Je pensais que c’était un rêve, mais non. N est bien la lettre qui m’arrive au corps quand. La triste ou l’horrible qui me prend toute, dont le sang s’infiltre en mes veines, me sépare et du reste du monde. La lettre du moment où mon corps prend possession de moi.
Étiquette : lettre
N
des suites (et son double)
— (d'1 double qui ne sera pas du semblant)
/ lettre pour la mort /
C’est pourquoi Lacan présente, au début de cette leçon, le terme heideggérien de l’être-pour-la-mort comme «la carte de visite par quoi un signifiant représente un sujet pour un autre signifiant». Il donne à ce S1 la valeur de la carte de visite, qui est «l’être-pour-la-mort».
Extrait de « Note sur la honte », Jacques-Alain Miller (5 juin 2002)
le vide-médian
La Voie qui peut s’énoncer
N’est pas la Voie pour toujours
Le nom qui peut se nommer
N’est pas le nom pour toujours
Sans nom : Ciel-et-Terre en procède
Le nom : Mère-de-toutes-choses
La Voie/voix, en tant qu’elle est avant tout nomination puis l’effet de nomination, qui fait venir quelque chose, mais quoi ?, car c’est là où ça n’est pas grec : il ne s’agit plus de faire venir à l’être, mais à un certain usage. Le chinois n’est pas une langue indo-européenne, il ne connaît pas le verbe être, à la place de la copule il y a cette invention propre au chinois qui est que le mot Tao veut dire tout à la fois faire et dire, énoncer.
J’avais établi un lien entre les deux : l’abandon de la calligraphie chinoise et le nœud bo comme si Lacan avait trouvé avec ce dernier sa propre calligraphie, qui lui allait comme une bague au doigt.
C’est avec un grand plaisir que je viens de faire l’acquisition de …ou pire que j’ai déjà eu l’occasion de lire par ailleurs. En feuilletant rapidement le texte établi par vous, j’ai été étonné de l’absence au début de la séance du 9 février 1972 du texte que Lacan semble avoir écrit en chinois au tableau : Je te demande de me refuser ce que je t’offre / parce que: c’est pas ça.
La référence est peut-être anecdotique. Mais ce qui m’avait frappé lors de mes lectures, c’est qu’il s’agissait là de quasiment la dernière référence au chinois après le Séminaire précédent, D’un discours qui ne serait pas du semblant. De plus, dans cette même séance Lacan introduit pour la première fois, après avoir utilisé divers schémas, le nœud borroméen. J’avais établi un lien entre les deux : l’abandon de la calligraphie chinoise et le nœud bo comme si Lacan avait trouvé avec ce dernier sa propre calligraphie, qui lui allait comme une bague au doigt. Ne peut-on y voir une réponse à la plainte qu’il formulait dans D’un discours qui ne serait pas du semblant : « Produire la rature seule, définitive, c’est l’exploit de la calligraphie. Vous pouvez toujours essayer, essayer de faire simplement ce que je ne vais pas faire parce que je la raterai, d’abord parce que je n’ai pas de pinceau, essayer de faire cette barre horizontale, qui se trace de gauche à droite, pour figurer d’un trait l’un unaire comme caractère, franchement. Vous mettrez très longtemps à trouver de quelle nature ça sʼattaque et de quel suspens ça arrête, de sorte que ce que vous ferez sera lamentable, c’est sans espoir pour un occidenté » (p.121).
Je serai heureux de connaître votre avis. Je me permets à cette occasion de soumettre à votre lecture un texte qui devait être les linéaments d’une intervention lors d’un colloque en avril 2010 à Chengdu en Chine sur « La nature de l’être parlant » (le voyage n’a pas pu se faire en raison de l’éruption du volcan islandais). Il porte essentiellement sur le déchiffrage de la référence à mes yeux énigmatique du caractère 厶 (szu) au beau milieu de la séance du 17 février 1971, page 63 de D’un discours qui ne serait pas du semblant .
Ce texte a été publié avec un autre : DU TRAIT UNAIRE À LA LETTRE. DE SHITAO À MENCIUS OU LʼOS EXTIME DU LANGAGE sur le site http://www.lacanchine.com créé par Guy Flecher. Les deux ont été traduit en chinois. En espérant ne pas vous avoir importuné, ni abusé de votre temps précieux, surtout en ce moment de rentrée intense pour vous, recevez mes plus cordiales.
Salutations.
Ferdinand Scherrer
Réponse. Je vois que j’ai affaire en vous à quelqu’un de sérieux. Vous n’abusez pas du tout. Ce sont toujours les gens qui n’abusent pas, bien sûr, qui s’inquiètent de savoir s’ils abusent. Je n’ai aucune documentation ici, en Ré, j’ai emporté un exemplaire des deux volumes parus, c’est tout.
1) La phrase chinoise que Lacan aurait écrite au tableau, et à laquelle il ne se réfère pas du tout dans sa leçon, manquerait donc p. 81. Si vous l’avez, passez-la moi; si elle n’y est pas, c’est parce que je ne devais pas l’avoir dans ma documentation - je suppose. Si vous êtes sûr que cette phrase a existé, je peux aussi demander à Mme Fang Ling de la reconstituer, comme je l’ai fait une fois: voyez …ou pire, p. 254, in fine.
2) Mon avis sur votre hypothèse, que le nœud remplace le chinois: très séduisante. C’est une idée qui ne m’était pas venue, mais je vous encourage à l’explorer, à la rendre consistance. Il m’est difficile, dans les circonstances actuelles, de me plonger dans vos textes, mais je garde la référence pour plus tard. Merci.
JAM
Extrait de Lacan Quotidien n° 06, 25 août 2011
ce n’est que des lettres que se fonde le nécessaire, comme l’impossible
Et cela même que je vise cette année, c’est à ce que vous ne confondiez pas les mots avec les lettres, puisque ce n’est que des lettres que se fonde le nécessaire, comme l’impossible, dans une articulation qui est celle de la logique. Si ma façon de situer les modes est correcte, à savoir que ce qui ne cesse pas de s’écrire, le nécessaire, c’est cela même qui nécessite la rencontre de l’impossible, à savoir ce qui ne cesse pas de ne pas s’écrire, qui ne peut s’aborder que par les lettres. C’est bien là ce que, ce que ne permet d’aborder par quelque dire que la structure que j’ai désignée de celle du nœud borroméen, c’est en quoi, la dernière fois, l’amour était un bon test de la précarité de ces modes. Il est porté à l’existence, cet amour, ce qui est bien le fait de son sens même, par l’impossible du lien sexuel avec l’objet, l’objet quelle qu’en soit l’origine, l’objet de cette impossibilité. Il y faut, si je puis dire, cette racine d’impossible. Et c’est là ce que j’ai dit en articulant ce principe : que l’amour, c’est l’amour courtois.
Jacques Lacan, Séminaire XXI, Les non-dupes errent (inédit), séminaire du 8 janvier 1974
Les points sur le U
Je m’étais couchée raisonnablement tôt, après une journée particulièrement banale – j’avais dû regarder quelques épisodes de série ( la finale d’Enlightened), je n’avais pas eu envie de lire, cela je m’en souviens, et je m’apprêtais à m’endormir dans un sentiment inhabituel de satisfaction. Soudain, couchée sur le côté – c’est autre chose. Une sensation dont j’aurais probablement tout oublié si je n’avais rapidement jeté ces quelques notes le lendemain matin– des mots que la nuit-même je m’étais répétés, anxieuse de les retenir, même si je les notai ensuite un peu à contrecœur, consciente encore de tout ce qui s’y perdait :
« Nuit
Corps sous couette, souffrance vide
corps & mots
Certain souvenir
Des mots
S’en viennent, s’en vont— L’idée d’un livre, l’intituler « Trauma » et qu’il n’y soit jamais raconté. –
Trauma. Tréma. Umlaut.1
Trauma. Tréma. Umlaut.
Ces points sur le u que je restituai à mon nom au sortir de l’analyse.
Müller, l’ü en double i. »
Il y avait eu les Journées d’étude de l’ECF2 sur le trauma. Je n’y étais pas allée mais j’en avais lu de nombreux textes préparatoires sur un blog publié par les directrices de ces Journées3. Je m’étais alors dit que je n’avais aucun souvenir de trauma, que je n’avais rien repéré comme tel au cours de mon analyse. Je ne manque pas bien sûr de mauvais souvenirs, et c’est d’ailleurs l’un d’entre-eux qui m’était revenu cette nuit-là, ses mots. Mais je ne leur ai jamais accordé de « valeur » traumatique. Ce sont de mauvais souvenirs. Point. Ils ne me semblent pas rattachés à grand chose de ce que je suis devenue — j’irais jusqu’à dire qu’ils ne me paraissent pas faire partie de mon histoire ( ou alors aux endroits qui s’arrêtent sur un gouffre, dont les chemins ne sont plus repris, bords oubliés d’un monde sinon rond). A moins qu’ils n’appartiennent à l’histoire honteuse ( ne pas raconter non pas à cause de l’indicible mais à cause de la honte). J’ai cherché à les oublier, cela oui, et ce n’est pas eux que j’ai oubliés, mais la souffrance qui se liait à eux. Ils sont vidés. Autant que l’était mon corps cette nuit-là. Lourd, recourbé en virgule sur rien, seul. Absolument, fondamentalement. Devenu seul et les mots, vides, sont juste là – satellites, mouches. le corps est la souffrance et la souffrance est vide. C’est une impression unique qui vient ( subrepticement) en suite de ce travail de l’École de la Cause freudienne sur le traumatisme. En réponse inattendue.
Il n’y a pas, il n’existe pas, me dis-je, d’interprétation de ces mauvais souvenirs, de possibilité d’interprétation. Je ne sais pas ce qu’ils m’ont fait. De son côté, mon corps, lui, a-t-il pu « arrêter une interprétation » ? Qu’il ait noué des liens spéciaux à certains mots de ces souvenirs, certains signifiants, sans m’inclure dans la partie, est possible. C’est bien ce que donne à penser ma transcription de cette nuit-là. La juxtaposition des mots et le corps, le vide de leur relation, la souffrance de ce lien en souffrance. Les mots étant la souffrance même, du corps seul, vides de sens, en un endroit d’étrangeté.
C’était comme ça. Comme je le dis, là.
Il y aura eu une façon d’interprétation de mon corps, de la part de mon corps, de mon corps en cet endroit inédit de solitude ; mais rien qui aie pu, aurait dû être interprété par moi et rejoué dans un scénario fantasmatique quelconque, destiné à être répété. Plutôt s’agirait-il d’une inscription.
ü
De pür douleur, dont l’un des noms s’est donné, aperçu alors, dans l’Umlaut de mon nom, le tréma, les points sur le « u »…
Oui, c’est drôle, tout d’un coup j’ai vu ça, que dans tréma, il y avait trauma.
Au départ, il y avait un tréma sur le u de mon nom et sur celui des autres membres de ma famille. Or ce tréma, au gré des passages par les guichets de l’administration belge, s’est vu disparaître. Moi-même, ni d’ailleurs mes parents, je ne l’apposais pas à mon nom, puisque ce n’était pas français. C’était un petit en-trop. Mais quand mon analyse s’est interrompue, brusquement interrompue et que je suis venue m’installer à Paris, j’ai voulu restituer ce tréma à mon nom, et je l’ai, à partir de là, retracé sur le « u ». J’ai fait cela sans réfléchir, je l’ai fait et je m’y suis tenue. Me séparant d’ailleurs sur ce point et avec plaisir du reste de ma famille, qui continue d’écrire ce nom sans ses points dus.
… que « le désir de l’analyste n’est pas un désir pur » et que « c’est un désir d’obtenir la différence absolue ». Il précise alors que la différence dont il s’agit est celle qui « intervient» quand le sujet, « confronté au signifiant primordial», « vient», pour la première fois, « en position de s’y assujettir». –Pierre Naveau, Désir de l’analyste
Donc, la proximité inhabituelle où j’étais de mon corps, d’une certaine vie de mon corps, non liée à ma conscience, mais à des signifiants vides de sens, sans pathos, me permettait de relever dans le tréma de mon nom sa résonance avec le terme trauma ; pointait ce « u», ce « u » aussi de l’avoir « eu », du corps « eu ». J’assistais à sa solitude, elle d’ordinaire inaperçue, et percevais les mots qui la hantent. Et même si mon corps est aujourd’hui couvert de mille petits points (mini tumeurs bénignes qu’une dermatologue patiente et blonde m’enlève à l’électricité depuis peu), en devint-il, au moment de ces événements, de cet éventuel trauma, pour autant plus sexuellement malade qu’il ne l’était déjà ? N’étais-je pas sans savoir déjà ce qu’il y avait à (ne pas) savoir du sexuel ? Non, non non, non. Dénégation, pourquoi niai-je mon ignorance d’alors ? Mais ce que je savais surtout ne pas savoir, qui couvrait tout le reste, c’était la possible méchanceté des hommes. Ce que je ne savais pas. C’est. Je ne savais pas qu’il pouvait m’arriver des malheurs. Je me croyais protégée. De Dieu. Je pensais que mon innocence me protégeait. Je ne perdais pas mon innocence, mais elle rencontrait dans le monde des réponses auxquelles elle ne s’attendait pas. Et ces mauvaises réponses étaient sexuelles. Et ces mauvaises réponses furent recouvertes par la méchanceté – qu’il était à ma portée, alors, de connaître déjà. Que sus-je alors de plus? Que je n’étais pas la princesse charmante – et que me restait-il alors à être? Que le monde résiste à la sainteté. Que le monde résiste à Dieu. Qu’un corps n’appelle pas que l’amour. Cependant, je restai püre. Alors que le sexe se séparait de l’amour.
C’est quoi la pureté?
Dieu, le sexe, l’amour, Un.
Conviendrait-il aujourd’hui que je ramène à ces souvenirs leurs tristes affects? Même tristes, malencontreuses, horribles éventuellement, ces histoires racontées, le pathos qu’elles appellent, dont elles relèvent en surface, n’est pas ce qui compte. C’est pourquoi je ne les ai jamais considérées comme des traumas, et que j’ai accepté que mon analyste ne les traitât pas comme tel.
*
* *
Notes:
- Umlaut (Wikipedia) : En phonétique, le processus d’ Umlaut (de l’allemand um-, « autour, transformation » + Laut, «son »), ou métaphonie (terme grec de même sens ; ne pas confondre avec le paronyme métatonie) ou encore inflexion, désigne le changement de timbre d’une voyelle à la suite de l’amuïssement d’une autre voyelle dans une syllabe suivante. La voyelle altérée garde pour ainsi dire une trace de la voyelle disparue en récupérant une de ses caractéristiques. C’est un type complexe de dilation. [↩]
- l’École de la Cause freudienne [↩]
- Mmes Marie-Hélène Brousse et Christiane Alberti, toutes deux psychanalystes et membres de l’ECF [↩]
J’avais écrit cette lettre
J’avais écrit cette lettre à M, rencontrée au stage de taï chi, au début du mois de juillet. Je l’ai écrite en plein mois d’août, à une époque où il faisait chaud, où j’étais en plein dans mon obsession du foie et de l’horloge biologique chinoise, mais aussi en pleine énergie, enthousiasme, dans le brûlure de l’été. Je faisais du taï chi dehors, au soleil, en différents endroits du jardin, je pratiquais les 108 dont je voulais finir de mémoriser les 2 premières parties apprises cette année, je travaillais également au jardin, un peu n’importe comment, avec des outils contondants que nous venions d’acheter. Je sciais des branches, je taillais des bosquets énormes où il m’est arrivée de me fondre en short, à plaisir, pour y traquer, scier l’arbre qui s’y était invité et pensait pouvoir continuer à longtemps pousser tranquille et échapper à ma fougue – tel ce pauvre noisetier poussé dans le laurier. Depuis que je le pratique, de façon tout à fait amatrice, le jardinage me paraît à la racine même de la civilisation, ça coupe, ça trace, ça fauche. Dans le corps à corps, la joie et la cruauté. Au moins en été.
Je n’ai jamais reçu, ou très tard, tout récemment, de réponse à cette lettre. C’est quelque chose que je ne supporte plus, que j’accepte mais ne supporte plus. Ça me laisse sans voix, ça m’éteint. Je le comprends, pour avoir écrit, autrefois, une quantité phénoménale de lettres auxquelles il n’a que rarement été répondu. Ces absences de réponses ayant fini par avoir raison de ma fougue, et je me serai, petit à petit, contentée d’écrire ces lettres mentalement à quoi aujourd’hui également je me refuse, pour y avoir passé trop de nuits blanches et vaine. Cette (unique) lettre est très pauvre par rapport à tout ce que j’aurais voulu ou pu ou dû, ma foi, je n’en savais rien, écrire durant cette été. Je n’ai rien dû ou pu ou voulu écrire en dehors d’un journal de mon alimentation et de cette lettre donc, avec les plus grandes difficultés, restée sans réponse. Je constate que je suis à une époque de ma vie où je suis en retenue par rapport à tout ce que j’ai trop pratiqué (mais ça dure depuis combien de temps). Et la lettre, au départ, à constitué mon premier mode de pensée. Aujourd’hui, je suis bien en peine de trouver à qui écrire et surtout, je ne m’y risque plus.
Ainsi, cette lettre à EL, dont il est question là, mais là aussi. Autrefois, cette lettre qu’il me manque d’écrire l’aurait-elle déjà été, écrite et envoyée, et son destin de rester sans réponse serait-il déjà scellé. Aujourd’hui, dès qu’il m’en vient une, je la retiens. Or, cette lettre à EL, j’y tiens, il faut que je l’écrive car je souhaite y développer ma réflexion sur les liens de la psychanalyse et du taï chi.
Ce qui me manque dans ces lettres d’autrefois, ces premières lettres, c’est leur inconscience. Elle n’avait d’autre objet que l’allant de leur adresse même. Je devais ignorer les entamant ce dont il serait question, que je développais cependant jusques au point final, allègrement posé. Probablement auront-elles pris certaines teintes d’anxiété au fur et à mesure qu’elles comprenaient qu’elles ne trouveraient pas d’échos, qu’elles resteraient sans résonance. Il y eut nombre de lettres d’amour. Ne s’agit-il pas toujours de corps-respondance ? et si ça ne respond pas dans le corps dans l’autre, eh bien, ça ne respond pas – ça ne correspond pas. S’agit-il pour autant d’être sans destin. Et plutôt que de ne rien écrire, écrire au vide. Et nous n’avons pas tous une lettre chevillée au cœur (pour expliquer l’absence de réponse).
Et puis, il y a l’envers de cela, ou l’avers, comme l’avers de la médaille, c’est que cela est juste aussi, juste et bon, de rester sans réponse. Que le vide est une tentation, un vertige. Qui en inspira plus d’un, plus d’une.
Et aussi : la passion de l’écriture se partage quelquefois. S’agissant de l’objet, lui, ne se partage pas. C’est ce que l’on ressent aussi, quand on reste sans réponse. On comprend que l’on se sera trop rapproché de son propre objet. Dont la nature est d’être détaché.
C’est pour ça que je ne répondrai, à mon tour, pas à MC. Ça ne correspond pas. Et mieux vaut encore apprendre à s’adresser au vide. Lui répondre, ce serait encore me retenir de lui répondre, me retenir de prendre support d’elle pour écrire ce que j’ai à écrire. Je suppose qu’il faut pouvoir écrire des lettres sans retour, à nul. Et je me souviens alors, que c’était une composante de mes lettres, toujours : crois-moi, cette lettre n’attend pas de réponse. Je prévenais l’absence et je la convoquais, mais aussi je l’absolvais de sorte que je puisse écrire encore. Surtout, écrire encore. Car, à vrai dire, il est plus agréable d’écrire à l’un qu’à nul. Or, nul probablement, ne peut entendre ce que j’ai à dire. Nul sans que les oreilles lui saigne. (puisque c’est le but, d’en saigner).
Maintenant, j’irais bien mordre dans quelque chose, moi.