordinateur, dont je ne peux que recommander la lecture, de Marie-Françoise De Munck, intitulé « Le croyant et la dupe »4 :

Ce qui constitue le symptôme, dit Lacan dans RSI, c’est qu’on y croit… Et qu’est-ce que croire, sinon croire à des êtres en tant qu’ils peuvent dire quelque chose…

Le texte de Marie-Françoise, je l’ai parcouru un peu rapidement, puisque ce n’était pas celui que je recherchais, mais j’y suis bien tombée en arrêt sur le paragraphe suivant :

Nous mettrons ici le même écart entre « être dupe » et « se faire la dupe » qu’il y a entre être l’objet du fantasme d’un homme et accepter de s’en faire l’objet cause du désir. Cet écart est celui de l’accès à une place de semblant.
Se faire l’objet du fantasme masculin conduit une femme à cette relation de «ravage» qui caractérise aussi bien la relation mère-fille quand, enfant, elle se fait objet du désir « pervers » de la mère. Tandis qu’accepter de se faire l’objet cause du désir pour un homme, accepter de se prêter à la perversion masculine, souligne l’accès à une place de semblant. Adopter cette place est une façon pour une femme de se faire la dupe du choix de l’inconscient.

C’est sur cette phrase que j’étais allée me coucher, et s’il ne me semble pas que le rêve qui a suivi aie voulu m’en reparler, il me paraissait important d’en faire état. Se maintenir dans une situation de ravage par rapport à la psychanalyse, ou par rapport à l’école qui la représente, se faire objet de la psychanalyse, ou « se faire l’objet cause du désir », se faire « semblant d’objet » pour un analysant ou pour un lecteur… 

Éventuellement donc on aurait:

  • angoisse constituée, loge le réel dans le fantasme : vouloir/croire être l’objet qui manque à l’autre (maternel) + ravage
  • angoisse constituante : ne loger le réel nulle part (sinon en marchepied de l’acte) et accepter (côté femme) de se faire l’objet cause du désir du fantasme d’un homme, accepter de jouer son jeu, accepter cette place de semblant. façon de se faire la dupe de l’inconscient.

Quoiqu’il en soit, ces deux textes me paraissent essentiels.

 

Notes:
  1. qui occupe toute « l’avant-scène », au premier plan de la scène du rêve, juste « devant mes yeux » []
  2. les fenêtres sont sur la droite, occupent le mur de droite []
  3. entendre dans ce G, le point G de la jouissance []
  4. Je ne sais pas du tout comment ce texte est arrivé sur mon ordinateur. Il est possible qu’il aie été publié par la revue Quarto à l’époque où j’y travaillais, ou que Marie-Françoise me l’ait passé, puisque nous étions amies (je ne suis plus en contact avec elle depuis que j’ai quitté Bruxelles. []
dimanche 17 novembre 2013

Sans titre

Quant à l’orgasme, il a un rapport essentiel avec la fonction que nous définissons comme la chute du plus réel du sujet. (…) Combien de fois vous aura-t-il été dit qu’un sujet aura eu, je ne dis pas forcément son premier, mais un de ses premiers orgasmes, au moment où il fallait prendre en toute hâte la copie d’une composition ou d’un dessin qu’il fallait rapidement termine ? Et puis, on ramasse quoi ? Son œuvre, ce sur quoi il était essentiellement attendu. Quelque chose est à arracher de lui. C’est le ramassage des copies. À ce moment-là, il éjacule. Il éjacule au sommet de l’angoisse.
JL, Le séminaire, Livre X, L’Angoisse, p. 198.

mardi 13 mai 2014

flamme éternelle, parenthèse (prolégomènes sur le désir)

Cette publication est la partie 5 de 14 dans la série FLAMME ETERNELLE – une oeuvre de Thomas Hirshhorn

enchantée donc l’autre jour par soirée passée avec Dominique au Palais de Tokyo, une conférence avec Didi-Huberman (par ailleurs annoncée entrée libre sur papier et sur le site, sans qu’il soit fait mention qu’elle était conditionnée par l’achat d’une entrée pour l’exposition (10 euros (qui deviendraient zéro si je m’inscrivais comme demandeuse d’emploi)).) Arrivées tard, nous n’avons pas eu le temps de voir l’expo avant la conf, tandis qu’après, comme j’eus l’idée qu’il fallait que nous nous posions d’abord un petit peu, rapidement, avec une petite bière, pour pouvoir la visiter ensuite – avant la fermeture des lieux, à minuit, la petite bière est rapidement devenue 4 ou  5  – moyennant quoi nous sommes évidemment sorties sans avoir vu l’expo, mais à l’heure prévue, de la fermeture, après minuit, où je me suis alors engouffrée, j’ose le dire: voracement, dans un taxi qui passait, après de trop courtes mais chaleureuses dans leurs intentions, embrassades avec Dominique dans la nuit, sous une fine pluie, directement en bas des marches du Palais. J’y étais, il faut le dire, également arrivée en taxi, dans un état d’angoisse assez remarquablement avancé, mais qui depuis a totalement disparu. Le désir, dirais-je, m’en est revenu, de par cette conférence, ainsi que la joyeuse alcoolisation qui s’ensuivit. Ce que la visite du lendemain à l’exposition de Thomas Hirshhorn, gratuite elle, mais où je suis allée – accompagnée cette fois de Frédéric et de Jules – après que nous ayons vu l’exposition Didi-Huberman, pour laquelle j’aurai donc repayé une entrée, n’a fait qu’amplifier, à un très haut point, au point que je puis craindre maintenant sa perte, du désir la perte, car il est parti dans des hauteurs, dont je sais me connaissant, qu’il me sera préoccupant d’avoir à dévaler forcément la pente dans l’autre sens, ma faible constitution dés(l)irante peu à même d’entretenir les feux de sa fièvre, rapidement que je suis rattrapée par mon coutumier sentiment d’impuissance à transformer en l’acte qu’il contient tout désir qui y tend.

 

vendredi 12 décembre 2014

Variations sur Deux notes, Philippe Cullard

Jacques Muller, Mère et enfant, 1971Exposé à Strasbourg le 7 mars 1999, à la Journée d’étude Metz-Nancy-Strasbourg, « L’enfant, l’adolescent et l’agressivité ».

La partition de la symptomatologie infantile que Lacan expose, en quelques lignes denses, dans ses « Deux notes »1  remises à Jenny Aubry, peut en imposer, à une première lecture – parfois retenue dans notre communauté – pour une correspondance avec la dichotomie classique névrose-psychose.

Cependant, dans le commentaire de Jacques-Alain Miller intitulé « L’enfant et l’objet »2 , cette division de Lacan en, d’une part, symptôme relevant du couple des parents, et d’autre part, symptôme du ressort de la relation prévalente mère-enfant, n’est clairement plus référable à cette opposition simple de structure. Ce commentaire constitue, au surplus, une synthèse lumineuse de l’enseignement de Lacan et balise, de façon tout à fait renouvelée, le champ clinique et théorique de l’enfant dans la psychanalyse, non sans empiéter largement sur celui de cet enfant vieilli qu’est l’adulte. Plus qu’un pont, il établit même une continuité.

 

Avant d’illustrer cette thèse d’un cas, il importe de rapporter brièvement l’essentiel de ces deux textes complémentaires.

Les « Deux notes  » qu’il convient de lire, comme l’a montré Jacques-Alain Miller, en inversant l’ordre initial de leur parution s’ouvrent sur un constat dont Lacan prend acte: « L’échec des utopies communautaires. »

Ouverture politique, donc, et évocation probable, non seulement du mouvement contestataire de mai 1968 – puisque ce court manuscrit est daté de 1969 -, mais aussi de ces expériences qui ont jalonné le milieu de notre XXème siècle, qui visaient toutes, peu ou prou, à l’avènement d’un enfant libre, sinon d’un homme nouveau, en se passant des fonctions du père et de la mère, en tant qu’elles impliquent « la relation à un désir qui ne soit pas anonyme (1) », c’est-à-dire  » particularisé ».

De cet « irréductible » « résidu » (1) que constitue cette famille nucléaireseule apte à  » la transmission » de la sociabilité -(1), Lacan déduit une alternative simple quant au symptôme que peut présenter l’enfant issu du « conjungo ».

Soit, « le symptôme peut représenter la vérité du couple familial ». « C’est le cas le plus complexe, précise Lacan, mais le plus ouvert à nos interventions (1) « . Soit, et c’est le thème que Lacan développe le plus, « le symptôme qui vient à dominer  » – ce qui en suppose au moins un autre mineur – « ressortit à la subjectivité de la mère« , et c’est alors  » directement comme corrélatif d’un fantasme que l’enfant est intéressé ». « Il devient l’objet de la mère et n’a plus de fonction que de révéler la vérité de cet objet « , c’est dire qu’il « réalise l’objet a dans le fantasme (1) « . Le développement accordé à ce thème constitue sans doute une indication, tant d’une avancée théorique, que de la prise en compte d’une clinique nouvelle, contemporaine du « déclin de l' »imago » paternelle  » et de la prolifération des objets.

En résumé, « vérité du couple familial «  et « identification à l’idéal du moi » pour le premier thème, S1 ;  » vérité de l’objet a dans le fantasme de la mère  » et, quant au mécanisme, « réalisation« , le terme est souligné par Lacan, pour le second, S2.

Notes:
  1. Lacan (J.), « Deux notes sur l’enfant », Ornicar?, n° 37, Paris, Navarin éditeur, 1986, p. 13-14. []
  2. Miller (J.A.), « L’enfant et l’objet « , Colloque EEP à Lausanne, 1er et 2 juin 1996,  La petite girafe, 18, Institut du champ freudien, décembre 2003, p. 7. []
mardi 1 mars 2016

un peu plus vite, peut-être ( et l’objet cruel de l’angoisse)

Cette publication est la partie 21 de 22 dans la série Pour en finir avec les antidépresseurs

Donn, au lit, une Q suffisante de degrés, lundi 29 février, 23:16

Je lis.

Daniel Pommereulle Objet Hors saisie (1964) Boite de peinture, lame de rasoir 10X8,5 cm
Daniel Pommereulle
Objet Hors saisie (1964)
Boite de peinture, lame de rasoir
10X8,5 cm

« Le ciel nous tombant sur la tête serait un bonheur. Caractère incompréhensible de Ia superstition gauloise. Quand ça arrive, c’est là, et sans doute n’y a-t-il rien dans tout ce qui arrive ou peut arriver qui soit aussi près de vite ou de rien. Savoir l’éclair garder serait la vraie, l’impossible devise. Art de vivre ennemi de la fiction, du rêve, du vague (rien est à l’opposé de vague).»

« DP ; ou le Dictionnaire Portatif de Daniel Pommereulle » de Jean-Christophe Bailly  IN Ferdinand Gouzon, Daniel Pommereulle –  Huitièmement, qu’est-ce que la cruauté ? Editions Multiple, Paris, 2016,  p. 160.

1er mars, mardi, Donn, 11h00

DP : … vie, vite, vide … l’éclair, le vite, le rien

à quoi je songeais cette nuit, moi qui  suis toujours dans la lenteur (dont l’âme est la lenteur).

… et la cruauté … mais la cruauté et le vite  ….or la cruauté et le vite

et la semaine dernière, avec ma mère, c’était bien ça : la cruauté, le vite. le trop vite. le trop cruel.

je songeais à cet objet de Pommereulle que décrit Ferdinand, cet objet insaisissable (parce que bardé lardé de lames de rasoir)

quel est-il cet objet, que m’apprend-il sur ce que je vis avec elle, ma mère. que me dit-il de l’angoisse,  de l’objet au cœur de l’angoisse, nommé par moi « cruel » (aussi cruel que son nom) (dans la suite probablement de ma lecture du l.  de Ferdinand.)

car je ne sais de quel côté chercher, ou s’il faut laisser tomber. analyser encore,  expliquer encore,  chercher à décrire encore. ou trouver autre chose. trouver à cette angoisse,  à cet insaisissable, une autre assomption, un autre destin,  un autre arrangement que celui des mots.

Pommereulle et sa vitesse : ce n’est pas une tension que je puisse soutenir cependant (moi qui suis lenteur et puissance toujours au bord de la défaillance).

et je songeais cette nuit aux tourments qui étaient les miens quand je suis arrivée à Paris, il y a une quinzaine d’années. qu’un analyste d’ailleurs avait  diagnostiqués, interprétés, nommés, baptisés : « angoisses », me soulageant au moins dans la mesure où je disposais enfin d’un angle, d’un coin par où saisir l’état pitoyable dans lequel j’étais. l’analyste convint également du traitement aux AD (on y revient, on les retrouve), malgré mon désagrément : car,  on le sent,  qu’il y a quelque chose, dans l’angoisse, quelque chose qui détient, qui attient à ce à quoi l’on tient plus qu’à n’importe quoi d’autre. (MY PRECIOUS,  murmure-t-on d’une voix assoiffée.) enfin, l’analyste sut me convaincre que c’était ce qu’il y avait de mieux à faire. qu’il serait encore possible de travailler là-dessus malgré l’apaisement apporté par les antidépresseurs.

je ne dirais pas cependant qu’aujourd’hui je retrouve l’angoisse, maintenant que j’ai cessé les AD, non, je ne dirais pas cela, car cette angoisse est toujours revenue quand je revoyais ma mère. et je m’en suis cette fois d’ailleurs plutôt honorablement sortie et plus vite.

11:50 plongeon rapide dans la baignoire  puis préparer à manger (sa salade de kasha, kale et patates douces). vite.

il y a bien une urgence qu’il faut rejoindre. :-)

jeudi 3 mars 2016

donn, jeudi, 7:46, réveillée par oiseaux

Cette publication est la partie 22 de 22 dans la série Pour en finir avec les antidépresseurs

jeudi, 7:46, réveillée par des oiseaux, 17 degrés, j’ai relancé le chauffage.

 

HIER – au réveil, angoisse à propos de ce que j’avais écrit la veille… à propos de l’angoisse justement et ennuyée à l’idée que nous ne soyons pas sortis, ou si peu, que nous n’ayons pas FROPITE-DE-LA-BELLE-NATURE – et les arbres.  aussi ai-je entraîné jules dehors et en avons-nous étreint quelques-uns, d’arbres.  puis, il est rentré, son heure d’écran approchant.1  de mon côté, j’ai prolongé la ballade avec le Ches.

– Fer. et Pomm. , eux peut-être un peu trop confiance en la pensée pour moi. –

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à mon tour rentrée, me suis déplacée dans la cuisine,  manipulé des objets en faisant des pas, à droite, à gauche, en tentant d’être centrée – de me centrer sur mon tantien – dans l’espace restreint de la cuisine. manipulant, maniant les divers éléments préparés la veille en vue de la préparation d’un tofu mariné à la citronnelle auquel je m’essayais. il ne restait qu’à suivre les dernières indications de la recette, c’était peu de choses.       ( et je songeais qu’il faudrait que j’en finisse avec cette série du blog : « Pour en finir avec les antidépresseurs« . et que peut-être, à partir de maintenant ce serait : « FACE A L’ANGOISSE ». ou alors, plus simplement : « L’ANGOISSE ».  or ça, physiquement, à ce stade, cela seulement que j’arrive à en dire, c’est – quasi rien, sinon : Pression au niveau du cerveau, au niveau de la dure mère (la dure mère, ça fait partie des méninges, ça ne s’invente pas).  là, ça grésille, ça chauffe, c’est mon signal d’alerte. voilà, elle est là, l’angoisse, c’est dedans elle que tu es maintenant).

(NOTE: je n’adore pas que ces histoires de chi, d’énergie, soient entrés dans ma vie, seigneur, ça m’embête – après la psychanalyse, ça -, encore un de ces trucs pas présentables, juste bons à provoquer des sourires au coin des lèvres sceptiques.)

ensuite, en vrac: 

après-midi, taï chi dans le salon: 11 et 24. 

après ça, crépettes ( =  pancakes minutes) (toute trace d’angoisse disparue) avec jules.

et, en début de soirée, dans un coin trouvé L’ incorazionone de Poppea,  écouté le premier CD —–  Disprezzata Regina, Disprezzata Regina ——-  ma voix préférée reste celle de Poppée… ah – ce que l’on trouve dans les coins, par ici… c’est très rare, que je mette, «  de la musique à moi », de la musique de mon enfance, de la musique qui : tout de suite : diapason immédiat. me suis assise, ai écouté. j et f étaient là. f, travaillait. j. faisait des légos.

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terminé avec  Les variations Goldberg  en passant rapidement un coup de torchon espagnol sur le carrelage noir et blanc, autour du tapis, entre les pieds des assis, m’astreignant à la plus grande imperfection possible. pour le dire rapidement : bonheur.

soir : Better call Saul, dernier épisode de la dernière saison.

– sinon l’idée de rentrer tête baissée, de front, de face dans le vieillissement,  vaillamment. de plein fouet.
se prendre ça dans la gueule et l’exposer au monde, et que le monde se taise, encaisse : DANS TA FACE

dans ta face
dans ta face au carré, plein soleil, imperfection mortelle

 

Notes:
  1. horaire des vacances et des jours férié : il est autorisé à « faire de l’écran » (télé, ordi, jeu vidéo, etc.) à partir de 11 heures. en théorie, il n’a droit qu’à une heure. []
mercredi 13 avril 2016

écrire et ne rien faire (comme disait ma grand’mère : ce qui est fait n’est plus à faire) _ en-trop et vouloir de l’Autre symbolique

mercredi 13 avril, 09:08

je vois maintenant que je n’écris ici que parce que je ne dois pas le faire. l’enfer, n’est pas seulement le faire, c’est le devoir faire. c’est l’enfer du devoir1. c’est quand le faire devient devoir, attendu par l’Autre.

écrire ici, c’est ne rien faire… de ce que j’ai à faire.

je ne peux pas continuer comme ça, faut vraiment que je trouve le moyen de faire ce que j’ai à faire.

du faire, l’enfer s’écrit plutôt dans l’à-faire. le faire en soi seul est supportable. c’est l’avoir à faire qui ne l’est pas. l’angoisse s’insinue dans le délai entre l’à-faire et le moment du faire. elle tient à la prescription symbolique de l’à-faire (celle qui ira plus tard l’inscrire  dans une liste (de choses à faire, la to do list)).

Tout ce qui concerne l’angoisse et l’objet tourne autour du manque. Du fait même d’être
définie par Lacan comme le « manque du manque », on voit comment il n’y a pas
d’angoisse sans le manque dont elle vient signaler la disparition.
Marcus André Vieira, « La voix, la résonance et la balle »2

c’est l’à-faire, qui situe la chose à faire dans un projet, en dehors du faire, qui l’inscrit comme goal, comme but, qui la sépare d’elle-même, qui crée l’angoisse. dans le faire même, je disparais, je fais place au faire. c’est dans l’à-faire que je sépare le faire de moi-même comme objet à-faire et que j’apparais, ou réapparais comme voulant faire, séparée de ce que je veux faire.  il s’agit de la séparation entre désir et jouissance. dans le faire, c’est jouissance, dans le désir, c’est jouissance ajournée, impossible, qui s’incarne dans l’angoisse : dans ma chair j’incarne alors ce qui à l’Autre manque (et le complète). ce que l’angoisse redoute c’est la disparition de cet être, ma disparition comme sujet et la dissolution du fantasme (dans lequel j’incarne ce qui manque à l’Autre).

pour autant, le faire du blog n’est pas sans tension, n’est pas sans se faire sans une certaine urgence, étant illicite (je n’y suis pour personne). mais ce n’est jamais que quelque chose qui ne se fait que parce qu’elle ne doit pas se faire. je suis juste infoutue de faire ce que je dois faire.

si le blog a pu paraître plus intéressant quand j’ai cessé les antidépresseurs, c’est peut-être parce que là, pour une fois, je faisais ce que je devais faire. c’était bien le minimum pour retrouver le goût, le goût tout court, et puis l’envie, le désir et la possibilité de faire. le minimum pour sortir de la chape de fatigue. or, on dirait bien que du coup je me suis retrouvée rattrapée par l’angoisse, qui elle veut que je ne fasse surtout rien, qui fait de ma vie un enfer.

c’est ce qui m’apparaît à la suite de ce qui s’est passé la semaine dernière.

je dois arrêter de ne pas faire ce que je dois faire.

NB: j’ai bel et bien l’impression de prendre tout à l’envers (psychanalytiquement parlant).

Notes:
  1. j’emprunte ici le titre d’un livre de Denise Lachaud, L’enfer du devoir – Le discours de l’obsessionnel publié chez Denoël, Coll. Espace analytique, 1995. []
  2. Papers nº 10, AMP  2014-2016 []
samedi 28 janvier 2023

samedi 28 janvier, 9h25

9:25 Hier, 3 gouttes + hhc (trop fort)

Dans le noir de la chambre

Étranges pensées cette nuit. Et sentiment de corps délocalisé. Je ne m’en suis pas rendue compte tout de suite, seulement quand j’ai décidé de m’éloigner de mes pensées en me concentrant sur le corps. J’ai découvert que mon corps n’était pas là où je m’attendais qu’il soit. Je l’attribue au HHC.

Je voulais faire l’exercice « lourd ». C’est un exercice qui consiste à penser « lourd », le mot seulement, la mot vide, et à envoyer cette pensée dans le corps, partie par partie, une à une, en essayant de n’en oublier aucune. De le remonter par exemple, depuis les pieds jusqu’à la tête –  les orteils, les pieds, les mollets, les genoux, les cuisses, etc.  Je me suis rendue que je devais « chercher » chacune des parties de corps visées. J’avais en fait voulu commencer par « fesses » et j’ai découvert une sensation très étrange (très ample, très écrasé, d’ores et déjà, étalé, bassine, bassin plutôt débordant). Ce que je faisais était probablement utile, mais je devais déjà me trouver dans un  état de relaxation passablement avancé. Je me suis alors concentrée sur les parties du corps qui touchaient le matelas,  mais quand j’ai voulu trouver le dessus du corps, je ne le trouvais pas, ça ne correspondais pas. Le dessus de la cuisse n’était pas en face de son dessous. Et c’est sans parler de l’intérieur. J’ai continué cependant. En me raccrochant au « tantien », au centre du corps, que je sentais précisément. J’ai essayé soit de retrouver sensation « normale », soit de me laisser aller dans la sensation anormale. Je me suis alors retrouvée avec des pensées assez raisonnables, il me semble.

Je pensais à la solitude, à ma solitude, et je me demandais ce que je pouvais faire. Sans trouver. Je me suis vue, perpétuellementassise dans mon fauteuil, dans mon canapé, mon coin de canapé, et n’en sortant pas. Je me suis demandée ce que je pouvais trouver pour en sortir.
J’ai eu des pensées inquiétantes quant à l’avenir et à la pension, et au fait sur je pourrais me retrouver seule et sans argent et à la rue.
En temps normal, je ne peux penser qu’au suicide comme recours.
J’essayais d’envisager autre chose.

Je pensais à ce qu’il m’est impossible de faire, tout ce qu’il m’est impossible de faire.
Je pensais à ce qu’il m’est impossible de faire parce que j’attendrais de ma mère qu’elle le fasse pour moi (le maintien nécessaire de cette dépendance) et l’angoisse qui me prend dès que je prends son rôle (d’elle qui m’aide). Et la peur de rater.
Cette relation de dépendance est désangoissante pour moi.
Sortir de ce rôle, de ce schéma, c’est l’angoisse.
Il arrive pourtant que j’y arrive.
Mais c’est peut-être plutôt quand F n’est pas là.
Comme lorsqu’il était à la clinique.
Je pensais à l’inhibition, à ce que j’avais lu hier sur la nature inconnue de ce qui mobilise tellement le mélancolique dans son « travail de deuil », travail qui évoque la façon que j’ai de me consacrer à ma maladie. Je me consacre à quelque chose, mais  à quoi ? Qui paraît vital. Or dès que je m’éloigne d’un certain effort, de construction peut-être, comme lors des voyages, alors l’angoisse me prend. La certitude est que je ne dois pas me lâcher, que je dois me maintenir dans un effort, dans l’analyse. Comme ce que  je fais maintenant, en écrivant le matin, ou ce que j’aurais fait si j’avais été artiste.

Être artiste m’aurait offert une identité, et cette identité est inacceptable.
Il s’agirait de trouver son identité à l’intérieur de cette identité manquante, absente, de trouver son identité dans cette quête là. Et dès que je sors de la quête, angoisse.

Mais quel rapport avec ma mère. Et l’identité trouvée dans ma dépendance à elle.
Cette identité la maintient à distance, nous met dans un rapport. Qui vaut mieux que l’absence de rapport, que l’identique, que le même.
Donc, le maintien de ce rapport, de cette dépendance, évoque encore le travail que je dois accomplir, celui décrit plus haut.

Maintenir cette dépendance, afin de n’être pas engloutie par l’identité à elle, l’être elle, qui serait un trou. Puisque la dépendance nous donne un rôle à elle et à moi.
Tout en cherchant à trouver une identité viable qui me permette de sortir de son sillage.

J’élucubre ça maintenant. Mais cette nuit, par rapport au fait que je ne pouvais pas être ma mère et donc faire ce qu’elle faisait, et par rapport au fait qu’elle avait toujours agi  dans le service à l’autre, dans le sacrifice, dans le  mépris de sa propre personne, je pensais que je pouvais sortir de là, peut-être, puisque telle est ma volonté, en poursuivant et consacrant mon travail de restitution de valeur et de dignité aux tâches à raz du réel auxquelles elle se consacrait. C’est-à-dire d’en consacrer la grandeur au contraire de ces tâches.

Et donc d’abandonner l’idée de dés-identification d’une mère, pour se maintenir uniquement à la hauteur du réel.

(Or, ce réel et ses exigences ne vous engloura-t-il tôt ou tard ?)

J’ai déjà écrit ça.
J’ai déjà trouvé cette solution.
L’idée, cette nuit, était de trouver à me dégager de l’angoisse où me plonge n’importe quel faire.
Je n’ai de solution que par ce que j’appelle le réel. De toutes façons. Je n’ai que le raz du réel.
C’est ma limite possible à moi. Ce serait.

Je ne suis pas, jamais, sortie d’une certaine famille. Je n’ai pas grandi. Je suis toujours ramenée en arrière.

Me lever, saluer Jules.

 

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