dimanche 12 mars 2017

12 mars, faire et défaire, c’est toujours travailler

thalys vers Bruxelles.

dans le train. enterrement tante demain. oublié bouquin à la maison. je foire toujours au moins un truc. la dernière fois, lundi dernier à la gare, juste devant la machine où je devais retirer mon billet de train, j’oublie mon code de carte de banque. c’est juste histoire de dire, tu sais pas y faire, faut que t’appelle F. tu peux pas faire sans

non. l’angoisse viendrait plutôt dès lors que je m’apprête à faire ce que je dois, dès lors que je veux le faire. c’est faire ce que je dois qui m’angoisse, ce que je dois qui est en fait ce que je veux. (je me suis si bien débrouillée, pour ne pas faire ce que je ne veux  pas faire, que vraiment, aujourd’hui, il ne me reste plus que ce que je veux faire. que je ne veux pas faire non plus.)  je pensais à ça ce matin dans mon bain. l’autre chose à  laquelle je pensais, c’est qu’il m’est vraiment difficile pour le moment de ne pas laisser F faire les choses à ma place. le faire, faire ce qu’il me revient de faire, et qui n’est pas ce travail que je dois faire, je n’y arrive plus. (je pense à des choses très simples, comme faire à manger, la moindre des choses.) toute à mon boulot. je me laisse happer, happer, happer, dévorer, je donne ce spectacle-là. de ma réduction par et pour l’autre, de mon esclavagisme, de mon aliénation. et que je ne puisse plus rien faire d’autre.  en termes lacanienne, c’est : quelle jouissance n’arrivai-je plus à sacrifier en ce moment, pourquoi me faut-il, en ce moment particulièrement, le soutien de F à 100%, au point qu’il se soit fait un lumbago. la jouissance de me donner toute à l’autre, un autre complètement fantasmatique, sous la figure spectrale du travail, et quel est ce fantasme, pourquoi ne puis-je simplement assumer ce que je veux, pourquoi faut-il que je m’épuise à démontrer que je n’y arriverai pas, quels que soient mes efforts. et pourquoi transformai-je ce que je veux en ce qui est voulu par l’autre.  je trouve ça complètement décourageant. dire que je me conduis en  fille gâtée est un euphémisme.  comment faire pour que ça bouge. 
 

à quel impossible travail m’astreins-je, toute à combattre l’angoisse qui en découle, combattre ce  qui se met en travers de ma route, comme par exemple, incessamment, ce sentiment de ne pas faire ce que j’aurais dû,  d’avoir fait le mauvais choix, de devoir rebrousser chemin, de devoir  recommencer, défaire le travail de la veille, recommencer. infinir. ma grand’mère disait faire et défaire, c’est toujours travailler. alors, pour ça oui, je travaille. c’est un trou que je creuse.  une tombe où je m’enfonce.

et comment j’en appelle à F maintenant, pour arbitrer mes choix, mes dilemmes.

aussi, me semble-t-il qu’il faut toujours que je sois à plaindre, maintenant plus que jamais. lui, me trouve des excuses, le décès de ma tante, le travail que j’essaie de faire. mais pourquoi ne suis-je  pas plus forte, comment puis-je être aussi ridiculement fragile. cette plainte même que j’exprime en ce moment est insupportable. quelle est cette plainte, sa fonction. et pourquoi ne cherchai-je pas davantage à épargner F, faut-il que toujours je l’inquiète. ne puis-je  souffrir en silence. et peut-être est-ce ce silence dont je fais l’épreuve, la nuit, quand je me réveille. la raison de ces insomnies qui ne me lâchent pas, qu’il faille bien cesser d’imposer aux autres sa vérité, être seule. devant l’éternité. et cesser de récriminer. 
 

comment renoncer à la vérité (elle que Lacan disait sœur de l’impuissance) 

voilà que nous arrivons à destination ! 

dans le tram 51, vers chez ma mère 

non, ce que je veux dire aussi, c’est que je sais très bien ce que je dois faire, très souvent. et que systématiquement ne le fais pas. comment c’est possible ça. 

et à tout ça, l’analyse n’a rien changé. malgré tout ce que je sais de mon fonctionnement. 

 

 
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