du temps gelé, de la guerre, du point g
— (de la lecture, de ma mère)

5 avril 2011 | avril 2011 | le caddie, un treillis sur la mer | , , , , , , , , , , , , |

Il y a deux jours, je rêve d’un amoncellement, d’un empilement vertical de « caddies » au dessus duquel je vais me percher, me réfugier, extrême précarité, je tente de diriger les mouvements des caddies, qui sont vifs, accélérés, imprévisibles, avec mon corps.

Cet empilement de « cas »  (les « cas » de « caddies ») désignant pour moi le « K » du « K-rante » (40) du 40-45 / date de la guerre / à laquelle je dis, à la suite de ma lecture de R. Warshasky,  que « mon temps s’est figé« .

Date à laquelle, depuis laquelle, l’histoire ne peut pas se faire. Qui ne s’intègre pas à la suite des nombres à laquelle pourtant elle appartient. 1Cela, je l’avais autrefois dit à mon analyste, le premier, qui l’avait balayé: « Mais non, … »

En sixième latine, sixième latine A, je dessine à la professeur d’histoire et de latin, Mme Chapeau, qui le demande, une ligne de temps où j’inscris 4 dates:

40-45 ; 0 ; 33 (âge de la mort du christ).

J’ajoute ensuite 14-18 parce qu’effectivement je connais cette date (qui vient doubler 40-45).

Dessous cette ligne,  j’explique que l’histoire ne peut être prise, considérée, comme une suite de dates, que l’histoire c’est passionnant, mais que cette passion ne tient pas dans les dates.

Aujourd’hui, aurais-je à dessiner une ligne du temps, elle serait la même.

Identifiée, passionnément… crucifiée… à la guerre (40).
Promise, dans le prénom de ma mère, à la lecture du point G.

LUTGARDE 
« art du G lu, art de lire le point G » 

G qui est de guerre, dit de guerre par mon père, de jouissance silencieuse en ma mère.

On voit qu’il y a là comme un lien entre le G de quarante et celui du prénom de ma mère. C’est un  lien, fait il y a bien longtemps, inoublié, en analyse, au départ d’un rêve où il était question d’un G (le GSM, le téléphone), et du point G (à propos duquel j’avais entendu un émission radiophonique).

Ce raccord, ce raccourci, je l’ai refait récemment, au sortir d’un cours de Miller, comme il avait évoqué la fixation et la jouissance féminine 2Les notes du cours concerné:
I Avant : désir interdit –> jouissance
II Ensuite : la jouissance est pensée au-delà – positivée comme celle d’un corps qui se jouit. C’est un événement de corps – ça s’oppose à l’interdiction, ça n’est pas articulé à la loi du désir.
Le choc, la contingence, le pur hasard, ça n’est pas dialectique, mais objet de fixation, non pris dans la loi du désir.
C’est comme ça, par ce biais, que Lacan a pu rencontrer la jouissance féminine – la part qui existe sans subir l’interdiction, qui n’est plus centrée sur le Penisneid, fonction négative, qui n’est pas prise du côté dialectique, de l’Aufhebung ça efface le « perdre pour retrouver » (un enfant, c’est encore mieux que l’organe qui manque). Ça ne se transmute pas en maternel.
Faut voir comment ça fonctionne du côté homme.
Au 2 mars…
  quand je me suis souvenue d’une sensation d’enfant. Lorsque, soi-disant malade, feignant la maladie, diagnostiquée cependant par une médecin d’angine blanche, je pouvais passer la journée dans le lit de mes parents, à la place de ma mère. Quelquefois alors je me mettais à entendre le temps ralentir, s’allonger. Mon corps lui-même s’allongeant, par différentes parties, élastique, s’étirant à volonté et à l’infini – et tout cela, dans cette lenteur entendue. J’étais à la place de ma mère. Dont je pourrais dire qu’elle est pourrait être ma place de sinthome aujourd’hui – c’est ce que j’entends au cours de Miller, l’inertie du sinthome.

Ah oui, le lien du G de la guerre de quarante, au G, comme point de jouissance ?

Je passe sur un rêve que j’ai fait qui me désigne explicitement dans la répétition du quarante, comme double même d’elle, de ma mère double dont j’ai coutume, auquel il ne faudrait pas que je me tienne, dont la culpabilité cependant m’a enfin quittée, ce qui explique que je puisse enfin avancer, sortir de la seule répétition du double, du double du double, pour répéter, réitérer seulement l’Un (sans double) -, dans la répétition d’un 40 d’abord, d’un 4 ensuite, au cours d’rêve qui se passe, pour partie au moins,  au moyen-âge, dans une moyenne d’âge (40).

Mais, le temps gelé : est-ce qu’on l’entend déjà dans ce que j’ai écrit jusqu’à présent? Ou cela doit-il être davantage précisé?

Dire : l’angoisse ne me saisit plus qu’en présence de ma mère. La pétrification. J’ai été vers ça, dans les derniers temps de mon analyse, l’envie, le désir, de lever ça, pour pouvoir rétablir un contact avec elle, un contact qui rende mieux justice à l’amour que j’ai pour elle. L’angoisse vis-à-vis de l’école (ECF) s’étant quant à elle atténuée. Au point que je puisse me demander même si elle n’a pas complètement disparu, c’est à tester, et si elle n’a pas trouvé à être remplacé par un désir, devenu tactique, ou qui se voudrait tel (je me découvrirais des ambitions sans nom, inavouables…), l’école n’étant pas de l’approche la plus facile. Et puis elle demanderait à ce que je quitte mon lit – où, heureusement, je peux encore réfléchir fortement, et établir mes plans d’action (hé hé hé).

La guerre, Le point g, Ma mère.

« 40 », c’est le dit, disais-je, de mon père: pas un jour où il ne nous parlait de la guerre et des juifs. Pas un jour. Pas une personne qu’il ne rencontrait, qu’il n’abordait, en ne lui parlant de la guerre. L’extraordinaire, c’est qu’il aurait eu toujours quelque chose de nouveau à raconter. C’était toujours autre chose. L’extraordinaire, c’est que ça faisait lien, que ça le faisait vraiment parler avec la personne qu’il rencontrait, que ça faisait point de rencontre, et que mon père était considéré comme très sympathique. Mes frères également, mes 2 frères, parlaient avec lui, de la guerre, nous, ma mère et moi, nous nous taisions. Et bablabli et blabla bla, je n’y arriverai pas, pas aujourd’hui, et c’est BASTA.

Questions diverses

1/

Quid de la relation :

désir de l’analyste – (jouissance du) sinthome

Cette jouissance du sinthome, n’est-ce pas quelque chose qui s’atteint se rejoint au-delà de la possibilité « d’être analyste »? il existe du sinthome là où il n’y a pas nécessairement d’analyste?

Ce que je voudrais interroger également : un point où désir et jouissance se rejoignent, trouvent à s’accorder.

2/

« Mais si on tient que le sujet ne se réduit pas, dans sa fonction la plus essentielle, au psychologique, son exclusion hors du champ du nombre s’identifie à la répétition, ce qu’il s’agit de montrer. »

(Jacques-Alain Miller, « La suture »)

Exclusion hors du champ du nombre –> répétition –> sinthome?

ou prise en dehors de la suite du nombre –> répétition –> sinthome ?

3/

« De même, l’existence d’un objet ne lui vient que de tomber sous un concept, aucune autre détermination ne concourt à son existence, si bien que l’objet prend son sens de sa différence d’avec la chose intégrée, par sa localisation spatio-temporelle, au réel. » (Ibid., « La suture »)

4/

« Par où vous voyez la disparition qui doit s’effectuer de la chose pour qu’elle apparaisse comme objet – qui est la chose en tant qu’elle est une. »    (Ibid. )

 concept –> disparition de la chose / apparition de l’objet = la chose en tant que Une = cet objet donc qui vient à exister

Nota bene:

A/ sur le « plus un », la réitération, et l’addiction : dirait-on (j’ai oublié ce à quoi j’avais pensé ce matin)

« une cigarette encore, donne-m’en une, la dernière » (ferré) – un verre de plus, le dernier, un tweet de plus, un clic de plus, un chips de plus

un en plus, le même, je réitère donc j’addicte

les accointances du sinthome et de l’addiction – difficile d’admettre le n’importe quoi du sinthome, le n’importe quel Un, du moment qu’il est Un, du sinthome – surtout si l’on pense à la « racine du refoulé » – qui n’est pas n’importe quoi, qui ferait la différence. relire à propos de l’addiction le cours de Miller, le dernier (9), et l’avant dernier (8).

B/ cet Un de la fixation bloque la pulsion (dit Miller) – dans mon cas, bloque au redoublement, ça double, ça se bloque, et ça redouble  – ma mère, encore, épelant le nom (du père)  disait : « M – U – double L – E – R »  (où l’on voit que le double n’est pas la répétition, la réitération.)

que me pardonnent tous ceux que j’ai doublés, mais je continuerai dorénavant de la faire,  et probablement pas sans jouissance, parce qu’il ne s’agit plus seulement de doubler. il y a de L tout seul, ou du G tout seul ou du cas tout seul soit de l’un, tout seul. sans Autre.

Notes en bas de page

  • 1
    Cela, je l’avais autrefois dit à mon analyste, le premier, qui l’avait balayé: « Mais non, … »
  • 2
    Les notes du cours concerné:
    I Avant : désir interdit –> jouissance
    II Ensuite : la jouissance est pensée au-delà – positivée comme celle d’un corps qui se jouit. C’est un événement de corps – ça s’oppose à l’interdiction, ça n’est pas articulé à la loi du désir.
    Le choc, la contingence, le pur hasard, ça n’est pas dialectique, mais objet de fixation, non pris dans la loi du désir.
    C’est comme ça, par ce biais, que Lacan a pu rencontrer la jouissance féminine – la part qui existe sans subir l’interdiction, qui n’est plus centrée sur le Penisneid, fonction négative, qui n’est pas prise du côté dialectique, de l’Aufhebung ça efface le « perdre pour retrouver » (un enfant, c’est encore mieux que l’organe qui manque). Ça ne se transmute pas en maternel.
    Faut voir comment ça fonctionne du côté homme.
    Au 2 mars…

Effets de réel, revenance du caddie, l’amour sans retour

6 avril 2011 | avril 2011 | le caddie, Ornelle, RÊVES | , , , , , , , , , , |

( Cela dit, je donnerais cher pour être débarrassée de mon inconscient et de toutes ces histoires qui trop me hantent, m’habitent en ce moment.)

I.

Réveillée cette nuit par une rêve dont je reste très longtemps persuadée qu’il est réel, auquel, une fois passé mon premier réflexe de réveiller F. pour lui dire que « je sais tout », je passe des heures à réfléchir dans un sentiment d’immense malheur, comme s’il venait de m’arriver, coup sur coup, les deux choses les plus abominables qui puissent m’arriver.

Je suis avec F chez mon frère JP et sa compagne Isabelle. Nous partons en promenade avec ma mère. Ils nous annoncent quelque chose (du style d’une naissance prochaine) – ma mère en profite de cette annonce pour… nous annoncer son propre (re-)mariage!

Je suis effondrée. J’ai rencontré par le passé l’homme dont il est question, c’est une brute épaisse, idiote et acculturée. Je crains qu’il ne fasse du mal à ma mère. Comme il est plus jeune qu’elle, je me demande si son « amour » n’est pas intéressé. Comme elle n’est vraiment pas riche, limite pauvre, et ne dispose que de l’œuvre de mon père, je me demande ce qu’il peut lui vouloir. Je crains qu’il ne cherche à lui faire du mal pour lui faire du mal; j’élimine l’idée qu’il en veuille à l’œuvre de mon père. Je touche de mes doutes un mot à mon frère. Ma mère conteste mes dires, affirme qu’ils s’aiment et s’aiment depuis… 7 ans (!)1. Ensuite, me dit  qu’elle est prête à tous les sacrifices pour lui, ce qui, la connaissant, est très effrayant. Finalement me lache qu’elle l’aime mais que lui ne l’aime pas. Qu’il lui fait déjà du mal. J’en fais part à mon frère, qui s’effondre à son tour. Nous devons partir, Frédéric et moi, rentrer à Paris. Il semble maintenant trouver que notre départ est urgent. (histoire… voiture… ma tante).

Je monte voir Frédéric. Il est ivre-mort, effondré, me tend un papier, sans un mot, c’est un questionnaire auquel il a répondu. Je le parcours, lis les questions, ne lis qu’une seule de ses réponses. « Comment s’appelle la femme avec qui vous la trompez? » Il a écrit : ORNELLE. Les autres questions tournent autour de cette relation, quels avantages / désavantages, offre l’une, l’autre, etc. Je ne sais absolument plus quoi faire. Rien de pire n’aurait pu m’arriver. Je ne peux pas compter sur F. pour rassembler nos affaires, faire nos bagages, il est complètement hors de course. Je veux expliquer ça à mon frère, mais lui s’énerve, veut qu’on parte. Je ne me sens pas moi-même capable de faire les bagages. Je dis à F. ce qui se passe, le re-mariage de ma mère. Il ne peut réagir. Il serait prêt à conduire.

Autre étage, étage supérieur. Isabelle, ma mère et moi. Des choses que j’ai oubliées. Debout, discutons. Isabelle a une idée. Plus tard. Eau, bassin, nage, nue, moi nue, nage dans bassin intérieur, immense (comme la baignoire d’Irène). Je montre à Jules, ce bassin, baignoire ronde, dans espace sombre, entouré de fauteuils, de fauteuils de cinéma. Des hommes, 3, des hommes du type les mauvais dans les films, costard-cravate, genre Tarentino, en vraiment méchant. L’homme de ma mère, peut-être l’un d’eux. Des choses se passent. Ma nudité me gêne, je nage sous l’eau.

Plus tard, me réveille. Veux d’abord réveiller Frédéric, me retiens, heureusement, la réalité du désagrément et de la mauvaise humeur qu’il en éprouverait arrivent à me retenir. Je suis convaincue de la réalité de ce que je viens d’apprendre dans le rêve. J’arrive à me dire que même si ce n’est pas vrai, ça recouvre une vérité, une réalité, un  certain – je pense « effet de réel ».

II.

Je finis par me rendormir.

Je suis en cours de mathématiques, j’arrive en retard. J’aime ce cours, je suis heureuse qu’il n’ait pas vraiment commencé. Il semblerait qu’ils se soient contentés jusque là de parler de … ??? Au tableau, des mots que j’ai peine à distinguer, dont j’ai peine à croire, que je  les trouve, lise là. Plus tard, le professeur, une femme, me dira qu’il s’agit de   » Ics  & réel » (!!!).

Ce professeur a découvert Lacan. Veut partager ça avec ses élèves. Sommes dans  période de l’année après les examens. Donc plus vraiment tenue par un programme. Elle attribue un séminaire à chaque élève, pour en faire un exercice de lecture. Moi, c’est le Séminaire IV. Elle nous invite à raconter le rêve que nous avons fait la nuit précédente. M’indique que j’aurais dû lui dire que je m’intéressais à la psychanalyse. Une fois venu mon tour, je raconte l’effet de réel du rêve, mon copain qui me trompe.  Mais, je ne me souviens plus de la première partie du rêve, dont  je dis qu’il est tout aussi catastrophique et l’effet de réel tout aussi poignant.

Sortie du cours. Nathalie…

Direction passage aux caisses. Croise un homme. Caddie plein me tombe dessus, se renverse sur moi.  J’arrive à me redresser, à le  redresser, ramasse les objets tombés, éparpillés. En vérité, personne ne m’aide (ce qui m’étonne un peu). J’arrive en caisse. Je paie avec une carte bleue. Quelqu’un a laissé à la caisse un livre de Lacan et des billets (j’hésite à m’en emparer, voler). Je repars, dans la rue, avec le caddie (dont je crains qu’on ne pense que je le vole, mais que j’ai l’intention d’ensuite restituer, que je ne fais qu’emprunter). Il commence à pleuvoir. Je m’abrite je ne sais où. La pluie me réveille, il fait soleil.

III.

Pas eu de réponse à ma lettre (demande de passe !!) de la semaine dernière. Cela me convient. Me permet de réfléchir. Il n’empêche que quelque chose est engagé. Et que j’aimerais sortir de cet actuel sentiment d’irréalité. M’assurer de donner la bonne réponse à cette absence de réponse, ne pas laisser passer cet instant, ni m’y installer, ne pas le laisser devenir rien. Tirer les conséquences.

Notes:
  1. 2011 – 7 = 2004, année de la conception de Jules, mon enfant []

Beau, su, est – Le symptôme du père

15 avril 2011 | avril 2011 | Beau, su, est - Le symptôme du père | , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , |

vendredi 14 ou 15 avril 2011

Le rêve :

« Je travaille pour quelques jours à E.1  Il y fait sombre. Je m’y sens seule et parano, avec l’impression de travailler mal que je connais si bien. 

En fin de journée, j’erre dans mon ancien quartier, sur la place où j’habitais, qui ne lui ressemble pas.  J’ai rendez-vous avec D*, mon analyste d’alors.  J’attends l’heure du rendez-vous dans un café en face de chez lui, qui en fait en face de chez moi, le café se trouvant lui à l’emplacement… de son cabinet à lui… son cabinet se trouvant à l’endroit où j’habitais. Nous habitions l’un en face l’autre.  Il vient me chercher, m’a vue depuis sa fenêtre, me dit de venir tout de suite, sans attendre, qu’il a du temps. Traversons la place, nous rendons à son cabinet.

Montons des ESCaliers de marbre, cabinet à gauche.

D* me fait entrer, me fait asseoir, s’assoit lui-même, mais pas à son bureau. Me présente à une jeune femme. Il y a quelqu’un d’autre. Me dit :  ‘Allez-y, racontez à cette personne comment [… souvenir manque  Je dis que ce n’est pas ça, que ça ne s’est pas passé comme il le dit et je me mets à raconter.

Ce que je raconte, à propos de mon de mon analyse et de mon lien à l’École, l’École de la Cause freudienne, me réveille au milieu de la nuit. »

Du rêve, le lieu, la place, les escaliers de marbre me ramènent d’abord à une petite place de mon enfance, la place Bossuet. Il y avait là un magasin  de je ne sais quoi où nous n’avions pas à aller souvent, presque jamais. Des escaliers de marbre à grimper et, une fois la porte poussée, sur la gauche, nous nous trouvions dans un sombre magasin, aux volets tirés, face à un comptoir dont les parois surélevées jusqu’au plafond ne laissaient qu’un restreint encadrement à la figure de l’un ou l’autre vendeur  y paraissant dissimulé protégé camouflé par un amoncellement, un bric à brac, une barricade  d’objets hétéroclites.

Aujourd’hui, l’école de Jules se trouve rue Bossuet. A l’école, des Dames,  j’avais étudié des extraits des Sermons sur la mort.

« Beau su est« . J’entends : « Le beau, su, est. »  J’y entends une ontologie  du beau. Cette ontonlogie au cœur du cours de Jacques-Alain Miller de cette année.

Je repense alors à ce moment où LG (mon analyste actuel) m’avait dit qu’il trouvait beau ce que mon père faisait, sa peinture. Je me souviens avoir pensé que ce moment avait été crucial. Parce que…  si l’œuvre de mon père était belle, si elle était reconnue comme telle,  je n’avais plus alors à l’incarner moi-même, je n’avais plus à être désirée en tant que l’œuvre de mon père… et  cette œuvre pouvait se détacher de moi. Me permettant de la désirer à mon tour. 

J’ai songé alors à l’œuvre en tant que symptôme, comme symptôme de mon père. Comme si j’avais eu à incarner ce symptôme-là. Et comme si tout d’un coup, je pouvais me mettre à avoir mon propre symptôme.

C’est quelque chose que j’avais déjà ressenti, écrivant  à propos d’autres rêves, le sentiment de découvrir le symptôme de mon père. Et qui s’était ravivé la veille, lisant Miller parler du père comme symptôme et de la nécessité de ce symptôme :

Eh bien, dans cette symptomatisation générale des catégories analytiques, Lacan esquisse que le père, l’essentiel de sa fonction, c’est d’être un symptôme. C’est le sens de ce développement que Lacan a pu faire sur l’exception que doit représenter le père. Il parle pour lui de caractère d’exception, parce qu’il veut lui donner le caractère d’ex-centré, que le père a le caractère d’ex-sistence, de subsistance « hors de ». Et donc, il lui faut donc à ce moment-là caractériser le père non pas par l’universel, mais au contraire par la particularité de son symptôme. Et c’est en ce sens que Lacan a pu dire le père est un pervers. Ça veut dire un père, le père freudien même, n’est pas le père de l’universel, il est au contraire au niveau de la particularité du symptôme. Il y a qu’il est essentiel qu’il ne soit pas Dieu, précisément. Freud avait montré la racine de l’illusion religieuse dans la fonction du père et Lacan au contraire marque que le mirage divin est à proprement parler mortifère ou psychotisant quand il est supporté par le père. Il faut que le père soit pervers au sens où il doit être marqué par la particularité d’un symptôme.
Jacques-Alain Miller, L’être et l’un, « X. Itinéraire et itération de Lacan // imaginaire → symbolique → réel », cours du 6 avril 2011.

(erreur sur le symptôme)

seig
neur
il y aura eu
e
rreur
sur-le-symptôme

BLIND BLIND BLIND
ha ha

ha

love

(sans œuvre pas sans art)

Ces réflexions m’ont amenée à une autre chose que LG m’avait dite, au téléphone, quand je lui avais dit que que si j’avais pu à un moment donné penser à moi comme à une artiste sans œuvre, au fond, j’étais à ce moment-là comme une analyste sans analysant. A quoi il m’avait répondu que c’était un rapprochement très intéressant (dont nous reparlerions (ce qui n’est s’est pas à proprement parler fait)) – mais que si j’étais sans œuvre, je n’étais pas sans art.

Avant que de lui parler, j’avais tenter d’interroger le rapprochement entre le travail d’un analyste et celui d’un artiste, entre  une œuvre et un analysant, et je n’y étais absolument pas parvenue. Cette réflexion me donnait l’impression de me trouver face à un problème de logique aporétique, quelque chose d’au-dessus de mes forces, de mon entendement, faisant paniquer mon esprit, le freezant, me laissant juste le sentiment d’être un peu idiote, déficiente, et n’ayant d’autre recours que l’espoir d’un éclair, d’une illumination. De cette aporie, LG par son compliment, m’a au fond délivrée comme il me disait que je n’étais « pas sans art »…

« Mais il y a un autre régime de l’interprétation qui porte non sur le désir mais sur la cause du désir, et ça, c’est une interprétation qui traite le désir comme une défense. Qui traite le manque-à-être comme une défense contre ce qui existe.
Et ce qui existe, au contraire du désir qui est manque-à-être, ce qui existe, c’est ce que Freud a abordé par les pulsions et à quoi Lacan a donné le nom de jouissance. »
https://disparates.org/lun/2011/05/jacques-alain-miller-cours-du-11-mai/

C’était alors à un moment où il me semblait découvrir mon goût du « sans », mon goût pour le « rien »  (à moi tendrement révélé au cours de vacances en Suisse, où il y avait eu le rêve des trois rondelles après le délice de la salade, les bénéfices cependant de cette « révélation » s’étant vu exploser, partir en terribles éclats, quand au retour de Suisse, j’avais trouvé ma mère ici).

Beau, su, est. Qui situe le beau uniquement du côté du savoir et de l’être. Ce que cette ontologisation dénonce.  Le beau  considéré dans sa matière signifiante, idéale et identificatoire. Symptôme de mon père qu’il me faut incarner. Sermon plaqué sur la mort. 

S’esquisse dans ces réflexions le passage d’un être à un avoir, via l’acquisition d’un certain savoir-faire. Le commun dénominateur à ces 4 termes, analyste, artiste, œuvre, analysant, c’est le symptôme. L’être, l’être signifiant, identificatoire, ne se supporte que d’avoir rien, or la pratique de l’analyse n’est sans tirer vers  ce nouvel avoir : un symptôme qui fût le sien. Artiste sans œuvre, analyste sans analysant : pas sans art. Au moins ça : il y a, de la jouissance, de l’art. De la manière. Du savoir-faire, un symptôme.

(Commission)

Je me rendors,  le rêve reprend.

« Je suis maintenant seule avec D*. Il voudrait que je reste, il a encore des rendez-vous. Mais je dois rentrer dîner, dormir chez mes parents, je travaille le lendemain. D* a l’air de penser, de trouver, de tenir, à ce que nous passions la nuit ensemble. Je me dis que si je fais ça, je n’aurai jamais le courage de retourner travailler à E* le lendemain, que déjà, j’en perds le courage. Je veux partir.

D* me dit qu’il a invité le Conseil ou la Commission (de la passe) de l’École. Que d’autres gens viendront également qui ne sont pas de l’École.

Ils arrivent.

Il y a quelqu’un que je connais parmi eux. Une jeune femme dont j’ai oublié le prénom, le curieux prénom, dont l’une des lettres devait soit être prononcé soit ne pas l’être (un « s », je crois), d’une façon inverse à la coutumière, avec qui j’ai travaillé à la Commission européenne. Dans le rêve, elle habite maintenant dans mon quartier. Nous nous entendions bien. Elle était de grade B (moi, C). Très gentille. Portait cependant un parfum que je détestais (Opium, d’YSL (!)). Vive, mariée, de province, française, elle écrivait, rédigeait, extrêmement bien – c’est-à-dire qu’elle faisait un travail que je me sentirais bien incapable de faire, où l’art de l’exposé et du résumé ne tenaient pas la moindre place. De même que le sens de la formule et la connaissance des formulations ad hoc. ) Elle parle des millions qu’elle gagne aujourd’hui.

J’étais arrivé chez D* avec deux livres ou classeurs. Sur la tranche de l’un d’eux il était écrit soit « Conseil« , soit « Commission« . Il n’y s’agissait pas d’un organe de l’École, mais j’avais crains qu’on ne le croie, et qu’on ne croie que je m’y connaisse, quand je n’y connais rien. Ce qui m’embarrasse.

D* pose une question que chacun note, moi également. Il s’agit d’art. Mais je n’ai pas envie de répondre à cette question. Je me lève pour m’en aller. D* me rejoint, sur le pallier, me retient. Me dit qu’il n’en a pas pour longtemps. Me serre dans ses bras, nous nous serrons, c’est bon. Nous nous embrassons. Je me demande si ça peut être agréable alors que je ne le désire, ne l’aime plus. Je constate que oui, c’est très agréable. Je retourne à l’intérieur avec lui. Les gens de l’École sont partis, il en ont eu assez d’attendre. Il restent quelques personne. Je me rends compte que D* donne en fait un cours d’histoire de l’art. Tous les gens s’en vont.

Nous sortons D* et moi, errons sur la place, en nous embrassant. »

Notes:
  1. E = société où travaillais autrefois, à Bruxelles, dont j’ai démissionné pour venir vivre à Paris, avec l’homme que j’avais rencontré, F. []

Giovanni Segantini

18 avril 2011 | avril 2011 | art |

 

… Il est émouvant de lire, dans l’autobiographie de l’artiste, comment à six ans il passait ses journées seul, enfermé du matin au soir dans une pièce étroite et nue. Il supporta son sort pendant un certain temps, aussi longtemps que ce cadre monotone offrit encore quelque attrait et quelque stimulant à son imagination. Mais le texte poursuit : 

 »  Un matin, alors que je regardais par la fenêtre comme hébété, l’esprit vide, le bavardage de quelques voisines parvint à mes oreilles : elle parlaient de quelqu’un, qui encore jeune, avait quitté Milan à pied et était arrivé en France, ou il avait accompli de grandes actions… Ce fut pour moi une révélation. On pouvait donc quitter ce palier, au loin… Je connaissais la route, mon père me l’avait montrée, au cours d’une promenade sur la place du château. ‘C’est par là, avait-il, sous cette voûte, que les troupes françaises et piémontaises victorieuses ont fait leur entrée. C’est Napoléon Ier qui avait fait construire l’arc de triomphe et la route; et la route, disait mon père, traversait les montagnes et conduisait tout droit en France.’  Et l’idée de parvenir en France par cette route ne me quittait plus. »

Les propos des femmes rappellent au petit garçon un récit de son père qui l’avait impressionné, ou il était précisément question de la France et des hauts faits d’un homme. Il n’en a pas fallu davantage pour éveiller les désirs infantiles de grandeur ; mais son énergie impulsive exige une action immédiate. L’enfant de six ans s’enfuit, se munit d’un morceau de pain, passe sous l’arc de triomphe et s’engage sur la route de Napoléon.

Karl Abraham

 

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