de la vérité à la satisfaction

Extraits du dernier cours de Jacques-Alain Miller (mercredi 26 mars)

… la fin de la psychanalyse … beaucoup plus fuyante

… tout dernier enseignement de Lacan, met en cause l’interprétation de la psychanalyse comme expérience de vérité et qu’il semble introduire la psychanalyse comme expérience de satisfaction. La satisfaction n’apparaît pas, n’apparaît plus comme un obstacle à la découverte de la vérité. En particulier, la satisfaction du symptôme n’apparaît plus comme un obstacle à la découverte de la vérité. Mais c’est la satisfaction elle-même qui apparaît comme une fin.

… « L’Esp d’un laps » … Le texte commence par une récusation de la fonction de l’attention : il commence par dire qu’il suffit qu’on fasse attention à ce qui est dans l’inconscient pour qu’on sorte de l’inconscient. … Et j’isole cette maxime qu’y formule Lacan en disant : Il n’y a pas de vérité qui – virgule – à passer par l’attention, ne mente.

… Et donc Lacan nous prévient de garder l’accent de vérité à sa place, c’est-à-dire à la place où la vérité surprend l’attention, où elle passe, où elle fuse comme un lapsus, que dire la vérité c’est toujours un acte manqué.

… Le déchiffrage c’est une pratique, la pulsion c’est une élucubration – d’ailleurs Freud l’amène comme ça, comme un mythe.

La sublimation ne repousse pas la pulsion, la sublimation procure une voie artificielle à la satisfaction de la pulsion. C’est-à-dire, elle consiste essentiellement dans l’investissement libidinal d’un substitut au but naturel de la pulsion…

Comment est-ce que, à la fin de l’analyse, le sujet supposé savoir est marqué d’un désêtre, pour permettre l’émergence de l’objet petit a ? Lacan, dans sa « Proposition », dit : C’est un virage. C’est un virage de l’être inessentiel du sujet supposé savoir au réel.

…. Avant le virage de son tout dernier enseignement on peut dire que Lacan formulait : Il n’y a de réel que par la logique. On n’isole le réel que par l’impossible, et l’impossible ne peut être déterminé que par la trame d’une logique. Et donc, la parole du patient, même si elle paraît liquide, cette parole est habitée par un algorithme invariable, qui doit conduire à l’émergence de l’objet petit a.

Cette conviction on peut dire est celle qui est mise en question dans le tout dernier enseignement de Lacan. La notion même de cet algorithme est ébranlée par la notion, mise au premier plan, qu’on ne peut que mentir sur le réel, qu’il y a une inadéquation du signifiant au réel.

… incompatibilité du désir avec la parole / l’incompatibilité de la jouissance avec le sens.

… L’analyse est donc moins l’attente de l’émergence d’une vérité que l’attente d’une satisfaction qui convienne. Et, d’une certaine façon, c’est par après que l’obtention de cette satisfaction donne lieu à l’élaboration d’une vérité.

il me semble que l’analysant que nous présente Lacan – c’est comme ça qu’il a interprété l’analysant, et spécialement l’analysant à la fin de l’analyse -, il a à construire, et il n’y a de fin de l’analyse qu’à la condition que l’analysant construise.

… à l’époque de la psychanalyse liquide, la fin de l’analyse dépend d’une décision de l’analysant, c’est-à-dire, elle dépend de sa capacité à assumer cette fin comme une feinte cause – je ne dis pas sainte cause -, comme une feinte cause, où il ne s’agit pas tant de la dire, ou de ne pas la dire, mais – je reviens à ce mot – d’y faire allusion.

Emergeant de la guerre, un livre que j'ai fait,


Ne me fermez pas vos portes, fières bibliothèques,
Car ce qui manquait sur vos rayons bien garnis, et dont pourtant vous aviez grand besoin,
je l’apporte
Emergeant de la guerre, un livre que j’ai fait,
Les mots de mon livre ne sont rien, son élan est tout,
Un livre distinct, non relié au reste ni perçu par l’intellect,
Mais ses latences non dites vous passionneront à chaque page.
Walt Whitman, 1867

et (le blog de WW) : http://blogwaltwhitman.blogspot.com/

journal (révélation)

3 lettres, 3 lettres, non 2, dont 1 redoublée. hélas, 3 x, et damnation. a-t-il fallu qu’à moi ça arrive ? faut-il qu’à moi ça arrive ? inavouable, inavouable,
inavouable ( oh
(foutrerie de la psychanalyse, démangeaisons) ( mais je n’ai plus peur de rien, que j’ai atteint le fin fond du ridic))

( de près ou de loin trait à « les livres ou la vie ? » – de près, trait. feuille feuille feuille (immaculaison) et saletés).

( plus que jamais voguer droite et le regard fier, au dessus
vagues et mêlées)

symptôme (mise en page)

il est neuf heures vingt-six. 9 h. 26. i know i should’nt come here, write here, i won’t stay. spend too much time here.
changed the template completely, again, yesterday. added an image or two, to the first post, this one.
c’est incroyable, puisque j’aurai également passé le week end à adapter le précédent template (hemingway).

qu’est-ce qu’un template? un modèle wordpress? c’est la partie visuelle du site, les fichiers qui commandent à la partie image, habillage. le précédent s’appelait Hemingway, n’était pas de moi. celui-ci est de moi, c’est to-be-or, le template de mon premier blog, dont il porte le nom. il ne fonctionne pas bien sur internet explorer. je rêve donc de le refaire, mais je dois m’en empêcher.

aujourd’hui, 17 novembre, je rajoute : mise en page, habillage, recherche d’une corps-respondance. cette impossible image. (et entre-temps le blog a changé de template un nombre devenu incalculable de fois. celui-ci, j’espère, c’est le bon.)

quant à la correspondance

je peux hélas affirmer aujourd’hui que je n’ai, jusqu’à présent, cherché d’autre correspondant que celui qui pût m’offrir, en miroir une image – dont le corps fût de lettres.

ce qui m’est apparu à la lecture du texte de la sagna sur l’inhibition publié dans la cause freudienne dont j’ai récemment repris ici un extrait.

(ma jambe n’en devient pas belle pour autant.)

lire forme d’inconscience

il a recommencé à neiger. ça ne va pas du tout. rien à voir avec la neige : les vacances sont finies.

/

ce n’est que quand frédéric est là que je peux me sentir quitte de l’obligation de travailler.

l’amour facile en ce moment et cela m’est nouveau. l’amour m’est facile, cela m’est nouveau ( question des préliminaires, d’ailleurs, au passage, tant que j’y suis, balayée. point ne m’en faut. il fallait n’y pas penser.)

nuance,

il faudrait juste qu’il apprenne à s’endormir ma lampe de chevet allumée. phrase qui n’est pas belle.

je l’aime. si seulement il pouvait s’endormir dans ma lumière. essai de phrase belle.

il faudrait juste qu’il apprenne à s’endormir malgré la lumière de ma lampe de  chevet // juste faudrait-il qu’allumée je puisse garder la lumière de ma lampe de chevet // que je n’aie pas à éteindre ma lumière pour qu’il puisse s’endormir // qu’allumée je puisse garder ma lampe de chevet // qu’il puisse s’endormir dans la lumière // ne pourrait-il apprendre à dormir la lumière allumée //  le seul problème c’est qu’il faut toujours que j’éteigne ma lumière quand il veut s’endormir et alors que je n’ai pas du tout envie de dormir //

ces jours-ci le soir quand je me couche, j’ai l’impression qu’une nouvelle journée commence.

voir même que j’aie besoin de lire pour m’endormir //

{ liRe (remembrance) –

après la pensée,

{ liRe

m’a protégée de biendesattouchements.

liRe je peux le vouloir lire est ce quejeveuxqu’onmelaissedonclire et la paix.

lirejepeuxlevouloir lirejepeuxlevouloir lirejepeuxlevouloir.

LiRe, je peux le vouloir.

ah mais laisse-moi liRe

{ Avant c’était plutôt

ah mais laisse-moi penser

LiRe, à vrai dire, m’endort.

LiRe m’endort.

LiRe, m’endort bien.

J’aime, à m’endormir en lisant.

Je ne retiens RIen de ce que je lis.

Ce que je lis glisse sur moi comme l’eau sur le miroir (du moment qu’il ne comporte pas de tache de graisse. Qu’il n’est pas GRAIS S EU X.

L’EAU est détournée de son cours par la graisse, la contourne.

Ma conscience liseuse est lisse et elle est propre. L’essentiel est qu’elle ne retient rien. Mais c’est extrême

ET

ma pensée s’arrête. Or, cela est juste esperluette bon —

tout ce qui arrête la pensée est bon maintenant il faut que j’arrête d’écrire car je ne vais toujours pas arriver à établir ce qui distinguerait une bonne d’une mauvaise pensée.

une bonne pensée une pensée souhaitable une pensée productrice. les bonnes pensées les bonnes idées les bonnes réflexions, et puis les mienneslesmauvaises qui me minentetdont d’ailleurs je ne souffre plus, en fait. (j’ai tant pensé à certaines pensées qu’il m’arrive encore (de penser) qu’elles sont
d’actu.a lité! erreurs, trois fois).

en certaines époques de la vie on peut souffrir il arrive que l’on souffre de mauvaises pensées. que l’on en soit dévoré. dévorée , dévorante / le plus souvent ça fait ruminée , ruminante – c’est LES pensées : CHEWING-GUM.

les mauvaises pensées sont inhibitrices, envahissantes et inhibitrices. (beau ont-elles comporter des hi et des hi : mauvaises elles sont, mauvaises elles sont (comme dirait jules). or et qu’ajouter que dire de l’inhibition? se souvenir qu’elle
vitenlisièreduréel. ce à quoi la production jamais ne saurait prétendre. mots que j’ajoute car
– j’ai du mal à promouvoir la production et démouvoir l’inhi bition.

J’éteins.

//

il a recommencé à neige. tout ce qui a été écrit ci-dessus, après la neige, l’a été il y a quelques jours, quelques soirs.

notes sur mon trop, mon n’importe quoi, mon web et mon grand ordinateur

j’ai perdu mon cahier rose, le nouveau, celui que je m’étais acheté pour me tenir à carreau du web. je suis couchée dans mon lit, j’ai fermé la porte de la chambre, j’ai dit je veux la paix pendant une heure, je tape sur le portable ; je n’avais jamais fait ça, avant. on dirait que c’est possible. jules et son copain elias sont dans la pièce que nous appelons « la salle », ils font de la pâte à modeler. 1 frédéric est allé cherché à gouter. les enfants sont seuls seuls seuls. j’ai plein de choses à raconter.

dire que la vie avec mon enfant est extraordinaire. avec frédéric sans doute aussi, mais c’est moins  évident. c’est plus simple facile de s’impliquer avec son enfant. les adultes sont plein de défenses, et il y a le sexe, aussi, surtout, je suppose. mais je crois que je vais faire de moins en moins d’histoire avec le sexe. frédéric ne fait pas d’histoire du sexe. moi, j’ai tendance ou eu tendance à en faire un pataquès. aujourd’hui c’est la saint valentin tiens, et l’anniversaire de jacques-alain miller.  je continue de l’aimer2, malgré des doutes, parfois, et qui me plaisent, car ça ne me déplairait pas de l’aimer moins, mais il a suffi que je le lise, hier ou avant hier, dans quarto, des choses qu’il dit sur la position de l’analyste, que je ne soupçonnais pas le moins du monde, des choses dont je n’avais pas idée, qui étaient si simplement et extrêmement dites, pour que ma flamme se ranime, c’est comme ça. si j’en ai le temps je reprendrai ces textes ici, j’ai reçu pour noël un scanneur de texte, un stylo scanneur, c’est comme ça que les textes sur ce peintre et ce poète sont arrivés ici. quel était leur nom? bon, j’ai oublié (celan, le poète, et anselm kiefer, le peintre). mais ça prend du temps, même avec un stylo scanneur, ça prend du temps et j’essaie de passer le moins de temps possible à ce genre de choses, sans que je sache plus trop pourquoi, ah oui, parce qu’aussi sinon que sinon aussi non ça devient tout de suite trop, ça devient tout de suite tout le temps – quoi que je fasse est menacé par le trop, d’office.

miller disait à ses cours récemment qu’il ne fallait pas avoir peur du trop, que du contraire. ce qui a tout de même étonné pas mal de gens, dont moi, mais il a beau l’avoir dit je continue de m’en méfier, du trop, de n’en pas vouloir. mon trop est trop grand pour moi, et pour mes proches3, ajoutais-je à je ne sais plus qui récemment, un gars de twitter je pense, @fources. donc, il y a probablement une différence entre mon trop et celui de lacan, n’est-ce pas, mais je ne sais pas très bien lequel. at least son trop n’était-il pas trop grand pour lui, puis il avait son philinte, mais moi aussi, je les ai, mes philintes. yes.

il avait le désir, homme de désir dit miller de lacan.4 ça sera ce qui me manque. enfin, il se dit des tonnes de trucs, à ce cours, que je n’arrive pas encore bien à mettre ensemble, cours auquel je ne vais d’ailleurs pas, car ça tombe pile à l’heure de mon psychanalyste, mais je lis les tweets, et ça me renseigne déjà pas mal. de tout ça, je n’avais pas lu tout  l’intention de parler. oui donc, j’ai repris l’analyse à cause du trop de site pour le journal des journées déjà mentionné ici.

alors. trop, quel trop? par rapport à quoi ? eh bien, par exemple par rapport à l’argent qu’il faut gagner, c’est une de mes culpabilités favorites (je les cultive, ça pousse bien) (à quoi elle me sert la culpabilité ? elle me protège de tout,  de tous puisque qu’il n’est rien personne vis-à-vis de quoi de qui je ne me sente coupable), je n’en gagne pas, je ne fais rien de mieux que de ne pas en gagner.  je n’en gagne trop rien. donc, comme je faisais ça tout le temps ce site du journal des journées, et que c’était également trop dans l’ombre, donc, trop travailleuse de l’ombre, que je m’en sentais coupable, et honteuse, et que ça m’a amenée à écrire les mails les plus insupportables à jacques-alain miller, me rendant ainsi très malheureuse, je me le suis fait interdire. il y a d’abord eu le conseil de frédéric, ce qui était bien sûr insuffisant, puis l’analyste, que j’ai revu, à cause de la tournure trop triste que prenaient les événements. pourtant j’aurais presque pu me faire des amis avec ce site, tout du moins des connaissances, mais cela m’effrayait aussi car ce n’était « que » virtuel et puis aussi, à ces connaissances, qui m’encourageaient à continuer, je n’avouais pas le péché de mes lettres à miller. et de toute façon, je n’aurais jamais osé me montrer à eux. enfin, ils m’ont un peu prise pour l’un des leurs, or. je ne suis jamais qu’une midinette. là maintenant je continue à écrire parce que je me dis que peut-être ça va devenir plus clair, mais ce n’est toujours pas de ça que je voulais parler. zut, frédéric a déjà mis les enfants devant la wii. bon, tant pis. bien vivre avec son temps.

les psy-twitters pensaient que c’était le désir qui me faisait faire ça, la force de mon désir, qui me permettait de travailler à ça, au site du journal des journées, nuit et jour, mais moi, j’avais des doutes là dessus, et c’est parce que je ne savais pas pourquoi je le faisais que j’étais malheureuse, voilà. désir, peut-être, mais alors inconscient. je pensais que c’était peut-être aussi ma fan-attitude, mon admiration pour le miller qui me mettait mal à l’aise, n’aurais-je fait tout ça que pour me faire bien voir de lui. alala, bien sûr, me faire bien  voir de lui, ça aurait été bien, mais ça n’a pas marché, je ne suis arrivée qu’à l’em… (gros mot). bon, ce genre d’aveu, c’est dur. c’est pénible. enfin, cela dit comme on dit, il m’aura tout de même dit que mon site était superbe. mais maintenant je pense qu’il ne cessera plus de m’éviter comme la peste. c’est drôle, j’aurais toujours cru que ces hommes, comme lacan, et maintenant lui, m’aurait appréciée, enfin à l’époque j’avais la jeunesse et la beauté et lacan était déjà mort tandis que j’en étais encore à ignorer miller, eh bien non, ces gens, je ne leur plais pas. je crois que miller m’aurait préférée jeune et jolie ou mieux installée dans le monde. or le monde, je ne cesse pas de le quitter, et de me déshabituer de lui, ce qui m’inquiétait lately à cause de jules à qui je n’arriverai pas à apprendre les manières du monde, ne les possédant pas ou les perdant un peu plus tous les jours. c’est aussi l’une des causes principales de mon refus de continuer à faire des blogs et le site du journal des journées, c’est que je pense que les gens dans la réalité ça vaut mieux. et qu’au plus je suis dans le trop virtuel au plus je suis dans le moins réalité . formule idiote. qui cherche à donner sa place au réel qui n’en n’a pas ou y est toujours, à sa place, et n’y arrive pas, la formule. et donc y renonce.  je n’y parle pas de réel parce que j’ai le sentiment d’en faire un amalgame immonde. quand je dis virtuel, ce à quoi je pense en réalité : c’est évitement de la rencontre avec ce qui ne cesse pas de ne pas s’écrire : le rapport sexuel. quand je dis virtuel, je dis un certain mode d’écriture, tenté par le tout-écrit, quand je dis réalité, je pense à ces lieux où la contingence est possible, où la rencontre est possible et où donc se rencontre plus « frontalement » ce qui ne s’écrit pas. j’y suis particulièrement sensible (angoisse). ceci donc peut encore se caser dans ce que j’ai pu développer ici autour du livre ou de la vie. c’est d’angoisse que je mourerais…

mes maîtres-mots à moi, ce sont le trop et le n’importe quoi, ce sont les mots qui m’embêtent le plus.

les gens, de twitter, disaient « désir » moi je disais « n’importe quoi » , je fais n’importe quoi – après, à l’analyste et au psychiatre, puisque lui aussi il me fallut bien le revisiter, lui re-rendre visite, j’ai ajouté « n’importe quoi qui tînt à un ordinateur ». je ferais n’importe quoi et sans cesse du moment que ça tient par un ordinateur.

une ordinateur est un machine qu’on arrive toujours à faire fonctionner. je fais fonctionner la machine. je la fais tourner, avec n’importe quoi. que ça chauffe, que ça marche. c’est là que je ne vois pas où se situerait le désir. si ce n’est à me rapporter éventuellement à ce « désir s’avérant in fine n’être désir de rien » que rappelait miller à son cours. ( et y a des moments, embêtants, où désir et jouissance ça ne se distingue plus tant que ça ; ça doit être quand on les prend du point de vue du réel – or il n’est probablement rien qu’on ne puisse ne prendre que de ce seul point de vue. )

séparer, me disait l’analyste, informatique et psychanalyse. « interdite » de JJ, de journal des journées. si « j’obéis » c’est que je veux en savoir plus. et que la façon dont j’étais barrée pour le savoir, seule, c’était mal. je veux savoir pourquoi je fais les choses et je veux le savoir à la lumière (en pleine conscience…)

je n’ai pas du tout parlé de ce dont je voulais parler.

Notes:
  1. la salle, la « salle de vie », ainsi que je l’ai un jour entendu appeler par les voisins de table d’une terrasse de café. c’est frédéric et ses enfants qui disaient « la salle. » moi, je ne vois plus comment l’appeler d’autre maintenant. c’est une pièce qui fait salon aussi bien que salle à manger. []
  2. je pense que vous devez détester ça, que je l’aime, que je l’admire, etc.  ou plutôt que cela vous fait rire. que vous m’en méprisez, non? et que j’y perds de ce fait là, la possibilité de votre amitié. que faire? cacher ces choses ? []
  3. « Le trop fait surgir, émerger, apparaître, en chacun, sa propre limite.  Il fait apparaître votre ‘pas plus loin’. Il suscite une intolérance. » []
  4. « ça n’invite pas à le dessiner en grand homme mais en homme de désir.  » []

ce n’est que des lettres que se fonde le nécessaire, comme l’impossible

Et cela même que je vise cette année, c’est à ce que vous ne confondiez pas les mots avec les lettres, puisque ce n’est que des lettres que se fonde le nécessaire, comme l’impossible, dans une articulation qui est celle de la logique. Si ma façon de situer les modes est correcte, à savoir que ce qui ne cesse pas de s’écrire, le nécessaire, c’est cela même qui nécessite la rencontre de l’impossible, à savoir ce qui ne cesse pas de ne pas s’écrire, qui ne peut s’aborder que par les lettres. C’est bien là ce que, ce que ne permet d’aborder par quelque dire que la structure que j’ai désignée de celle du nœud borroméen, c’est en quoi, la dernière fois, l’amour était un bon test de la précarité de ces modes. Il est porté à l’existence, cet amour, ce qui est bien le fait de son sens même, par l’impossible du lien sexuel avec l’objet, l’objet quelle qu’en soit l’origine, l’objet de cette impossibilité. Il y faut, si je puis dire, cette racine d’impossible. Et c’est là ce que j’ai dit en articulant ce principe : que l’amour, c’est l’amour courtois.

Jacques Lacan, Séminaire XXI, Les non-dupes errent (inédit), séminaire du 8 janvier 1974

« AVANT L’ÊTRE, IL Y A LA POLITIQUE »

Par Mickaël Perre, sur Facebook

Il y a quelques mois paraissait le dernier livre de Laurent de Sutter : L’âge de l’anesthésie – La mise sous contrôle des affects. Grand livre, à la fois puissant et original, nous donnant à lire et à penser autre chose que ce qu’il a l’air d’aborder. Car contrairement à ce que semble indiquer le sous-titre, ce livre n’est pas qu’un livre de « philosophie politique » (même si l’auteur revendique par ailleurs son appartenance à une certaine lignée ou « tradition » philosophique à partir de laquelle se dessine toute une série de positionnements polémiques : Machiavel et La Boétie ; la « psychopolitique » de Byung Chul-han et la « biopolitique » de Foucault ; Tarde et Freud…). Il s’agit avant tout d’un traité d’ontologie, et même d’« anti-ontologie ». Dans un entretien récent, Laurent de Sutter revient sur cette manière singulière de procéder par « décadrage » ou décalage constants :

« chacun de mes livres s’empare d’un dossier très pratique (la prostitution, la police, la pornographie, etc.) pour raconter autre chose ; chacun de mes livres se veut, d’entrée de jeu, une machine à décadrage, un dispositif créant les conditions d’une vue parallaxe sur un problème qu’à trop aborder frontalement on ne parvient plus à rien en penser. De même que Poétique de la police était une théorie de l’image, Pornostars une théorie du désir ou Métaphysique de la putain une théorie de la vérité, je considère L’âge de l’anesthésie comme une théorie de l’être. » (entretien avec Fabien Ribery)

Ce décalage n’induit aucun décrochage, il n’introduit aucune rupture ni aucune contradiction dans le discours de l’auteur ; au contraire, il nous fait voir de nouveaux rapports et tisse de nouveaux liens entre les choses. Toutefois, le décalage comme opérateur de réflexion ne possède une pertinence théorique que s’il nous fait voir autre chose, que s’il nous fait sortir du cadre. Or c’est bien l’ambition de l’ouvrage : nous faire sortir du cadre de la politique (et de la philosophie politique traditionnelle) pour voir comment celle-ci communique avec l’ontologie. Il y a donc l’être et la politique : il n’en va pas simplement de l’être de la politique (de sa définition ou de de son essence), mais plus précisément, de la manière dont la politique exige pour fonctionner la constitution d’une ontologie adaptée aux opérations policières de contrôle et de répression qu’elle souhaite mettre en œuvre. En ce sens, on peut lire L’âge de l’anesthésie à la fois comme la mise à l’épreuve et le développement d’une intuition formulée par Deleuze et Guattari dans Mille Plateaux : « avant l’être, il y a la politique » (p.249). Cette antériorité de la politique sur l’être n’est pas chronologique (car la politique et l’être se définissent en même temps) mais logique : il faut que la politique dispose d’une ontologie pour pouvoir prendre forme ; toute décision politique ne peut se déployer sans un horizon ontologique déterminé qu’elle aura activement contribué à tracer. Bref, on ne peut pas élaborer un dispositif de contrôle sans se donner une certaine image de l’être à contrôler. La politique est dès lors inséparable d’une métaphysique. La grande nouveauté du livre de Laurent de Sutter ne réside pas seulement dans l’analyse des mécanismes de domination que le « narcocapitalisme » met en œuvre pour produire des sujets anesthésiés, des corps désaffectés, rivés à leur propre fonctionnalité dévitalisée. Elle réside aussi dans la mise en évidence d’une « police des étants » ou d’une métaphysique policière (l’auteur poursuit ainsi l’entreprise philosophique commencée avec Poétique de la police paru cette année) : l’Être n’est jamais neutre, il est policier par vocation ; il est une catégorie d’ordre. En raison même de l’importance qu’il accorde à la métaphysique saisie dans son lien constitutif à la politique, L’âge de l’anesthésie nous semble plus proche de L’Anti-Œdipe que de Naissance de la clinique.

Quelle est donc la métaphysique du « narcocapitalisme » contemporain ? Quelle est l’ontologie de notre modernité pharmacologique ? À grand renfort d’exemples, Laurent de Sutter déploie sous nos yeux l’ontologie impliquée dans la « psychopolitique » moderne (contrôle de la psyhé). Il montre alors que toutes les inventions narcotiques, ainsi que les applications politico-« médicales » qu’on a pu en tirer au cours de l’histoire récente, peuvent être référées à un problème ontologique spécifique. Chaque problème clinique et politique trouve ainsi sa formule ontologique. Par exemple, le problème clinique de l’excitation « maniaco-dépressive » est lié au problème ontologique de la stabilité ou de la subsistance : si l’excitation met l’individu « hors de lui » (ce qu’indique bien l’étymologie : ex-citare), comment maintenir l’être dans ses limites ? Comment mettre un terme à « l’errance de l’être », à cet état de « désêtre » et de dispersion que constitue l’excitation ? Comment donner une stabilité à un être qui tend à se dissoudre dans les fluctuations intensives qui l’agitent ? De la même façon, la cocaïne est envisagée en lien avec le problème du dualisme corps-esprit. L’enjeu proprement métaphysique de la cocaïne (conçu comme « carburant du cerveau »…) est de savoir comment annuler la résistance que la matière oppose à l’esprit : comment optimiser l’efficacité de l’esprit ? Comment purifier la volonté ? Ou en termes platoniciens : comment faire sortir l’esprit de la « prison du corps » ? Comme le montre Laurent de Sutter, la logique de la dématérialisation qui sert de principe métaphysique à la prise de cocaïne constitue, par métonymie, le modèle de l’économie capitaliste, comme économie dématérialisée (certaines de ces pages font écho au manifeste publié l’an dernier par Jean-Clet Martin : Asservir par la dette, et qui dénonce lui aussi, à travers un autre appareillage conceptuel, la « mauvaise métaphysique » de la politique et de l’économie actuelles). En cherchant à promouvoir au niveau économique le « déploiement libre des puissances permises par l’oubli de tout ce qui pourrait les contraindre » (p.64), par l’abstraction généralisée de la monnaie, purifiée de tout référent extérieur ou matériel, le capitalisme est profondément cocaïnique. « Il n’y a de capitalisme que de la cocaïne – de même qu’il n’y a de cocaïne qu’en tant que requérant un système économique adéquat à sa volatilité, à son illégalité, à son addictivité et à son immatérialité (…) Tout capitalisme est, nécessairement, un narcocapitalisme » (p.67).
Par conséquent, si l’être est bien « l’allié objectif de toute police », s’il est bien « la catégorie sur laquelle repose chaque entreprise visant à établir un ordre au sein duquel les places peuvent être assignées de manière sûre » (p.136), la question urgente d’une contre-politique ou d’une « politique » de résistance est donc la suivante : comment sortir de cette ontologie policière ? Comment ouvrir de nouvelles possibilités d’existence au-delà des frontières que tracent pour nous, et malgré nous, les substances que nous assimilons ? Comment en finir avec cette « interpellation » pharmacologique des individus en « sujets » anesthésiés ? Et si la politique est dans son fonctionnement indissociable d’un certain quadrillage ontologique, comment élaborer une politique sans être, une politique sans ontologie ?

La réponse de l’auteur se développe en deux temps : il faut défendre la possibilité d’une « anti-ontologie», brouiller les catégories ontologiques les mieux établies et les plus fonctionnelles. En un mot : refuser d’« être ». Mais cette réponse serait trop abstraite si elle n’était pas suivie de certaines propositions éthiques : contre ce programme politique d’anesthésie ou de désexcitation généralisée, il faut réexciter la vie, persister dans l’intranquillité, creuser l’écart qui empêche l’individu de verrouiller son être dans une subjectivité cohérente et prévisible. Car comme le montre Laurent de Sutter, l’excitation est d’abord l’expérience d’un écart ou d’une non-coïncidence avec soi, d’un appel du dehors qui ventile les possibles. C’est dans cette marge, dans cette fêlure ouverte par l’excitation, que la liberté s’actualise et que de nouveaux modes d’existence peuvent prendre forme. Comment donc en finir avec cette injonction policière à « être » ? En s’efforçant toujours de n’être rien. Tâche d’une « politique de l’excitation » comme seule politique valable. Politique du « dépassement de l’être » (p.144-145). Politique qui ne se situe plus « avant l’être » mais « après l’être ».

 

Voir aussi : https://unphilosophe.com/2020/01/13/entretien-avec-laurent-de-sutter-la-raison-nest-raison-que-parce-quelle-est-delire/

Laurent de Sutter, L’Âge de l’anesthésie. La mise sous contrôle des affects – Premières impressions

Laurent DE SUTTER, L’Âge de l’anesthésie. La mise sous contrôle des affects, Les Liens qui Libèrent, 2017, 156 p., 15,50 €/ ePub : 9.99 €, ISBN : 979-10-209-0508-6

Le narcocapitalisme, selon Laurent de Sutter c’est l’idée que le capitalisme se soit soutenu de l’anesthésie, c’est-à-dire dire d’une volonté de réduire les excitations et d’anesthésier les corps. Depuis l’utilisation par Kraepelin de l’hydrate de choral pour calmer les maniaco-dépressifs, en passant par la cocaïne, l’invention de l’anesthésie et la pilule contraceptive. Tout ça a servi à l’être, à ce que l’humain soit réduit à l’être (au langage), séparé de son corps. Parce que l’être est toujours policé, contrôlable.

Cela rejoint la dénonciation par Lacan du sujet de la science (dont il fait remonter l’origine à Descartes). In fine, pour la science, le corps idéal est un corps mort (et l’on voit se développer les séries où le médecin légiste est l’un des principaux acteurs de la police scientifique, c’est lui qui apporte les preuves intangibles : le cadavre ne ment pas.)

Sutter examine ensuite la naissance des foules, du concept de foule (je ne me sens pas tout à fait à l’aise avec sa lecture de la Psychopathologie des foules de Freud, mais ça n’a pas d’importance).

Ce qu’il  cherche, vise, c’est – me semble-t-il – ce qu’il y a au-delà du sujet, qui le dépasse, c’est pourquoi il en appelle au désêtre, à la désidentification. La foule, dit-il, fait peur parce qu’elle s’excite, parce que naît ou renaît en elle le sentiment, l’énergie de ce qui la dépasse et qui est vivant. Dans les phénomènes de foule, il y a désidentification à soi (Sutter évacue/élude me semble-t-il la possibilité d’une identification à un leader (au cœur de la lecture freudienne)) et naissance, accroissement d’autre chose, de vital.

Ce livre est à la recherche d’une communauté possible, où la police de l’être ne règne pas en maître. Ce qui implique (de faire tout sauter) de repartir depuis la simple observation de ce qu’il y a, de ce qui circule. Et une réconciliation, un renouage avec le corps (qui fait si peur, apparemment).

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