mes supposés lecteurs

Publié le Catégorisé comme brouillonne de vie, psychanalyse Étiqueté , , , , , 8 commentaires sur mes supposés lecteurs

Dois fermer le blog, pas le courage de l’écriture, trop paresseuse, devenue trop paresseuse ; ai été travailleuse, ne le suis plus. Du coup continue à trop restreindre ce que je dis. Présuppose, crains, espère, m’attends à certains lecteurs, qu’internet rend d’ailleurs trop proches, auxquels je cherche à servir ce à quoi je m’attends qu’ils s’attendent.

Par exemple, entre autres, et s’opposant d’ailleurs à mes autres supposés lecteurs, crains trop la lecture des psychanalystes, moins leur lecture que celle de l’École (de la Cause freudienne), qu’ils représentent pour moi. Ce que je crois de ce qu’elle peut savoir, qu’elle veut savoir, de la façon dont elle veut le savoir, du moule, des modèles (langagiers) dans lesquels elle fonctionne, de l’étroitesse de ces moules, dans lesquels pourtant je voudrais forcer ma pensée. Cela ne veut pas dire qu’elle ne supporterait pas que ces moules soient forcés, élargis, mais cela y demanderait une assiduité à l’écriture que je n’ai pas.

C’est quelque chose du style de l’École qui ne me paraît pas propice à l’auto-analyse, un style trop maîtrisé, surveillé, stéréotypé, et peut-être le fait que trop peu d’analystes aient suffisamment insisté pour faire reculer les limites de leur propre analyse. Pour les faire sauter. Ou pour témoigner de ces limites, des limites de la psychanalyse. De ce qu’ils n’ont pas pu faire sauter comme verrou.

Quelque chose cloche dans la psychanalyse, quelque chose rate, qui au moment de son enseignement se voit pris dans un discours qui certes lui convient, « L’Autre  qui n’existe pas, le trou du langage, l’insensé du réel, etc. », mais qui rate de trop bien fonctionner, de rater son ratage. Le lisse et le poli même de son discours lui fait rater, trahir l’objet qu’elle a su pourtant cerner. Elle devrait trouver le moyen de bégayer un peu plus et la finesse d’en rire. Le discours de la psychanalyse ne devrait se supporter, ne consister, que de l’invention (et donc de l’incrédulité que l’invention éveille).

Politiquement, elle est trop sage, peu incline à reconnaître qu’elle ne devrait s’avancer qu’en se passant des atours politiques habituels,  atours,  discours dont elle ne devrait se revêtir qu’avec la plus grande prudence, plutôt que la déférence dont elle fait montre, se limitant dans un premier temps à un rôle de révélateur et de critique, dans le souci de d’abord  faire entendre la voix de la psychanalyse plutôt que celle du discourcourant politique.

Je voudrais qu’elle cesse de croire et de porter aux nues une élite intellectuelle –  parlant ici surtout de ce qui se passe à Paris -, à laquelle elle appartiendrait.  Parce que cette croyance l’aveugle et diminue considérablement la portée de ce qu’elle annonce, présente. Dans le même esprit, ses intérêts culturels sont bien trop limités.

C’est à cause de tout ça que moi je dois cesser d’écrire mon blog, où je suppose, espère toujours la présence d’un psychanalyste dans mes lecteurs, mais d’un psychanalyste en tant que représentant et responsable de l’ École, une école exploratrice, laboratoire, inventrice d’un enseignement toujours à réinventer. Et c’est à cause de ce que je connais des limites de cette École que je me limite d’écrire et c’est pourquoi je dois cesser de croire en elle, et cesser d’écrire ce blog.

Par Iota

- travailleuse de l'ombre

8 Comments
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Ser
Ser
10 années il y a

Cesser de croire ou plutôt savoir?
Un psychanalyste, par définition, ne sait pas.
Le savoir lie la raison et l’intuition, un art de vivre qu’atteste la contingence.
Le savoir de son vivant est possible, encore faut-il renoncer à mourir et continuer à écrire.
L’école est par nécessité variée, le recrutement ne fait pas l’économie des vaniteux et des crétins pourvu qu’ils soient notoires.
J’ai été à bonne école, ma reconnaissance est immense, mais certes pas infinie.

véronique m.
10 années il y a

merci pour ce commentaire auquel je ne m’attendais pas (du tout).

vous dites des choses curieuses : « renoncer à mourir »

oui, l’école est variée, et belle. et il me suffit souvent d’un mot (d’un écrit) d’elle pour que mon désir se retrouve, se ravive. et je lui en suis reconnaissante.

pour moi, j’attribue à l’école la charge de l’enseignement de la psychanalyse. une fois l’analyse terminée, je ne vois rien qui soit plus passionnant, poignant, difficile, impossible que cela. qu’est-ce qui s’enseigne de la psychanalyse, qu’est-ce qui s’en transmet au monde extérieur. je dis cela n’appartenant pas à l’école et n’étant pas analyste.

… s’en passer à la condition de s’en servir / d’accord – si ce n’est qu’on se trouve encore souvent dans un s’en servir qui ne s’en passe pas, mais pas du tout

pour l’instant le « s’en passer » m’intéresse plus que le « s’en servir »

véronique m.
10 années il y a

Enfin, tout ça n’est que fantaisie. Des pensées de réveil, des pensées au réveil, après une nuit trop courte. Rien de très réfléchi…

Ser
Ser
10 années il y a

S’en passer? C’est l’Ecole qui peut se passer de vous, c’est son précepte.
Pas sûr de pouvoir s’en passer… sans passer, à condition de s’en servir… sans servir.
La condition est première, le premier pas est peut-être de s’en servir,et non de servir jusqu’à l’asservissement.
A savoir que le service gagnant est parfois sans retour.

véronique m.
10 années il y a

Oui, l’École se passe de moi, vous avez bien raison (quant à ce que ce soit son précepte, je ne le comprends pas ;)) Et c’est moi qui ne trouve pas le moyen de me passer d’elle…
Je vous remercie pour vos commentaires qui m’ont aidé à réfléchir quelque chose qui ne l’était pas.
L’Ecole fait du très beau travail. Il y a seulement que je n’en fais pas partie et qu’elle s’adresse essentiellement aux psychanalystes, dont je ne suis pas… quand finalement je cherche de mon côté à enseigner la psychanalyse en dehors de l’École et comme non-analyste à des non-analystes. Mon amertume vient de là, de cet impossible face auquel je suis, qui me fait à l’École continuer de (dé-)supposer le savoir.
Il m’a fallu trois jours pour voir ça. Et votre intervention. Merci beaucoup.

ser
ser
10 années il y a

Vous détacher de ces crapules sans scrupules, de la carotte qui fait avancer pour retrouver votre liberté, voir le monde supposé et continuer à les aimer pour ce qu’ils ont fait, vous aurez tout gagné à ne pas rejoindre Onfray.

Riez, pauvres ânes bâtés !
Riez de l’onagre en liberté,
Priez, belles âmes captives
Pour l’hémione sur la rive.

Frayez, cochons engraissés
Raillez votre cousin sanglier,
Il passe et courtise la truie
Cependant que la laie vous fuit.

Braillez fort, hommes bien nés
Criez, beaux mâles affamés
Pleurez femelles soumises
Les larmes vous sont permises.

Brillez étoiles dans la nuit
Le jour sera votre ennemi
Il vous faut les ténèbres
Pour vous rendre célèbres.

Et moi, le jour pour m’animer, je vous souhaite bonne journée.

véronique m.
10 années il y a

bonjour.
je vous « réponds » beaucoup plus tard. merci.
j’ai été un peu bouleversée (ne vous en faites pas je suis coutumière du fait) par ce que nous avons écrit ici. j’avais d’abord écrit n’importe quoi, ce qui me passait par la tête ce matin là, n’importe quoi vraiment. et puis, probablement de ce que ça a été entendu, de ce que ça trouvait une oreille, ce qui en moi autrement serait resté étale, a dans l’ombre fomenté une petite tempête qui a débordé de son verre (d’eau).
je ne pense pas pour ma part qu’il y ait à l’Ecole de crapule. il y a – au moins une – personnalité qui me fascine, dont j’admire l’enseignement, et qui laisse parfois connaître certains de ses faibles – de ses faiblesses, de ses goûts, de ses opinions – qui ne sont pas les miens. la belle affaire… ça complique un peu le transfert, il est vrai, mais quelles amours ne sont pas (compliquées)… et puis cette personne, bien sûr, n’est pas toute l’école (mais si pour moi elle est la crème).
très bonne journée à vous aussi, par la grâce que nous fait cet automne de nous chauffer encore un peu les coeurs et les corps…
amicalement,
v

ser
ser
10 années il y a

Crapule : Tête agitée selon le Littré.
Trop de cœur, encore du malheur.
C’est à forcer la séparation par la logique qu’on trouve la solution dans l’aliénation ou dans une liberté à assumer, ce qui ne fait pas partie, a priori, mais sans préjuger de notre réalité.

Enlevez la crème pour boire du petit lait, voilà un conseil pour une journée ensoleillée :-)

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