« Cette différence, propre à Lacan, du symptôme et du sinthome, nous montre bien pourquoi nous avons aussi besoin de deux termes comme ceux de désir et de pulsion. Le désir a ses intermittences tandis que la pulsion a sa constance. Il y a du côté du désir tout un jeu de masques et il est incessamment travaillé par une négativité interne, si je puis m’exprimer ainsi, alors que, du côté de la pulsion, nous avons une positivité plus ou moins grande.
… Du côté symptôme et vérité, tout repose sur le manque. Du côté sinthome et jouissance, il n’y a pas de manque.
…
Du côté du symptôme, c’est la répétition de la rencontre manquée, une répétition de l’évitement, tandis que du côté du sinthome, c’est la répétition de ce qui soutient le sujet dans l’être, et pourquoi tout lui est bon. Ce n’est qu’en termes économiques qu’on pourra ici parler de plus et de moins. »
Conclusion des Leçons du sinthome, Journées ECF 2005, Jacques-Alain Miller
il y a urgence, il y a mercredi, bientôt, la séance. peu de souvenirs, pas un cauchemar en tous cas. un truc affairé, ce que j’en écris déjà ré-inventé:
immense bateau immense peut-être cargo
il avance, il doit faire demi-tour (il le doit vraiment, c’est probablement une question de vie ou de mort, une question cruciale)
il fait demi-tour une première fois, manœuvres gigantesques
en fait, état de guerre, désordre total, insurrections, je ne trouve pas le mot. guerre n’est pas le mot. guerre civile, guerilla, guérilla urbaine. feux, saccages, rues,
demi-tour avorté, repart sur route première des jeunes, comment est-ce qu’on les a appelés, pendant les « événements récents en france », canaille? racaille? non, je ne sais plus. canaille, c’est une terme pour moi devenu lacanien, qui ne peut pas du tout désigner ces personnes. enfin, eux dont j’oublie le mot qui les a désignés, essaient de me fourguer, vendre, sommes dans salle de machine
– avez-vous vu récemment à la télévision le film, c’est ça, un bateau coulait, nombreuses personnes enfermées, allaient essayer de s’en sortir, circulaient dans le bateau, rencontraient partout où ils allaient mort et désolation, le bateau était renversé -,
les jeunes donc essaient de me vendre des fringues de magasins qu’ils en ont profité pour pille. je leur réponds vêtement par vêtement, très calmement, décide de prendre leurs offres au sérieux, fais comme si aurais pu être intéressé,e si ça m’avait convenu et rejette un à un tous les vêtements. à la fin, leur explique, à ceux qui sont restés avec moi, le dramatique de la situation, mais, je ne me souviens plus de quoi il s’agit, de quelque chose de vraiment grave, qu’ils ne savaient pas. s’en vont, savent. je remonte. tout est désert.
le bateau fait demi-tour, demi-tour immense, manœuvre immense. je suis furieuse. folle furieuse. seule et folle furieuse. je ne sais pas qui comment quoi a décidé de ça, comment ça s’est fait. je veux arrêter ça. ce n’est pas du tout que je sois contre le demi-tour, mais pas de cette façon. pas que ça se fasse et que ça soit décidé par d’obscurs dirigeants que je décide de débusquer. je devine où ils se cachent probablement. ils sont dans les machines, et les machines sont disposées en profondeur, cachées, en demi-cercle autour de moi. je suis au centre d’une immense plate-forme ronde, déserte, au bord de laquelle, dans un demi-cercle, accrochés au bord, dans des cabines (blanches et bleues), sont cachés « les maîtres » (c’est-à-dire ceux qui ont ordonnés en secret, secrètement, sans en rien dire à personne), que je dois débusquer.
l’image en fait c’est celle de « l’agrafe du nom-du-père » ou bien plutôt « l’agrafe du sinthome » (ce truc greffé, qui fait tenir les bords ensemble).
voilà, c’est tout.
12h08
bon, je n’ai pas encore trouvé sur internet d’image de l’agrafe par le sinthome
mais:
L’œuvre (de Joyce) avait-elle besoin d’être publiée ? Pas nécessairement. Le sinthome oui, le nécessitait. Que Joyce ait voulu sa publication, c’est une question qui a pu rendre perplexe Lacan. Dès lors, elle est une agrafe (elle fait le quatrième) qui épingle le symptôme comme social, lui laissant enfin une entrée. C’est ce que Joyce appelle son tour de farce. Son dire magistral est plutôt pour Lacan tour d’écrou qui libère et serre en ses tours la réserve, montrant ainsi qu’un nouage est possible sans père, à cette condition bien sûr de s’en être chargé. A la force du dénouage et renouage, le sinthome (écrivons-le de sa dernière écriture), élève la condition d’artiste à ce paradigme: se faire fils nécessaire.
L’intérêt maintenant est d’examiner ce qui lui a permis de rabouter en place de cette fêlure, de réduire et tasser le glissement de l’imaginaire, c’est-a-dire du rapport au corps. Il n’est pas Joyce qui, lui, produit une écriture comme sinthome pour réparer le détachement de l’ego, mais il pourra prendre congé du lien à l’analyste sans que cela se dénoue pour autant, avec une agrafe (pur produit de l’analyse).
Du fait même qu’il m’en propose le plastron, parmi les autres, au cours de sa dérive, et que je m’en saisisse rapidement, le lui désignant comme un enjeu, il va se dire et se faire maverick. Ce mot anglais désigne, au sens propre, un animal non marqué au fer, c’est-a-dire détaché du troupeau, comme pourrait l’être un veau ou un cheval ; au sens figuré, il signifie anticonformiste.Maverick, c’est l’homme libre. Ce plastron est un peu plus souple que les autres, et présente l’avantage (je l’apprendrai dans le recueil de ses effets) de rassembler une série métonymique et de nommer sa jouissance avec un mot de la langue anglaise (langue de la branche paternelle de sa famille). Il marque sa position de sujet libre. Il va même s’en tatouer. Une façon, dira-t-il, de tatouer la mort et de trouver le mors, le frein dans la langue. Il s’en fait un blason sur une chevalière qu’il porte au doigt, de sorte que lorsqu’il la tourne d’un certain côté, c’est le signe pour les jeunes femmes qu’il est à prendre (il est ainsi chevalier de la dame) ; retournée de l’autre côté, principe de mesure, cela signifie qu’il est déjà pris. Ce blason dont il invente lui-même le dessin, fait contrepoids entre un père déclassé et une famille maternelle d’origine noble. C’est un S1 qui agrafe réel et symbolique, liant l’imaginaire. C’est un capiton dans le texte de lalangue. Il va se dire, se faire maverick, et il ne sera plus fou.
A partir de ce nom qui fixe sa jouissance et sa position de sujet libre, il va pouvoir rassembler les faits de son histoire, sa dispersion ; ce nouveau nom va borner l’instabilité du signifiant. Il va se maintenir dans un lien social, non plus en chassant les reflets, mais en devenant surveillant dans un lycée privé. Ce nouveau nom a l’avantage de l’inclure tout en le laissant libre puisque c’est son choix insondable. Il lui permet de désamorcer la pulsion de mort, la jouissance qui insiste jusque dans son patronyme (il est composé de deux syllabes paradoxales, l’une évoquant la mort, l’autre (anglaise), la fuite, la liberté) qui restera toujours son nom social, mais débarrassé du réel de l’impératif. Avec maverick, il trouve le jeu de pouvoir continuer à être cheval sans identification rigide, sans licou puisque c’est le sujet libre, mais il n’est plus sans mors, sans principe d’arrêt. D’un sans marque, il a fait sa marque. C’est pourquoi je dis que maverick est une invention, un pur produit de l’analyse qui l’a amène à se passer du lien a l’analyste, au bout de sept ans d’efforts.
en voilà une d’image – dans mon rêve, les « dirigeants », ceux à l’a-ttaque/ssaut – desquels je vais partir, ceux qui sont à l’origine du mouvement de retour, mais qu’ils ont lancé de façon absolument anti-démocratique, à tout le moins sans s’en être concertés avec moi, sont dissimulés dans les cabines (bleues et blanches) du sinthome.
Il y a deux jours, je rêve d’un amoncellement, d’un empilement vertical de « caddies » au dessus duquel je vais me percher, me réfugier, extrême précarité, je tente de diriger les mouvements des caddies, qui sont vifs, accélérés, imprévisibles, avec mon corps.
Cet empilement de « cas » (les « cas » de « caddies ») désignant pour moi le « K » du « K-rante » (40) du 40-45 / date de la guerre / à laquelle je dis, à la suite de ma lecture de R. Warshasky, que « mon temps s’est figé« .
Date à laquelle, depuis laquelle, l’histoire ne peut pas se faire. Qui ne s’intègre pas à la suite des nombres à laquelle pourtant elle appartient. 1Cela, je l’avais autrefois dit à mon analyste, le premier, qui l’avait balayé: « Mais non, … »
En sixième latine, sixième latine A, je dessine à la professeur d’histoire et de latin, Mme Chapeau, qui le demande, une ligne de temps où j’inscris 4 dates:
40-45 ; 0 ; 33 (âge de la mort du christ).
J’ajoute ensuite 14-18 parce qu’effectivement je connais cette date (qui vient doubler 40-45).
Dessous cette ligne, j’explique que l’histoire ne peut être prise, considérée, comme une suite de dates, que l’histoire c’est passionnant, mais que cette passion ne tient pas dans les dates.
Aujourd’hui, aurais-je à dessiner une ligne du temps, elle serait la même.
Identifiée, passionnément… crucifiée… à la guerre (40). Promise, dans le prénom de ma mère, à la lecture du point G.
LUTGARDE « art du G lu, art de lire le point G »
G qui est de guerre, dit de guerre par mon père, de jouissance silencieuse en ma mère.
On voit qu’il y a là comme un lien entre le G de quarante et celui du prénom de ma mère. C’est un lien, fait il y a bien longtemps, inoublié, en analyse, au départ d’un rêve où il était question d’un G (le GSM, le téléphone), et du point G (à propos duquel j’avais entendu un émission radiophonique).
Ce raccord, ce raccourci, je l’ai refait récemment, au sortir d’un cours de Miller, comme il avait évoqué la fixation et la jouissance féminine 2Les notes du cours concerné: I Avant : désir interdit –> jouissance II Ensuite : la jouissance est pensée au-delà – positivée comme celle d’un corps qui se jouit. C’est un événement de corps – ça s’oppose à l’interdiction, ça n’est pas articulé à la loi du désir. Le choc, la contingence, le pur hasard, ça n’est pas dialectique, mais objet de fixation, non pris dans la loi du désir. C’est comme ça, par ce biais, que Lacan a pu rencontrer la jouissance féminine – la part qui existe sans subir l’interdiction, qui n’est plus centrée sur le Penisneid, fonction négative, qui n’est pas prise du côté dialectique, de l’Aufhebung – ça efface le « perdre pour retrouver » (un enfant, c’est encore mieux que l’organe qui manque). Ça ne se transmute pas en maternel. Faut voir comment ça fonctionne du côté homme. Au 2 mars… quand je me suis souvenue d’une sensation d’enfant. Lorsque, soi-disant malade, feignant la maladie, diagnostiquée cependant par une médecin d’angine blanche, je pouvais passer la journée dans le lit de mes parents, à la place de ma mère. Quelquefois alors je me mettais à entendre le temps ralentir, s’allonger. Mon corps lui-même s’allongeant, par différentes parties, élastique, s’étirant à volonté et à l’infini – et tout cela, dans cette lenteur entendue. J’étais à la place de ma mère. Dont je pourrais dire qu’elle est pourrait être ma place de sinthome aujourd’hui – c’est ce que j’entends au cours de Miller, l’inertie du sinthome.
Ah oui, le lien du G de la guerre de quarante, au G, comme point de jouissance ?
Je passe sur un rêve que j’ai fait qui me désigne explicitement dans la répétition du quarante, comme double même d’elle, de ma mère – double dont j’ai coutume, auquel il ne faudrait pas que je me tienne, dont la culpabilité cependant m’a enfin quittée, ce qui explique que je puisse enfin avancer, sortir de la seule répétition du double, du double du double, pour répéter, réitérer seulement l’Un (sans double) -, dans la répétition d’un 40 d’abord, d’un 4 ensuite, au cours d’rêve qui se passe, pour partie au moins, au moyen-âge, dans une moyenne d’âge (40).
Mais, le temps gelé : est-ce qu’on l’entend déjà dans ce que j’ai écrit jusqu’à présent? Ou cela doit-il être davantage précisé?
Dire : l’angoisse ne me saisit plus qu’en présence de ma mère. La pétrification. J’ai été vers ça, dans les derniers temps de mon analyse, l’envie, le désir, de lever ça, pour pouvoir rétablir un contact avec elle, un contact qui rende mieux justice à l’amour que j’ai pour elle. L’angoisse vis-à-vis de l’école (ECF) s’étant quant à elle atténuée. Au point que je puisse me demander même si elle n’a pas complètement disparu, c’est à tester, et si elle n’a pas trouvé à être remplacé par un désir, devenu tactique, ou qui se voudrait tel (je me découvrirais des ambitions sans nom, inavouables…), l’école n’étant pas de l’approche la plus facile. Et puis elle demanderait à ce que je quitte mon lit – où, heureusement, je peux encore réfléchir fortement, et établir mes plans d’action (hé hé hé).
La guerre, Le point g, Ma mère.
« 40 », c’est le dit, disais-je, de mon père: pas un jour où il ne nous parlait de la guerre et des juifs. Pas un jour. Pas une personne qu’il ne rencontrait, qu’il n’abordait, en ne lui parlant de la guerre. L’extraordinaire, c’est qu’il aurait eu toujours quelque chose de nouveau à raconter. C’était toujours autre chose. L’extraordinaire, c’est que ça faisait lien, que ça le faisait vraiment parler avec la personne qu’il rencontrait, que ça faisait point de rencontre, et que mon père était considéré comme très sympathique. Mes frères également, mes 2 frères, parlaient avec lui, de la guerre, nous, ma mère et moi, nous nous taisions. Et bablabli et blabla bla, je n’y arriverai pas, pas aujourd’hui, et c’est BASTA.
Questions diverses
1/
Quid de la relation :
désir de l’analyste – (jouissance du) sinthome
Cette jouissance du sinthome, n’est-ce pas quelque chose qui s’atteint se rejoint au-delà de la possibilité « d’être analyste »? il existe du sinthome là où il n’y a pas nécessairement d’analyste?
Ce que je voudrais interroger également : un point où désir et jouissance se rejoignent, trouvent à s’accorder.
2/
« Mais si on tient que le sujet ne se réduit pas, dans sa fonction la plus essentielle, au psychologique, son exclusion hors du champ du nombre s’identifie à la répétition, ce qu’il s’agit de montrer. »
Exclusion hors du champ du nombre –> répétition –> sinthome?
ou prise en dehors de la suite du nombre –> répétition –> sinthome ?
3/
« De même, l’existence d’un objet ne lui vient que de tomber sous un concept, aucune autre détermination ne concourt à son existence, si bien que l’objet prend son sens de sa différence d’avec la chose intégrée, par sa localisation spatio-temporelle, au réel. » (Ibid., « La suture »)
4/
« Par où vous voyez la disparition qui doit s’effectuer de la chose pour qu’elle apparaisse comme objet – qui est la chose en tant qu’elle est une. » (Ibid. )
concept –> disparition de la chose / apparition de l’objet = la chose en tant que Une = cet objet donc qui vient à exister
Nota bene:
A/ sur le « plus un », la réitération, et l’addiction : dirait-on (j’ai oublié ce à quoi j’avais pensé ce matin)
« une cigarette encore, donne-m’en une, la dernière » (ferré) – un verre de plus, le dernier, un tweet de plus, un clic de plus, un chips de plus
un en plus, le même, je réitère donc j’addicte
les accointances du sinthome et de l’addiction – difficile d’admettre le n’importe quoi du sinthome, le n’importe quel Un, du moment qu’il est Un, du sinthome – surtout si l’on pense à la « racine du refoulé » – qui n’est pas n’importe quoi, qui ferait la différence. relire à propos de l’addiction le cours de Miller, le dernier (9), et l’avant dernier (8).
B/ cet Un de la fixation bloque la pulsion (dit Miller) – dans mon cas, bloque au redoublement, ça double, ça se bloque, et ça redouble – ma mère, encore, épelant le nom (du père) disait : « M – U – double L – E – R » (où l’on voit que le double n’est pas la répétition, la réitération.)
que me pardonnent tous ceux que j’ai doublés, mais je continuerai dorénavant de la faire, et probablement pas sans jouissance, parce qu’il ne s’agit plus seulement de doubler. il y a de L tout seul, ou du G tout seul ou du cas tout seul soit de l’un, tout seul. sans Autre.
Notes en bas de page
1
Cela, je l’avais autrefois dit à mon analyste, le premier, qui l’avait balayé: « Mais non, … »
2
Les notes du cours concerné: I Avant : désir interdit –> jouissance II Ensuite : la jouissance est pensée au-delà – positivée comme celle d’un corps qui se jouit. C’est un événement de corps – ça s’oppose à l’interdiction, ça n’est pas articulé à la loi du désir. Le choc, la contingence, le pur hasard, ça n’est pas dialectique, mais objet de fixation, non pris dans la loi du désir. C’est comme ça, par ce biais, que Lacan a pu rencontrer la jouissance féminine – la part qui existe sans subir l’interdiction, qui n’est plus centrée sur le Penisneid, fonction négative, qui n’est pas prise du côté dialectique, de l’Aufhebung – ça efface le « perdre pour retrouver » (un enfant, c’est encore mieux que l’organe qui manque). Ça ne se transmute pas en maternel. Faut voir comment ça fonctionne du côté homme. Au 2 mars…
Comme Jacques-Alain Miller l’avait si justement désignée, il y a de nombreuses années, et que son cours de l’an passé permet d’argumenter, il s’agit bien d’une clinique ironique. C’est-à-dire une clinique qui fait la distinction radicale entre réel et semblant, entre existence et être, soit entre hénologie et ontologie. Mais qui fait sa part belle au sinthome, agrafe unique du semblant et du réel. Encore faut-il que le praticien l’ait aperçu, que cet instant de voir porte à conséquences, qu’il en prenne la mesure et ne recule pas devant la tâche. On peut attendre que sa cure analytique, faite d’ouverture et de fermeture de l’inconscient, lui enseigne peu à peu ce qui fonde la qualité ironique de sa position. L’éveil, la curiosité et l’enthousiasme en sont les meilleurs signes. Et, ici, notons qu’enthousiasme ne va pas sans une certaine intranquillité, qu’en tout cas nous sommes loin de la béatitude.