quel manque me manque – où il est question du trop et des jeux vidéos

Réveil, petit samedi matin, au lit. Dans le noir, à côté de F.

  1. Je ne parviens pas à croire que je vivrai encore cela, le moment où Jules aura grandi et où il sera confronté aux difficultés que lui vaudra d’avoir trop aimé les jeux vidéo.
  2. Quelles seraient ces difficultés que j’imagine et comment se fait-il que je n’arrive dès lors pas à les prévenir, à les empêcher ?
  3. Il me semble que se sacrifie dans le jeu vidéo, que se voit sacrifié dans le jeu vidéo, ce que la psychanalyse m’a appris à considérer sous le vocable1 de désir« .
  4. Or, si le désir est en son fond désir de rien, le désir ne se trouverait dans le jeu vidéo non pas sacrifié, mais au contraire trop vite découvert et trop vite comblé.
    (Trop vite découvert puisque c’est quelque chose dont il vaudrait mieux ne s’apercevoir qu’au terme d’une longue analyse;
    trop vite comblé, et donc l’éteignant, puisqu’il serait également de la nature du désir de n’être pas satisfait. Un désir satisfait est un désir mort.)
  5. Mais ce qui caractérise d’abord le désir n’est pas qu’il doive rester insatisfait ou qu’il soit désir de rien – cela, c’est « en son fond » , in fine, cela ne fait pas un début dans la vie. C’est qu’il trouve sa condition – qui ensuite déterminera sa nature – dans le manque. Le jeu vidéo manque de manque.
    Le jeu vidéo me paraît manquer de manque. Trop satisfaisant.
  6. En temps normal (la normalité désignant ici le discours qui me conditionne, conditionnement qui n’est pas celui de Jules), le manque de manque provoque l’angoisse. (Ici, citation Lacan) Ici, le manque de manque est jouissance.
    (De mon côté j’ai, à force, pu distinguer un lien, une accointance, entre l’angoisse et la jouissance. Mais cela est encore très théorique et ne m’a encore guère servi à les supporter (sinon que j’ai survécu). )
  7. Quel manque donc manque, qui probablement me manque, aujourd’hui, pour que je ne puisse le donner à Jules ?
    « L’amour, c’est donner ce qu’on n’a pas à celui qui n’en veut pas. « 
  8. Quel manque me manque, quel trop l’a effacé ?
  9. Ce manque serait au moins d’une sorte. Symbolique, il est manque de mot, il est le manque du manque des mots (qu’il me semble que nous éprouvons cependant, mais sans que cela ne nous manque suffisamment que pour nous mener à les chercher, les désirer.)
  10. Et peut-être pourrais-je le dire également manque de corps (mais j’y manque et ce serait comme un manque de trop, un manque en forme de trop. Théorique.)

Jules vient dans le lit, me lire par dessus mon épaule. Coucou Jules. BISOU.

Plus tard, dans le canapé.

Ce n’est pas tellement que je ne puisse supposer à Jules suffisamment de ressources que pour arriver à vivre, et vivre bien, au départ de ce qui fait son plaisir aujourd’hui,  les jeux vidéo,  c’est que le monde n’y est pas adapté ; et aura-t-il l’a force,  l’intelligence,  les ressources d’adapter le monde.

Il n’est pas du tout forcé qu’il doive passer par mes difficultés,  puisque son début dans la vie est tellement différent du mien,  mais – je ne sais plus ce que j’allais dire et je dois aller manger….

Notes:
  1. vocable (Définition du Littré)
    vo-ka-bl’s. m.
    Terme de grammaire. Mot, partie intégrante d’un langage.
    Patronage, en parlant d’un saint.
    Il existe à Vienne, sous le vocable de saint Pierre, une église élevée sur la place d’une basilique des premiers siècles, LEBLANT, Inscript. chrét. de la Gaule, t. II, p. 113.
    HISTORIQUE
    XVe s. : Le vocable [proverbe] que on dit, que : à celui à qui il meschiet, chascun lui mesoffre, FROISS., II, II, 159.
    XVIe s.:
    Vous dictes en vostre monde que sac est vocable commun en toute langue, RAB., v, 45.
    Ignorant des frases et vocables qui servent aux choses plus communes, MONT., I, 103.
    Dieu par nature a constituez les vocables pour les choses, non les choses pour les vocables, BONIVARD, Advis et devis des lengues, p. 55.
    ÉTYMOLOGIE
    Provenç. vocable ; espagn. vocablo ; ital. vocabolo ; du latin vocabulum, de vocare, appeler (voy. VOIX). []

Bénédicte Henderick à la galerie Catherine Putman

« La galerie Catherine Putman expose pour la première fois à Paris le travail de Bénédicte Henderick.

Née en 1967 en Belgique, Bénédicte Henderick vit et travaille à Bruxelles. Elle peint, dessine, réalise des installations et des objets entre design et sculpture. Le dessin tient une place très importante dans son œuvre et se développe avec une grande variété de techniques et de supports: papier, carton, toile marouflée ou même, ici, cartes à jouer.

«Corpus I» est la suite du projet « Préface » commencé en 2012 et qui s’inscrit dans la suite de sa dernière série «Camina Ando». Le corpus se développera en plusieurs temps avec la phase initiale – ou premier chapitre – à Paris. Les complices choisis pour ce premier développement sont Tadao Ando, Maurice Blanchot, Jacques Lacan et Francis Picabia.

Il ne s’agit nullement d’un travail illustratif : il n’y a ici ni référence explicite, ni citation directe; Bénédicte Henderick nous propose des œuvres qui, par un jeu d’association et suggestion, se réfèrent à ces auteurs et artistes qui l’accompagnent depuis toujours.

«Camina Ando» : alter ego de l’artiste, personnification d’un cheminement personnel et, par analogie, filiation à Tadao Ando. Telle est son approche originale et personnelle dans ce «Corpus» où chaque œuvre renvoie à l’une ou l’autre de ces personnalités.

L’approche du dessin pour Tadao Ando est très construite avec une érotisation implicite, plus conceptuelle et proche de l’indicible pour Maurice Blanchot, plus «nodale» avec Jacques Lacan et une expression jouissive et décomplexée pour Francis Picabia. » (communiqué de presse de la galerie)

Liens :
http://www.catherineputman.com/artistes/henderick.html
http://www.benedictehenderick.com/

grande carte - silhouette d'un  couple enlacé

Carte. Couple enlacé, debout, les bras de la femme autour du cou de l’homme, plus grand qu’elle, comme il se doit. Point rouge au centre de la carte, à l’endroit de la réunion des sexes. Silhouettes nues, un ruban noir les enlace, plus ou moins flottant autour de leur taille. Un autre ruban noir, plus large cette fois, descend sous le coude élevé de la femme, en prolongement de ses cheveux, à moins que ce ne s’agisse encore de ses cheveux, sur lequel est dessiné le point rouge, camoufle le visage de l’homme réfugié dans le creux de l’épaule de la femme.

 

grande carte - tête de Möbius

Grande carde. Silhouette noire d’un homme habillé et chaussé se tenant debout, pieds légèrement écarté, sur fond de ce qui pourrait s’apparenter à une pupille de couleur rose au centre d’un iris jaune (!), ou d’un soleil rose irisant sur fond jaune d’or, un ruban s’élevant d’entre ses épaules, lui fait office de tête, retombant en crochet qui se prolonge en escalier, une ou deux marches donnant dans le vide, dans lequel est pris un ruban de moebius.

[Imaginé par le mathématicien August Möbius (1790 – 1868) en 1858, le ruban de Möbius est une surface qui a la particularité de n’avoir qu’un seul côté et qu’une seule face. Le ruban de Möbius s’obtient en recollant deux côtés opposés d’une bande rectangulaire à laquelle on fait subir au préalable une torsion d’un demi-tour. _ Wikipedia]

 

paire de cartes (petites) - pont arrière, escarpin rougedeux cartes, l’une sur fond rose l’autre sur fond vert. sur fond rose un escarpin rouge à talon haut, de profil, sur le fond vert, le tracé d’une silhouette qui prend son départ d’une position en « pont arrière » (gymnastique), se décomposant pour se relever, suivant celle tracé d’une flèche qui s’élève pour aller vers le droite, le buste se relevant. la décomposition du mouvement des jambes n’est pas donnée, seul celui du buste. le visage est tracé grossièrement, le nez en pomme de terre, le franc sourire d’un simple trait, des billes pour les yeux.

doublet de cartes roses

 

C’était lors de mon premier arbre, / J’avais beau le sentir en moi / Il me surprit par tant de branches, / Il était arbre mille fois. / Moi qui suis tout ce que je forme / Je ne me savais pas feuillu, / Voilà que je donnais de l’ombre / Et j’avais des oiseaux dessus. _ Jules Supervielle
C’était lors de mon premier arbre, / J’avais beau le sentir en moi / Il me surprit par tant de branches, / Il était arbre mille fois. / Moi qui suis tout ce que je forme / Je ne me savais pas feuillu, / Voilà que je donnais de l’ombre / Et j’avais des oiseaux dessus. _ Jules Supervielle


carte 1 : silhouette, contour noir d’un visage sur fond vert pâle ; silhouettes pleine de 2 oiseaux noirs sur un (demi) fil. carte 1 : L’intérieur du visage est blanc, traversé d’une veinure noire verticale d’où partent ou aboutissent des traits pouvant évoquer les nervures d’une feuille.

carte blanche, carte noire the story of you and me - 2 the-story-of-you-and-me

11-20121116_150447

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