![]() toutes les photos sont de jules. prises le jour où nous avons fait le sapin de noël. au premier jour des vacances. maintenant, c’est fini, les vacances. |
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Étiquette : noël
un noël inoubliable
Cher Père Noël,
Si j’avais à vous demander Je crois que je vous demanderais « Pourquoi est-ce que tout de même CA NE VA PAS. »
C’est ce que je voudrais savoir. Pour le savoir, il me semble qu’il faudrait que je connaisse la nature de ce qui actuellement me satisfait suffisamment et malheureusement sans que j’en sache rien, de sorte que je ne change rien à ma vie qui cependant et donc ne me paraît pas être ce qu’elle devrait, ne m’apporte pas satisfaction, voire m’attriste.
De quoi jouis-je ? Quelle est l’inconsciente formule de mon jouir ? Disons, la formule principale ? Ou les formules principales ?
Intuitivement je dirais: y aurait-il éventuellement quelque chose à promouvoir, que je m’acharnerais peut-être à maintenir dans l’ombre et dont je serais secrètement et totalement honteuse et triste ?
Cher Père Noël, j’ai bien compris qu’il y a des choses qui sont plus fortes que vous et donc qui vous attristent (pas vous, moi). Je comprends ou je fais le pari qu’il faut les laisser être plus fortes que vous (je veux dire, moi), moi qui suis de toutes façons presque absolument sans force, sans presque absolument plus de forces.
Car, je m’en rends compte vous l’écrivant, je suis arrivée à cela, à dégager de ma vie tout ce qui fait obstacle à ce qui est plus fort que moi. Il ne reste donc plus dans ma vie que ce qui est plus fort que moi dont je ne sais rien et moi qui suis presque morte, j’aime à le dire.
Cher père Noël qui n’existe pas.
magie de Noël
Noël. Ca ne s’était pourtant pas trop mal passé. Jusqu’à ce que je craque, une fois la fête finie. Mais, avant ça, les préparatifs, tout ça. Les cadeaux. J’en ai même fait plus que d’habitude. Surtout à Frédéric. Des livres essentiellement. Et Jules avait tenu à faire le repas de Noël. Je l’ai secondé. Il avait également eu cette idée de faire un grand nettoyage de la maison, à la japonaise. Je l’ai secondé également. Dans les faits, il s’est moins agi de nettoyer que de faire du rangement. Tout de même, il a fait les poussières. Puis, comme se rapprochait l’échéance de la fête, il est devenu inquiet, très inquiet. À l’idée que ça puisse mal se passer. Il y avait eu trop de discussions à propos de la présence ou l’absence de son frère et de sa sœur. Je l’ai rassuré. Mais pas complètement. Sont venus Stan et son amie. Stan, fils de Frédéric. Pas Nina. C’était peut-être la source de l’inquiétude. Non. J’étais, moi, inquiète à ce propos. Et suis arrivée à combattre cette inquiétude. Jules après la fête était rassuré.
Magie de Noël, angoisse de Noël.
J’ai dit à Frédéric et Jules combien je tenais à Noël. Combien j’aimais tout de Noël. Comme on discutait de tout ça. Combien j’aimais tout ce qui brille alors et les cadeaux, les emballages et les rubans, les dorures, les décorations, les guirlandes, les lumières qui clignotent. Aussi, les verres en cristal les assiettes à liseré d’or les couverts en argent les nappes. Les mandarines. Les bougies, les anges.
Je n’ai pas parlé de la façon dont j’ai aimé autrefois tous les préparatifs avec ma tante. Auxquels j’ai tellement repensé cette année. Les préparatifs dans la grande maison, l’agitation. Les paroles à voix très haute. Ma tante, la seconder, l’aider. L’arbre de deux mètres de haut, la crèche et les bouquets à l’église.
Les cadeaux que j’apportais de Bruxelles, que j’avais achetés, emballés.
L’énorme soin toujours porté à l’emballage. Aux étiquettes de noms.
Je pourrais faire artiste d’emballage de cadeau. Les Japonais aussi aiment les emballages.
Pour moi, c’est le plus beau du cadeau.
Après on le déchire. Ou on essaie de ne pas. On déballe très lentement. Ma mère. Déballait très lentement. Soulevait précautionneusement le scotch pour ne pas abîmer le papier. Faire durer, préserver, agacer un peu l’entourage. Magie du déballage.
Je n’y mets plus autant de temps de cœur, aujourd’hui, ni d’angoisse. Un peu comme ça en toutes choses. Mais toujours, un peu. Joie de la main qui passe sur un pli bien fait.
Nous sommes arrivés à faire le sapin. J’ai commencé, Jules a continué. Avec les années, j’ai fait des progrès, pour ne plus souffrir de ça, la comparaison avec le passé. Beaucoup de progrès. Cette année l’arbre était de travers. C’est un peu douloureux. Tous les ans, j’essaie de ne pas en avoir. Jules a voulu. Moi, c’est trop d’angoisse. Mais, je maîtrise. De mieux en mieux. Cette année probablement la première fois que j’ai pu dire que j’aimais ça. Plutôt que d’être angoissée. Dire aussi combien c’était important les cadeaux. Important, angoissant. Tout ce que l’on met là-dedans. Et rien qui soit vraiment à la hauteur, finalement.
À propos de Noël, j’ai écrit à N : fête où l’on peut faire savoir aux autres combien on tient à eux. C’était très gentille lettre. À cause de ses silences. Elle viendra le 2 ou le 3, avec sa fille.
Souvent, il m’a été impossible d’acheter cadeaux. C’est devenu quelque chose de contre-nature. Je pensais en ces termes : réduite, condamnée à rien donner.
Pourtant, quand Noël arrive, l’envie se fait grande, pressante, de faire des cadeaux. J’en cherche. Je fais les magasins. Je préfère faire les magasins, plutôt qu’internet. Il me semble que ça demande ça, un cadeau, ça demande qu’on se déplace, qu’on y mette du sien, que ça coûte;. Mais dans les magasins, toujours, il y aura un moment où je doute, où je me mets à douter. Et où je vais remettre les cadeaux préalablement, et longuement, choisis dans les étalages. Alors tristesse, égarement. Les épaules très lourdes, les jambes. On se traîne, on est égaré.
Cela dit, d’une façon générale, aucun objet n’est facile à acquérir.
Ça n’a pas toujours été comme ça. A l’époque des grands Noëls chez ma grand-mère, je me souviens d’une année où le Bon Marché – de Bruxelles -, avait ouvert pour la période des fêtes une section indienne. De bric-à-brac indien (hindou). J’avais trouvé là des cadeaux pour tout le monde. J’étais enchantée moi-même. Et ça brillait comme il fallait, et ça n’était pas très cher, et j’avais volé tout l’argent que j’utilisais pour faire une quantité incroyable de cadeaux. La famille de ma mère est très grande. Mais, probablement je n’avais fait d’achats que pour mes trois cousins, mes deux frères, mes parents, ma grand-mère, quelques tantes. Titi. Plein de cadeaux. Tous amoureusement emballés. Étrange tout de même que mes parents ne m’aient jamais interrogée sur la façon dont je payais ces cadeaux, sur l’argent volé.
Les paillettes indiennes, les odeurs, les couleurs, les bois. Oui, j’avais peut-être même acheté l’un ou l’autre petit meuble.
Sans angoisse, contente, affairée.
J’étais à mon élément.
Je ne sais pas quand c’est devenu impossible de donner, quoi que ce soit.
Ni quel âge j’avais alors. Quinze ans peut-être. Seule dans les grands magasins.
Peut-être les difficultés pour donner me sont venues quand je me suis arrêtée de voler de l’argent à mes parents.
J’ai beaucoup volé, en fait beaucoup volé pour donner.
J’ai pensé Kleptomane.
Volé à ma mère sa bague de fiançailles pour la donner à une fille de la classe, à Renée Avial. Je crois que les parents de l’enfant l’avaient rendue à mes parents.
Je faisais leurs poches, à mes parents. Dans leurs manteaux au porte-manteau. Dans le portefeuille de ma mère.
Un jour j’ai écrit une lettre, un mot, où je leur promettais solennellement de ne plus voler. Je l’ai mise sous enveloppe, je la leur ai donnée. Et je n’ai plus volé.
Je n’ai plus acquis grand chose non plus.
Certainement je fais ici un raccourci.
La voix de ma tante
La voix de ma tante
Aujourd’hui, j’ai compris combien c’est ta voix qui me manque
Ce dont vois-tu je ne me doutais même pas
C’était tous les ans la même chose, à cette époque de l’année, de la grande fête
Je me trouvais soudain plus seule encore qu’à l’habitude
Des jours durant, agitée, abattue
Malgré moi plongée et replongée dans un passé
Dont l’éclat me revenait par bribes
Celui des papiers brillants
Surtout celui de ta voix riant
Qui s’élançait dans l’escalier traversait la maison envoyait ses ordres s’adressait aux uns et autres et lançait un maelstrom d’activités pour préparer la fête
Des jours et des jours durant, année après année, les mêmes gestes répétés
Et je pouvais te suivre, en silence, partout avec toi accomplir. J’avais ma place dans le monde. Il m’était demandé et je pouvais répondre et je riais aussi sous tes regards discrètement tendres
Est-ce qu’aujourd’hui encore dans l’amour j’attends cette voix sans peur qui prend si largement l’espace et me l’ouvre
On pourrait bien le croire quand l’angoisse referme sur moi son couvercle, à force de silences prolongés
Il est rude de ne plus t’entendre. Ma tante. Et depuis que j’ai compris cela, c’est moi qui donne de la voix, je la donne, tu vois, comme toi, vaillamment, je la lance, j’y mets comme toi autant de gaieté possible. Et je repense à toi.
C’est comme de retrouver jambes, corps, vie.
A cette époque de l’année.