Exposé à Strasbourg le 7 mars 1999, à la Journée d’étude Metz-Nancy-Strasbourg, « L’enfant, l’adolescent et l’agressivité ».
La partition de la symptomatologie infantile que Lacan expose, en quelques lignes denses, dans ses « Deux notes »1 remises à Jenny Aubry, peut en imposer, à une première lecture – parfois retenue dans notre communauté – pour une correspondance avec la dichotomie classique névrose-psychose.
Cependant, dans le commentaire de Jacques-Alain Miller intitulé « L’enfant et l’objet »2 , cette division de Lacan en, d’une part, symptôme relevant du couple des parents, et d’autre part, symptôme du ressort de la relation prévalente mère-enfant, n’est clairement plus référable à cette opposition simple de structure. Ce commentaire constitue, au surplus, une synthèse lumineuse de l’enseignement de Lacan et balise, de façon tout à fait renouvelée, le champ clinique et théorique de l’enfant dans la psychanalyse, non sans empiéter largement sur celui de cet enfant vieilli qu’est l’adulte. Plus qu’un pont, il établit même une continuité.
Avant d’illustrer cette thèse d’un cas, il importe de rapporter brièvement l’essentiel de ces deux textes complémentaires.
Les « Deux notes » qu’il convient de lire, comme l’a montré Jacques-Alain Miller, en inversant l’ordre initial de leur parution s’ouvrent sur un constat dont Lacan prend acte: « L’échec des utopies communautaires. »
Ouverture politique, donc, et évocation probable, non seulement du mouvement contestataire de mai 1968 – puisque ce court manuscrit est daté de 1969 -, mais aussi de ces expériences qui ont jalonné le milieu de notre XXème siècle, qui visaient toutes, peu ou prou, à l’avènement d’un enfant libre, sinon d’un homme nouveau, en se passant des fonctions du père et de la mère, en tant qu’elles impliquent « la relation à un désir qui ne soit pas anonyme (1) », c’est-à-dire » particularisé ».
De cet « irréductible » « résidu » (1) que constitue cette famille nucléaire – seule apte à » la transmission » de la sociabilité -(1), Lacan déduit une alternative simple quant au symptôme que peut présenter l’enfant issu du « conjungo ».
Soit, « le symptôme peut représenter la vérité du couple familial ». « C’est le cas le plus complexe, précise Lacan, mais le plus ouvert à nos interventions (1) « . Soit, et c’est le thème que Lacan développe le plus, « le symptôme qui vient à dominer » – ce qui en suppose au moins un autre mineur – « ressortit à la subjectivité de la mère« , et c’est alors » directement comme corrélatif d’un fantasme que l’enfant est intéressé ». « Il devient l’objet de la mère et n’a plus de fonction que de révéler la vérité de cet objet « , c’est dire qu’il « réalise l’objet a dans le fantasme (1) « . Le développement accordé à ce thème constitue sans doute une indication, tant d’une avancée théorique, que de la prise en compte d’une clinique nouvelle, contemporaine du « déclin de l' »imago » paternelle » et de la prolifération des objets.
En résumé, « vérité du couple familial « et « identification à l’idéal du moi » pour le premier thème, S1 ; » vérité de l’objet a dans le fantasme de la mère » et, quant au mécanisme, « réalisation« , le terme est souligné par Lacan, pour le second, S2.