le dentiste tué d’une balle dans la bouche
— jeudi 22 oct. 2020, 10:56

22 octobre 2020 | octobre 2020 | RÊVES | , , , , , , , , |

Donn

22 octobre, jour de mon anniversaire, 57 ans.

  1. Je suis en prison. Peu de souvenirs. Beaucoup de monde. Dortoirs.
    Je dois aller chez le dentiste.
    Quelqu’un essaye de tirer dans le dentiste qui a la bouche ouverte, dans sa bouche.
    Il n’est pas mort. Les portes ont été fermées.
    De l’autre côté de la paroi quelqu’un tire au hasard et touche le dentiste au cou, il meurt.
    Je me réveille. Je me dis que je ne dois pas oublier. Je me souviens alors de beaucoup de choses. Je me rendors. Je rêve la suite du rêve.
  2.  Toujours en prison, je dois rentrer à la prison après l’assassinat du dentiste. C’est la nuit, j’éprouve de la fatigue. Il fait noir. Je marche entre les lits.
    Quelqu’un pour une raison oubliée allume toutes les lumières en poussant des cris.
    Tout le monde s’agite.
    Je profite de la lumière pour me mettre en pyjama. J’y parviens. Je me couche alors que c’est le branle-bas de combat. Irène (très belle femme, amie, longtemps compagne de mon frère, femme très aguerrie, combattante) me dit qu’elle se demande comment elle doit s’habiller. Je lui dis qu’elle est très bien comme elle est. Elle se fâche en se déshabillant, me dit qu’elle ne me connaît pas assez (comme si nous allions sortir dîner), qu’on voit ses seins à travers le chemisier (je les vois alors en effet, je vois sa silhouette, elle se tient debout sur son lit, dans une position un peu en déséquilibre). Une fois changée, dans une tenue plus adéquate, elle s’en va en courant par dessus les lits.
    Je sors. De loin, il me semble pouvoir observer qu’une manifestation avec d’énormes blindés militaires passe de l’autre côté du mur de la prison. Je les vois qui dépassent au dessus des murs de la prison, dont il n’est pas sûr qu’ils soient toujours debout (les murs). Je ne sais pas ce qui se passe. Il s’agit de défendre quelque chose. Je ne suis pas sûre qu’il s’agisse de la bonne cause (ce pourrait être un coup d’état fasciste). Je marche lentement, à contre-cœur, vers les lieux de l’agitation.
  3. Je suis arrêtée par l’observation d’une petite fille qui se tient immobile au milieu du courant. Elle fait quelque chose de très extraordinaire. Elle est capable de faire quelque chose d’extraordinaire et de surprenant. C’est petit, ça tient dans ses mains. Je ne sais plus ce que c’est. D’autres adultes sont penchés sur elle, attentifs. Je m’approche, elle me montre, me parle doucement. Nous remontons alors, devisant, à notre affaire, vers les lits.

Samedi 24 octobre

Dentiste
Je souffre d’une maladie parondontale, une parodondite. Je suis donc souvent amenée à aller chez le dentiste. Je pourrais y perdre toutes mes dents. J’en ai été beaucoup plus inquiète qu’aujourd’hui, je m’y suis faite.
C’est curieux que ce soit le dentiste qui soit tué. Balle en bouche, balle dans le cou.
À cette maladie, je lie la cigarette, dès que je fume, elle se réveille.
Il y a cette paroi au travers de laquelle le tireur tire, à l’aveugle (comme la paroi dans laquelle se fiche la balle de l’autre rêve, ah non du film, Le cercle rouge.)
Je pourrais retrouver le rêve fait il y a quelques années intitulé par moi : Parondontologie à la gencive / Par odd ontologie à l’agence Yves. Yves étant le prénom de mon analyste, de mon premier analyste à Bruxelles, pendant 10 ans. Roger chantait cette drôle de chanson : À l’agence des amants de Madame Müller.
Il y a aussi ce bout de phrase : suicidé balle en bouche (le grand père du château).
La paroi me fait penser à un film de samouraïs vu il y a quelques temps (Lone Wolf and Baby Cart). Le héros tirait souvent au travers de parois sans jamais rater son coup. Il devait entendre où l’adversaire se trouvait. Un ancien samouraï déclassé, parti sur les routes avec son fils, jeune enfant, qu’il pousse dans une drôle de charrette, pour venger l’assassinat de sa femme. Il ne tire pas de balle, use d’un sabre.

Troisième partie du rêve. Je ne sais quoi ajouter. La petite fille est toute petite, mais en âge de parler. Ce sont d’autres adultes qui sont d’abord avec elle. Puis moi. Elle m’est inconnue. Et elle le reste. Ce dont elle s’occupe évoque le tai chi. Une matière, une énergie impalpable, concentrée.

Bouche. Quand je ne vais pas bien, j’ai une tension particulière dans la bouche, je me souviens que je la ressentais, comme l’inscription même d’une maladie terrible dans les gencives, dans la mâchoire. J’essayais de travailler là dessus, de me détendre de la soigner avec du Chi, la nuit.
En ce moment, tension légère quand je fais du chi (travail du Chi), au moment de la prise en main du tantien. Toujours comme si la bouche voulait faire l’exercice à la place du ventre. Toujours occupée à essayer de détendre. Enfin, depuis quelques semaines. Puis, quand c’est bien parti dans le ventre, ça disparaît.
C’est quelque chose de connu en tai chi : comment démobiliser l’appareil phonateur, dans tout ce qu’on fait, sa constante participation, toujours à accompagner les pensées, à les articuler, déplacer alors l’appareil phonateur dans le ventre, au tantien, pour mettre la bouche au repos et disposer de toutes ses forces dans le ventre.
Quand la parondontite est en crise, c’est tout l’appareil phonateur qui va mal, la gorge, le nez les oreilles. Je soigne l’inflammation avec huiles essentielles.

*
*     *

Pierre B., prof de tai chi, travaille beaucoup la disparition du corps. Ça n’est pas difficile pour moi. Je ne le suis pas dans sa façon de nommer Joie ce qui s’éprouve alors. Je me trouve dans quelque chose de neutre et parfois d’agréable ou  de sensationnel.
Cours : Je me tiens assez bien à cette idée que je peux m’en sortir, que je suis tout à fait à ma place, que je peux m’en sortir sans la discipline quotidienne, sans les « années de pratique » toujours évoquées. Idée, volonté, qui date de l’été. Mais déjà bien préparée dans les derniers temps avec N, à cause de la souffrance, du mal-être, du malaise lors des cours ou des stages. Ce malaise de la mesure à l’aulne de l’autre. Ressenti par nombre d’autres que moi lorsque je leur en parlais. Quelque chose que N n’a pas la clé pour faire disparaître, qu’elle évoque bien sûr, aussi bien qu’elle provoque (les bons points, les mauvais points, les privilèges). Je laisse place à une volonté de tout, tout de suite, pas tout à l’heure, pas dans 10 ans, dans 20 ans, une volonté de sortir de l’idée du progrès, d’apprécier pleinement ce qui est là, dont je suis seule à pouvoir juger, que je veux d’ailleurs sortir du jugement, qui n’est plus dans le jugement.
Les cours que j’ai suivis pendant l’été étaient d’un niveau très avancé et c’était très bien. Jamais je ne me suis laissée distancer, préoccuper par le fait que quelque chose n’allait pas tout à fait. Il y a toujours moyen de revenir dans l’instant, l’instantané.
Hier, Pierre a fait un récapitulatif de ce qu’il avait fait jusque là, et je me suis dit que ce serait bien que je reprenne, seule et prenne du temps pour… prendre au sérieux, travailler, ces propositions. J’ai senti chez lui une volonté d’enseigner et que ce pourrait être bien que je m’affronte un peu seule à… ce qui ne va pas tout seul…
Les cours de Pierre sont très proches de certaines sensations très fortes que j’ai pu éprouver petite fille. Donc, si dans les préparatifs « musculaires », techniques, je peux être parfois un peu perdue, quand on arrive au moment de la technique à proprement parler, à l’effet recherché (même si ça a déjà lieu tout au long de la préparation, si ça s’annonce), je constate que j’y suis toujours instantanément. Peut-être en va-t-il de même pour tout le monde. C’est à chaque fois une immense surprise. Même s’il y un refus des termes, refus sans animosité bien sûr, simplement ça ne me touche pas, que Pierre peut alors mettre : Vie ou Joie ou Force. Mais, peut-être que c’est chez moi quelque chose de l’ordre d’une défense. Qui me ressemble. J’aime alors ma neutralité.
J’ai déjà utilisé l’idée de vie pour contrer celle de mort. Je l’ai déjà fait pour combattre de très fortes angoisses, la nuit. J’ai brandi ce mot, de la façon dont on peut le faire lors des relaxations en tai chi, ainsi que je l’ai appris avec N, avec Vlady avant elle, pour l’opposer à ce qui s’imposait à moi. Dans une certaine neutralité, c’est-à-dire sans exaltation, sans croyance, j’ai brandi le mot Vie vide, tel que je le ressens, contre ce qui m’envahissait, de mortel, et où la mort, elle, avait ses mots lors des crises où j’entends des injonctions à mourir,… et ça avait marché. C’est vrai. C’était un exercice contre-nature, foncièrement, contre ma nature, mais c’était indispensable.
Quand dans le travail de chi on se vide, c’est comme quand j’essaie de vider la mâchoire, c’est arrêter un instant, dans tout le corps, l’incessante articulation. Pour la résoudre dans un point de vie, de battement, celui du tantien. Et ensuite re-remplir le corps d’une matière fort agréable. Et dans laquelle on croit, je crois à la bonté, au bon de cette matière. Et, c’est comme re-faconner de l’intérieur, se refaire.
Je connais bien sûr, parfois, la joie. Des moments. Rares et simples, intimes, silencieux. Pierre, comme professeur, doit les mettre, sur le moment même. Ces mots. Et c’est bien. C’est très bien. Cela sert, dans l’après-coup, l’après cours.

mar. 27 juillet :: dedans dehors (d’inanité sonore)

27 juillet 2021 | juillet 2021 | brouillonne de vie | , , , , , , , |

Rentrés hier à Paris. Réveillée ce matin à 7 heures. Plein de rêves, plein de rêves. Traîné puis levée pour écrire et réinscrite réseaux sociaux, ça fait 2 heures que j’y.

Ca fait 2 heures que j’y.

Tout le monde dort, une fenêtre du salon ouverte sur le ciel blanc. Bruits qui résonnent dans ce qui s’entend encore du silence : c’est le matin, c’est les vacances. Mardi 27 juillet. Du dehors, l’air n’est pas tout à fait le même qu’au dedans. Il y aurait quelque chose à en dire, mais je ne trouve pas quoi. De la conscience de cette frontière, à quelques mètres de moi. Dedans dehors. Je songe une fois de plus à la joie de Proust qui écoute, guette ravi depuis sa chambre les bruits de la rue et nous les décrits. Il y a quelque chose de ça. N’était-ce la stridence de certains bruits parfois, qu’il faut supporter, accepter, intégrer. Le rugissement d’un camion. Ici, pas de marché, pas de marchand, de passant quotidien que l’on reconnaîtrait, rue anonyme. Des voix, des dialogues, pourtant, qui sont comme de toute éternité, même en langue étrangère, et tiens, voila du français, cet accent ! Ceci ne s’entend qu’au matin. Et que grincent les pneus d’un vélo dans la descente. – Allez, bonne chance ! – Bon courage ! Avec leur métier, leur âge tout inscrit dans leur voix, comme hier le lierre pris dans les branches blanches du vieux poirier. Chair, rocaille. Si l’on ne distingue ce qui se dit, un soupir s’entend. Dedans, dehors. Qu’est-ce qui me vaut ce qui s’apparenterait à de la joie. Une joie bien calme, qui ressemble au silence, au recueil. – Ce pays de merde ! Voix reconnue d’un clochard. Et l’absence de soleil. Qui ne se lèvera pas du jour, cela se laisse aisément prédire. Les deux amis qui passent en parlant. Les pas de ceux que je n’entends pas. 9h30. Quelle cloche sonne ? De Belzunce. Qu’est-ce qui nous vaut la joie, la joyance? Est-ce d’être seule, ce vol aux dormeurs, ce vol aux surveilleurs? Comment on sait si peu de soi et de ses raisons. Faut-il le savoir ? Le bus électrique se signale d’un son de cloche qui ressemble à celui des trams bruxellois. Ou s’agit-il seulement de cet état d’être, en extension, en élargissement. En neutre élargissement. Car le mot de joie est trop connoté, a trop pris parti, pour parler de cet instant qui n’est pas loin de se satisfaire de cela seulement qui résonne, se transmet, se répercute. Les voies sonores, l’épaisseur trouée du silence.

(l’air, vecteur, est cela qui vous enseigne)

*

Lu hier, de Bernard Lecoeur :

« L’identification contribue à transformer ce qui est de l’extérieur en intérieur. C’est une façon d’aménager l’espace, d’y introduire une certaine vérité qui n’est autre que celle du corps. L’identification participe à la mise en place de lieux, le lieu de «l’un comme tel [devient celui de] l’Autre » [1].
[1] Lacan J., Le Séminaire, livre IX, « L’identification », leçon du 29 novembre 1961, inédit.« 

https://www.hebdo-blog.fr/identification-a-distance/

qui se répercute ici sans que j’y comprenne rien.
De l’Un devient de l’Autre. Ce qui se répercute : de l’Autre. L’humanité.
De lieu : Disons : de corps étendu. Sa vérité ai-je tellement envie d’ajouter.

… au salon vide : nul ptyx
Aboli bibelot d’inanité sonore,
(Car le Maître est allé puiser des pleurs au Styx
Avec ce seul objet dont le Néant s’honore.)

Je ferme la fenêtre le bruit, retourne me coucher
jusqu’à ce que tous se lèvent et que je puisse
à mon tour faire du bruit.

mar. 27 juillet :: rêve -affublée d’un double

27 juillet 2021 | juillet 2021 | RÊVES | , , , , , , |

À ce que j’écrivais ce matin, je voudrais rapidement ajouter que je m’étais d’abord réveillée fort prise dans un rêve où j’ai aussi longtemps que possible continuer d’errer, que j’aimais alors qu’il s’agissait d’un cauchemar, dont je ne me souviens d’aucun terme, si ce n’est, peut-être, celui exagéré des silhouettes de ce sculpteur dont le nom me revient : Giacometti.

J’étais dans le rêve affublée d’un double, crois-je. Un double masculin dont l’allure évoquait l’un de ses longs marcheurs au corps de terre adoigtement rapprochée (je le dis comme ça me vient). Ce double avait une fonction déterminée liée à ce qu’il ne soit pas sans sens qu’il soit, lui, de sexe masculin. Cette fonction s’exerçait sur moi, consistait à me faire faire quelque chose. D’autres personnes étaient ainsi affublées de doubles. De doubles comme d’ombres.

(Dans une revue, j’avais vu hier une sculpture de Giacometti constituée, je crois, de 4 de ces longs marcheurs (pris dans une sorte de carré, de plaque carrée, à distance respectable les uns des autres), chacun solitaire*. Il y a de ça dans le rêve. Ainsi qu’une petite céramique de mon père.)

Eveillée, songeant à ce rêve, l’oubliant tout en même temps, constatant ma fatigue, j’entendis l’une de ces voix dont j’oublie toujours les paroles, qui me disait, mais de façon fort neutre, de mourir. Je l’ai observé, le phénomène, j’ai vu qu’il pouvait s’amplifier (les phrases étaient prêtes à faire chorus). Je n’avais pas du tout peur, n’étais pas mal à l’aise, restais dans les traces du rêve où j’aurais aimé retourner, dans l’observation de mon ample fatigue, très remarquable, très agréable. J’ai envoyé tout de même l’une de ces phrases un peu stupides que j’utilise parfois pour contrer le phénomène, où je m’enjoins à vivre plutôt (que de mourir). Phrases un peu stupides, inspirées par le tai chi, mais qui ont certainement largement contribué à dédramatiser le phénomène, qui fut autrefois douloureux, qui l’est de moins en moins. Qui n’est plus qu’un signe mystérieux de je-ne-sais-quoi, d’une réalité de mon fonctionnement, d’une vérité même. Il y a en moi quelque chose qui ne tient pas tellement à ce que je vive.

Or, c’est la neutralité ce matin qui était le sentiment dominant. Rien n’était désagréable. Alors même qu’il y avait le cauchemar et les phrases. Je préfère le préciser, cette indéniable amélioration. Car j’ai écrit ici par le passé, le mois dernier, des choses qui moi-même m’ont effrayée.

Je ne dis pas qu’il n’y ait pas d’autres choses à écrire ici, qui aient trait à ce phénomène (des ordres de mourir que j’entends, ou des injures), dont, si je puis dire, la charge virale semble s’être considérablement amoindrie. Je le ferai. Je crois bien que je le ferai.

C’est ce phénomène, dont je ne retiens jamais comment les psys l’appelle, ce que j’ignorais jusqu’à peu, qu’ils l’appelaient, le nommaient, jusqu’à ce que je commence à lire sur la bipolarité, qui a signé pour moi ma mélancolie, dont j’ai même lu qu’elle était considérée « déclenchée » une fois que ces voix apparaissaient. personnellement, j’aurais préféré la case « psychose ordinaire ». Mais bon, ça change.

* Illustration : La sculpture était plus grande que celle de l’illustration que j’ai utilisée, sans être surélevée. Les personnages au moins 4, et plus distants.

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