[ comme si – ici , les hors

29 août 2005 | août 2005 | ... surmoi voix j'ouis | , , , , |

je voulais dire comme si la parole . je voulais dire ici ,        ces lieux qui n’en sont pas ( hors-lieux de, les blogs , internet , etcaetera) , comme si lieux de parole , la voix en moins .       je parle de la voix débarrassée de sa chair , voix : viande en moins . son seul os , comme qu idirait .   –       où la chair serait le réel la présence réelle physique ( : péché (de chair mon père)   –       l’os , ce qu’il en reste , subsiste , pendant qq temps ( le signifiant aux allures clean sèches      ( pense à  l’amaigrie .

dans la série les écrits volent les paroles restent

22 novembre 2005 | novembre 2005 | ... surmoi voix j'ouis | , , , |

Dans le De bello gallico (VI, 13), décrivant la société gauloise du Ier siècle, Jules César
rapporte ceci des druides celtes : « Un grand nombre de jeunes gens viennent s’instruire chez [eux], beaucoup viennent de leur propre chef se confier à  leur enseignement, beaucoup sont envoyés par leurs parents et leurs proches. On dit qu’ils apprennent là  par coeur un très grand nombre de vers : certains restent donc vingt ans à  leur école. Ils sont d’avis que la religion interdit de confier cela à  l’écriture ».
[…]
Les études, en Irlande, duraient douze ans, vingt ans en Gaule d’après César, et la matière de l’étude, uniquement orale et versifiée, comportait, outre la récitation des scéla («récits»), le droit, la généalogie, la poésie et tout ce qui concernait la spécialisation. Pourtant les Celtes n’ignoraient pas l’écriture […] Mais l’écriture était interdite en tant qu’archive ou moyen de transmission du savoir traditionnel parce que, par rapport à  la parole, elle est morte et fixe éternellement ce qu’elle exprime. Tous ses emplois ne peuvent être que magiques ou incantatoires. Le gaulois, langue sacrée et savante, a disparu avec toute sa littérature parce qu’il
n’a jamais été une langue écrite et, sans la christianisation qui a propagé l’étude des écritures, l’irlandais aurait subi le même sort ou au moins n’aurait presque rien laissé de sa littérature mythologique. Le droit irlandais considère encore comme seule preuve concluante «la mémoire concordante » de plusieurs personnes.
[…]
Le livre EST donc le problème ; le livre est même tout le problème ou plutôt
l’industrialisation du livre
avec tout ce que, dès son origine, elle implique et qui, peu à  peu, s’enchaîne dans un ensemble de dispositifs de plus en plus contraignants : la standardisation, le formatage, les conventions, les collections, le marketing, les publics, les critiques, les auteurs, les autorités, les genres, les éditions critiques, originales, princeps, etc. C’est le livre et ses principes de « fixation », de figement temporel, qui rendent intéressants la recherche des antécédents aux écrits qu’il enferme.
[…]
Or, la littérature, comme nous le savons tous, même si nous ne voulons pas toujours
accepter toutes les conséquences de ce savoir, existait bien avant le livre et, dans beaucoup de régions du monde encore – mais là  encore notre ethnocentrisme culturel occidental nous aveugle souvent – existe sans aucun recours au livre.

Extraits de écriture sans manuscrit, brouillon absent
Jean-Pierre BALPE
Université Paris VIII
avril 2002


livre, problème, lequel?

Dans le monde ancien et tout contracté des « localités », les choses, les discours, les œuvres avaient à croître et à devenir.

4 janvier 2013 | janvier 2013 | Non classé | , , , , , , , , |

Dans le monde ancien et tout contracté des « localités »,  les choses,  les discours,  les œuvres avaient à croître et à devenir. Ils avaient à se propager de bouche en bouche ou de main en main, et ils se propageaient en étoile, au petit bonheur, se différenciant et se symbolisant toujours davantage, et formant des mondes culturels distincts les uns des autres,  avec leur légendes,  leurs mythes,  leurs rites propres.  Dans le monde contemporain de la mondialité,  rien ne se propage plus : tout est déjà immédiatement  propagé, déjà universel,  déjà connu de tous. Un récit,  soumis au régime du « mondial » ne se développe pas,  ne se transmet pas : il atteint immédiatement sa forme définitive. Aussi n’est-il jamais traité comme discours.  Il ne se donne pas comme texte à déchiffrer,  mais comme « reportage »,  bloc de réel à l’état pur. L’événement est trop vite su, figé mondialement dans son « quoi » sans devenir, pour faire germer un récit.1

Il fut un temps où  j’essayais de penser ce qui est décrit là en terme de « translation »2 . Sur les réseaux sociaux, les choses ne circulent plus que reproduites mécaniquement, à l’identique et par écrit.  Par écrit, sans qu’aucune main, aucun doigt n’en détaille plus les lettres, c’est en bloc compact qu’elles  sont sélectionnées, copiées, collées.  « Bloc de réel à l’état pur »  en effet, dont seul compte le chiffre de jouissance :  pur Un ((du Y a d’l’Un lacanien)) hors sens, ne valant que par sa frappe, like ou Retweet, racine de l’addiction. On est dans le « One to One », le « want to want » de la pulsion acéphale, littéralement sans queue ni tête. (One to one qui est  One to Self que la boîte d’écho de l’internet mue One to Many.)

Notes:
  1. Cédric Lagandré, Le monde des asphodèles,  « Le protocole du sens » ,  p.  81, 82. []
  2. Définition translation
    Action de faire passer une chose d’un lieu dans un autre.
    Déplacement d’un corps dont tous les points décrivent des trajectoires égales et parallèles entre elles. Action de transférer une propriété d’une personne à une autre. Biologie : Translation de coupure  []

Comment la psychanalyse pourrait-elle s’écrire dans le monde chinois ? I

25 mars 2016 | mars 2016 | brouillonne de vie | , , , , , , , , , , , |

Très heureuse d’avoir trouvé sur le net, sur http://www.lacanchine.com/(une mine), cette thèse de Lu Ya-Chuan1, intitulée (curieusement)2 « Une autre voie pour les Chinois ou Comment la psychanalyse pourrait-elle s’écrire dans le monde chinois ? 路亞娟« 

Je commence tout juste à la lire. Je la trouve passionnante dans la mesure où je me trouve vraiment curieuse de découvrir dans les textes anciens, chinois ou japonais, la présence de ce Chi que je découvre en taï chi, ici appelé Ki, le Souffle.

Il me semble que ces textes n’ont pas dû souvent  être convenablement traduits, puisque les occidentaux (si je ne me trompe) ignorent tout du chi. Comment en effet lire un mot d’on on ignore tout du réel, et pour lequel il n’existe en conséquence pas de mot dans sa propre langue. A la traduction, ce réel ne peut, à mon avis, qu’en grande partie passer à l’as, être mis à la trappe.

Je suis également heureuse de découvrir jusqu’à quel point le corps est central dans la pensée chinoise. Aujourd’hui, cela commence à faire sens pour moi. A certains égards, il me semble, et un peu rapidement dit, que la psychanalyse vous laisse en fin de parcours, seul(e) avec votre corps, sans avoir la moindre idée finalement d’un quoi faire (même si Lacan dit avoir rêver qu’elle puisse déboucher sur une nouvelle érotique) avec lui. Bien sûr, il s’agit d’une ouverture. Bien sûr, il ne s’agit plus que de liberté et d’invention. Comme un nouvel amour.

http://www.lacanchine.com/Lu_01.html

Extraits :

Dans l’antiquité chinoise, il n’y a pas de mot pour dire «corps», mais un grand nombre de mots pour le qualifier selon ses divers aspects et ses diverses fonctions.

[…]

Dans la médecine traditionnelle, le corps est un foyer d’énergie, un lieu d’interaction avec son environnement naturel, lieu qui existe et se définit par rapport à ce qui l’entoure. Le corps n’est donc qu’un support d’échanges. Il ne s’enferme pas sur lui-même, mais s’ouvre au monde, est perçu comme un microcosme qui représente le monde des phénomènes à part entière. Cette vision du corps est propre au taoïsme comme à la médecine. Les Chinois pensent que le corps n’est jamais isolé du cosmos.

[…]

De son côté, la pensée chinoise renvoie aux troubles somatiques dans une dialectique interactive. C’est dans les mouvements rituels du taiji que la pensée s’incarne et le corps se pense. Non-séparation de l’esprit et de la matière, le corps physique et le corps cosmique sont liés l’un à l’autre. La quête taoïste consiste en un travail sur l’individu, son corps et son esprit, afin de s’assimiler au rythme naturel de l’univers. Lacan a écrit à propos de l’image du corps : «Ne cherchez pas le grand Autre ailleurs que dans le corps.» En nous référant à sa remarque, nous pouvons dire que, si le corps est indissociable de l’Autre, la formulation de la psychanalyse va de pair avec la représentation chinoise. Le corps chinois implique avant tout une pratique tangible préalable à tout discours sur lui-même. Citons le postulat des sages anciens : « Le Tao est dans mon corps. » La proposition lacanienne qui sous-entend la dialectique d’intériorité-extériorité rejoint à cet égard la représentation du corps chinois.

[…]

Tout au long de son histoire, la pensée chinoise est celle du Souffle, du Qi 氣, énergie vitale. Le corps est considéré comme un foyer d’énergie, porteur du Souffle. Le Qi 氣 opère au nom de la pulsion et, parce que l’homme est dans un corps, sa sexualité passe par ce corps individuel dans sa recherche d’équilibre entre l’esprit et le matériel. Nous verrons que pour la psychanalyse les différentes pulsions se rassemblent en deux groupes qui fondamentalement s’affrontent. Cette opposition engendre la dynamique qui supporte le sujet et l’anime.

Notes:
  1. Thèse présentée à Paris VIII en 2010, dirigée par Gérard Wajcman et co-dirigée par Gérard Miller. []
  2. Je suis au fond d’abord  intéressée par la problématique inverse : Comment inscrire le taï chi dans la psychanalyse. Mais aussi, comment, d’ores et déjà, le taï chi se trouve-t-il inscrit dans la psychanalyse. En tout cas, c’est, quant à moi, bien plutôt le monde chinois que j’aimerais importer dans la psychanalyse, sûre qu’elle a beaucoup à y gagner. []

les frigos – une question d’espace et de mouvement

11 septembre 2016 | septembre 2016 | brouillonne de vie | , , |

08:24

[Réveillé à 6h30, hier déjà, net progrès. 6h30, heures des poumons.]

Pour  le moment, je suis très triste mais ce n’est peut être qu’une question d’espace et de mouvements. Qu’il me manque, qu’il nous manque,  l’espace et les mouvements. 

Nous étions l’autre jour chez Darty, à l’étage des frigos, et moi qui allais si mal, au bout d’un moment, j’ai senti que j’allais beaucoup mieux, que j’étais même joyeuse, oui, que nous étions tous passés joyeux. Mais, ce qui nous plaisait, peut-être, je le réalise maintenant, ce n’était pas tant d’acheter ensemble, l’acte consommatoire, que de circuler ensemble d’un frigo à l’autre en nous amusant à les commenter, en les ouvrant joyeusement, et que cela se passe dans un espace très grand, très haut de plafond, une vieille bâtisse peinte en blanc, où nous pouvions nous déployer, glisser,  tandis que nos paroles écoulaient des commentaires légers, nous offrant pour un court instant (de réaliser son but, à la parole et) d’atteindre un certain accord sur l’objet, en l’occurrence, le frigo. Lequel n’avait que très peu d’importance, au moins dans sa fonction première, même si, à la réflexion, leur taille, généreuse, légèrement supérieure à la nôtre, posés qu’ils étaient, alignés sur une surélévation du sol, leur ample largeur, la douceur de leurs courbes, en faisaient des objets rassurants. Et sans d’ailleurs que nous nous payions l’illusion de pouvoir acquérir ce caractère, tant l’espace confiné de notre propre cuisine en aurait, je le crains, plutôt fait ressortir l’aspect morbide,  dès que nous l’y aurions coincé. Eh quoi, pas de nouveau frigo, alors. 

*

08:41

Il est temps que nous récupérions nos organes. Nos organes et les espaces qui leur conviennent.

Je me demande s’il y a assez d’espace sur terre pour que chacun y soit logé dignement. Chacun d’entre devrait pouvoir  vivre dans un château. Certains d’entre-nous, toutefois, préfèrent-ils peut-être des espaces plus confinés. Cela dit, dès que l’espace public nous aura été restitué, la question ne se posera peut-être plus de façon si poignante. 

De mon point de vue, l’espace extérieur n’est plus aménagé que pour que les travailleurs travaillent. Que l’on songe aux voitures, n’est-ce pour le travail qu’elles circulent d’abord principalement. Et lorsqu’elles circulent toutes ensemble aux moments des transhumances d’été, n’est-ce encore pour obéir aux exigences du travail. 

Et donc, non, il ne s’agit plus d’un espace public, d’un espace appartenant à la cause du vivre ensemble, à la polis, mais d’un espace dédié à la mise aux travail des humains.

(Je me propose d’observer s’il n’y aurait pas quelque  avantage à traiter la parole comme un organe. Que nous apprenions à en prendre soin comme nous apprenons à prendre soin de nos organes, à nous les réapproprier.)

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