les livres ou la vie

les livres. ma vie.

[ 25 février 2008 / 21 novembre 2008 ]

les livres, il ne leur manque que la parole; ma vie, c’est d’être écrite (qu’il lui manque).

night

[ 27 février 2008 / 30 mars 2008 ]

Récemment abondamment lu Imre Kertész*. Commencé par un livre dont à l’instant j’oublie le nom, alors que j’avais cru qu’il allait changer ma vie. Être sans destin. Actuellement lis un livre acheté pour son titre, Les livres que je n’ai pas écrits, de Steiner Georges. Titre qui me rappelle qu’à la lecture de Pourquoi je n’ai écrit aucun de mes livres (de Benabou), également j’avais pensé que ma vie en serait transformée.

Du temps a passé depuis Être sans destin, sans que concrètement rien n’ait vraiment changé. Si ce n’est peut-être cette tristesse supplémentaire, ce sentiment d’avoir laissé, une fois de plus, passer quelque chose.

* J’en livre ici la liste : Être sans destin, Le refus, Kaddish pour l’enfant qui ne naîtra pas, Le Dossier K, Liquidation, Le drapeau anglais, Le chercheur de traces

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des suites de la lecture du Refus (et l’idée d’en finir)

[ 27 février 2008 / 24 novembre 2008 ]

non, je ne sais plus, ce qui tant m’a marquée, à la lecture du Refus. je retrouve ce mail, que je n’aurais pas écrit, certainement, si je ne ne l’avais lu. ce livre qui m’aura parlé de l’écriture. ramenée à son amour. au travers duquel j’allais vers cette reconnaissance, la reconnaissance de cet amour. je ne suis pas très forte, à ça, reconnaître à quoi je tiens. c’est un livre qui, me semble-t-il, parle de l’impératif que peut comporter l’écriture, de l’impérieuse nécessité d’écrire et de ce qui ne passe qu’à l’écriture. qui parlerait de l’impérieuse singularité de l’écriture.

:::JD :::20/12/07:::15:56 +0100:::Re: RE: suite:::

je lis en ce moment un livre extraordinaire, de imre kertesz, « le refus ». dans le paragraphe sur lequel je me suis endormie hier il était question de l’honneur :

« Il lui semblait avoir tenu bon, avoir bien défendu quelque chose, mais quoi ? Le mot jaillit en lui : son honneur. Mais, se demanda-t-il avec stupéfaction, comme s’il avait trébuché sur un obstacle imprévu, c’était quoi, son honneur ? »

très solitaire, aussi bien dans ma vie que dans mon travail, je me suis rendu compte, à lire cet auteur, Imre kertesz, que je découvre récemment, avidement, également ce livre intitulé « être sans destin » lu juste auparavant, que dans cette solitude je cultive certaines sortes de grands sentiments dont je ne sais hélas plus que faire dans la « vie réelle » – aussi me semble-t-il souvent que je me trahisse ou que je sois lâche. je vous dis cela voyez-vous, parce que j’ai été si peu consultée, si peu tenue au courant de ce qu’il allait advenir de mon travail, celui fait sur wordpress, dont vous avez eu tout de suite l’air de dire qu’il ne valait rien ( ce ne sont bien sûr pas vos termes, mais c’est ainsi qu’in fine j’en suis venue à interpréter vos propos ; il va sans dire que vos propos seuls ne sont pas impliqués, mais la situation générale), que j’éprouve le besoin, non probablement de « sauver mon honneur » – parce qu’en ce qui me concerne, j’en reste à un : « ça serait quoi, mon honneur ? » – , mais de vous dire que j’existe, malgré que je me suis si mal comportée pour défendre mon travail et que mon désir de le conserver m’ait conduite, à laisser ouvertes certaines portes que j’aurais mieux fait de faire claquer avec pertes et fracas.

je m’en serai tenue à vous envoyer ces petits signes, minuscules, ridicules : des mails où je ne vous envoie ni de « cher monsieur », que je ne signe pas, où je n’inscris aucune formule de politesse·

comme nous n’aurons jamais l’occasion de nous rencontrer, et puisque internet le permet, ces mots souvent trop vite envoyés, je vous redis seulement : j’existe. et je sais aussi que vous existez. président de […].

c’est bizarre, non, que je vous envoie cela. moi aussi, je le trouve. je ne le fais pas du tout pour vous agresser, c’est même plutôt le contraire. vous m’envoyez du « bien cordialement », je vous envoie une petite histoire,

avec mes respects,

jd

« Travaillez, faites l’apprentissage de la vie, ouvrez vos yeux et vos oreilles, accumulez de l’expérience. Ne croyez pas que nous ayons renoncé à vous et à votre talent. Cette porte », son bras se tendit et montra quelque chose dans le dos de Köves, sans doute la porte, « cette porte, vous verrez, s’ouvrira encore devant vous.

– C’est possible », dit Köves en se levant d’un bond.

En même temps que l’espoir (si espoir il y eut), sa patience le quitta, la patience envers tout ce qui ne l’intéressait plus du moment que ce n’était ni son obligation, ni même sa liberté. « C’est possible, mais moi, je ne la franchirai plus ! »

Les livres ou la vie (1)

[ 1 mars 2008 / 21 novembre 2008 ]

Le brouillard ayant envahi mon esprit, brouillard blanc où je distingue quelques panneaux lumineux, dont celui qui comporte les mots « IMRE KERTÉSZ », je décide, sans en savoir plus, de racheter aujourd’hui Être sans destin, prêté déjà, et que je ne risque pas de revoir avant longtemps. Le racheter, le relire, à cause de la forte impression qu’il m’a faite dont ne me reste qu’un souvenir flouté.

A propos d’I. K., me serait-il possible en ce moment d’en dire plus ? Se concentrer.

L’écriture.

J’aurai le lisant compris que j’accordais à l’écriture, aux livres, bien plus d’importance qu’à « la vie ». (Je ne rapporte ici que ce que j’arrive à en rapporter, de ce que j’aurai alors compris, maigre moisson, constatai-je, maigre moisson, au regard des souvenirs dont je suis sûre : ce que j’avais cru comprendre alors m’avait laissée bouleversée, pendant des semaines.)

Cet autre souvenir : je demande à D, dont c’est la spécialité, si elle me croit atteinte de bovarysme. À mes explications, elle répond que c’est certainement là l’un des noms de ma maladie. Je lui demande quoi faire. Elle me dit que je ne peux rien faire d’autre que de l’accepter.

Je me souviens également avoir été saisie par la nécessité de prendre cet amour qui se révélait de moi, de façon éclatante, au sérieux. Cet amour pour les livres, pour l’écriture, il me fallait l’assumer, le revendiquer. Il ne s’agissait plus de laisser dans l’ombre, une ombre honteuse. Le porter au grand jour.

C’est intéressant.

Il allait s’agir de faire en sorte que soit la vie qui soit atteinte par les livres. Il faudrait que le sérieux des livres se propage par contagion à la vie. Il ne s’agirait plus de vivre une vie amputée du sérieux des livres. Je ne peux m’empêcher de songer ici à la formule de Lacan concernant l’aliénation. La mienne s’écrirait : « Les livres ou la vie ». Que vous choisissiez l’un ou que vous choisissiez l’autre : vous n’aurez jamais les deux. Vous n’aurez jamais que l’un amputé de l’autre. Telle en tout cas me sera apparue ma vie à ce moment-là, sa difficulté : amputée des livres. Dans les livres, j’étais sans la vie, dans la vie, j’étais sans les livres.

ou les livres ou la vie

Les livres amputés de la vie

La vie sans les livres

Comment le dire : j’aime le sérieux et la passion des livres et je reproche à la vie de ne jamais rien m’offrir de pareil. Et m’est-il apparu que simplement, ma vie serait-elle écrite, je l’aimerais. Passionnément peut-être même. Pourquoi je me force aujourd’hui à cet exercice.

Et raison pour laquelle je me suis sentie autant emportée, emballée, quand j’ai écrit ce mail à XY. Je lui parlais là de la seule façon dont il me semble valoir la peine de parler. Plus exactement, je m’adressais à lui, de la seule façon… Les intérêts que je mettais en jeu étant les seuls ceux qui m’intéresse. Mon compagnon, F., y vit à redire : « Tu ne peux pas ainsi t’adresser à un concurrent ». Je lui répondis que ma décision se trouvait là, ne renoncer à m’adresser à quiconque dans mon style à moi, dans ce qui était important pour moi. Bien sûr, il est bien possible qu’il ait eu raison, et que si cet homme me répondit de façon charmante, c’était probablement pour m’amener à lui fournir les renseignements dont il avait besoin pour que le travail qu’il avait à faire, de reprendre mon boulot, pût se faire à moindre coût. Qui donc mieux que moi pouvait défaire ce que j’avais fait.

Les livres ou la vie (2) – choc

[ 2 mars 2008 / 12 décembre 2008 ]

Que ces lectures, se figure-t-on, m’ont causé un choc :

Lacan Jacques, Séminaire XI, p. 191

Si dans ce cercle, celui de gauche, il y a cinq objets, et si, dans l’autre, il y en a encore cinq, – les additionner, ça fait dix. Mais il y en a qui peuvent appartenir aux deux. S’il y en a deux qui appartiennent à chacun des deux cercles, les réunir consistera en l’occasion à ne pas redoubler leur nombre, il n’y aura dans la réunion que huit objets. Je m’excuse de ce qui peut paraître là enfantin à rappeler, mais cela est fait pour vous donner la notion que ce vel que je vais essayer de vous articuler ne se supporte que de la forme logique de la réunion.

Le vel de l’aliénation se définit d’un choix dont les propriétés dépendent de ceci, qu’il y a dans la réunion, un élément qui comporte que, quel que soit le choix qui s’opère, il a pour conséquence un ni l’un, ni l’autre. Le choix n’y est donc que de savoir si l’on entend garder une des parties, l’autre disparaissant en tout cas.

Topologie, Problèmes, Seymour Lipschutz, p. 3

La réunion de deux ensembles A et B, notée A B, est l’ensemble de tous les éléments appartenant à A ou à B, c’est-à-dire

A B = { x : x A ou x B }

Les livres ou la vie (3) – et le vel

[ 3 mars 2008 / 8 septembre 2009 ]

Il y a donc les livres, il y a donc la vie. Ce dont je souffrirais – la perte de ce qui leur serait commun, à la vie, aux livres. Cela justement à quoi je tiendrais le plus, MISère.

Se rappeler qu’il s’agit là d’une formule de l’aliénation (ou/ou, soit l’un/soit l’autre, et quand l’un, l’un sans l’autre, l’un moins l’autre, et quand l’autre, l’autre sans l’un, moins l’un : VEL), l’aliénation selon Lacan (dans le séminaire XI). Se souvenir que les chapitres concernant l’aliénation sont suivis d’au moins un chapitre sur ce qu’il appelle la SÉParation – où je trouverais la délivrance.

(
plus tard, se rendre compte que je ne sais pas ou plus ce que signifie le mot VEL. sur internet, je trouve:

Cette comédie pour nous recouvre simplement l’absence encore dans la logique d’une négation adéquate. J’entends de celles qui seraient propres à ordonner un vel, je choisis vel et non pas aut en latin, d’un vel à poser la structure en ces termes : ou je ne suis pas, ou je ne pense pas – dont le cogito cartésien donnerait l’intersection. Je pense que des logiciens m’entendent et l’équivoque du mot « ou » en français est seule propice à brocher là la structure de cette indication topologique : je pense , là où je ne puis dire que je suis. Où, là il me faut poser dans toute énoncé le sujet de l’énonciation comme séparé de l’être par une barre. Plus que jamais, évidemment, ressurgit là non l’intuition, mais 1’exigence de l’être. Et c’est ce dont se contentent ceux qui ne voient pas plus loin que le bout de leur nez.
Jacques Lacan, Préface à l’ouvrage de Robert Georgin, Cahiers Cistre, 1977, Lacan, 2me édition, Paris, l’Age d’homme, coll. « Cistre-essai », 1984, pp. 9-17.

vel dès lors nouvelle recherche, dictionnaire latin/français :

vel, adv. [abréviation d’une ancienne forme de l’impér. velle : veux-tu? si tu veux] : – 1ou, ou bien, si l’on veut. – 2même, et même, ne serait-ce que. – 3 – Virg. Hor. et, et encore, en outre, de plus. 4 – (si tu veux une précision), ainsi, par exemple. – 5avec un superl. : peut-être, sans doute; sans contredit, vraiment.
– vel … vel… : ou… ou…, ou… ou disons…, soit… soit…
– vel (potius) : ou plutôt.
– vel dicam : ou que je dise plutôt, ou plutôt.
– vel (vero) etiam : ou même, ou bien encore.
– vel praepono : je préfère même.
– vel maxime : même au plus haut point.
– vel minima sentire : percevoir même les plus petites choses.
– vel sternas licet, Cic. : tu peux même ronfler.
– vel hoc ipso intellegi potest : on peut comprendre, ne serait-ce que par ce fait.
– suaves accipio litteras : vel, quas proxime accepi… : je reçois des lettres exquises, la dernière, par exemple…
– domus vel optima Messanae, notissima certe : la maison peut-être la plus riche de Messine, en tout cas la plus connue.
– vir vel elegantissimus : l’homme vraiment le plus élégant.
– mores quidem populi Romani quantum mutaverint vel hic dies argumento erit, Liv. 39, 51 : combien ont dégénéré les moeurs des Romains, en tout cas ce jour-là le prouvera (ce jour à lui seul le prouvera).

et si je recopie un extrait de la définition de mon dictionnaire latin, ça donne :

1 adv. ou, si vous voulez; ou; a) [donne à choisir une expression entre plusieurs ] : … le souverain bien dérive de la vertu, ou [si vous voulez] repose dans la vertu mêmenous l’avons [je vous laisse le choix de l’expression] ou rejeté ou renvoyé ou

(mon dictionnaire, je trouve plus parlant. serais-je vraiment blabla, j’irais maintenant chercher le mot latin aut. « minutieuse » ou « studieuse », sont les mots qu’on peut-être pourrait mettre à la place de « blabla » dans la phrase précédente. si je ne les y mets pas, c’est je suppose qu’ils ne conviennent pas. )

Les livres ou la vie (4) – La lettre perdue

[ 6 mars 2008 / 21 novembre 2008 ]

De la réunion à l’intersection, de l’aliénation à la séparation. Dans l’aller vers la séparation.

Lacan Jacques, Séminaire XI, p. 194

Tandis que le premier temps [l’aliénation] est fondé sur la sous-structure de la réunion, le second est fondé sur la sous-structure qu’on appelle intersection ou produit. Elle vient justement à se situer dans cette même lunule où vous retrouverez la forme de la béance, du bord.
L’intersection de deux ensembles est constituée par les éléments qui appartiennent au deux ensemble. C’est ici que va se produire l’opération seconde […] Je l’appellerai, introduisant ici mon second nouveau terme, la séparation.

Nous y sommes, m’étais posée la question de ce qu’il y aurait eu dans l’intersection des Livres et de la Vie. Ce qu’ils auraient eu en commun.

Je reprends mon petit schéma :

les-livres-ou-la-vie

Dans l’intersection, la « lunule », ce qui est commun à la vie et aux livres, d’instinct, à la va-comme-je-te-pousse, je dirais la lettre. (Ce qui se perd, ce qui se récupère, la lettre, le réel de la lettre.)

les frontières de l’intime par Gérad Wajcman

[ 7 mars 2008 / 12 décembre 2008 ]

Les hasards de l’internet m’amènent à cet article, de Gérard Wajcman, psychanalyste, membre de l’ECF, Intime exposé, intime extorqué. J’en reproduis ici quelques extraits. L’intime est  une notion qui m’intéresse beaucoup. Ce qu’il en advient aujourd’hui, la façon effectivement dont il est, et peut-être plus souvent qu’à son tour, exposé; les limites, à tracer pour chacun, qu’imposerait son dévoilement. Habituée de la psychanalyse, où ce dévoilement, mais confiné à l’intérieur des  4 murs du cabinet de l’analyste, est convoqué,

Intime exposé, intime extorqué • Gérard Wajcman


l’espace où le sujet peut se tenir et s’éprouver hors du regard de l’Autre. Un espace en exclusion interne, une île, ce qu’on nomme à l’occasion le chez-soi, où le sujet échappe à la supposition même d’être regardé. C’est la possibilité du caché.

Je dirais qu’il n’y a de sujet que s’il peut ne pas être vu. Entendons ici le sujet moderne, qui pense, et donc qui est – autant dire que le sujet regardé ne pense pas. Donc, au temps moderne, l’intime, le territoire secret, de l’ombre ou de l’opaque, est le lieu même du sujet.

L’intime se découpe sur le fond d’un Autre benthamien, au regard importun, intrus ou envahissant – qui veut tout voir et tout savoir tout le temps. Il s’agit alors de dire ce qui peut faire limite à ce désir sans limite. On peut invoquer la loi. Mais la loi préserve le privé ; ou, plutôt, le privé c’est cette part qui peut être protégée par la loi.

Là encore, il faut entendre qu’on parle de liberté réelle, de liberté matérielle. Parce que, comme le soutient Jean-Claude Milner, la véritable question de la liberté, c’est de dire comment obtenir que le plus faible puisse être effectivement libre en face du plus fort. Si les garanties juridiques et institutionnelles sont précieuses, elles restent assez illusoires. C’est-à-dire que, comme l’intime, la doctrine des libertés, ne se fonde pas sur le droit, mais sur la force. En vérité, dit Milner, nous sommes tous convaincus d’une chose: mis à part les contes de fées où le faible devient fort (c’est-à-dire le rêve révolutionnaire), il n’y a pour les libertés réelles qu’un seul garant: c’est le droit au secret, unique limite matérielle au pouvoir de l’Autre – qu’on nomme là l’état, les institutions ou la société.

Il ne saurait y avoir de sujet sans secret, autant dire de sujet entièrement transparent. Tout rêve de transparence emporte avec la dissolution de toute opacité celle du sujet lui-même. La démocratie est bien sûr animée d’un idéal de transparence, mais elle concerne en principe le pouvoir, non les sujets.

C’est que dans les faits, notre démocratie paraît animée d’une volonté parfaitement opposée: d’un côté, l’Autre tend à s’opacifier toujours plus et, de l’autre, les sujets sont rendus toujours plus transparents.

la défense de l’intime et du secret est proprement une cause de la psychanalyse.

Considérons en premier lieu l’acte du pouvoir. Soit le fait que l’Autre vient mettre son nez, son œil dans l’intimité. C’est une tendance lourde.

Dans le sens de cette criminalisation rampante généralisée de la société, on peut mettre en lumière certaines procédures actuelles au service d’une politique dite préventive de la criminalité. La prévention est devenue un maître mot de l’époque.

Je peux parler en particulier du rapport de l’Inserm sur la prévention de la délinquance, « Troubles des conduites chez l’enfant et l’adolescent », une « expertise collective »…

C’est qu’il y a donc une autre façon de passer la frontière de l’intime: dans l’autre sens. Cela concerne ceux qui, hors de toute contrainte, ouvrent leur intimité, qui l’avouent ou l’exposent. En fait, c’est là le sens le plus immédiat des « images honteuses », qui ne sont pas des images volées mais délibérément exhibées. Il faut entendre qu’il ne s’agit pas pour le sujet d’une renonciation au droit au secret, mais, au contraire, d’un acte libre, d’un certain exercice de ce droit.

Ce qui caractérise notre temps, c’est que, en plus de se dire dans le secret du cabinet de l’analyste, l’intime aujourd’hui se publie, s’étale sur les écrans et s’expose sur les murs des musées. J’ajoute: sans honte.

après avoir lu Daniel Arasse, il y aurait quelque crédit à tenir La Venus d’Urbin de Titien pour le paradigme des « images honteuses ». Cette femme nue couchée qui se caresse en nous souriant est une image honteuse à certains égards sans honte. Sauf que, et c’est là le point, cette image intime n’était alors destinée qu’à l’intimité d’un seul regard, celui de Guidobaldo della Rovere qui avait commandé cette pin up à Titien pour son usage exclusif – ce qui pose d’ailleurs un réel problème non pas quant à l’exposition d’une telle peinture aujourd’hui, mais à son effet de sens dans un lieu public d’art. L’intime allait alors à l’intime. Aujourd’hui il va au musée, ce grand lieu de la démocratie du regard,

Mon hypothèse est que l’actualité de l’ostension des images de l’intime ne relève pas seulement de l’exercice moderne d’une liberté, mais constitue, paradoxalement, une réponse à la menace sur l’intime. Bien sûr, à la menace hypermoderne d’un regard illimité sur l’intime, on pourrait tenir que le voile est une réponse. Or on assiste dans l’art à un mouvement aussi de dévoilement, ce qui pourraît être après tout parfaitement en phase avec le désir d’omnivoyance du maître moderne. Or les images de l’art y font en vérité arrêt. Il faut donc dire en quoi, et pourquoi.

On est tenté de penser que ce qui était jadis un attribut divin, l’omnivoyance de Dieu, son pouvoir de tout voir sans être vu, est devenu aujourd’hui un attribut du pouvoir séculaire armé par la science et la technique.

je suis supposé représenter un discours (de la psyschanalyse) dont on a pu dire que allait lui aussi dans le sens de l’extorsion de l’intime. Foucault l’a dit. Le tout-dire irait droit à la confession – l’église et le communisme ont pratiqué ça.

Tout le problème se circonscrit alors dans deux questions qui impliquent deux barrières. La première est éthique: si l’analyste dispose de l’omnivoyance, cela donne toute sa valeur au fait qu’il n’en use pas. Ce qui ne repose que sur un choix éthique à quoi l’analyse est suspendue : dans sa fonction d’écoute, l’analyste est non-voyant (c’est peut-être ce qui lui confère le pouvoir, comme Tirésias, de voir loin). La seconde barrière serait réelle: est-ce que du pouvoir de voir tout il suit que tout peut se voir? En vérité, le problème se joue là, parce que cela appelle la question d’une limite au regard, fondée non sur l’interdit, sur un choix ou sur une quelconque contingence, mais sur un impossible, sur le réel.

Tout cela ne prend sens que si on met la psychanalyse en perspective dans le siècle. Jacques-Alain Miller s’y est employé brillamment dans une émission de radio récente. Il faut en effet dire que le premier effet de la psychanalyse dans notre monde, c’est qu’elle a modifié le sens commun en clamant haut sa réclame: tout dire fait du bien. C’est en tout cas comme ça que la société l’a interprétée. Aujourd’hui, on peut considérer que l’idée des bienfaits du tout dire est entrée dans le sens commun. Avant, jadis, il y avait des choses qui ne fallait pas dire. Le sacré pouvait être offensé par un dire. Il faut mesurer que cela donnait du coup au fait de dire toute sa valeur. L’instance de la censure a eu du coup au cours des âges un rôle important, et Freud n’a pas manqué de reconnaître cette importance, en donnant à la notion de censure une place dans sa théorie. Les écrivains connaissaient le problème, du temps où le fait de dire comptait. Le partenaire de l’écrivain, c’était la censure. C’est Léo Strauss qui a mis en évidence le rôle de la persécution dans l’art d’écrire, qui obligeait à une écriture de la dissimulation, un « art d’écrire entre les lignes », de sorte que tous les écrits devaient être des messages chiffrés. Même le Rousseau des Confessions, à qui j’ai fait plus haut allusion, et qui professait une franchise sans limite, avoue qu’il emploie un certain art d’écrire afin de ne pas dévoiler aux méchants ce qu’il pense vraiment. Reste qu’aujourd’hui on doit constater que le tout dire a triomphé. Nous somme à l’âge d’Internet qui va à l’évidence vers le tout dire.

On peut photographier le fonctionnement intime des organes sexuels, mobiliser pour cela la science et les techniques les plus sophistiquées, cela ne ne risque pas de livrer le secret du sexe, de comment marche le human desire et l’étonnante machine des sexes dont nul n’a les plans. Contrairement à la machine à caca que, comme par hasard, Wim Delvoye lui-même s’est attaché à construire, avec une réussite totale. En sorte que la Cloaca-Turbo (qui donne aussi la vision d’un mécanisme de l’intérieur du corps) et l’image X-Rays d’un acte sexuel seraient les pendants inverses l’une de l’autre: image d’une machine qui marche d’un côté, image d’une machine qui marche pas de l’autre. Plus exactement, je dirais que ces images X-Rays, qui rencontrent le célèbre dessin anatomique de Léonard figurant un coït en coupe, montrent surtout qu’il y a quelque chose qu’on ne peut pas voir: comment ça marche, l’amour, ce qui serait le secret de la sexualité. C’est leur dimension critique: elles s’adressent aussi aux médecins et à tous pour dire: la recherche de la transparence du corps est un fantasme, parce qu’il y a quelque chose qu’on ne pourra jamais voir, jamais savoir, et donc jamais maitriser: le rapport sexuel. Vous pouvez radiographier le corps, autopsier le corps, le rendre aussi transparent que vous voudrez, vous ne verrez jamais le secret du rapport sexuel. Voilà ce qui au bout du compte résiste définitivement à la volonté du maître que « ça marche ». Le savoir expert se cassant les dents sur le rapport sexuel, ce pourrait être le titre de la série des images de Wim Delvoye.

Il est du coup assez amusant de relever que la première image aux rayons X faite par Röntgen, inventeur de la radiographie en 1895 – même année de naissance que la psychanalyse et le cinéma -, fut celle de la main de sa femme, et que ce qu’on y voit d’abord, c’est l’ombre noire de son alliance. Comme quoi, ce que la première image de l’intérieur du corps d’une femme révèle d’abord, c’est la présence d’un homme, plus exactement d’un mari – pour qui elle ne saurait avoir aucun secret. ça explique sans doute cette image. On se demande en effet ce que Röntgen avait en tête quand il a décidé de réalisé comme première image une radiographie du corps de sa femme? On pourrait se dire que Wim Delvoye montre ce que Röntgen avait en tête. Faut pas rêver.

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Les livres ou la vie (5)

[ 9 mars 2008 / 25 juin 2008 ]

Aussi, encore, il restera à (re)trouver, décrire, ce qui dans Imre Kertesz m’a menée à ces… constatations. Et puis, aussi, il faudra, mais ça ce sera beaucoup plus difficile, et peut-être que ça ne sera pas possible, retrouver ce qui m’a amenée à penser que – mais qu’était-ce donc, et je me demande si je ne l’ai pas écrit, quelque part, franchement, ça serait souhaitable, car il ne me reste rien, vraiment, sinon ces termes : « après Auschwitz ». Et peut-être : « Ecrire après Auschwitz ». Mais non, ça n’est pas ça. Est-ce que ça va revenir ? Est-ce que ça peut revenir ? Est-ce que ça doit revenir ?

Il y a eu une nuit très dense, très insomniaque, où je me suis levée finalement. Et j’aurai essayé d’écrire quelque part, quelque chose à ce propos. Une lettre. Voilà, c’est ça. C’était ça, la grande terrible idée, écrire à Imre Kertesz. En ai-je eu des nuits à lui écrire, en pensée. C’est là que je me suis rendu compte, de l’importance, pour moi, des lettres. Ces lettres non-écrites. Pensées.

Et, il y a eu le grand chambardement, mais c’est une autre histoire, et c’était avant ça, de la passe de JAM (Jacques-Alain Miller).

Les livres ou la vie (6)

[ 11 mars 2008 / 21 novembre 2008 ]

J’ai retrouvé l’ébauche de lettre à Imre Kertesz

A I. K.,

de ce livre qui a écrit A., Être sans destin, l’écriture peut commencer. depuis ce livre, depuis A. l’écriture devient possible. (redeviendrait)

A, Auschwitz.

3 janvier 2008 – 2:52

De même qu’une note à propos du rêve qui s’en est suivi :

« des rêves de cette nuit, un seul mot retenu : « kertezsionisme » (!) »

Je n’ai plus la moindre idée de ce qui a pu m’amener à penser ça. plus rien.

les lettres ou la vie (7) – correspondance-matière (et être l’être perdue)

[ 11 mars 2008 / 24 novembre 2008 ]

c’est peut-être bien vrai que ce sont les lettres qui me rendent folle pensais-je ce matin, au réveil, les CORRESPONDANCES. écoutez, c’est drôle, je me suis rendu compte de ceci ( c’est vrai que je n’arrête pas de me RENDRE COMPTE de trucs, et peut-être bien possible que je ne cesse de me rendre compte des MÊMES trucs, qui plus est, que j’oublie, ensuite, et qui me reviennent, plus tard, comme venus de nulle part – OUBLI – mais comme vous aussi, vous aussi, vous oubliez, OUBLIEZ), les hommes que j’ai connus, cela s’est fait :

soit au départ d’une correspondance
soit parce qu’ils m’ont vue danser
( parfois même, il y a eu les 2, ils m’ont écrit après m’avoir vu danser)

ceci viendrait à la suite de ce que j’écrivais là, à propos de la lettre perdue : à penser que je la retrouve, dans la correspondance, je me mets à aimer, j’entre en amour ( quant à LA DANSE, à croire qu’il y a en moi quelque corps-respondance – être l’être perdue, être l’être perdue, être l’être perdue, être l’être perdue, comme un halètement).

(ici c’est : écrits posthumes, lettres pour la mort.)

au matin, invasions de pensées

[ 15 mars 2008 / 24 novembre 2008 ]

d’abord un rêve, qui a curieusement trait à un texte écrit il y a quelques temps et que je viens de rendre public sur disparates.

intitulé enfermée dans la chambre (venue aux faits), la publication de ce texte m’avait parue impossible et, bloquée, j’avais fermé le blog. récemment, au moment de créer ce blog-ci, j’ai rouvert disparates au public et j’ai laissé le texte, sans trop réfléchir et sans même le relire, sans vouloir le relire.

le rêve de cette nuit touchait directement à ce que j’y  » révélais », des trucs dont je vois mal qu’ils puissent se dire ailleurs que dans l’intimité d’un cabinet d’analyste, quand seulement ils y arrivent.

il se trouve également que les faits que j’y raconte, je doute qu’ils puissent influer encore sur ma vie aujourd’hui, je ne peux pas le croire, je ne comprends seulement pas qu’ils continuent de me poursuivre. c’est pourquoi j’avais fermé disparates. je racontais là quelque chose qui en devient une histoire, qui est devenu une histoire, une histoire à laquelle semblent me ramener certains de mes symptômes actuels, sans que j’accepte de reconnaître le lien qui les lie, pour la raison que ce lien me parait trop facile. traumatisme conséquences. petite histoire conséquences. ( la question devient donc: puisqu’un lien persiste, ne fût-ce qu’au travers de mes rêves, quelle est la nature de ce lien?)

( actuellement, je peux (il est dans mes possibilités de) croire que l’enjeu du rêve tourne autour :

  • du sexe tout de même quand même bien sûr et d’abord, comme si ça n’était pas d’ailleurs toujours ça,
  • de ce qui supporte de s’écrire (et dont il semble que l’inconscient aime à s’emparer) : les petites histoires, ce qui supporte de devenir une petite histoire, avec des personnages, des protagonistes, des méchants, des bons, un bourreau, sa victime – le fantasme ou son « horreur du vide« ,
  • du quoi faire de ce qu’on dit, a dit, dirait à un psychanalyste,
  • du trop grand prix que j’accorde à mes pensées, que je n’arrive pas à dévaluer. ce serait elle qui les aime, les petites histoires.)*

( je refuse de me faire enculer, l’homme prend une autre femme alors. ils le font. je suis à l’extérieur du bâtiment ( c’est un bâtiment d’école, les dames de marie, à bruxelles, école qu’aurait fondée mon arrière-grand oncle, raison pour laquelle on m’y avait inscrite, j’avais déjà re-rêvé de ce bâtiment dans le rêve également repris dans le texte susmentionné), où ils sont, le font, je vois un professeur arriver, je les préviens, attention, attention. ils sortent, mais : drame, il y a drame, grand drame, très grand drame, le professeur s’en occupe, de la femme ( la tout juste enculée) en grand danger, que s’est-il passé : elle, la femme, est atteinte d’une maladie qui l’empêche absolument d’être enculée, sous peine d’en mourir. elle me dit que si elle s’est laissée faire, c’est qu’elle l’aimait (!) j’essaye de convaincre l’homme qu’il ne doit plus jamais le faire, mais ce n’est pas sûr que j’y arrive.)

* il m’apparaît que je n’ai pas grand chose vraiment à faire avec l’écriture : je suis seulement trop encombrée de pensées, pensées qui « NE CESSENT PAS DE S’ECRIRE » – ainsi que j’ai essayé de le traiter par le passé dans to be or (dont on aura quelques traces dans ce texte : l’a-pensée, que ma paresse m’a poussé à rechercher, histoire de n’avoir pas une fois de plus à réinventer la roue.)

c’est pourquoi il faut que je trouve le moyen de pouvoir renoncer à mes pensées, dont il faut bien dire, aussi encombrantes soient-elles, qu’elles me passionnent, que je les trouve passionnantes, que je ne trouve pas grand chose qui puisse leur faire concurrence, mais dont le motif est HONTEUX, donc, puisqu’il y s’agit de croire et de faire croire que TOUT pourrait s’écrire, alors qu’on sait bien, tous autant qu’on est, que le rapport sexuel ne s’écrit pas. d’où il découle que l’effort que je fais, que je ferais, d’écrire dans ce blog, est un HONNETETE, puisque j’y mets à l’épreuve une CROYANCE, laquelle ne devrait en sortir que VAINCUE ( terrassée)**- moi de même par la même occasion. j’ajoute : de croyance ne voulons pas, nous conviennent seules les certitudes. ( je suis à peu près persuadée qu’autour de tout cela, j’avais déjà tourné aussi bien dans disparates que dans to be or, ça ne servit donc à rien, puisque je ne peux m’empêcher d’y revenir. sommes-nous donc condamnés à tourner en rond, condamnés?)

autre autre autre question annexe : mais que faire de tout cet or ces pépites qui s’accumulent dans l’intimité d’un cabinet d’analyste quand d’analyste on ne se destine pas (plus?) à embrasser la profession? question CRUCIALE s’il en est.

** je ne dis pas qu’ils ne soient pas nombreux de-par-l’internet, à y arriver, à écrire, sans en sortir, de cette illusion qu’on-pourrait-tout-écrire et sans s’en sortir très bien, et même très très bien; quant à moi : non, je ne veux pas, m’en sortir, non, c’est vaincue que je me veux, c’est vaincue que je dois être (et même incessamment sous peu, car je commence à en avoir un peu marre).

( la suite du rêve, vous la voulez? non, eh bien vous devriez, la voilà : je trouve en fait que cet homme, qui a été coucher avec cette autre femme, aurait mieux fait de rester avec moi, j’avais pensé qu’éventuellement ça me donnerait plus de prix, à ses tendres yeux, si je refusais de me faire enculer, mais on dirait bien que non. je pense que s’il apprenait que j’ai un enfant, son intérêt pour moi augmenterait, je cherche mon enfant, mais je ne le trouve plus, d’ailleurs en fait, ce n’est pas mon enfant que je cherche, mais mon chat, ma chatte, Mélusine, mais je ne la trouve plus, je la cherche partout dans l’énorme grenier ( grand-maternel), il y a d’autres chats, mais d’elle, il n’y a pas. je m’inquiète pour sa vie.) je cause encore un coup avec celle donc qui d’être enculée mourrerait, qui me dit que ce n’est peut-être pas de cette maladie-là qu’elle est malade, mais d’une autre, comment vérifier. je cause, prends par le bras un homme encore autre, grand, massif, on s’embrasse, il m’entraîne à sa suite vers un autre grenier, plus petit, où se niche un nid d’amour, il veut faire l’amour avec moi, je lui explique que ce n’est pas possible parce que j’ai déjà fait l’amour avec un autre ce jour-là, et que ça me ferait une mauvaise réputation, laquelle d’ailleurs déjà me poursuit, il me dit que ça n’a pas d’importance. je pense qu’il sera secrètement triste de coucher avec moi, moi couchant avec lui comme s’il était n’importe qui. il essaye de m’entraîner donc dans un lit qui est le mien, qui se trouve en haut d’une échelle, échelle de laquelle je faille tomber dans le vide, mais non. c’est la fin du rêve, l’homme est dans le lit, m’attend, résolu, moi, je suis en haut de l’échelle, non-tombée.)

éventuellement, j’ajoute, petit passage par Kertész : ce qui m’aura époustouflée, renversée, le pas qu’il entonne et dans lequel j’aurai voulu m’insinuer : sa réponse, via l’écriture, à l’impératif que comporte, à mes yeux, le réel, d’en rendre compte.

il fut un temps où j’imaginai cette image, probablement scandaleuse, impossible : les grilles façon camp de la mort, dans lesquelles il y aurait ces mots, non pas « Arbeit macht frei » ou « Jedem das Seine » mais « Il n’y a pas de rapport sexuel ».

je veux donc dire que je peux pas croire au « traumatisme » que rapporte ces rêves, mais que je crois à celui qui implique que le rapport sexuel ne pourrait s’écrire (ne cesse pas de ne pas s’écrire). raison ici raisonnante, à laquelle mes rêves ne semblent pas vouloir plier.

extraits du dernier cours de jacques-alain miller (19 mars 2008)

[ 24 mars 2008 / 30 mars 2010 ]

l’analyse se sert de la métaphore paternelle pour résoudre la question de la jouissance, elle se sert de la métaphore paternelle et disons de son bataclan conceptuel habituel pour tamponner l’énigme de la jouissance et la faire virer au sens, mais ça n’est […] qu’une duperie. avoir recours à la métaphore paternelle ça n’est qu’une duperie au regard de l’énigme d’une jouissance qui exclut le sens.

alors, c’est là où Lacan, sur la fin de l’analyse, n’a pu dire que ceci […] que la fin de l’analyse, c’est une construction de l’analysant. c’est le sens de sa question : qu’est-ce qui pousse quiconque à s’hystoriser de lui-même surtout après une analyse ? qu’est-ce qui pousse un analysant à narrer son analyse, à en faire un récit qui ait du sens, surtout après une analyse – ce qui veut dire que l’analyse devrait lui avoir appris ce qui, de la jouissance, exclut le sens.

donc pourquoi tramer un récit qui rendrait compte, dans le sens, de la fixité de la jouissance ? […]

ca laisse ouvert un ordre de récit qui est néanmoins concevable à condition de préserver sa propre incomplétude. le récit de passe, tel que Lacan le fait miroiter sans en donner les coordonnées, c’est un récit qui doit comporter essentiellement le caractère de l’allusion, de ce qui n’est pas dit en plein, ni en direct, mais un récit qui traduit le contournement de ce qui, au gré du sens, apparaît comme un vide.

les frontières de la publication

[ 24 mars 2008 / 3 février 2009 ]

les frontières de la publication sont pour moi difficiles à dresser.

longtemps, je me suis intéressée, passionnée, pour toutes ces auteurs-femmes qui racontent leur vie, celles dont on dit également qu’elles font de l’auto-fiction. d’abord, et surtout, parce que j’étais avide de ce qu’elles auraient eu à me dire de LEUR vie sexuelle, ensuite parce qu’elles « cédaient » à cela, simplement parler d’elles-mêmes, un point c’est tout, et publier. leur vie devenait livre.

la voie dont j’aurais aimé qu’elle la traçât pour moi, de VIRGINIE DESPENTES, et que je ne sus pas suivre, tant il est vrai, qu’elle écrit, selon moi, quant à elle, de la FICTION : c’est-à-dire qu’elle, elle sait le faire. mettre une distance entre sa vie et le livre qu’elle écrit. pourquoi dès lors la citai-je ici ? le sexe, son genre (féminin), qu’elle soit femme et auteur. et contemporaine.

je ne dis pas que VIRGINIE DESPENTES ne m’ait pas fait du mal, ce n’est pas ce que je dis, je dis même le contraire, je vous dirai le mal qu’elle me fit.

(très sincèrement, j’aurais aimé que des livres, que des femmes, en disent quelque chose de comment ça fonctionne la jouissance féminine, le désir au féminin.)

j’ai espéré, voulu, prendre leurs livres A LA LETTRE. mais, que je ne m’y retrouve pas, que je ne me retrouve pas dans LEURS lettres quand MOI je faisais l’amour, ou dans ce que MOI, je pouvais vivre du désir, n’a eu de cesse de me PERTURBER, BLESSER, TORTURER.

(quelle donc pouvait être cette confiance que la mienne, que je plaçai en leurs écrits.)

elles y allaient tout de go, franco de port, et ça n’avait rien à voir avec ce que par exemple une DURAS, MARGUERITE, avait pu écrire. rien de ce que MARGUERITE écrivit jamais ne me fit de tort. (et si de MARGUERITE le style un moment me marqua au point que je pus croire écrire dans sa voix, je compris vite et facilement et sans encombre, sans dommage, qu’elle était inimitable. elle, c’est un roc. éternel, unique. )

mais leur franco de port, leur tout de go, et sans fards, à elles, DESPENTES VIRGINIE, ANGOT CHRISTINE, et qui donc encore, je crois qu’il m’en manque une, je parle de celles qui furent importantes pour moi, c’est-à-dire qui me perturbèrent, il me semblait que je pourrais l’imiter, rentrer dans leur imitation  (imitation à ma portée).

d’abord, donc, et cela va presque sans dire, je les aimai femmes. en tant que femmes (oui, va sans dire). (je ne mentionnerai pas ici, la je-ne-sais-plus-comment-elle-s-appelle que d’emblée je considérai comme une traîtresse, menteuse, conne.)

or, après m’être laissé travaillée ainsi par elles des années durant, à leur écrire des lettres, des lettres en pensée, bien sûr, venant de moi, à quoi s’attendre d’autre, des lettres rêvées, où on aurait discuté, elles et moi, de ces choses, du sexe, de l’amour et de la mort, et à comparer mes émois (sexuels, amoureux) aux leurs, je finis par comprendre, mais réellement, comprendre, c’est-à-dire que ça ne devait pas être qu’intellectuel, puisque dans les faits elles cessèrent de me perturber, je finis par comprendre, que ce que j’avais espéré, que s’écrivît quelque chose qui fût de l’ordre de l’UNIVERSEL, à propos de la sexualité féminine, ne s’écrirait pas – moi, cela, je l’avais VOULU. et je ne sais si j’y ai vraiment renoncé.

or donc, et au vu et à cause de la façon dont j’avais souffert, de leurs écrits, je décidai qu’il devenait pour moi dès lors impératif, s’il m’arrivait jamais d’écrire à propos de la/ma sexualité, que je fasse entendre qu’il ne s’agirait jamais que de la mienne. de sorte qu’aucune (femme) ne pût en souffrir, de ne pas se reconnaître, dans ma loi à moi – si d’aventure j’en venais à en transcrire un brin. je m’établissais donc là, quant à moi, une première frontière à la publication/cité de mon intime. (un pas- que je mettais, de moi-même, à mon tout. (et non pas le pas- qui s’imposait de lui même, non pas le pas- de réel, extérieur/intérieur à moi, je me comprends, la nuance est probablement importante.)

(c’est MARGUERITE DURAS qui me donna l’envie d’écrire. tout de suite alors, la découvrant, je sus, il m’apparut, que je ne voudrais ne saurais écrire rien d’autre qu’autour de l’amour. (c’était pas très malin, mais c’était avant que vraiment je ne connaisse des garçons, je ne savais pas encore alors que l’amour ne m’irait pas de soi. je n’ai pas l’amour fort facile, c’est le moins que l’on puisse dire.))

(MARGUERITE elle, c’était une voix, et elle a le grand sens du drame, et de la folie, de la folie des femmes. j’aimais ça. et toujours, et c’est ce que je veux. et encore. et encore.)

première frontière donc, admise et appelée. la deuxième, vraiment difficile. la deuxième. c’est ANGOT qui m’y amena. au plus ça allait, au plus, elle, et d’ailleurs également une autre de ses consœurs, au plus elle donnait les noms des personnes dont elle parlait. jusqu’à ce qu’un jour je l’entendis à la radio « révéler » un truc à propos de son ex-mari, où il me sembla que vraiment, elle dépassait les limites (ce qui mit fin à ma propre tentation, de dépassement). les limites en tout cas du respect de l’autre, de votre prochain. qu’on en fasse ce qu’on veut de son propre intime, c’est une chose, de là à dévoiler la vie privée des autres, c’est un pas que je ne peux pas faire. que je décidai de ne pas faire.

la deuxième frontière donc, c’était ça, et c’était très compliqué, comment parler du rapport amoureux, sexuel, de l’amour, sans parler de celui avec lequel on s’y exerce. j’avais été véritablement fascinée à lire les noms que ces auteurs donnaient de leurs proches, et à me demander comment, d’où, de quel point elles s’y autorisaient. la science ? l’écriture ? leur « travail sur elles-mêmes » ? on a beau me dire que tout cela n’est jamais que de la fiction, je veux bien, mais y a un moment où.

advint donc, la deuxième frontière.

en séance, je veux dire sur le divan de psychanalyse, no problemo, on balance. on donne les noms, on dénonce. or moi, dont la nature, la structure, me porte à dénoncer, comment, dans ce cas, écrire un TRAITRE mot (le moindre) (l’impossible livraison de mon tonton, voir le petit billet jean livre sterling sur ce même site ) ?

j’en étais réduite, et je le suis toujours, soit à ne rêver que d’écrire, soit de mes proches à attendre la mort (que je ne suis pourtant pas sûre de réellement désirer.)

(et c’est comme ça que je me suis vue réduite au secret. kertesz, lui dit que c’est de la nature de l’écriture, le secret, de la nature de l’écriture, il dit de très belles choses, là dessus, qui pourraient presque vous, me réconcilier, avec le secret.)

et si je me donne des allures parfois pontifiantes, c’est aussi parce que j’essaie d’en dire quelque chose, de mes secrets, qui prît une allure scientifique, où l’on parlât de petits a et de petits b et aussi d’inconnue x. sans que de noms aucun soit cité, sauf ceux bien sûr tombés dans le domaine public. allures pontifiantes et airs d’universel.

ça n’est pas la meilleure des voies, il lui manque le rire, il lui manque le style. ( j’en avais pris, pourtant, au départ, me semble-t-il une meilleure de voie, c’était au moment où j’ai rencontré frédéric, et que j’ai commencé à écrire dans 2balles, là, nous y arrivions, à ne parler que par allusions ( pour reprendre le terme utilisé par Jacques-Alain Miller : «c’est un récit qui doit comporter essentiellement le caractère de l’allusion, de ce qui n’est pas dit en plein, ni en direct, mais un récit qui traduit le contournement de ce qui, au gré du sens, apparaît comme un vide…» enfin, je n’ai pas tenu le coup longtemps, j’ai déraillé vite. ) je dis nous, parce qu’il y s’agissait d’un dialogue.)

bon, j’ai été suffisamment longue, je m’arrête là. pour aujourd’hui.

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qu’est-ce qui se précipite au moment où vous « devenez victime »

[ 28 mars 2008 / 29 novembre 2008 ]

que sais-je saurais-je, de la mort, cette idée que je n’ai même pas ( comme ces faux souvenirs qui traînent et qui ne sont plus que des mots).

aujourd’hui, c’est bien autre chose.

( pour y retourner tout de même, à mes petits amusements personnels;
quand, j’ai, commencé
une analyse
je venais de terminer le livre de Pierre Rey, « une saison chez lacan », je pensais, alors, je promettais à mon analyse comme issue, j’espérais : soit devenir écrivain comme pierre rey, soit me suicider, comme son ami, le gros, celui dont lacan, chez qui il était également en analyse, -avait dit : mais qu’auriez-vous voulu qu’il fît d’autre? à cette alternative, s’ajoutait la possibilité que mon analyste me dise, comme lacan avait pu le dire à pierre rey, « mais pourquoi est-ce que vous ne seriez pas analyste? » je n’aurais quant à moi certes pas refusé.
)

( autrement dit même pas les livres ou la vie, mais les livres ou la mort.)

( ces choses que j’écris. dont j’ai un jour commencé à parler en analyse. et puis reparlé. et reparlé encore, avec de plus en plus de facilité. dont il ne resterait qu’une marque, une cicatrice (presque une signature?)  est-ce qu’à une souffrance vécue, ne se lie pas toujours  – un cri, ait-il ou non été émis-  une jouissance?) ( qu’est-ce qui se résout, se précipite, au moment où vous subissez quelque chose, où vous êtes victime ? ces choses peuvent-elles se penser en dehors de la relation bourreau/victime. à quoi touche, tend, cette relation ? de quoi tend-elle à se faire la traduction ?)

(j’ai repensé à certains termes que j’ai utilisés ici, qui ne sont vraiment pas de moi, que je ne reconnais toujours pas, que je vais devoir effacer.)

(maitenant voilà, depuis notre conversation, j’ai un peu honte d’écrire ici.)

( les soleils noirs.)

de la vérité à la satisfaction

[ 1 avril 2008 / 29 novembre 2008 ]

Extraits du dernier cours de Jacques-Alain Miller (mercredi 26 mars)

… la fin de la psychanalyse … beaucoup plus fuyante

… tout dernier enseignement de Lacan, met en cause l’interprétation de la psychanalyse comme expérience de vérité et qu’il semble introduire la psychanalyse comme expérience de satisfaction. La satisfaction n’apparaît pas, n’apparaît plus comme un obstacle à la découverte de la vérité. En particulier, la satisfaction du symptôme n’apparaît plus comme un obstacle à la découverte de la vérité. Mais c’est la satisfaction elle-même qui apparaît comme une fin.

… « L’Esp d’un laps » … Le texte commence par une récusation de la fonction de l’attention : il commence par dire qu’il suffit qu’on fasse attention à ce qui est dans l’inconscient pour qu’on sorte de l’inconscient. … Et j’isole cette maxime qu’y formule Lacan en disant : Il n’y a pas de vérité qui – virgule – à passer par l’attention, ne mente.

… Et donc Lacan nous prévient de garder l’accent de vérité à sa place, c’est-à-dire à la place où la vérité surprend l’attention, où elle passe, où elle fuse comme un lapsus, que dire la vérité c’est toujours un acte manqué.

… Le déchiffrage c’est une pratique, la pulsion c’est une élucubration – d’ailleurs Freud l’amène comme ça, comme un mythe.

La sublimation ne repousse pas la pulsion, la sublimation procure une voie artificielle à la satisfaction de la pulsion. C’est-à-dire, elle consiste essentiellement dans l’investissement libidinal d’un substitut au but naturel de la pulsion…

Comment est-ce que, à la fin de l’analyse, le sujet supposé savoir est marqué d’un désêtre, pour permettre l’émergence de l’objet petit a ? Lacan, dans sa « Proposition », dit : C’est un virage. C’est un virage de l’être inessentiel du sujet supposé savoir au réel.

…. Avant le virage de son tout dernier enseignement on peut dire que Lacan formulait : Il n’y a de réel que par la logique. On n’isole le réel que par l’impossible, et l’impossible ne peut être déterminé que par la trame d’une logique. Et donc, la parole du patient, même si elle paraît liquide, cette parole est habitée par un algorithme invariable, qui doit conduire à l’émergence de l’objet petit a.

Cette conviction on peut dire est celle qui est mise en question dans le tout dernier enseignement de Lacan. La notion même de cet algorithme est ébranlée par la notion, mise au premier plan, qu’on ne peut que mentir sur le réel, qu’il y a une inadéquation du signifiant au réel.

… incompatibilité du désir avec la parole / l’incompatibilité de la jouissance avec le sens.

… L’analyse est donc moins l’attente de l’émergence d’une vérité que l’attente d’une satisfaction qui convienne. Et, d’une certaine façon, c’est par après que l’obtention de cette satisfaction donne lieu à l’élaboration d’une vérité.

il me semble que l’analysant que nous présente Lacan – c’est comme ça qu’il a interprété l’analysant, et spécialement l’analysant à la fin de l’analyse -, il a à construire, et il n’y a de fin de l’analyse qu’à la condition que l’analysant construise.

… à l’époque de la psychanalyse liquide, la fin de l’analyse dépend d’une décision de l’analysant, c’est-à-dire, elle dépend de sa capacité à assumer cette fin comme une feinte cause – je ne dis pas sainte cause -, comme une feinte cause, où il ne s’agit pas tant de la dire, ou de ne pas la dire, mais – je reviens à ce mot – d’y faire allusion.

Emergeant de la guerre, un livre que j’ai fait,

[ 2 avril 2008 / 12 décembre 2008 ]


Ne me fermez pas vos portes, fières bibliothèques,
Car ce qui manquait sur vos rayons bien garnis, et dont pourtant vous aviez grand besoin,
je l’apporte
Emergeant de la guerre, un livre que j’ai fait,
Les mots de mon livre ne sont rien, son élan est tout,
Un livre distinct, non relié au reste ni perçu par l’intellect,
Mais ses latences non dites vous passionneront à chaque page.
Walt Whitman, 1867

et (le blog de WW) : http://blogwaltwhitman.blogspot.com/

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journal (révélation)

[ 6 avril 2008 / 29 novembre 2008 ]

3 lettres, 3 lettres, non 2, dont 1 redoublée. hélas, 3 x, et damnation. a-t-il fallu qu’à moi ça arrive ? faut-il qu’à moi ça arrive ? inavouable, inavouable,
inavouable ( oh
(foutrerie de la psychanalyse, démangeaisons) ( mais je n’ai plus peur de rien, que j’ai atteint le fin fond du ridic))

( de près ou de loin trait à « les livres ou la vie ? » – de près, trait. feuille feuille feuille (immaculaison) et saletés).

( plus que jamais voguer droite et le regard fier, au dessus
vagues et mêlées)

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journal (révélation)

[ 6 avril 2008 / 10 avril 2008 ]

eh bien tant pis pour moi, je pense que je ne me passerai jamais de la honte.

ça va bien aller.

les années d’annie ernaux

[ 8 mai 2008 / 27 novembre 2008 ]

c’est un livre d’histoire et d’une histoire jamais écrite. un livre qui vous parle d’hier, celui depuis longtemps enseveli par l’oubli, qu’il va déterrer, au prix d’efforts qu’on ne peut imaginer, qui laissent pantois d’admiration. un livre qui pourrait vous réconcilier, pour partie probablement seulement, avec votre propre histoire. qui ira mettre des ponts entre ce que vous étiez alors, par le passé, avec votre solitude augmentée de ce qui dans le monde arrivait, dans le monde arrivait et à vous arrivait, sans que vous n’y puissiez rien. il arrive des choses, dans le monde, qui sont des choses qui vous arrivent, auxquelles vous ne pouvez mais, parce que vous n’y êtes pour rien. vous en êtes l’objet, et vous commencez à vous penser impuissant. (l’impuissance tenant à un sentiment d’incapacité d’agir sur le réel, faute qu’il soit seulement pensable).

A l’origine, un tableau, une image qui dit tout le livre: on y voit une femme, une femme à la poitrine nue et, derrière elle, une enfilade de portes entrebâillées. Le titre était Anniversaire et le tableau est de Dorothea Tanning.

A l’origine, un tableau, une image qui dit tout le livre: on y voit une femme, une femme à la poitrine nue et, derrière elle, une enfilade de portes entrebâillées. Le titre était Anniversaire et le tableau est de Dorothea Tanning.

elle, annie ernaux, parle, dit, ce qui arrive, ce qui est arrivé, et en quoi ce qui est arrivé, affectait, des corps, qui n’y étaient, pour rien. donc, oui, elle fait cela, dont elle s’était établi l’objectif, elle fait se rejoindre l’histoire du monde et l’histoire des personnes, une histoire qu’elle grossit des évènements du monde. ça devient une autobiographie historique, où c’est aussi l’histoire qui prend la parole, l’histoire de ce qui arrive, dans le monde qui vous entoure, qui vous englobe, silencieusement, qui devient, rejoint la vôtre. un livre de gauche aussi, ou plutôt, un livre à gauche, un livre certainement à gauche, sans qu’il le revendique, à gauche dans son regard, par le biais d’une ironie dont je n’ai pas compris comment elle fonctionnait, mais qui est là, presque palpable, et légère1. qui tiendrait dans la distance, l’endroit du constat, que l’on dira d’autant plus objectif qu’il parle de l’arrivée d’objets nouveaux dans le monde, l’ironie tenant dans le détachement de ce constat, la distance inexorable qui s’établit entre le sujet qui profère décrit et l’objet qu’il d’écrit. c’est un livre qui pointe, qui indexe, qui décrit. le livre lui est la pointe, l’index, la description. en conséquence c’est aussi un livre qui vous enseigne, qui vous parle du temps, des années, des années qu’il faut parfois pour digérer, de ce qui vient après-coup, et ne vient qu’après-coup. les années, il faut qu’elles passent, qu’elles aient passées. c’est un livre qui va à rebours de l’instant, qui y va volontairement. de gauche aussi, à gauche, du fait de sa conscience de classe. sa conscience aigue, conscience qui est mémoire également. et peut-être même conscience en forme de mémoire. une mémoire de classe. ce sont des choses que vous que nous avions oubliées, ce dont elle parle, parce qu’il est probablement vrai également que les classes dont elle reparle se sont entre-temps estompées. de cette estompe même qu’il s’agit, de l’effacement. de l’effacement, et de ce qui vient à la place. de l’arrivée des nouveau m’êtres, écrivons-le comme ça. elle le dit, elle en parle, du temps passé dans les centres commerciaux, où ils vont, où nous allons, chercher, dit-elle, « un supplément d’être ». l’ironie tiendrait aussi à cela, à notre ridicule, à notre petitesse. à celui qui s’en moque, celui qui en parle depuis un point au delà ou en deçà, ailleurs. depuis un lieu où justement la moquerie n’a plus lieu d’être, n’a plus cours. l’ironie se permet depuis le point où l’impuissance est moquée, voire dénoncée. j’ajouterais que cette ironie est lentement gagnée d’amertume, ce que le livre y perd, au fur et à mesure que les années avancent et se rapprochent de ce que nous connaissons encore trop bien, de ce qui n’a pas bénéficié de l’oubli, et pâtit d’une abondance croissante d’informations. la tristesse du livre s’en accroit, et également dans ce qu’elle décrit de son embourgeoisement, du processus de son embourgeoisement. l’embourgeoisement, c’est triste. elle est celle qui en sait quelque chose et qui le dit . je ne sais pas exactement ce qu’elle sait, ni comment elle le dit, mais je vois bien que depuis un certain point d’intime, qu’elle arrive à formaliser au travers de ce qu’elle appelle son embourgeoisement, elle éclaire l’histoire du monde moderne – qui consiste aussi en une triste forme d’embourgeoisement généralisé, où nous sommes tirés dont ne sait où dans des caddies de supermarchés. à cet insupportable, à ce monde insupportable, son histoire insupportable, notre insupportable histoire, l’insupportable de l’histoire, cela que l’histoire ne supporte pas, l’écriture est sa réponse. et les années lui vont bien (d’ailleurs l’histoire n’a pas lieu, au moment où elle vous arrive.)

LIENS :

Notes:
  1. que le lecteur peut-être est lui-même appelé à apporter, sans quoi le livre serait, resterait, proprement insupportable. aussi, peut-être n’ai-je perçu cette ironie, que parce qu’elle ne pouvait qu’y être. et sa légèreté viendrait-elle de ce que c’est à celle du lecteur qu’il est appelé de recourir. un peu comme quand on dit : c’est de l’humour ? parce qu’on ne sait pas du tout ce que ça serait si ce n’en n’était pas. []

jean livre sterling

[ 9 juin 2008 / 1 décembre 2008 ]

lors de la dernière séance, où j’avais bcp pleuré, l’analyste devant s’absenter m’avait demandé que je l’appelle la semaine suivante tous les matins, à huit heures. était-ce parce que je lui avais dit que j’avais l’impression de n’être pas prise au sérieux, de n’avoir  pas été prise au sérieux, ici, par les analystes de paris ? était-ce pour cela ? pour me prouver le contraire ? pour me réengager dans le processus analytique?

ce que cette semaine de « séances téléphoniques » a donné. j’ai du mal à me souvenir.

lors du premier coup de fil, j’avais commencé disant qu’il serait peut-être bon d’interroger pourquoi très vite ça avait été ça : l’analyse ou la mort1. et quel était, quel serait, pourrait être le lien entre la psychanalyse et les camps de la mort, Auschwitz.

Sieg Maandag, jeune Juif hollandais survivant, marchant sur un chemin bordé de cadavres, à Bergen-Belsen, vers le 20 avril 1945. il y a eu le rêve:

des jambes, des corps couchés, alignés. une douche passée par dessus, une douche dont le jet est très fort, qui déplace les chairs – la cellulite.
celui qui manipule la douche qui dit : regardez, ça bouge, ça bouge.

douche : je pense aux camps (jet gaz/eau).
cellulite : je pense à cellule, enfermement, je pense oncle jean.

je dis à l’analyste, au téléphone, « vous ai-je dit que pendant la guerre mes grands-parents ont sauvé une famille juive, cachée dans leur grenier ? » je dis leur nom : Sterling. je dis que c’est le père Sterling qui a appris la peinture à mon père.

en raccrochant, je me demande pourquoi j’ai raconté ça,  pourquoi j’ai donné ce nom, « Sterling »?

fatiguée, troublée, dans la volonté de repenser à tout ça, je me recouche  ; il est un peu après huit heures. je réalise que j’ai omis de dire qu’ils étaient partis, finalement, les sterling, qu’ils avaient eu peur de mon oncle, jean.

mon oncle jean. peur qu’il les livre aux Allemands.

je me souviens alors d’un rêve fait au cours de l’analyse avec D., où je le payais avec des « livres sterling« . là, tout se précipite dans ma tête (déchainement) :

mon oncle, qui voulais voulait écrire un livre, aurait livré sterling aux allemands, aux camps (« jean livre sterling »). je précise ici que les sterling ont survécu, et que le fils s’est inscrit à l’académie de dessin où mon père était directeur.

alors, écrire, livrer, l’impossible livre; écrire trahir; livrer aux camps de la mort.

après les livres de Imre Kertesz, la seule chose que j’étais parvenue à écrire : « après ce livre ce qui écrit Auschwitz : écrire devient possible. redevient possible »

les jambes – les corps – la douche – la livre de vie, la livre de chair. « ça bouge, ça bouge… »

Notes:
  1.  avec ça que j’étais arrivée pour ma « demande de passe », des années auparavant, dans cette certitude que le choix d’être analyste, c’était un choix de vie, le choix de vivre ; et puis, bien avant cela, il y avait eu ce dont j’ai déjà parlé ici : j’étais arrivée en analyse à la suite de la lecture du livre de pierre rey, espérant qu’elle débouche sur ça : ou devenir analyste, ou écrire un livre, comme pierre rey, ou me tuer, et me réussir, comme le gros []

pomme, pommeau

[ 11 juin 2008 / 24 novembre 2008 ]
la cane de jeanne

la cane de jeanne

conclusion de la séance d’hier : je ne sais pas quoi faire de ma vie, je ne sais plus du tout. curieusement, m’en sens libérée. loin de ces lourdes histoires auschwitziennes et autres « lacan-dla-mort » (le plaisant docteur g. me dira plus tard : « après les camps, la libération, c’est logique, c’est logique»).

je dis à l’analyste que l’image du rêve des « corps allongés morts passés à la douche » m’avait fait pensé, après-coup, à une photo de cadavres alignés, retrouvés à Auschwitz ; cette image qui maintenant s’impose. il me parle de cette cadavérisation dans le rêve comme d’une défense contre le grouillement de la vie (« ça bouge, ça bouge! »)

à propos du rêve surtout, cela qui dédramatise, ce que je n’avais pas vu et dont l’analyste s’est étonné  ( ou a fait semblant de s’étonner) : le pommeau de douche ≈ le pommeau du téléphone !!! ( ce coup de fil que je m’étais vue invitée à lui passer tous les jours).

NB: se défendre contre la jouissance / s’il est possible de comprendre pourquoi elle est serait s’avère si HORRIfiante.

écrire debout

[ 16 juin 2008 / 24 novembre 2008 ]

13:29

à cdz, il le faut, que je lui dise que je me cache de tout, de tous, en ce moment, et surtout du travail.

et surtout du travail,
amen

je voudrais un bureau auquel je puisse travailler debout, et un tout petit ordinateur ( un écritoire ancien, un meuble à écrire debout).

me lever de ce bureau. marcher dans l’appartement ( échapper aux habitudes des lieux, aux assises anciennes : impossible – mais pas complètement) ( sur mon bureau une revue intitulée : « la force du même »). me lever.

13:43
également: changer de lumière.

13:54
voyez-vous, auschwitz même, dans mon cas, est une défense ( pour le dire simplement).

vendredi avec jules : bhv de l’hôtel de ville ( recherche cadeau f.) , puis notre-dame ( « non, je ne veux pas rentrer, ça fait peur »). pénétrons une autre église, où l’on chante en latin ( c’est Église Saint-Nicolas-du-Chardonnet,  » fief d’un mouvement catholique traditionaliste »). jules veut s’asseoir. les gens se lèvent. c’est un mariage, les robes sont longues et les chapeaux sur toutes les têtes des dames. à jules, je ne dis, explique rien, si ce n’est qu’il s’agit d’un mariage, il dit oui oui, il parle tout bas. je l’entraîne vers la sortie. plus loin, il va foncer pour pénétrer dans un espace précédé de l’enseigne qu’il ne sait évidemment pas lire :  » mémorial de la déportation« . je lis sur l’insigne de la dame qui l’arrête dans son élan, qu’elle est de la  » défense nationale ». elle me demande son âge et si il a déjà vu un cimetière. je lui dis que oui. je sens les larmes me monter aux yeux. dans ce cas, me dit la dame défense nationale, il peut y aller. jeune homme, lui dit-elle en se tournant vers lui, avez-vous un téléphone portable sur vous, non, répond-il, avez-vous un appareil photo, non répond-il, bien, vous allez descendre ces marches, mais attention, vous ne pourrez plus parler, plus faire de bruit, ne vous approchez pas de la herse. plus tard, nous monterons manger des gâteaux en haut, tout en haut de l’institut du monde arabe. jules prend des photos. avant de prendre le bus pour rentrer, nous passons par les plaines de jeu du jardin des plantes. je suis très fière de jules, de sa façon de se déployer, de ses courses, de ses cris, de sa gaieté, des enfants qu’il amène à sa suite. au retour, nous croisons un héron cendré, jules lui dit qu’il s’appelle jules et s’indigne de ce qu’il ne lui réponde pas. je lui dis que l’animal est sauvage et qu’il ne parle pas. il a peine à me croire.

Les photos de Jules  :

on est partion se relève, on a fini le goûterchien-caca, \ma poussettevuearrivée sur la terrasse

qu’Auschwitz donc, est un autre encore des noms que prend ma défense. couverture , voile.

« défense », le terme est de l’analyste la semaine dernière, parlant du rêve, de la cadavérisation comme d’une défense contre l’horreur de la vie, le grouillant de la jouissance.

14:22 je voulais dire qu’auschwitz couvre seulement l’horreur, celle qui n’en n’a pas, de nom. une représentation.

14:32 mercredi: le cours de miller, le dernier cette année (la lettre que je ne lui ai pas écrite).

(14:41 en fait, c’était le contraire : d’abord le mémorial de la déportation, ensuite l’église de la rue des bernardins.)

symptôme (mise en page)

[ 14 octobre 2008 / 3 décembre 2008 ]

il est neuf heures vingt-six. 9 h. 26. i know i should’nt come here, write here, i won’t stay. spend too much time here.
changed the template completely, again, yesterday. added an image or two, to the first post, this one.
c’est incroyable, puisque j’aurai également passé le week end à adapter le précédent template (hemingway).

qu’est-ce qu’un template? un modèle wordpress? c’est la partie visuelle du site, les fichiers qui commandent à la partie image, habillage. le précédent s’appelait Hemingway, n’était pas de moi. celui-ci est de moi, c’est to-be-or, le template de mon premier blog, dont il porte le nom. il ne fonctionne pas bien sur internet explorer. je rêve donc de le refaire, mais je dois m’en empêcher.

aujourd’hui, 17 novembre, je rajoute : mise en page, habillage, recherche d’une corps-respondance. cette impossible image. (et entre-temps le blog a changé de template un nombre devenu incalculable de fois. celui-ci, j’espère, c’est le bon.)

quant à la correspondance

[ 14 novembre 2008 / 21 novembre 2008 ]

je peux hélas affirmer aujourd’hui que je n’ai, jusqu’à présent, cherché d’autre correspondant que celui qui pût m’offrir, en miroir une image – dont le corps fût de lettres.

ce qui m’est apparu à la lecture du texte de la sagna sur l’inhibition publié dans la cause freudienne dont j’ai récemment repris ici un extrait.

(ma jambe n’en devient pas belle pour autant.)

le livre sur « rien »

[ 22 novembre 2008 / 14 janvier 2009 ]

je me doute bien que je suis plutôt du côté du vide (plein) que du rien, comme le dit (si bien) éric chevillard.1 tant pis. même si ça me donne un peu la honte. j’essaierai tout de même de lire ce livre de pierre senges dont il parle… il est vrai aussi qu’il doit avoir raison quand il dit qu’ils sont peu nombreux ceux qui s’intéressent à la littérature.2

LIENS :

Notes:
  1. « De Beigbeder à Angot, le « rien » est omniprésent. Alors que chez vous je trouve énormément de vie, de matière littéraire. C’est le style qui différencie le « livre sur rien » du livre vide ?
    Je le crois. Un livre vide est affreusement plein : de vent (l’air du temps), de considérations vaines, de bavardages complaisants et oiseux, de détails sans intérêt, et surtout de mots dont aucun n’est pertinent. Livres vides, c’est-à-dire surchargés tout comme le sont les croûtes en peinture. Aucun rapport, donc, avec le livre sur rien qui est le ciel enclos, la chair faite verbe. Le livre sur rien, ce serait le grand déménagement du monde hors de ses greniers et de ses caves. Sur le trottoir, les encombrants, tout ce qui pèse et depuis toujours nous plombe, on s’en va, on laisse tout, on existera dans la langue, dans le livre sur rien, fait de mots justes et si bien articulés que rien précisément dans les phrases qui le constituent ne grippe ni ne grince. On approchait ce bonheur dans l’eau, dans l’air, dans la musique, mais ce n’était pas ça encore, trop de limbes, tandis que livre sur rien réjouit l’intelligence, elle se trouve là enfin dans son élément… »
    []
  2. La littérature ne concerne de toute façon vraiment qu’un très petit nombre de gens, parmi lesquels une bonne moitié de simulateurs. N’oublions jamais que presque tout le monde vit sans littérature et s’en passe aussi aisément que d’une cornemuse ou d’un hibou dans le grenier. []
catégorie: les livres ou la vie| mots-clés:

lire forme d’inconscience

[ 5 janvier 2009 / 9 mars 2016 ]

il a recommencé à neiger. ça ne va pas du tout. rien à voir avec la neige : les vacances sont finies.

/

ce n’est que quand frédéric est là que je peux me sentir quitte de l’obligation de travailler.

l’amour facile en ce moment et cela m’est nouveau. l’amour m’est facile, cela m’est nouveau ( question des préliminaires, d’ailleurs, balayée. point ne m’en faut. il fallait n’y pas penser.)

nuance,

il faudrait juste qu’il apprenne à s’endormir ma lampe de chevet allumée. phrase qui n’est pas belle.

il faudrait juste qu’il apprenne à s’endormir malgré la lumière de ma lampe de  chevet // juste faudrait-il qu’allumée je puisse garder la lumière de ma lampe de chevet // que je n’aie pas à éteindre ma lumière pour qu’il puisse s’endormir // qu’allumée je puisse garder ma lampe de chevet // qu’il puisse s’endormir dans la lumière // ne pourrait-il apprendre à dormir la lumière allumée //  le seul problème c’est qu’il faut toujours que j’éteigne ma lumière quand il veut s’endormir alors que je n’ai pas du tout envie de dormir //

ces jours-ci le soir quand je me couche, j’ai l’impression qu’une nouvelle journée commence.

voire même que j’aie besoin de lire pour m’endormir //

{ liRe (remembrance) –

après la pensée,

{ liRe

m’a protégée de biendesattouchements.

liRe je peux le vouloir lire est ce quejeveuxqu’onmelaissedonclire et la paix.

lirejepeuxlevouloir lirejepeuxlevouloir lirejepeuxlevouloir.

LiRe, je peux le vouloir.

ah mais laisse-moi liRe

{ Avant c’était plutôt

ah mais laisse-moi penser

LiRe, à vrai dire, m’endort.

LiRe m’endort.

LiRe, m’endort bien.

J’aime, à m’endormir en lisant.

Je ne retiens RIen de ce que je lis.

Ce que je lis glisse sur moi comme l’eau sur le miroir (du moment qu’il ne comporte pas de tache de graisse. Qu’il n’est pas GRAIS S EU X.

L’EAU est détournée de son cours par la graisse, la contourne.

Ma conscience liseuse est lisse et elle est propre. L’essentiel est qu’elle ne retient rien. Mais c’est extrême

ET

ma pensée s’arrête. Or, cela est juste esperluette bon —

tout ce qui arrête la pensée est bon maintenant il faut que j’arrête d’écrire car je ne vais toujours pas arriver à établir ce qui distinguerait une bonne d’une mauvaise pensée.

une bonne pensée une pensée souhaitable une pensée « productrice ». les bonnes pensées les bonnes idées les bonnes réflexions, et puis les mienneslesmauvaises qui me minentetdont d’ailleurs je ne souffre plus, en fait. (j’ai tant pensé à certaines pensées qu’il m’arrive encore (de penser) qu’elles sont
d’actu.a lité! erreurs, trois fois).

en certaines époques de la vie on peut souffrir il arrive que l’on souffre de mauvaises pensées. que l’on en soit dévoré. dévorée , dévorante / le plus souvent ça fait ruminée , ruminante – c’est LES pensées : CHEWING-GUM.

les mauvaises pensées sont inhibitrices, envahissantes et inhibitrices. (beau ont-elles comporter des hi et des hi : mauvaises elles sont, mauvaises elles sont (comme dirait jules). or et qu’ajouter que dire de l’inhibition? se souvenir qu’elle
vitenlisièreduréel. ce à quoi la production jamais ne saurait prétendre. mots que j’ajoute car
– j’ai du mal à promouvoir la production et démouvoir l’inhi bition.

J’éteins.

//

il a recommencé à neige. tout ce qui a été écrit ci-dessus, après la neige, l’a été il y a quelques jours, quelques soirs.

(madamerêved’artifices)

[ 3 avril 2009 / 6 avril 2009 ]

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Libération, jeudi 2 avril 2009

notes sur mon trop, mon n’importe quoi, mon web et mon grand ordinateur

[ 14 février 2010 / 30 mars 2010 ]

j’ai perdu mon cahier rose, le nouveau, celui que je m’étais acheté pour me tenir à carreau du web. je suis couchée dans mon lit, j’ai fermé la porte de la chambre, j’ai dit je veux la paix pendant une heure, je tape sur le portable ; je n’avais jamais fait ça, avant. on dirait que c’est possible. jules et son copain elias sont dans la pièce que nous appelons « la salle », ils font de la pâte à modeler. 1 frédéric est allé cherché à gouter. les enfants sont seuls seuls seuls. j’ai plein de choses à raconter.

dire que la vie avec mon enfant est extraordinaire. avec frédéric sans doute aussi, mais c’est moins  évident. c’est plus simple facile de s’impliquer avec son enfant. les adultes sont plein de défenses, et il y a le sexe, aussi, surtout, je suppose. mais je crois que je vais faire de moins en moins d’histoire avec le sexe. frédéric ne fait pas d’histoire du sexe. moi, j’ai tendance ou eu tendance à en faire un pataquès. aujourd’hui c’est la saint valentin tiens, et l’anniversaire de jacques-alain miller.  je continue de l’aimer2, malgré des doutes, parfois, et qui me plaisent, car ça ne me déplairait pas de l’aimer moins, mais il a suffi que je le lise, hier ou avant hier, dans quarto, des choses qu’il dit sur la position de l’analyste, que je ne soupçonnais pas le moins du monde, des choses dont je n’avais pas idée, qui étaient si simplement et extrêmement dites, pour que ma flamme se ranime, c’est comme ça. si j’en ai le temps je reprendrai ces textes ici, j’ai reçu pour noël un scanneur de texte, un stylo scanneur, c’est comme ça que les textes sur ce peintre et ce poète sont arrivés ici. quel était leur nom? bon, j’ai oublié (celan, le poète, et anselm kiefer, le peintre). mais ça prend du temps, même avec un stylo scanneur, ça prend du temps et j’essaie de passer le moins de temps possible à ce genre de choses, sans que je sache plus trop pourquoi, ah oui, parce qu’aussi sinon que sinon aussi non ça devient tout de suite trop, ça devient tout de suite tout le temps – quoi que je fasse est menacé par le trop, d’office.

miller disait à ses cours récemment qu’il ne fallait pas avoir peur du trop, que du contraire. ce qui a tout de même étonné pas mal de gens, dont moi, mais il a beau l’avoir dit je continue de m’en méfier, du trop, de n’en pas vouloir. mon trop est trop grand pour moi, et pour mes proches3, ajoutais-je à je ne sais plus qui récemment, un gars de twitter je pense, @fources. donc, il y a probablement une différence entre mon trop et celui de lacan, n’est-ce pas, mais je ne sais pas très bien lequel. at least son trop n’était-il pas trop grand pour lui, puis il avait son philinte, mais moi aussi, je les ai, mes philintes. yes.

il avait le désir, homme de désir dit miller de lacan.4 ça sera ce qui me manque. enfin, il se dit des tonnes de trucs, à ce cours, que je n’arrive pas encore bien à mettre ensemble, cours auquel je ne vais d’ailleurs pas, car ça tombe pile à l’heure de mon psychanalyste, mais je lis les tweets, et ça me renseigne déjà pas mal. de tout ça, je n’avais pas lu tout  l’intention de parler. oui donc, j’ai repris l’analyse à cause du trop de site pour le journal des journées déjà mentionné ici.

alors. trop, quel trop? par rapport à quoi ? eh bien, par exemple par rapport à l’argent qu’il faut gagner, c’est une de mes culpabilités favorites (je les cultive, ça pousse bien) (à quoi elle me sert la culpabilité ? elle me protège de tout,  de tous puisque qu’il n’est rien personne vis-à-vis de quoi de qui je ne me sente coupable), je n’en gagne pas, je ne fais rien de mieux que de ne pas en gagner.  je n’en gagne trop rien. donc, comme je faisais ça tout le temps ce site du journal des journées, et que c’était également trop dans l’ombre, donc, trop travailleuse de l’ombre, que je m’en sentais coupable, et honteuse, et que ça m’a amenée à écrire les mails les plus insupportables à jacques-alain miller, me rendant ainsi très malheureuse, je me le suis fait interdire. il y a d’abord eu le conseil de frédéric, ce qui était bien sûr insuffisant, puis l’analyste, que j’ai revu, à cause de la tournure trop triste que prenaient les événements. pourtant j’aurais presque pu me faire des amis avec ce site, tout du moins des connaissances, mais cela m’effrayait aussi car ce n’était « que » virtuel et puis aussi, à ces connaissances, qui m’encourageaient à continuer, je n’avouais pas le péché de mes lettres à miller. et de toute façon, je n’aurais jamais osé me montrer à eux. enfin, ils m’ont un peu prise pour l’un des leurs, or. je ne suis jamais qu’une midinette. là maintenant je continue à écrire parce que je me dis que peut-être ça va devenir plus clair, mais ce n’est toujours pas de ça que je voulais parler. zut, frédéric a déjà mis les enfants devant la wii. bon, tant pis. bien vivre avec son temps.

les psy-twitters pensaient que c’était le désir qui me faisait faire ça, la force de mon désir, qui me permettait de travailler à ça, au site du journal des journées, nuit et jour, mais moi, j’avais des doutes là dessus, et c’est parce que je ne savais pas pourquoi je le faisais que j’étais malheureuse, voilà. désir, peut-être, mais alors inconscient. je pensais que c’était peut-être aussi ma fan-attitude, mon admiration pour le miller qui me mettait mal à l’aise, n’aurais-je fait tout ça que pour me faire bien voir de lui. alala, bien sûr, me faire bien  voir de lui, ça aurait été bien, mais ça n’a pas marché, je ne suis arrivée qu’à l’em… (gros mot). bon, ce genre d’aveu, c’est dur. c’est pénible. enfin, cela dit comme on dit, il m’aura tout de même dit que mon site était superbe. mais maintenant je pense qu’il ne cessera plus de m’éviter comme la peste. c’est drôle, j’aurais toujours cru que ces hommes, comme lacan, et maintenant lui, m’aurait appréciée, enfin à l’époque j’avais la jeunesse et la beauté et lacan était déjà mort tandis que j’en étais encore à ignorer miller, eh bien non, ces gens, je ne leur plais pas. je crois que miller m’aurait préférée jeune et jolie ou mieux installée dans le monde. or le monde, je ne cesse pas de le quitter, et de me déshabituer de lui, ce qui m’inquiétait lately à cause de jules à qui je n’arriverai pas à apprendre les manières du monde, ne les possédant pas ou les perdant un peu plus tous les jours. c’est aussi l’une des causes principales de mon refus de continuer à faire des blogs et le site du journal des journées, c’est que je pense que les gens dans la réalité ça vaut mieux. et qu’au plus je suis dans le trop virtuel au plus je suis dans le moins réalité . formule idiote. qui cherche à donner sa place au réel qui n’en n’a pas ou y est toujours, à sa place, et n’y arrive pas, la formule. et donc y renonce.  je n’y parle pas de réel parce que j’ai le sentiment d’en faire un amalgame immonde. quand je dis virtuel, ce à quoi je pense en réalité : c’est évitement de la rencontre avec ce qui ne cesse pas de ne pas s’écrire : le rapport sexuel. quand je dis virtuel, je dis un certain mode d’écriture, tenté par le tout-écrit, quand je dis réalité, je pense à ces lieux où la contingence est possible, où la rencontre est possible et où donc se rencontre plus « frontalement » ce qui ne s’écrit pas. j’y suis particulièrement sensible (angoisse). ceci donc peut encore se caser dans ce que j’ai pu développer ici autour du livre ou de la vie. c’est d’angoisse que je mourerais…

mes maîtres-mots à moi, ce sont le trop et le n’importe quoi, ce sont les mots qui m’embêtent le plus.

les gens, de twitter, disaient « désir » moi je disais « n’importe quoi » , je fais n’importe quoi – après, à l’analyste et au psychiatre, puisque lui aussi il me fallut bien le revisiter, lui re-rendre visite, j’ai ajouté « n’importe quoi qui tînt à un ordinateur ». je ferais n’importe quoi et sans cesse du moment que ça tient par un ordinateur.

une ordinateur est un machine qu’on arrive toujours à faire fonctionner. je fais fonctionner la machine. je la fais tourner, avec n’importe quoi. que ça chauffe, que ça marche. c’est là que je ne vois pas où se situerait le désir. si ce n’est à me rapporter éventuellement à ce « désir s’avérant in fine n’être désir de rien » que rappelait miller à son cours. ( et y a des moments, embêtants, où désir et jouissance ça ne se distingue plus tant que ça ; ça doit être quand on les prend du point de vue du réel – or il n’est probablement rien qu’on ne puisse ne prendre que de ce seul point de vue. )

séparer, me disait l’analyste, informatique et psychanalyse. « interdite » de JJ, de journal des journées. si « j’obéis » c’est que je veux en savoir plus. et que la façon dont j’étais barrée pour le savoir, seule, c’était mal. je veux savoir pourquoi je fais les choses et je veux le savoir à la lumière (en pleine conscience…)

je n’ai pas du tout parlé de ce dont je voulais parler.

Notes:
  1. la salle, la « salle de vie », ainsi que je l’ai un jour entendu appeler par les voisins de table d’une terrasse de café. c’est frédéric et ses enfants qui disaient « la salle. » moi, je ne vois plus comment l’appeler d’autre maintenant. c’est une pièce qui fait salon aussi bien que salle à manger. avant que je ne rencontre frédéric, je n’avais connu que des pièces séparées, le salon, la salle à manger. []
  2. je pense que vous devez détester ça, que je l’aime, que je l’admire, etc.  ou plutôt que cela vous fait rire. que vous m’en méprisez, non? et que j’y perds de ce fait là, la possibilité de votre amitié. que faire? cacher ces choses ? []
  3. « Le trop fait surgir, émerger, apparaître, en chacun, sa propre limite.  Il fait apparaître votre ‘pas plus loin’. Il suscite une intolérance. » []
  4. « ça n’invite pas à le dessiner en grand homme mais en homme de désir.  » []