Articles comportant le mot-clé "Paul Celan"
[ 29 janvier 2010 / 25 mars 2010 ]
Faire quelque chose,
faire
quelque chose
à la hauteur de la
profondeur.
Quelque chose, sur terre.
< Paul Celan >
PORT-BOU – ALLEMAND ?
[ 31 janvier 2010 / 26 mars 2010 ]Déjouque la cagoule magique,
le casque d’acier.
Nibelungs
de gauche, Nibelungs
de droite:
nettoyé, rhincé, purifié,
déchet.
Benjamin
vous non-dit, à jamais,
il oui-dit.
Ce genre d’éternité, aussi
sous les espèces du B~ Bauhaus :
non.
Pas de Trop tard,
un secret
Ouvert.
Les « Nibelungs de gauche» désignent un collectif: les étudiants « antifascistes» de 1968 qui élurent Benjamin comme leader spirituel tout en se présentant eux-mêmes en victimes de leurs pères. Comme Benjamin, Celan « dit non» pour « dire oui» : non à « ce genre d’éternité », non à toute éternité héroïco-transhistorique, non aussi à sa purification moderniste, non au fonctionnalisme ésotérique du Bauhaus. Celan met en parallèle l’isolement croissant de Benjamin et le sien, son propre sentiment de marginalisation parmi des gauchistes qu’il soupçonne, à tort ou à raison, d’être restés fidèles à l’appel des Nibelungs sous la cagoule magique d’un philo sémitisme ressentimental. Il les met dans le même sac que les « Nibelungs de droite », les nationalistes de « l’Allemagne secrète» critiqués par Benjamin, s’approprie l’adjectif « secret» et pose un « secret Ouvert» utopique, en lieu et place de la topique nationaliste. Quant à l’adjectif qualificatif « allemand », il est éjecté vers le titre, séparé par un trait de Port-Bou, la localité dans les Pyrénées espagnoles où Benjamin, poursuivi par la Gestapo, ne voyant plus d’issue, s’est donné la mort en 1940. L’évocation de Port-Bou place l’ensemble du poème sous l’angle du suicide et de la tombe de Benjamin en terre espagnole, sous l’angle du rétrécissement ultime de sa biographie dans l’impasse de l’histoire. Port-Bou serait-il allemand? La question du titre débouche sur un « secret Ouvert ». Ouvert serait-il la « petite porte étroite» par laquelle, selon Benjamin, le monde en ruines pouvait encore trouver une issue? On ne le saura pas. À 1’instar du philosophe, Celanconserve le missing link qui ouvre le dialogue avec le lecteur.
Andrea Lauterwein, Anselm Kiefer et la poésie de Paul Celan, Editions du regard, pp. 63, 64
Pas de Trop tard,
un secret
Ouvert.
La composition centrifuge des paysages kieferiens a souvent été comparée
[ 31 janvier 2010 / 8 février 2010 ]« La composition centrifuge des paysages kieferiens a souvent été comparée à celle de Champ de blé aux corbeaux de Van Gogh, considérée comme sa dernière toile avant son suicide. Kiefer, dont Van Gogh est l’une des premières idoles, se reconnaît dans la grande charge de souffrance de ce paysage. Sa composition nie l’éclaircissement progressif vers le haut de la peinture de paysage classique, et inverse le centre de gravité habituel en produisant un sentiment de désorientation entre le haut et le bas. Celan, dans Sous une image, l’un de ses nombreux poèmes implicitement dédiés à Van Gogh, s’est intéressé à cette sensation produite par la réversibilité entre l’air et les profondeurs de la terre. Ce motif, constant chez Celan, de la réversibilité entre le haut et le bas permet aussi une rencontre, à distance, du monde des morts et de celui des vivants. »
Andrea Lauterwein, Anselm Kiefer et la poésie de Paul Celan, Editions du regard, p. 146
Les survivants avaient tout simplement réinterprété les aigles massives qui surplombaient la colonne,
[ 31 janvier 2010 / 24 mars 2010 ]« A Maidanek notamment, fin 1943, les survivants du camp d’extermination enfermèrent une boîte contenant des cendres du crématoire dans une stèle due aux désirs d’embellissement des SS. Les survivants avaient tout simplement réinterprété les aigles massives qui surplombaient la colonne, le sigle de l’Empire allemand, comme un symbole de la liberté. »
Andrea Lauterwein, Anselm Kiefer et la poésie de Paul Celan, Éditions du regard, p. 158