« violent et revanchard, cru et cruel »

Publié le Catégorisé comme brouillonne de vie Étiqueté Aucun commentaire sur « violent et revanchard, cru et cruel »

publié ceci sur FB, sur mon mur. ça n’a pas été facile. je l’avais d’abord mis en commentaire sur le mur de quelqu’un qui avait publié cet  article de Libération, « Balance ton porc ? Non merci ! ». cela n’avait suscité aucune réaction. je crois que j’ai essayé alors de le replacer, dans un autre commentaire, ailleurs. et ça n’en a toujours pas suscité plus. j’ai pris alors mon courage à deux mains, parce qu’il en fallait, et j’ai publié ce texte sur mon propre mur. il est toujours resté sans réaction. j’en ai été blessée. il n’avait pas été facile à écrire, j’étais moi-même bouleversée, et il me semblait que mes amis au moins auraient pu me témoigner leur présence:

selon cet article, #Balancetonporc est un « hashtag violent et revanchard, cru et cruel ». j’ai 54 ans. me faire agresser en raison de mon sexe ne m’arrive plus (si ça peut rassurer, c’est les jeunes qui se font emmerder, avec l’âge, ça se tasse). ça m’est arrivé. violemment, cruellement, crûment. et dans les gestes, les paroles, souvent, il y avait quelque chose de l’ordre de la revanche, de la haine, pour ce que je suis, ce que je représente, comme femme. j’ai pour ma part toujours encaissé en silence. certaines sont sans doute mieux préparées à faire face. je ne l’étais pas. j’ai été seule avec ça, toujours. cela m’a modelée, faite, petit à petit, jour après jours. au fur et à mesure qu’apparaissaient sur mon corps les dits « signes de ma féminité ». ça a contraint ma façon de marcher, ma façon de m’habiller, mes envies de sortir, mes désirs de voyager. mes désirs tout court. ça a barré des joies, des enthousiasmes, des gaietés. ça m’a contrainte à m’enlaidir. à désaimer mon corps. alors, si j’ai finalement lu très peu de témoignages sur twitter ou ailleurs, en raison de la nausée que ces lectures provoquaient, il est certain que ça résonne en moi et que de leur nombre quelque chose me parvient, qui me fait signe et qui me fait du bien. un immense silence qui se dévoile et se déchire. peut-être y a t-il quelque chose à faire, peut-être n’est-ce pas une fatalité. tandis qu’après-coup une sorte de colère monte en moi. une colère jusque là jamais même éprouvée, qui me prend à retardement, parce que ces agressions concernaient de trop près mon être de femme, mon intimité, ma pudeur. ça n’est pas du tout de la victimologie. je ne me suis jamais sentie victime. j’en ai ressenti l’énigme (de mon propre être). j’en ai été saisie. je m’y suis figée. alors aujourd’hui, ce hashtag, #balancetonporc, s’il m’a d’abord heurtée, j’ai fini par sentir qu’il comportait quelque chose de juste. parce qu’enfin bon, ok, l’énigme, le silence, c’est bien, c’est comme ça, « on se débrouille », il n’en reste pas moins qu’il est peut-être temps, finalement, et juste, pour moi, de les nommer, tous ceux-là, à qui je n’avais jamais rien dit, à qui il n’était rien possible de dire, parce qu’ils étaient plus forts que moi, parce qu’ils étaient cons, parce que cela aurait encore plus attisé leur colère, il était peut-être temps de les injurier en retour. (alors non, je n’y suis pas allée de mon #hashtag, mais je considère que celles qui y vont, y vont pour moi aussi, je cautionne.)
cela dit, par delà l’injure, « l’indignation de masse » dont il est question ici, qui a lieu, qui se manifeste, celle-là me touche profondément. qui comporte en son creux quelque chose d’infiniment juste. même s’il n’y a pas d’oreilles pour l’entendre (parce qu’il faudrait que ça rentre dans un cadre jurid……)

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