enfermée dans la chambre (venue aux faits)

12 mai 2007 | mai 2007 | brouillonne de vie, RÊVES | , , , |

samedi 12 mai 12:57

rêve de cette nuit. ma mère à la clinique. on découvre qu’elle est très malade. qu’elle a un cancer, je ne sais plus de quoi, des poumons peut-être, enfin, ça reste vague. on lui dit qu’elle doit se reposer. on lui dit qu’elle doit se faire aider. je suis là, on me fait comprendre que je dois l’aider, absolument. je vais de mon côté à un hôpital. je suis malade aussi. on me met des pansements. beaucoup. je vais voir ma mère, je lui dis que je suis très malade. moi aussi, très malade. je lui dis « mais tu sais, c’est vrai, je suis très malade. » elle n’a pas l’air de me prendre au sérieux. nous sommes à l’hôpital. je crois qu’elle est en soins intensifs. on la traite comme si elle était très malade. qu’elle pourrait mourir. je me retrouve à l’école des dames de marie, où j’ai fait mes humanités. je crois que je suis sur une sorte de chaise roulante. j’explique que je suis très malade, je découvre mes plaies. ma chair est à vif.

Rêve d’il y a plusieurs nuits. Irène me propose que nous vivions ensemble. Elle me fait visiter un appartement qui doit lui appartenir, très grand, très beau, mais tout y est très ancien, vieux, poussiéreux, sombre. L’appartement est si grand que je lui demande ce que nous ferions si nous entrions en froid, avions un petit problème, parce qu’il serait facile que nous vivions chacune dans un coin de l’appartement, sans nous rencontrer jamais, et que je redoute cela, de longues bouderies. Je lui reparle de cela par deux fois. Elle ne me répond pas. Elle a l’air désireuse de vivre avec moi. Me fait ensuite visiter un autre appartement, moins grand, plus vide, plus ancien encore, me semble-t-il, avec une sorte d’odeur de moisi. Je l’interroge sur les chambres. elle me montre la sienne, puis apparaît la mienne. Je lui parle de Jules, je lui dis que je ne peux pas me séparer de lui. Je lui demande si elle me fera payer plus cher parce que je suis avec Jules, parce qu’il y a une personne en plus. Je m’aperçois qu’il y a un petit lit pour Jules dans ma chambre. Je lui dis que je ne veux pas ça, que Jules dorme ma chambre. Une petite chambre pour lui apparaît.

A quoi sert de raconter des rêves, si on a aucune idée de la façon dont les interpréter. J’ai dû faire ce dernier rêve mercredi, juste avant la séance de jeudi. J’ai la nausée, une terrible nausée, il faut que j’arrête d’écrire.

13 :21. Nausée. Je préfère écrire à la main plutôt qu’à l’ordinateur. Je me suis enfermée dans la chambre, couchée sur le lit. Je passe beaucoup de temps sur le lit en ce moment, peut-être cela correspond-il aux heures que je passais devant la télé quand nous en avions une, avant qu’elle ne cesse de fonctionner en décembre de cette année. A la place, je rêve ou je lis – ou je dors. Et je préfère le lit, la chambre au salon. J’aime beaucoup cet endroit – qui n’est pourtant pas très bien aménagé. J’aime la lumière et les arbres devant la fenêtre. Jules ne s’apercevra pas de mon absence, Stan, son frère, son grand frère, son demi-frère, le fils de Frédéric, est là – et Jules l’aime énormément. Ce que je voudrais, c’est poser ma tête sur l’oreiller et fermer les yeux. Je suis ici à écrire pour dire que lors de la dernière séance, j’ai raconté ce qui m’était arrivé. Je ne suis d’ailleurs ici, à écrire, que pour raconter ce qui s’est passé en séance. Je vais fermer les yeux deux minutes.
Fermer les yeux, c’est proprement délicieux.
Heureusement qu’il fait plus froid ces jours-ci, c’est moins confortable, à moins que je ne me glisse sous la couette. C’est que je suis un peu inquiète d’être si encline à me coucher. (Les maisons du rêve avec Irène sont des maisons de « grand-mère », abandonnées. Je préfère la première, malgré sa taille, sa grande taille, à la deuxième, vraiment trop vieille.) Je m’émerveille de ces phrases qui me viennent, de leur déroulement, de leurs virgules, du mot qui suit. Finalement, le point, et je ferme les yeux. tout ça pour. tout ça pour ne pas. Ne pas. Je lève les yeux, le vert de l’arbre, le soleil qui joue dans ses feuilles, ce vert dont Walser R. s’émerveille dans le livre que je lis en ce moment. Ce n’est pas que du vert que je m’émerveille – l’arbre devant la fenêtre est jeune encore et sa taille s’ajuste parfaitement dans l’encadrement de la fenêtre, le vent faisant jouer son corps mince. Il ne me semble pas avoir jamais été d’humeur aussi « contemplative » que ces jours-ci. enfin, je rêve beaucoup aussi, je rêvasse. D’une incroyable paresse. Tout de même, je m’étonne (tout ça pour ne pas), je m’étonnais hier, regardant l’arbre bouger, couchée sur ce même lit, sur le dos plutôt, face à lui, et ressentant ses mouvements dans mon corps-même, immobile, versée, déversée.

« Les faits. » Les suivants : l’âge ? 16, 17 ? Les nuits, une boîte de nuit, où j’allais seule, le Richard, depuis le jour de mes seize ans. Je dansais, je dansais, je ne buvais, pas d’alcool. « Les faits. » J’ai moi-même souvent dit que je couchais avec tout le monde, n’importe qui, un jour dans la rue, me suis-je souvenue hier, à cette époque. Assez souvent pour que je le croie je l’ai dit – parce que de souvenirs, je n’en ai pas tant. Assez joué. Silence jusqu’à ce que. Silence ! Deux hommes, 2 jeunes hommes, deux amis, un blond, un brun. toujours au bar. Jeunes et beaux. Leurs deux amies, blondes, très minces, leurs pantalons serrés, chaussures pointues, coiffures « lionnes » (tout ça, pas dit, en séance). Silence. Silence (mais le soleil dans l’arbre, c’est important). Je ne sais pas, plus du tout, comment je suis arrivée dans l’appartement de l’un d’entre eux, le blond. Un très grand appartement, « moderne », en banlieue me semble-t-il, car c’était loin de la ville, du centre-ville. Loin. dans la chambre, nous avons fait l’amour, je ne me souviens plus de son nom, puis il est parti, me laissant seule, là. J’étais au lit, dans le lit, quand le deuxième est arrivé, son copain, le brun. Il s’est couché dans le lit, c’était la nuit, m’a parlé, le lit était très grand, m’a demandé qui j’étais, si je connaissais son copain depuis longtemps. J’ai répondu que non, que cela datait du soir même. Son comportement a alors changé, comme sis ma réponse l’y autorisait. Il m’a fait l’amour. m’a retournée sur le ventre. M’a enculée. Ce que je n’ai pas pu raconter en séance. Est-ce que j’ai crié de douleur. J’ai eu mal. ensuite m’a fait lever. M’a dit de partir, de m’en aller. (C’est incroyable comme les mots se suivent, s’enchaînent). Dans le hall, comme il s’apprêtait à fermer la porte, je lui ai demandé de l’argent, pour prendre un taxi, je lui ai dit que je n’en avais pas. Je ne savais pas où j’étais. Il m’a ri au nez, m’a dit : « Quoi, moi, qui fais travailler des filles, alors qu’il y a en ce moment-même des filles qui travaillent pour moi, toi, tu me demandes de l’argent !!! » et il a fermé la porte. Je suis rentrée en stop. J’étais silencieuse, dans une voiture, la nuit. Je veux dire qu’une sorte d’énorme silence m’a prise, m’a entonnée.
Tiens, plus de papier.
Pourquoi est-ce que quelques jours plus tard, je suis retournée à cette boîte. Pourquoi est-ce que je me suis approchée du garçon au bar, comment, le blond, lui ai-je laissé me dire, d’un ton moquer que je lui avais filé je ne sais quelle maladie « honteuse ». « Tu veux la voir, ma bite, viens, viens voir, tu veux voir dans quel état tu l’as mise ? ». Je me suis éloignée, comment ai-je fait ? Qu’ai-je dit ? en montant les escaliers pour sortir, un jeune qui les connaissait m’a rejointe, m’a dit, mais vraiment gentiment, m’a demandé « pourquoi je faisais ça ». M’a dit que je ne devais plus le faire. Je l’ai écoutée. Les arbres. Il y a beaucoup de vent. Et là-bas, derrière, le ciel. Un bout de ciel.
Tu vois, je ne sais pas pourquoi pendant des nuits, et des nuits, j’ai repensé à ce qui s’était passé. Et c’est vrai, c’était comme de tomber dans un trou. Jamais je n’avais raconté cette histoire. Je n’aurais jamais cru que je le puisse. l’écrire non plus.

Le rêve aux grand appartement, avec Irène :
Irène est une amie dont je n’ai pas pris l’amitié au sérieux, que j’ai perdue à cause de ça, que j’ai aimée plus que ce que je ne croyais – et pas seulement à cause de sa liaison avec mon frère, comme j’ai pu le croire et si j’en crois les nombreuses fois où je repense à elle. J’ai deux frères, que j’aime beaucoup.
Dans le rêve, l’appartement était très grand, comme j’ai pu écrire que l’appartement des 2 garçons était très grand. Et il est aussi vieux que le leur était moderne, aussi poussiéreux que mon souvenir.
Je ne sais pas pourquoi je m’inquiète que nous puissions y vivre séparés. Amies, mais séparées, vivant ensemble mais séparées, nous boudant. J’ai beaucoup boudé dans mon enfance, trop longuement, et il est arrivé avec Anne, une amie homosexuelle, que nous nous soyons boudées plusieurs mois, alors que nous travaillions l’une à côté de l’autre, que nous soyons parties en vacances ensemble, et que nous nous aimions beaucoup.
Maintenant que j’y pense, les deux amies des deux garçons, toujours habillées, coiffées de la même façon, étaient peut-être jumelles. Je me suis demandée, après, si elles « travaillaient » pour ces hommes.
Ces 4 jeunes gens détonnaient fort dans la boîte de nuit. Ils étaient beaux, différents, arrogants, méprisants. Fascinants.

Le rêve avec ma mère cette nuit :
Je ne vois pas le rapport de ce rêve avec tout ceci. Nous étions malades, ma mère ne faisait pas attention à moi, nous étions malades, elle était malade comme la Desperate Housewive vue la veille à la télévision, malade de trop de travail, malade d’être mère. Dans le rêve, je suis écorchée vive sous les pansements. Peut-être cela a-t-il à voir avec ce que j’ai dit de la façon dont je n’ai plus su comment m’habiller après cet événement, comment je n’ai plus pu sortir, comment j’ai totalement perdu mon image. Mais quel rapport avec ma mère ? Elle y a un cancer des poumons, je crois. C’est son torse qui est atteint, tandis que moi, ça se passe plutôt dans la partie inférieure de mon corps. Mon père est mort des poumons. Ma mère est si malade qu’un médecin ferme la porte de sa chambre. Parce qu’elle va peut-être mourir. L’école où je retourne dans mon rêve date de l’époque visée par le souvenir aux deux garçons. Ma mère m’avait dit que quand elle était jeune, elle avait rêvé d’être torturée, pour l’épreuve de sa foi, et qu’elle était brûlée à petit feu, sur des charbons ardents.

recette italienne

21 mars 2013 | mars 2013 | RÊVES | , , , , , , , , , |

Le rêve

Rêve du 13 au 14 mars 2013

Titi,  et puis aussi mes parents vont venir chez moi. JF et JP, mes deux frères aussi probablement. Je prévois que nous mangerons au restaurant le premier soir et que le lendemain je ferai une recette italienne. Cela se passe avenue Paul Deschanel, c’est mon premier appartement, au quatrième étage, j’avais une vingtaine d’années.

Puisque je vais cuisiner, je dois faire des courses. Je suis maintenant dans le quartier de mes parents, rue Waelhem, celui que je viens donc de quitter pour habiter seule. Dans une rue inventée par le rêve, je trouve une épicerie italienne. C’est un quartier qui appartient aux rêves, qui m’y ramène régulièrement, on y parvient en bifurquant dans la chaussée d’Helmet. Je décide d’y acheter tout ce dont j’ai besoin pour la recette. A l’intérieur de l’épicerie, je me rends compte que j’ai oublié de prendre la recette. J’en parle à l’épicière, la décris comme très longue, lui dis mon intention d’en acheter chez elle tous les ingrédients. Elle s’y intéresse, voudrait la voir. Elle va la cuisiner et mettra le plat en vente, dans des barriques.

Quand je retourne au magasin avec la recette, j’en profite pour (oser) la lire. Je m’aperçois qu’elle n’est pas si difficile que ça : essentiellement composée de 4 sortes différentes de pâtes et de crevettes qu’il faut décortiquer – en quoi consiste finalement la seule difficulté de la recette. Je laisse la recette à l’épicière. Je lui achète 2 bouteilles de vin.

Il y a également un livre que je voudrais acheter. Je monte la chaussée d’Helmet, toujours dans le quartier de mes parents, à la recherche de la librairie. Je ne la trouve pas, ni le livre.

Puis, je vais à Louvain chez ma tante. Je pense que mon intention est d’y faire des courses. Or, elle est toujours à son appartement.  Elle n’est donc pas encore partie pour Bruxelles. Je me demande comment elle compte y parvenir (puisqu’elle doit y venir me rendre visite). Je me demande quelle est la durée du trajet Louvain-Bruxelles. Je pense qu’il s’agit de vingt minutes. Elle revient de chez les morts, bien sûr. Encore un peu blême et peut-être fragile. Mais est bien elle-même, allongée sur son divan, odalisque avec son fume-cigarette.

Éléments d’interprétation

Les lieux

L’appartement au quatrième étage de l’avenue Paul Deschanel, mon premier appartement.
Le quartier de la rue Waelhem, où j’habitais donc juste avant. La chaussée d’Helmet où nous faisions nos courses.
Le quartier imaginaire. Je le retrouve en rêve, en bifurquant sur la droite dans la chaussée d’Helmet. En prolongeant une promenade que je faisais parfois avec mon père. Qui m’y avait fait découvrir une cité ouvrière, en briques (le foyer Schaerbeekois).
Louvain, où ma tante habitait, à 20 minutes en train de Bruxelles.

les pâtes fraîches / l’homme aux cervelles fraîches

Les pâtes fraîches qu’il faut à la recette m’évoquent d’abord les « cervelles fraîches » de « L’homme aux cervelles fraîches » – ce cas  d’un certain Kris, Ernst Kris, plusieurs fois commenté par Lacan. C’est une lecture lointaine, dont il ne me reste que peu de souvenirs. Un patient qui se soupçonne de plagiat se voit réfuté par son analyste, à qui il avoue alors abruptement que tous les jours en sortant de sa séance, il fait un détour pour reluquer des menus de restaurants, et spécialement celui où il font de la cervelle fraîche, son plat préféré. 

« Alors comme saisi d’une illumination subite, il profère ces mots : “Tous les midis, quand je me lève de la séance, avant le déjeuner, et avant que je ne retourne à mon bureau, je vais faire un tour dans telle rue […] et je reluque les menus derrière les vitres de leur entrée. C’est dans un de ces restaurants que je trouve d’habitude mon plat préféré : des cervelles fraîches.” » – Lacan J., Écrits, Paris, Seuil, 1966, p.397.

Lacan parle d’acting out. L’homme signifie à son analyste que ce n’est pas ça, que quelque chose ne passe pas qui ressort de la pulsion, de l’objet a de la pulsion orale.

Au lendemain du rêve, « pâtes fraîches » donc m’évoque d’abord ça, les « cervelles fraîches » de Kris.

4 sortes de pâtes / 4 ≈ 40 ≈ Guerre ≈ Identification ≈ Un

Bon. Il faut ne faut pas seulement des pâtes fraîches, mais il en faut 4 sortes. Et je ne peux m’empêcher de me demander pourquoi 4?

De quatre, du chiffre 4, il est souvent question dans mes rêves, dans mes interprétations. A l’époque du « rêve du 4X4 », je l’avais fait correspondre à 40, à la guerre quarante. Je parlais alors d’une « date identificatoire à laquelle mon être s’était figé ».

C’est difficile à résumer. Mon père se disait « névrosé de guerre ». Moi-même, lors de ma première année de collège, lors du premier cours d’histoire sur la ligne du temps qu’il nous était demandée de tracer, je n’étais parvenue à pointer que 0/33 – 14/18 et 40/45. C’était mes trois dates. Cela m’est resté. J’avais d’abord placé 40/45, puis 0, puis 33, j’avais ensuite pu ajouter 14/18, l’autre guerre. Il me semble encore voir cette flèche. De même que je me vois encore assise, à ce banc-là, d’école. Et… ma consternation.

D’autres interprétations, d’autres rêves, m’avaient menée à écrire, à pointer la guerre de la lettre G, du point G ( il y avait eu le rêve du GSM,  fait encore en Belgique et, beaucoup plus tard, le rêve du caddie, et je peux donc écrire cette équivalence :

4 → 40 → G → I → 1
4 = 4 ≈ 40 ≈ Guerre ≈ point G ≈ Identification ≈ Un

Curieusement, ces signifiants, ces S1, ces signifiants premiers – comme par exemple ce  4 qui revient, se présente et représente, sous différentes guises -, c’est-à-dire ces mots, ces morceaux de mots, ces syllabes, auxquels se lient mon être, tiennent, traversent les années, me poursuivent. Ces signifiants que je repère, que j’interprète. Qui se donnent vides de leur signification propre sans qu’ils soient vides de toute signification. Et qui se lient les uns aux autres par leurs résonance, leur son, leur réson, indépendamment de leur sens. Comme dans les mots croisés. Et qui font la matière du rêve, la tissent.

Ces signifiants, qui se repèrent par leurs lettres, et qui s’inscrivent dans mon histoire, paraissant y commander, de façon totalement inaperçue, inapercevable, sinon dans cette lecture à la lettre d’un rêve.

La façon dont j’interprète aujourd’hui le quatre, le quarante, va à l’encontre d’une réponse que m’avait faite autrefois mon analyste, mon premier analyste, réfutant que mon histoire puisse s’être arrêtée à cette date-là, de la guerre, 40.

C’était en 1998, je venais de traduire, pour la revue de psychanalyse Quarto, un article de Rivka Warshawsky, Du zéro au septième million : Israël et l’Holocauste. L’auteur y témoigne de sa vie de psychanalyste en Israël et d’un analysant de la deuxième génération après l’holocauste, dont la vie est toute de douleur et de répétitions.

«Cependant, écrit-elle, à certaines conditions, la répétition peut « passer » au témoignage. Ces conditions impliquent le signifiant du trauma. Le signifiant traumatique est le trait unaire de l’inhibition. Dans la vie de l’analysante dont je parle, cet « un » trait de l’inhibition se répétait à l’infini, souffrance et frustration s’étaient faits mode de vie. Que fallait-il qu’il arrive au sujet pour qu’il soit soulagé ? « Pour que le nombre passe de la répétition du 1 de l’identique à sa succession ordonnée, pour que la dimension logique gagne décidément son autonomie, il faut que sans nul rapport au réel le zéro apparaisse. » Le témoignage a le pouvoir de mettre un terme à la répétition.»

Au fond, j’avais interprété et extrapolé ce texte : au départ du souvenir de ma ligne du temps où j’avais le sentiment de n’être jamais arrivée à écrire qu’une seule date, 40, il m’avait semblé pouvoir dire que quelque chose en moi était figé, s’était figé dans cette guerre de quarante, m’obligeant à la répétition. La question qui s’ouvrait pour moi était celle d’un accès à la succession (de la sortie du cardinal, du passage à l’ordinal) par l’instauration du zéro, ainsi que le développe Warchawzky, s’appuyant d’un texte important de Jacques-Alain Miller, « La suture ». Comment pouvais-je poser un zéro qui me sorte de la répétition du même. Comment se concevoir, s’inscrire comme zéro. Je partais du constat de ma propre inhibition, de mon propre temps arrêté, figé. Mon analyste avait balayé ça, me disant que « j’avais le zéro » (puisque sur la ligne du temps, j’avais écris zéro), et que donc, j’étais « introduite à l’histoire ».

Faut-il que j’y voie une « erreur d’interprétation» de mon analyste à rapprocher de celle de Kris, qui trop vite dit à son analysant que non, il n’était pas plagiaire, que ce qu’il faisait était réellement original. Placage trop rapide suivi donc de l’acting out où l’analysant profère ces mots où il est question de cervelles fraîches. L’analysant, dit Lacan, venant montrer ce qui ne rentre pas dans la réponse de l’analyste : la livre de chair, les cervelles fraîches, et le désir d’elles dont il ne sait rien, qui le dépasse, les dépassent tous les deux et relève de la pulsion orale, de l’objet a.

L’erreur de mon analyste, de ne pas avoir voulu entendre ce que je cherchais à pointer de mon rapport énigmatique à l’histoire, peut-elle être rapprochée de celle de Kris et s’est-elle vue suivie d’une acting out? Cela, je ne le sais pas et cette « erreur » remonte maintenant à trop longtemps… Cependant, je retiens : au patient de Kris les cervelles fraîches, à moi les crevettes et la difficulté de les décortiquer.

la recette indienne

La veille du rêve, j’étais arrivée à cuisiner tranquillement, sans recette, ni angoisse. En cuisinant des légumes dont j’avais eu envie, que je ne connaissais pas.

Aujourd’hui, l’envie de manger commence à me revenir, me semble-t-il. Cette envie dont je me suis battue des années pour me départir, ayant vécu à l’adolescence des années assez difficiles de boulimie, lesquelles avaient rapidement succédé à une forme larvée d’anorexie (régimes extrêmes). Ce furent des années lourdes où je trainais seule avec mon obsession de nourriture et dans le dégout constant de mon corps. Le goût de l’alimentation m’en est passé. Je n’en garde que l’aspect mortifère. Que j’aie la veille du rêve préparé un repas en me laissant guider par ma seule improvisation et mon envie est assez exceptionnel et pouvait provoquer un rêve.

Au fond, c’est dans ce premier appartement de l’avenue Paul Deschanel, où le repas va avoir lieu, que j’appris à vaincre la boulimie. Je n’avais plus de frigo à vider (je me gardais de le remplir) et je me suis mise à écrire jour après jour  tout ce que je mangeais. C’est aussi à ce moment-là que je me suis mise à la lecture de Lacan, du séminaire II, celui sur le moi.

Tandis qu’en réalité, et j’ai mis du temps à m’en souvenir, il  y eut un tel repas, une première invitation à dîner dans ce premier appartement, un dîner somptueux, au départ de recettes indiennes trouvées dans de Marie-Claire, et où ma tante cependant ne fut pas invitée, mais Marc H. Cela avait représenté plusieurs jours de travail. Je me souviens de la cagette de mangues très mûres, achetée chez l’arabe (plutôt que l’italienne), dont j’avais fait un chutney et des confitures. Je me souviens qu’il y avait également deux sortes différentes de biscuits (contre les 4 sortes de pâtes), très réussis.  

Avant que je n’emménage là, il y avait eu une période où je n’étais plus inscrite à aucune école et où je ne travaillais pas. Je ne me souviens plus des circonstances exactes. Comme je vivais chez mes parents, comme j’avais des choses à me faire pardonner, j’avais proposé de faire à manger à la place de me mère, pour la soulager. Ne sachant pas cuisiner, je suivais des recettes. Et tous les jours j’allais faire des courses et, comme dans le rêve, je montais la chaussée d’Helmet avec mon caddie.

Je faisais donc des petits plats spéciaux et récoltais beaucoup de compliments. Cuisiner m’a paru facile, il suffisait de suivre les recettes à la lettre, ce qui ne me posait aucune difficulté. Il y avait cependant une sorte de sentiment désagréable lié au fait que j’aurais mieux cuisiné que ma mère. Je ne sais pas combien de temps ça a duré. C’est là que j’ai appris à cuisiner. C’était beaucoup de travail. C’était faire quelque chose à la place de ma mère et sans qu’elle me l’ait ni enseigné ni demandé. Je ne souviens plus de sa réaction, son attitude vis-à-vis de ça. Je me souviens chez moi d’un sentiment triste et calme de faire ce que je devais faire, de payer (pour ma présence). Tandis que mes succès culinaires succédaient aux ratages dont ma mère n’avait cesser de s’accuser : « C’est raté », s’obstinait-elle à répéter jour après jour en nous servait à manger.

L’invitation à dîner lors de mon aménagement avenue Paul Deschanel, c’était une forme de  répétition de ça. Une occasion restée unique, où j’étais maintenant à ma place.

Beaucoup plus tard, quand je me suis installée à Paris avec les enfants de F, c’est là qu’est née la très grande angoisse de cuisiner, liée à cette place que je prenais, de mère (même s’il ne s’agissait que de belle-mère). Une place absolument insupportable. Je n’arrivais à cuisiner que rarement, jamais sans l’aide d’une  recette, et je pris l’habitude de servir les plats avec les mots de ma mère : « C’est raté ». Elle l’avait fait dans la plus grande placidité, je prenais sa relève en ayant la plus grande peine du monde à contenir ma rage.

crevettes à décortiquer

Crevettes,
petites crevées à décortiquer,
petites rêvettes roses,
bébêtes. 
Crécett
es

Qu’est-ce qui se dit ici de la pulsion orale ? La coïncidence avec le cas de l’homme aux cervelles fraîches, est-elle à prendre en compte? Ce cas qui m’a toujours un peu interloquée, sans que je sache en quoi. Ça se passe autant au niveau du vol (j’ai été kleptomane), du plagiat, que de l’erreur, des cervelles fraîches, et les diverses interprétations de Lacan, notamment celle sur le rien. Ce qui n’est pas noté par l’analyste, dit-il, c’est que son patient vole : rien. Ailleurs, il parle je crois du dégoût du patient pour ses propres pensées et d’anorexie. Qu’en est-il de mon rapport à la psychanalyse ? Mes décorticages de rêves ? Ces crêvettes ? Se situe-t-il lui aussi à ce niveau-là, de la pulsion orale, de la boulimie ? Je n’ai jamais aimé décortiquer des crevettes. Je déteste même ça. C’est typiquement quelque chose dont j’attends qu’on le fasse pour moi. Idem pour les plus gros crustacés, idem pour le poulet. Le décorticage est un obstacle à l’avalage, à la gloutonnerie. C’est du boulot. Un boulot ici prescrit par la recette. La recette répond à l’angoisse, répond de l’angoisse. La recette qui est de l’Autre. La recette à la lettre, la recette, sa mesure. L’angoisse de préparer à manger. Cuisiner sans recette, c’est pour moi cuisiner sans filet. Les circonstances où je me prête à improviser sont très rares. C’est ce que j’essaie en ce moment. Aussi : retrouver l’envie.

L’Italie / Vis ta lie

Dérive

Italie – Nathalie.
Nathalie amie d’enfance depuis longtemps dans mes rêves.
Et puis aussi… hier sur YouTube des  éruptions volcaniques, de l’Etna, du Vésuve, en Italie…
Et, Talie est le nom d’un personnage que j’ai écrit autrefois, je crois, peut-être dans l’histoire du pays de Blanc (auquel je pensais hier).
Ditalie, je m’en souviens, nom curieux d’un chien. Ditaly. Non, Vitaly. Ou Vitalie ? Une histoire de chiens, de cirque, de gens qui vivent dans la rue. Longue et triste que j’aimais beaucoup. Retrouver le titre de ce roman, auquel je pensais il y a quelques temps.
Est-ce que j’ai encore ce livre dans ma bibliothèque ? Hector. Le nom de l’auteur. Malot ? Non. Hector Malot.  Non. Consultation de l’internet : Oui ! Hector Malot existe ! Le livre n’est plus dans ma bibliothèque. Dis-moi Google quel est son titre ? 
« Sans famille »!
Maintenant vérifier nom du personnage qui ne devait pas être un chien.  « Vitalis ». 
« Vitalis », tel était son nom, en vérité.

(Retrouver cette histoire, la lire à Jules).

Titi

Titi. Quel est son rôle dans le rêve? C’est elle d’abord qui est invitée. Je prends le train pour aller chez elle à Louvain. Vingt minutes de Bruxelles. Y faire encore des courses. Elle est là, revenue des morts, mais c’est bien elle. Je me réveille.

Titi est une sœur de ma mère. C’est ma tante préférée. Elle était blonde, rieuse, pleine de vie. Je passais tous les ans des vacances à la mer avec elle. Il m’a toujours semblé que c’est grâce à elle que j’ai connu quelque chose de la douceur de vivre. Mes parents étaient bien plus inquiets, sérieux, l’économie et le péché sur le bout de la langue. Avec elle, nous restions des heures sur la plage à ne rien faire sinon bronzer et papoter, mangions des crêpes, des glaces, des fraises. Achetions des vêtements. Fumions et faisions du vélo. Le soir, regardions la télévision.

Ma mère, qui avait tendance à confondre tous les noms, m’appelait quelquefois du vrai prénom de ma tante, Jéfa (pour Jozéfa). Il est arrivé qu’elle me dise que je préférais certainement ma tante ou que j’aurais préféré que ma tante, que Titi, soit ma mère. C’était très désagréable à entendre. Mais, il y avait chez ma tante une présence, une consistance qui manquait un peu à ma mère. Elle me parlait. Nous nous parlions. Elle avait des demandes, là où ma mère ne demandait rien. Je n’ai que peu de souvenirs de conversations avec ma mère. Il s’agissait d’abord de son silence. Mais elle aimait à me consoler. Elle trouvait ses mots dans la consolation.

Pourquoi ce rêve?

Je ne peux m’empêcher de me demander ce qui se recouvre du rêve et de cette représentation (mon interprétation)?

Récapitulons. J’aurai fait ce rêve à cause du repas préparé la veille, et de ma réflexion à propos de l’envie de retrouver l’envie, le goût, pour arriver à pouvoir cuisiner sans angoisse. Ma tante est certainement du côté de cette envie. Dans le rêve, une recette vient, une recette est là. Elle est neuve, inédite, simple, elle sera bonne. Elle est longue. Elle vient après le restaurant, le restaurant du premier soir. D’abord il y a eu la cuisine de l’Autre, maintenant, c’est la mienne – enfin, d’après recette…

« C’est qu’il puisse avoir une idée à lui, qui ne lui vient pas à l’idée, ou ne le visite qu’à peine. » Lacan, à propos du patient de Kris.

Rapprochons la recette de la psychanalyse, la psychanalyse comme texte d’aménagement d’un mets délicat, la cervelle fraîche (que pour ma part, j’abhorre). La délicatesse, la jouissance, c’est celle de la cervelle. Elle est fraîche. Et, elle cherche à faire recette. Un comment faire quelque chose de délicieux. Il y faut décortiquer. Cela parle de mon « mode de jouir », qui cherche à faire recette. C’est l’épicière italienne qui s’en chargera. Elle vendra le plat en barriques, façon barriques d’olives. Le désir est celui de faire rente du cas (cas rente, quarante). De faire commerce. « Le sinthome comporte un élément de relation », écrit Riwka Warshawsky.

C’est l’épicière italienne qui prépare la recette et la met en vente, en gros, dans des barriques d’olives.
Olive – qui n’est pas loin d’ô-livres -, est un très vieux mets de mon histoire (baptême de mon frère Jean-François, où j’ai dérové dérobé dévoré toutes les olives, j’avais deux ans).

Dans le rêve, je cherche aussi une librairie et un livre. Mettons le livre comme le destin souhaité de la recette du cas rente, à la crevette/cervelle fraîche décortiquée.

Quelque chose du rêve supporte (= se traduirait, supporterait d’être traduit) une représentation graphique, visuelle. Cela se passe au niveau, à l’instant, à l’intérieur du tracé de la lettre. Des lettres, de l’encre, de son apparition sur le papier, des courbes, de leurs formes, du crissement de la plume. Son dépôt. Avec la lettre, avec les lettres, dans le report de ce qui se passe dans un rêve, il ne s’agit pas seulement d’un entendre, mais d’un voir.

Et les S1, signifiants premiers ici repérés, revenus, sont les signifiants de la lalangue, lalangue de jouissance. C’est elle qui fait les rêves de même qu’elle est la langue de l’interprétation, des associations.

Encore, ma tante, Titi, avait un rapport joyeux à la langue. Inventif. Elle disait des choses comme : « Je suis un pneu crevette. »

les femmes avaient de nouvelles ambitions / Mauvaise mère
— 13 novembre 2015

13 novembre 2015 | novembre 2015 | brouillonne de vie | , |

Lors de mes nombreuses conversations avec moi-même, je me plains de mes cinquante ans, et hier, je me dis soudainement que mère ne m’a pas appris à faire tout ce qu’elle faisait, ne me l’a pas communiqué. Elle a dû croire qu’elle serait toujours là.

Je ne fais toujours pas ce qu’elle faisait. Je ne suis pas une bonne mère. C’est ce qu’elle disait toujours. Moi aussi, je commence à le dire. Je me le dis quand je pense que je devrais faire tout ce qu’elle faisait. Quand je compare ce que nous faisons. Mais, je ne dois pas. Comment je suis comme mère ne devrait pas être lié à ce qu’elle a été comme mère. D’ailleurs, ça ne l’est pas. Les temps ont trop changé. Son rôle et ses devoirs de mère lui suffisaient, l’accomplissaient. Au moins donnait-elle cette impression. Et d’ailleurs l’affirmait-elle: Mais non, je me sacrifie pas. Mais oui, je fais ce que je veux faire. Elle se faisait une haute idée du service. Et moi, pas du tout. Ça ne me suffirait pas du tout. Ma mère ne s’est pas vraiment rendu compte des changements. De ces changements qui arrivaient sans qu’on s’en rende compte. Qui faisaient qu’une femme ne se satisfaisait plus, ne se contentait plus d’être mère. Ma mère ne m’a pas enseigné ça, aussi parce que déjà ça changeait. Déjà ça changeait, déjà ça n’était plus ce qu’il fallait, pour les femmes, d’être mère. Les femmes avaient de nouvelles ambitions.

l’accident de ma mère

3 novembre 2020 | novembre 2020 | brouillonne de vie | , , , , , |

Hier, dentiste. M’a arrangé les dents de devant. Ça a été assez long, 2 heures. Je ne m’y attendais pas, à ce qu’on a fait. Le résultat est joli, inespéré. On peut craindre cependant, je crains, que ça ne tienne pas.

Soir, après minuit, n’arrivais pas à dormir. Et soudainement ai pensé au rêve du dentiste assassiné et… c’est devenu affreux… instantanément. 

Je me suis souvenue de l’accident de ma mère, à ses dents de devant, quand elle était petite, j’essayais de me rappeler ce qui lui était arrivé, elle avait, je crois mais je me suis mise à douter, je l’ai toujours su, mais là, je me rendais compte compte que je l’avais oublié, reçu une porte en pleine figure, ce qui lui avait explosé les dents de devant. Ma tante, Titi, avait claqué cette porte. Et je me demandais si le souvenir était exact. Et comment il était possible qu’un accident similaire soit arrivé une génération après, quand l’un de mes cousins a claqué une porte sur son frère, en verre, ce qui a entraîné une très importante blessure au bras. 

C’est ce qui me faisait douter. 

Et, lorsque je me suis souvenue de l’accident du dentiste, dans mon rêve, de son assassinat, la balle qu’il reçoit dans ses dents, je ne sais pourquoi, je me suis mise à imaginer/sentir l’éclatement de mes dents de devant, les dents même qui avaient été travaillées, celles de ma mère, ça ne cessait de se répéter. J’ai déjà vécu ça, c’était atroce. Par le passé. Pas dans la réalité, de cette façon. Un peu comme une hallucination. Ça se répétait, les coups, et j’entendais au loin une voix qui disait des choses peu aimable. 

Par le passé, c’est comme ça que ça avait commencé, les coups. Dans la figure, la mâchoire, le cou. Le crâne, les os du crâne explosés. La mâchoire. L’année où on est allé en Toscane. C’est là que les « Fracassemeurs » avaient commencé. Avec des coups ultra violents, puis les voix. Après, les coups ont disparu, il ne restaient que les voix, que je pouvais entendre n’importe quand. D’abord, de façon très angoissante. Mais, petit à petit, je me laissais moins impressionner. Je me disais que ça n’avait aucune signification. Que ce n’était que du bruit. (Et le signe d’une volonté, isolée, mauvaise, en moi.)

Et ça a disparu. Je l’ai lié de plus en plus certainement à la cigarette. Parce que déjà en Toscane, j’avais remarqué que c’était lié à la cigarette, au fait que j’avais recommencé à fumer, jamais plus d’une cigarette par jour cependant. Et les terribles crises, elles apparaissaient chaque fois que je fumais. Une cigarette. Et chaque fois que par la suite, j’avais repris la cigarette, rarement plus d’une par jour, les crises revenaient, surprenantes. Mais, de moins en moins graves, parce que j’avais appris à les connaître. 

Je me suis levée très vite, c’était trop affreux, j’ai pris un demi anafranil, et me suis recouchée. J’ai dit à Frédéric que j’avais d’affreuses angoisses. Il m’a prise dans ses bras. C’était bien, ça aidait, sans pouvoir  être suffisant. À un moment, son doigt a touché mon cou, j’ai pensé balle dans le cou. Je n’avais aucun moyen d’agir sur ma pensée. J’ai eu de loin l’idée d’exercices de relaxation, mais… Je ne pouvais qu’attendre. Je savais que le médicament ferait son effet et que je finirais par m’endormir.  

Bien sûr comme le dentiste avait travaillé ces dents, elles étaient sensibles. 

Ma mère porte un appareil dentaire. À ses dents de devant, de la mâchoire supérieure.

Je me souviens, souvenir-écran, d’un matin, devant la porte d’entrée de sortie, vitrée en partie, de la maison, je m’apprête à sortir pour aller à l’école, ma mère m’embrasse pour me dire au revoir. Je ne sais pourquoi à cette image se lie le souvenir du désir qui m’est venu d’avoir comme elle un appareil. Alors que mes dents étaient… parfaites. « De petites perles », aimait à répéter ma mère, reprenant les mots du dentiste.

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