lundi 8 août 2016

L’horloge biologique chinoise (mise à l’heure d’été)

Horloge biologique chinoise Yang Sheng

Une compilation des 12 périodiques de la médecine traditionnelle chinoise et d’un article intitulé «Un temps pour chaque chose»

Le Yang Sheng se veut une technique pour optimiser différents aspects de la vie dont la santé, la beauté, la longévité, la qualité d’être et la qualité de vie.

L’horloge biologique chinoise nous indique les principales caractéristiques spécifiques à chaque période d’une journée. Selon la chronologie traditionnelle chinoise la journée compte 12 périodes de deux heures. Une personne en harmonie avec son horloge biologique gagne en vitalité tout en évitant le gaspillage de son énergie vitale, son Qi.

dimanche 14 août 2016

l’annonce faite à M
— L'été à l'heure chinoise

15:12
15:12

Chère M,

Comme prévu, nous sommes à Donn. Là, je suis au jardin, installée sous les noisetiers, je fais une pause après m’être démenée à couper des branches d’arbres. Il fait chaud, il fait bon, ça brûle et j’adore ça.

Malheureusement, je crains  que ça ne soit un peu compliqué pour moi de venir te voir, ainsi nous en avions parlé. Tout simplement, je ne sais pas conduire et dépends pour cela de mon conjoint. A moins qu’un bus ne roule entre chez toi et chez moi. 

Cela dit, tu es la bienvenue, quand tu veux. Nous sommes encore là jusqu’à jeudi. Après, hélàs, c’est retour à la ville.

 

Tu sais, ça fait des mois que je dors mal. Que je me réveille toutes les nuits vers 4 heures. Il faudrait que je vérifie quand ça a commencé, mais probablement au moment où j’ai arrêté les anti-dépresseurs. Et ça au fond, je ne sais plus de quand ça date. Attends, j’en avais fait le conte là, https://www.disparates.org/iota/Series/pour-en-finir-avec-les-antidepresseurs/ . je vais vérifier : décembre 2015. Voilà. Donc, je ne dors plus bien depuis décembre 2015. Cela dit, en contrepartie, je suis beaucoup moins fatiguée.   

Or, au début du mois, alors que nous étions ici, il y a eu un jour où j’ai vomi toute la journée. Cela faisait un bon bout temps déjà que j’avais des nausées, et puis là, crac. C’était le lendemain d’un soir où j’avais abusé des apéritifs et des gâteaux apéritifs donc j’ai pensé « crise de foie». Et j’ai eu l’idée de faire une recherche sur internet avec les termes  « Crise de foie Médecine traditionnelle chinoise ».  Figure-toi que je suis tombée sur des trucs… incroyables… qui m’ont paru décrire exactement mes symptômes du moment. 

Ainsi, par exemple, venais-je  la veille d’avoir été reprise par une incroyable colère, aussi subite qu’injuste (enfin, jamais complètement, n’est-ce pas) et démesurée. Et voilà que la médecine chinoise me parle de foie, de bile, de colère rentrée et sortie, de frustration et de culpabilité, de ruminations, de dépression, etc. , etc. etc. Par dessus le marché, elle me parle également de réveils nocturnes à répétition à 4 heures du matin, typiques, semble-t-il, des personnes souffrant du foie. 

(Oh, un petit écureuil, tout roux, la première fois que j’en vois un ici, tout léger, qui remonte dans l’arbre là-bas).   

D’où, j’en suis venue à conclure à un excès de chi dans le foie (Montée de Yang dans le foie), auquel j’ai
(j’ai l’impression que cet écureuil circule au dessus de ma tête, dans les noisetiers, peut-être qu’il est joueur, il me semble que je l’entends grignoter… oui, ça doit être lui, il grignote puis jette ses coquilles) 
attribué 
(je le vois!!!) 
auquel donc j’ai attribué le fait de parfois sentir trop de chi dans les hauteurs, trop de chi montant, trop peu descendant, du chi qui me pousse parfois curieusement par derrière, au niveau du coccyx et qui me soulève les jambes, ou qui me monte à la tête et me siffle dans les oreilles.

Enfin, je m’en suis trouvée fort aise et me suis dit que voilà, c’était fait, c’était ça, je vais faire ce qu’ils disent, vivre à l’heure chinoise,  guérir. Recommencer à dormir, cesser d’être envahie (et d’envahir les autres) par des colères démesurées, sortir de mon infinie tristesse noire.  Fini. Je ne boirai plus jamais de café, ni d’alcool, ni ne mangerai de produits laitiers, ni d’ailleurs de sucre. 

Après, bon, ça a été peut-être un tout petit peu décevant, pas aussi rapide qu’espéré, et là, enfin, je ne dors toujours pas. Mais, les colères ont disparu ou retombent très facilement. Et puis, je vis à une autre heure,  il y a maintenant une heure à laquelle je vis, à laquelle je me rapporte, et ça fait un bien fou. D’abord, ça cadre, ça me dit ce que je dois faire et ne pas faire, ce qui est toujours très reposant, puis ça me mène à faire connaissance avec quelques-uns de mes organes dont je dois dire que j’ignorais jusque là l’emplacement exact dans mon corps. Bon, je ne sache pas, et je n’ai pas vraiment trouvé (sur l’internet), sauf peut-être en chi quong, qu’il existe d’exercice de taï chi particulier pour le foie, mais j’ai l’idée que dans l’ensemble, de toutes façons, le taï chi, ça doit être bon. S’agissant du chi qui me soulève de terre, je m’astreins à me concentrer sur les jambes, à m’ancrer encore davantage. 

Bien. Je me demande pourquoi je te raconte ça.  Enfin, c’est un peu la grosse obsession du moment. C’est un peu ça le truc avec moi, c’est que ça fonctionne toujours pas obsession. Bon, c’est comme ça. Je ne suis d’ailleurs rien arrivée à écrire à propos de tout ceci. Et je t’écris un peu pour ça aussi, m’y astreindre, car, je me connais, tout ce que je vis ici pour le moment sera très, très, très vite oublié. Ca aura été. 

Enfin, j’ai également pris rendez-vous – mais c’était au plus pire moment, à un trop triste moment de dépression, qui paraît déjà bien loin – avec l’acupunctrice que N connaît, parce qu’il n’est pas sûr que je m’en sorte avec mes seules tisanes, mon petit taï chi dans le soleil levant ou mes séances de débroussaillage intempestives. Je la vois en septembre et suis curieuse de ce que ça va donner. Dans l’ensemble, je suis très curieuse de tout ce que va pouvoir donner ce qui se passe ici en ce moment.

J’ai été un peu longue, comme toujours, et en toutes choses. Je n’ai parlé que de moi. Pourtant, j’espère que tu vas bien de ton côté et te dis que je suis heureuse de t’avoir rencontrée.

J’espère que nous aurons l’occasion de nous revoir,

t’embrasse,

Véronique

lundi 29 août 2016

C’est un RESET qu’il nous faut
— 29/08/16 16:41

À A. (avec qui nous avons mangé ce midi, dans un restaurant « branché »), je raconte que je suis toujours occupée à arrêter quelque chose, que je dois aimer ça. 

Je raconte. Oui. Je m’entends lui parler et je réalise combien effectivement j’avais pour habitude de lui raconter des choses, de les tirer en longueur, de concocter du suspense. 

Je ne sais pas s’il y avait d’autres personnes à qui je parlais ainsi à Bruxelles. Probablement, oui. J’avais oublié, que je pouvais parler comme ça.  C’était très amusant.

A. me manque. Elle m’avait appelée lors de notre arrivée. Nous avions rapidement parlé, moi, aussi vite que possible, raconté ce qui m’arrivait, puisqu’il m’arrive toujours quelque chose, donc raconté, ces histoires de foie, et elle m’avait répondu d’une façon telle que la nuit suivante j’avais rêvé  d’elle, et, pour ce que je m’en souviens, il était question qu’elle actionne, qu’elle enclenche un RESET (en deux endroits de mon corps qu’elle avait connectés). J’étais enchantée. Nous avions parlé de ma mère aussi.

mardi 30 août 2016

NUIT

3h56, rengaine qui me vient à l’esprit1   : « Je voudrais me
Je voudrais me
Je voudrais me
Tuer
Je voudrais me
Je voudrais me
Je voudrais me
Tuer »

Qu’opposer à cela ? 

Tenter le mot « Vivre ».

Mais, nous sommes de retour à Paris, le matelas est chaud et mou et je ne sais à quoi m’appuyer, à quel endroit du corps (si ça fait sens de dire cela). 

Je viens dans le salon avec ma couette. Je vais voir si je trouve une meilleure place au sol, mais auparavant j’éteins toutes (tout ce que je peux, ce n’est pas toujours possible)  les veilleuses, toujours allumées et qui brûlent pour rien (hashtag PourRien), ce qui m’insupporte, viscéralement. L’idiotie de ces lumières rouges ou jaunes dont l’industrie veut qu’elles continuent de vriller nos nuits. Mais pourquoi (ne peut-elle pas nous restituer nos nuits noires).  

http://conseils-thermiques.org/contenu/arretez_appareils_en_veille.php

J’écris un mot rapide à A. qui m’a, me semble-t-il, parlé hier2 de séances qu’elle avait faites de « re-programmation du corps »  (je pense à la dé-programmation de ces méchantes petites phrases qui me viennent la nuit, de je ne sais où).  Il me semble qu’A disait qu’il s’agissait de déprogrammer des choses qui avaient été  utiles un moment et que le corps ne pouvait s’empêcher de répéter, cherchait ensuite à répéter, jouissait de répéter. Elle ajoutait qu’il s’agissait d’une théorie. 

2016-08-30 4:12 GMT+02:00 :
Comment s’appelle ce dont tu me parlais hier dans la rue ? L’auto-programmation ? La re-programmation ? Et comment me disais-tu que ça marche ?
C’était super de se revoir
Véronique 

5h15
Cher EL,  Je prends plume et papier pour vous écrire. Peut-être s’agit-il d’un acte magique et mes mots s’inscriront-ils alors délicatement dans votre chair (vous croyez, je l’espère, qu’elle existe), aussi vaudrait-il mieux que vous me lisiez de nuit, tout comme je vous écris.
Lettre abandonnée. 

Rengaine de 5h39 : au secours
au secours
au secours
au secours 
 
05:51 Je vous salue Marie 
05:56 De l’eau
De toute manière, je ne fumerai plus (les cigarettes de ma mère) puisque nous avons quitté Bruxelles. 
06:04 comment dit-on (prononce-t-on)  foie en anglais,  « liver » ? 

 ˈlɪvə(r

« Mais deliver-nous du mal. Amen. »
 
06:49 Couchée dans le canapé fuchsia. Décidément, je ne serai pas arrivée à lancer une relaxation. Chanson dans ma tête…. Seulement l’air, quelques paroles, chanson très chaotique, dont je ne connais ni le titre ni le groupe: …. who you really are
Who
who who
who who
who
 
08:51 réveil. Finalement endormie après entame de relaxation. Vlady, dans mon souvenir, les faisait en commençant depuis le bas du corps, depuis les pieds. Aujourd’hui, N les fait depuis le haut. Mais, peut-être qu’effectivement commencer depuis le visage est plus rapide. Je ne sais même pas si j’ai commencé depuis le visage. Je me disais, il suffit de nommer, nommer les parties du corps. Et en effet, cela suffit. 
 
09:00 Maintenant, j’ai comme le gueule de bois. Je n’ai pas bu hier.  Finalement, je n’ai pas bu à Bruxelles, seulement fumé et trop mangé (restaurants presque tout le temps). 
 
Je n’écris pas le plus important. J’écris ce qui s’écrit et qui est mûr. Ça tombe, ça se détache. Et, puis, j’écris d’abord ce qui guérit, j’écris pour guérir, ce que j’invente, je trouve pour guérir. Et puis,

je suis curieusement (affreusement, dilemnement, corneillement) tiraillée entre le temps pour le langage et le sens, le langage, le sens, la mémoire, et le temps pour ce qui n’en n’est pas,  ce qui y échappe,  ce qui permet d’y échapper. 

 
Aujourd’hui, je voudrais peut-être retourner aux mots, à cause aussi de mon frère que nous venons de revoir à Bruxelles et qui avait logé ici chez nous au début du mois. 
 
Mais, il me semble que j’ai, ces dernières années, perdu une grande partie de ma capacité à penser et à manier la langue. Je me suis vidée, petit à petit et possiblement également à l’aide des médicaments. Je me suis vidée pour n’avoir pas supporté, plus supporté de rester seule avec mes pensées. La jouissance de penser était trop grande pour arriver à m’en départir.  Et l’impératif  de n’en rien lâcher, rien donner, surtout rien,  trop importante.
 
Cette nuit je pensais : Il faut arriver à lâcher le rien pour le manque.
 

Le rien est cet objet qui fait bouchon au manque. On le voit dans cette image que je viens de donner. De la jouissance de pensée fermée sur elle-même dans la tête, bouchée, bouclée, ne laissant surtout rien s’échapper, formant l’objet rien lui-même, qui ne débouche sur rien. Rien est un nom du manque symbolique. Un nom qui appartient au langage.  L’intérêt de penser par le corps ou au départ du corps, c’est d’abord d’étendre les territoires de la pensée consciente et ensuite, surtout, que cela prenne son départ de ce qu’il y a. Qui scelle  l’objet de la jouissance de pensée (l’a-pensée). Le problème de cet objet, de ce recel par le rien, c’est qu’il s’extrait, qu’il tend à s’extraire du monde qui l’environne, à fomenter un monde pur esprit – dans un déni du corps que je ne m’explique plus. Et rien est aussi le nom d’une identification symbolique. Identification au signifiant qui manque au symbolique, au langage, pour le boucher. 

Enfin tout ça est assez imbuvable, pour ne pas dire imbitable.

Un déni du corps que je m’explique pas, disais-je. Peut-être parce qu’il est le lieu de cette jouissance de pensée sans que cette pensée en sache finalement grand chose, inconsciemment. Mais enfin, cette explication paraît un peu grossière. Peut-être parce que le corps est non seulement le siège de la jouissance de pensée mais également de bien d’autres jouissances. Ou parce que le corps a des trous et des besoins et des désirs et une vie qu’il paraît mener de son côté, dans une totale indépendance. 

Or nous pouvons le visiter de l’intérieur, nous pouvons l’apprendre, nous pouvons le ressentir, nous pouvons même lui parler, nous pouvons lui faire du bien, et nous pouvons ressentir le bien qu’il ressent de par  sa seule existence, de par son simple fonctionnement. Nous pouvons le sentir réagir à nos mots. Nous pouvons lui en apprendre de nouveaux mots et tenter de supplanter ceux qui se sont inscrits en nous, inconsciemment, et qui reviennent et pas toujours à notre plus grand  agrément (je pense à mes rengaines suicidaires bien sûr).

Enfin, il ne s’agit ici que d’une tentative de mise en boîte de phénomènes étranges que j’observe par ailleurs. 

Et que le jouissance d’un pur esprit,  la jouissance de pensée, est plutôt celle d’un corps couché, sans mouvement. Sans interaction physique avec le monde extérieur. 

D’où ma méfiance à l’égard des jeux vidéos, à cause du sentiment qu’ils ne relèvent finalement que de jeux de l’esprit. De jeux de l’esprit et de jeux de maîtrise, dont le corps est absenté.

Et je reviens à cette idée que nous vivons dans un monde qui tente à nous défaire du faire, à nous désapprendre le faire. A cette idée du monde ready-made, où notre corps n’a plus rien à faire sinon du sport, histoire de correspondre à une certaine image d’un corps maîtrisé (et dont la jouissance est maîtrisée). Où les liens du corps et du faire ont été effacés, détruits. Où les liens du corps et de la personne qui l’habite sont jours après jour supprimés.  Où ça a de moins en moins de sens d’être physiquement dans le monde, sinon comme image, et de préférence comme image d’un corps jouissant convenablement,  sautant, bondissant, dansant, courant, riant dans une parfaite maîtrise de lui-même –  quand cette maîtrise nous est retirée jour après jour que nous passons dans des bureaux idiots à des travaux idiots.  Ces lieux où nous sommes séparés de nos corps, amenés à tous devenir idiots (parce que c’est ça la jouissance phallique dont parle Lacan, c’est ça la jouissance de l’idiot : celle du manche et du pur esprit, celle du mort). 

Ceci en grande partie inspiré par le film Demain

[Écrit dans la nuit du 29 au 30 août. Et publié le 5 septembre après une nouvelle et longue et pénible nuit d’insomnie.]

 

Notes:
  1. bon d’accord,  fumé hier, 2 cigarettes, me semble-t-il. et puis, je ne sais plus si j’ai déjà parlé de ces rengaines qui me visitent inopinément la nuit, probablement. []
  2. nous étions à Bruxelles []
mardi 6 septembre 2016

J’avais écrit cette lettre

J’avais écrit cette lettre à M, rencontrée au stage de taï chi, au début du mois de juillet. Je l’ai écrite en plein mois d’août, à une époque où il faisait chaud, où j’étais en plein dans mon obsession du foie et de l’horloge biologique chinoise, mais aussi en pleine énergie, enthousiasme, dans le brûlure de l’été. Je faisais du taï chi dehors, au soleil, en différents endroits du jardin, je pratiquais les 108 dont je voulais finir de mémoriser les 2 premières parties apprises cette année, je travaillais également au jardin, un peu n’importe comment, avec des outils contondants que nous venions d’acheter. Je sciais des branches, je taillais des bosquets énormes où il m’est arrivée de me fondre en short, à plaisir, pour y traquer, scier l’arbre qui s’y était invité et pensait pouvoir continuer à longtemps pousser tranquille et échapper à ma fougue –  tel ce pauvre noisetier poussé dans le laurier. Depuis que je le pratique, de façon tout à fait amatrice, le jardinage me paraît à la racine même de la civilisation,  ça coupe, ça trace, ça fauche. Dans le corps à corps, la joie et la cruauté. Au moins en été.

Je n’ai jamais reçu, ou très tard, tout récemment, de réponse à cette lettre. C’est quelque chose que je ne supporte plus, que j’accepte mais ne supporte plus. Ça me laisse sans voix, ça m’éteint. Je le comprends, pour avoir écrit, autrefois, une quantité phénoménale de lettres auxquelles il n’a que rarement été répondu. Ces absences de réponses ayant fini par avoir raison de ma fougue, et je me serai, petit à petit, contentée d’écrire ces lettres mentalement à quoi aujourd’hui également je me refuse, pour y avoir passé trop de nuits blanches et vaine. Cette (unique) lettre est très pauvre par rapport à tout ce que j’aurais voulu ou pu ou , ma foi, je n’en savais rien, écrire durant cette été. Je n’ai rien dû ou pu ou voulu écrire en dehors d’un journal de mon alimentation et de cette lettre donc, avec les plus grandes difficultés, restée sans réponse. Je constate que je suis à une époque de ma vie où je suis en retenue par rapport à tout ce que j’ai trop pratiqué (mais ça dure depuis combien de temps). Et la lettre, au départ, à constitué mon premier mode de pensée. Aujourd’hui, je suis bien en peine de trouver à qui écrire et surtout, je ne m’y risque plus. 

Ainsi, cette lettre à EL, dont il est question là, mais là aussi. Autrefois, cette lettre qu’il me manque d’écrire l’aurait-elle déjà été, écrite et envoyée, et son destin de rester sans réponse serait-il déjà scellé.   Aujourd’hui, dès qu’il m’en vient une, je la retiens. Or, cette lettre à EL, j’y tiens, il faut que je l’écrive car je souhaite y développer ma réflexion sur les liens de la psychanalyse et du taï chi.

Ce qui me manque dans ces lettres d’autrefois, ces premières lettres, c’est leur inconscience. Elle n’avait d’autre objet que l’allant de leur adresse même. Je devais ignorer les entamant ce dont il serait question, que je développais cependant  jusques au point final, allègrement posé. Probablement auront-elles pris certaines teintes d’anxiété au fur et à mesure qu’elles comprenaient qu’elles ne trouveraient pas d’échos, qu’elles resteraient sans résonance. Il y eut nombre de lettres d’amour. Ne s’agit-il pas toujours de corps-respondance ? et si ça ne respond pas dans le corps dans l’autre, eh bien, ça ne respond pas –  ça ne correspond pas. S’agit-il pour autant d’être sans destin. Et plutôt que de ne rien écrire, écrire au vide. Et nous n’avons pas tous une lettre chevillée au cœur (pour expliquer l’absence de réponse). 

Et puis, il y a l’envers de cela, ou l’avers, comme l’avers de la médaille, c’est que cela est juste aussi, juste et bon, de rester sans réponse. Que le vide est une tentation, un vertige. Qui en inspira plus d’un, plus d’une. 

Et aussi : la passion de l’écriture se partage quelquefois. S’agissant de l’objet, lui, ne se partage pas. C’est ce que l’on ressent aussi, quand on reste sans réponse. On comprend que l’on se sera trop rapproché de son propre objet. Dont la nature est d’être détaché. 

C’est pour ça que je ne répondrai, à mon tour, pas à MC. Ça ne correspond pas. Et mieux vaut encore apprendre à s’adresser au vide. Lui répondre, ce serait encore me retenir de lui répondre, me retenir de prendre support d’elle pour écrire ce que j’ai à écrire. Je suppose qu’il faut pouvoir écrire des lettres sans retour, à nul. Et je me souviens alors, que c’était une composante de mes lettres, toujours : crois-moi,  cette lettre n’attend pas de réponse. Je prévenais l’absence et je la convoquais, mais aussi je l’absolvais de sorte que je puisse écrire encore. Surtout, écrire encore.  Car, à vrai dire, il est plus agréable d’écrire à l’un qu’à nul. Or, nul probablement, ne peut entendre ce que j’ai à dire. Nul sans que les oreilles lui saigne. (puisque c’est le but, d’en saigner). 

Maintenant, j’irais bien mordre dans quelque chose, moi. 

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