discipline « Reply #1

26 octobre 2016 | octobre 2016 | brouillonne de vie | , |

Online eoik

« Reply #1 on: October 26, 2016, 02:31:14 pm »

j’ai parfois l’impression que si j’arrivais à être un peu plus disciplinée (je rêve de me concocter des horaires auxquels je me plierais tous les jours que dieu fait, des horaires du style de ceux du lycée (je ne suis jamais allée plus loin)), je serais beaucoup plus équilibrée.

et vous, avez-vous des états d’âme par rapport à la discipline. êtes-vous plutôt naturally borned disciplined ou la tenez-vous en horreur ?

Re: discipline « Reply #10

28 octobre 2016 | octobre 2016 | brouillonne de vie | , |
« Reply #10 on: October 28, 2016, 11:51:59 pm »
 

je tape « discipline » dans google. je tombe sur « un ensemble de règles ». je suis très étonnée. je relis. « le mot discipline renvoie à un ensemble de règles. »

à la réflexion, je me demande à quoi je m’attendais.

étymologie, tout de même, « du latin disciplina, issu de discipulus, disciple, élève, lui-même dérivé de discere, apprendre. » plus proche déjà de ce que j’imaginais.

aussi, instrument : « Une discipline est un objet servant à se flageller. »

et dans les contraires de discipline, je trouve bien : désordre.

 
sinon : Georges Bataille : « Tout problème, en un certain sens, est un problème d’emploi du temps. »
 
puis, cette formule de Benjamin Constant : « Constant dans l’inconstance »,  reconnue mienne dès que je l’ai découverte…
 (l’inconstance s’oppose à la discipline et la constance va bien au-delà)

Re: discipline « Reply #16

30 octobre 2016 | octobre 2016 | brouillonne de vie | , , , , |
 
« Reply #16 on: October 30, 2016, 10:23:45 am »
 

merci beaucoup pour vos réponses. tous les deux au fond, mais Juliet aussi, vous vous en sortez avec des projets.  il vous faut quelque chose à accomplir à l’intérieur d’un délai.

s’agissant de l’écriture, c’est quand elle est hors projet, que tu as, dis-tu Élise, la tentation de la discipline. ah non,  je te relis : tu ne parlais pas de l’écriture, mais de « travailler pour faire ce que tu dois faire », sans autre précision. a priori donc, hors projet, hors délai (si ce n’est l’ultime. c’est alors que la discipline te manque.

toi, Guy, tu ne fais pas la distinction entre les tâches qui te tiendraient à cœur, la musique, par exemple, et des contraintes administratives. tel que tu l’as présenté, tu traites cela de la même façon : ce qui doit être fait, doit être fait (c’est sans état d’âme,  mais le plus vite possible néanmoins (pourquoi ?) ) j’aime beaucoup l’expression : je n’ai besoin que de savoir l’heure.

donc, dans une certaine mesure, le projet vous sert de discipline.

c’est certainement ce qui me manque. et pendant longtemps ce à quoi j’ai tenté d’échapper (rien au monde de plus angoissant qu’un délai à tenir, qu’un projet à accomplir). pour tromper cette angoisse,  je suis obligée à chercher à faire sans faire.

je m’aperçois aussi, à vous lire, qu’au bout du compte, ce que je fais ou veux faire est toujours lié à un soin que je prends de moi-même. bien sûr, j’en ai un peu honte.  j’écris, c’est pour m’aider. je fais du taï chi, c’est pour m’aider. même la cuisine, c’est encore pour m’aider. grande malade. je suis toujours dans une notion d’apprentissage et d’amélioration (d’amélioration non pas par rapport à un Bien quelconque, mais pour tenir le coup . je travaille sur moi

et j’ai renoncé à accomplir, achever, terminer.

quand j’écris, il me semble que je pourrais ne pas cesser d’écrire, idem quand je fais du taï chi, et tout le reste finalement.  enfin, c’est toujours le même problème qui ressort : je fais ce que je fais au moment où je le fais, en dehors de ça, je ne tiens à rien.

la discipline, les horaires, m’aideraient à passer d’une chose à l’autre sans l’inconfortable sensation de vertige que j’éprouve entre deux activités.

voilà. j’ai des activités (comme les enfants), pas de projets. sinon des projets à long, très long terme (puisque je ne supporte pas le terme).

la mort, m’est un peu égal, quand elle n’est pas souhaitable. vieillir par contre est très embêtant.

la question du temps apparaît donc centrale pour chacun d’entre nous.

(^_-)
 
« Last Edit: November 01, 2016, 07:36:55 pm by eoik »

Re: discipline « Reply #25

1 novembre 2016 | novembre 2016 | brouillonne de vie | , , |
Re: discipline 
« Reply #25 on: November 01, 2016, 07:34:50 pm »
 

ces histoires de projet me rappellent Bataille.  je l’avais découvert vers l’âge de 22 ans. lui qui m’avait permis de me départir,  dépêtrer, m’éloigner du projet la tête haute.

là, une consultation rapide de Google me rappelle que si Bataille ne voulait plus du projet, cela partait chez lui d’une volonté d’en finir avec le langage (dans lequel il semblait  pourtant bien installé, un poisson dans l’eau) et celle d’aller vers d’autres formes de communication, directes, non médiées.

décidément quelque chose qui continue de me diviser. même si je ne pense plus qu’on puisse quitter le langage. au moins cesser d’en vouloir comme seul habitat et inclure dans son emploi la conscience de ce qui ne lui obéit pas et qui existe. vivre dans des mondes déchirés. au cœur de la fêlure de ces mondes qui s’engendrent et s’ignorent. (car  le réel auquel Bataille voudrait atteindre de façon non-médiée est encore un réel né de la rencontre avec le langage, que le langage n’est pas seul à atteindre, n’atteint pas seul, ce à quoi il faut faire place dans l’usage du langage, dans le discours courant.)

http://www.revue-klesis.org/pdf/Klesis-Varia-III-4-La-nudite-totale-chez-Georges-Bataille-Avargues.pdf

« D’une  façon  analogue,  cette  quête  vise  à  mettre  en  cause  la  fiction  du langage  ;  fiction  qui,  incontestablement,  constitue  le  narcotique  le  plus  ancré dans  nos  existences  humaines.  Si  le  langage  est  à  mettre  à  bas,  c’est  parce  qu’il forme  une  médiation  entre  moi  et  le  monde,  et  donc  un  obstacle  à  leur rencontre.  En  effet,  toute  mise  en  mot  modifie,  transforme,  et  en  un  certain  sens trahit  l’expérience.  Parce  que  le  langage  a  pour  fonction  de  catégoriser  et d’établir  des  distinctions  à  ce  qui  n’en  a  pas  nécessairement  dans  l’expérience, ou,  au  contraire,  à  créer  des  liens  là  où  ils  sont  inexistants 9 ,  ils  ne  peuvent  que gâcher  l’expérience  en  question.  En  outre,  et  parce  que  l’on  échoue,  en  tant qu’humains,  à  sortir  de  la  mise  en  mots,  Bataille  définit  le  langage  comme  une cage  dont  les  barreaux  nous  sépareraient  du  monde.  C’est  dans  ce  contexte  qu’il exprime,  et  ce  via  une  écriture  poétique  qui  se  veut  ―  tragiquement  ―  une révolte  du  langage  au  sein  du  langage,  la  souffrance  de  sa  captivité  dans  les bornes langagières et la nécessité absolue d’en sortir :

«  je  ne  peux  plus  souffrir  /  ma  prison.  /  Je  dis  ceci  /  amèrement:  /  mots  qui m’étouffent,  /  laissez-moi,  /  lâchez-moi,  /  j’ai  soif  /  d’autre  chose  (…)  /  Je  hais cette vie d’instrument  /  je  cherche une  fêlure, /  ma fêlure,  /  pour  être brisé  »10.

Pour  parvenir  à  sortir  de  cette  cage,  il  s’agit  tout  d’abord  de  convenir,  comme Bataille,  que  le  «moi»  n’est  qu’une  fiction  langagière,  qu’une  belle  coquille vide.  Puis,  une  fois  comprise  et  acceptée  la  non  existence  du  «moi», l’exigence  du  non  savoir  nous  exhorte  à  briser  l’illusion  de  l’ego  pour  s’ouvrir absolument  au  monde  qui  nous  entoure.  Or,  cette  ouverture,  que  Bataille nomme  tour  à  tour  fêlure,  déchirure,  brisure,  ne  peut  être  catalysée  que  par l’atteinte  de  la  nudité  totale. « 

8 Autrement dit au jugement que l’existence n’a aucun sens : que le monde tel qu’il est ne devrait pas être et que le monde tel qu’il devrait être ne peut exister.
9 Voir F. Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra, Paris, Livre de Poche, 1972 : « Les mots et les sons ne sont-ils pas des arcs-en-ciel et des ponts illusoires entre ce qui est éternellement séparé ? ».
10 L’expérience intérieure, p. 71.

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