se faire honte

jarrivenchantéelaveillej’ai
luterminédanslavoiture
la
note de miller sur la honte

(je ne dis pas que ce n’est pas pénible d’écrire tout ça, ça l’est)

à l’analyste mardi je dis :
« le problème, ça a toujours été de signer. comme si…»
là, j’hésite presque longuement.
je crois que je lui ai dit « …comme si rien n’était à la hauteur, ne pourrait être à la hauteur de ce nom».

surprise, pas convaincue, j’ajoute que non, ce n’est pas ça.

je parle de la note de miller, sur la honte. je n’en dis pas vraiment grand chose. mais ça me mène tout de même à dire que je crois que maintenant je pourrais signer de mon nom.
il se lève, se dirige vers la porte, me demande comment va mon fils. je lui dis qu’il dit « maman. mam… maman».

c’est comme ça.


souvenir de la note de miller

un jour lacan dit: « je veux vous faire honte» (certains s’en seraient scandalisés).

lisant, je me dis, est-ce que c’est ça que je me fais, quand j’écris, quand je me fais lire :
est-ce que je me fais honte ? est-ce que c’est ça ? et pourquoi ça serait bien, ça serait mieux, vaudrait mieux ? se faire honte, plutôt que pas.

lacan dit (moi, je dis toujours ce que dit lacan), ça ne sont pas ses mots, exacts, il dit
« … ça n’est pas si courant que ça mourir de honte ».

il lacan dit, « ça s’est perdu, la honte». est-ce qu’il dit que ça s’est perdu avec le capitalisme, je ne sais plus – pour le coup j’ai peur d’avoir mal retenu : passons.

la honte, l’honneur – ça s’est perdu.

tout cela qui vous vient de ce que vous êtes liés à un S1, explique miller. je lis un « S1 », je pense « nom du père ». je pense « nom de mon père ». je pense « mon nom».
le S1, le nom propre. c’est une lecture, il y en a d’autres. (un S1, pas un autre, d’aucun autre.)

s’est perdu. la honte, l’honneur. ce qui fait qu’il y a quelque chose dans le nom, votre nom, le nom propre, qui serait au-delà de vous. dont il faille se montrer digne. pour quoi, à l’occasion, on doive mourir. miller dit, dans le S1, c’est l’être-pour-la-mort.

pour tout vous dire, jusqu’à là, jusqu’à cette lecture, je pensais que le S1, il fallait le laisser tomber. que du S1 identificatoire, s’agissait de se désidentifier.

je crois que ce à quoi j’ai pensé, en séance, et que je n’ai pas dit, c’est « le nom, mon nom, ça n’existe pas. »

« ça n’existe pas », ça n’ex-siste pas, ça indique bien, jusqu’à quel point j’ai maintenu ça comme un réel : ça n’ex-siste pas au symbolique. c’est un nom, c’est un signifiant, mais mon « ça n’existe pas » indique bien qu’il n’est pas pour moi un signifiant comme les autres. il ne rentre pas dans la danse, le  commerce, je l’ai installé en position d’exception, dont aucune signification n’est digne – ce qui pourrait même valoir comme définition du phallus. « je le suis », ou plutôt « il m’est ». il me « m’êtrise ». et se faire « m’êtriser » par « l’être-pour-la-mort », ça explique peut-être certaines de mes tendances. la honte, encore, dit lacan quelque part, c’est affaire d’« hontologie ».

le nom, il ne s’agit pas de l’être. et pourtant de le porter.

ça me rappelle un texte de cet allemand, écrivain allemand, dont j’oublie le nom (toujours j’oublie les noms propres, les nom d’auteurs) qui disait « faites gaffe à porter la croix si vous ne voulez finir porté par elle ». je crois, en ce moment, que c’est de ça dont il s’agit, le nom, aussi pénible que ça soit, il faut le porter, tout en faisant gaffe à ne pas finir mourir en croix sur lui.

il n’est pas allemand, l’écrivain, c’est tournier, michel, et le bouquin c’est « le roi des aulnes ». (toute une histoire d’ailleurs où il n’est question que de porter. de la passion du portage.)

il faut le porter et il faut s’en montrer digne. mon nom, ça a toujours été le nom de mon père. je n’ai jamais pu le faire mien.

l’« hontologie », comme toute affaire d’être, c’est affaire de jouissance. donc miller dit, le S1, il faut s’en séparer bien sûr, le « désêtre », mais il ne faut pas ignorer qu’il est là, faire comme s’il n’y était pas. le S1, c’est le signifiant de ce qui vous est le plus intime, de la jouissance la plus inconnue.

et puis, pour les autres, pris parmi les autres, il redevient un signifiant quelconque (même si, à coup de savoir-faire, il leur imprime sa signature). donc, si je signe… un texte, il parlera de ce que je suis, de mes limites, erreurs, errements, etcétéra. à mes yeux, il tombe de son piédestal, la statue bascule. ce que je n’ai pas dit non plus, en séance, je ne sais pas pourquoi ce n’est pas sorti, mais c’était l’idée que si je signais, on saurait, on allait savoir qq chose de mon désir. comme si le désir, à tout prix, devait rester le plus secret. et moi aussi.

j’ai fait ces recherches sur la honte, à cause de celle qui m’envahit quand j’écris. plus précisément, quand je signe. quand j’écris mon nom. quand j’assume la paternité d’un texte.

Freud, Heidegger, notre histoire, par Jean-Luc Nancy

Point de vue

Freud, Heidegger, notre histoire, par Jean-Luc Nancy

LE MONDE | 03.11.05 | 12h57  •  Mis à jour le 03.11.05 | 12h57

Point de vue

Je lis le journal

TO BE OR | 04.11.05 | 12h57  •  Mis à jour le 06.11.05 | 13h09

 

Lorsque les houles médiatiques se calment, le temps vient de poser les questions sérieuses. Heidegger et Freud : pourquoi l’un et l’autre subissent-ils régulièrement le retour d’opérations de dénonciation et de démolition ? Que les pensées de notre héritage soient soumises à relecture, à discussion, à critique et à transformation, c’est la moindre des choses. C’est la vie et le travail de l’esprit, c’est sa praxis.

On peut supposer que JL Nancy se réfère, entre autres, au bouquin, torchon, récemment publié sur Freud, mais vaut-il la peine de le mentionner ici.

 

 

Mais, avec Heidegger et Freud, il s’agit d’autre chose, comme on le voit bien. On ne les discute pas, on les voue aux gémonies. On veut nous exorciser de leur présence pernicieuse. Le rectorat nazi de l’un et l’extraterritorialité de l’autre (ni proprement médecin, ni
psychologue, ni philosophe) sont des motifs très propres aux exécutions sommaires. D’un côté l’infamie politique, de l’autre l’irrespect du protocole positiviste suffisent à mettre en place un a priori de discrédit. A l’abri de ce discrédit, et sans plus d’examen ni de réflexion, on s’acharne sur eux.

« on les voue aux gémonies« , « on s’acharne sur eux« , oui, pas seulement sur Freud, sur Lacan aussi, et la sur psychanalyse dans son ensemble.

 

 

Qu’y a-t-il donc de commun entre Heidegger et Freud qui pourrait expliquer l’analogie de ces acharnements compulsifs ? Les deux cas sont entièrement différents, cela va de soi. Ils sont même aux antipodes l’un de l’autre si l’on
s’en tient au plus visible, au plus manifeste de leurs figures
respectives, tant politiques qu’intellectuelles. Il n’en existe pas
moins entre eux un point de contact, sinon de convergence.

Ce point consiste dans une perception qu’on ne peut dire commune, mais concomitante de l’interruption des visions ou des significations du monde. La question dite « de l’être » d’un côté, celle nommée de « l’inconscient » de l’autre ont une espèce d’asymptote commune : le « sens » n’est plus disponible, ni donné, ni constructible ou projetable, ni par déchiffrement ni par encodage du monde, ni par lutte ni par partage. Le « sens »– de l’homme, de l’histoire, de la culture – n’est plus en acte ni en puissance. Lorsque cette perception s’est
imposée à Freud comme à Heidegger, une continuité s’est interrompue.

Notre tradition a vu s’ouvrir ­ ou a ouvert elle-même ­ un fossé entre elle et son passé, même le plus récent, tout autant qu’entre elle et son avenir. Autour de la première guerre mondiale, et à travers, s’est jouée une déposition générale des représentations et des significations. S’est alors ouvert un suspens de sens ou de monde tel
que l’histoire occidentale n’en avait pas connu – depuis la fin de Rome – ou bien depuis la veille du premier monde grec.

Ca, c’est la partie qui éveille mon intérêt. Ce dont Lacan parle en termes de « disparition, dissolution du Nom-du-Père« . Ce qu’il m’a semblé rencontrer, entre autres, quand j’ai commencé d’écrire ici. Ce pourquoi j’en appelais à la coupure, la coupure alors comme Nom-du-Père, coupure,  interruption dans le flot des significations, le flot, le flux, le flou métonymique ai-je pu dire des significations, l’une ne venant plus que s’ajouter à l’autre, s’enfiler derrière l’autre, dans la présence toujours, est-ce que vous le sentez que je vous parle des blogs, de cette façon dont tous les jours on vient ajouter une petite pierre, et que malgré ces ajouts quotidiens, quelque chose de l’ordre de « l’étincelle du sens » n’apparaît pas. Dans la mesure où, comme le montre Lacan dans le Séminaire V, il n’y a que la métaphore qui opère ce qu’il appelle le « pas-de-sens », qui fasse le saut du sens, soit à l’origine d’un sens nouveau, qui fût à proprement parler créative.

Déjà, qu’il choisisse de parler de « pas-de-sens » pour dire le sens justement, on a le sentiment de rejoindre ce dont nous parle Jean-Luc Nancy ici, quelque chose qu’il m’est difficile de concevoir. Je le sens bien, que je m’essouffle à courir après le sens. Ce sens qu’il n’y aurait pas qu’il n’y aurait plus. Après lequel il n’y aurait plus de sens de courir? (Ce sens qui ne prend son sens que du non-sens même, mais c’est insupportable ce genre de phrase, à force. Ce non-sens auquel on voudrait échapper à tout prix.).

 

Si donc dans un premier temps Lacan aura délinéé la fonction du Nom-du-Père, il sera ensuite revenu sur elle pour promouvoir sa seule fonction d’usage : le Nom-du-Père  : s’en passer, s’en servir. Il fait retour sur le sens également, en dénonce la vacuité la vanité la « jouï-sens ». La chose se ramenant finalement à ça: rien n’échappe à la jouissance, rien qu’elle ne récupère. Et l’avancée de Miller, Jacques-Alain, selon moi, ça sera: si l’on n’y échappe pas, à cette jouissance, comment faire pour en pâtir moins, voire n’en pâtir plus, voire en jouir plus, puisqu’aussi bien elle reste le plus réel. L’éthique selon Lacan : connais ton désir, passe alors à : et penche-toi sur tes « modes de jouissance » (auxquels de toute façon tu ne saurais déroger : apprivoise-les).

Donc, la métaphore, elle qui arrête le sens : s’en servir, à la condition de pouvoir s’en passer. S’en servir, l’utiliser, en connaissance de cause, c’est-à-dire, sachant sa valence de « comme si », de semblant. Sans y croire. Mais elle reste nécessaire si l’on veut faire le moindre « pas », le moindre retour en arrière, retour sur l’arrière, retour sur l’écoulement. Si l’on veut faire autre chose qu’avancer (je pense : avancer à l’aveugle, avancer sourd et muet, avancer, à l’instar de la pulsion, sans queue ni tête, dans la seule propulsion).

Nous sommes toujours dans ce suspens. Pour le pire et pour le meilleur. Le meilleur est que nous sommes avertis des impasses ou des mensonges du « sens », de toute espèce d’accomplissement ou de promesse de sens. Le pire est que notre monde devient capable de n’importe quoi dans la
mesure où il n’a rien d’autre pour se comprendre lui-même que l’équivalence générale – c’est-à-dire l’argent – combinée avec les finalités autoreproductrices – c’est-à-dire la technique : en bref tout se vaut et rien ne mène à rien.

Cette question de l’équivalence générale, équivalence généralisée, tout vaut tout, rien ne vaut rien, depuis longtemps me rappelle le mathème de l’obsessionnel, où les objets ne sont justement ramenés considérés que dans cette équivalence, l’un pouvant sans problème remplacer l’autre. Toujours dans le Séminaire V, Lacan développe l’idée, la montre sur le graphe, que l’obsessonniel, au fond, ce à quoi il n’a pas accès, ce qui le fait tourner en rond dans la partie inférieure du graphe, au niveau des besoins, ceux-là qui peuvent être satisfaits, ne supporte pas la confrontation à l’Autre barré, à grand S de grand A barré. C’est parce qu’il ne supporte pas que le sens soit troué, et c’est ce que notre époque non plus ne supporte, – où il s’avère que c’est justement le trou dans l’Autre qui fera la valeur, la valeur autre, non-équivalente, ce trou de pas de sens -, que l’obsessionnel s’en tient obstinément à des objets interchangeables entre eux, des objets, dont la valeur sera accordée par leur prix, ces fameuses marchandises.

A l’obsessionnel donc la pute, c’est bien connu. Et à l’horizon, intouchable intouchée irréelle la dame, la mère vierge, la toute puissante, à laquelle il ne manque rien. Je dis ici que l’époque s’obsessionnalise.

A quoi les machines également contribuent, qui nous mènent à penser le monde, – ces écrits qui ont lieu ici, dont on nous bassine les oreilles, dont on s’esbaudit -, en termes que par facilité je me contenterai de qualifier de binaires : les machines, je parle de l’ordinateur,   nous donne à nous penser comme elles : doués d’une mémoire où tout s’écrit en 0 et en 1. Où les choses se deletent les bins se trashent et les mots de passe des programmes se crackent. Ordonnancement à tout crin tout va, où moi aussi je trouve à m’appareiller.

Freud et Heidegger ont eu de cette métamorphose une perception aiguë, bouleversée, sans concession.
Ils ont pensé le déplacement : pour l’un, du lieu et de l’enjeu du sens (« l’être ») ; pour l’autre, de son émetteur récepteur (« l’inconscient »). Ni « l’être » ni « l’inconscient » ne sont de nouveaux objets dont l’effectivité serait à vérifier. Ce sont des noms – provisoires, même douteux – qui auront été mis au travail pour nous faire penser la mutation du monde.

   

Les limites et les fourvoiements de l’un et de
l’autre penseur – la tentation de la régénération pour l’un, celle de la scientificité pour l’autre, et, pour les deux, celle d’une efficience– étaient inhérentes aux conditions que leur faisait leur temps, et que presque tous partageaient alors, y compris, bien entendu, les « révolutionnaires ». Depuis ce temps – bientôt un siècle – , leurs pensées ont d’elles-mêmes engendré le travail de leur propre dépassement, critique, déconstruction. Nous n’avons pas fini de comprendre ni l’irruption de ces pensées ni leurs insuffisances et leurs risques, car nous n’en avons pas fini avec la transformation du monde. Et nous n’en finirons pas nous-mêmes, ni nos enfants. Mais nous devons d’autant plus, en toutes nos pensées, penser aussi cela : qu’une mutation est en cours pour laquelle, par définition, nulle forme n’est donnée, ni « nature » ni « histoire », ni « homme » ni « Dieu », ni « machine » ni « vivant ». Les énervés crient au nihilisme : ce qu’ils nomment ainsi porte en réalité le savoir et la responsabilité de ce fait que rien ne nous est donné, sinon d’ouvrir les yeux et de tendre l’oreille.

Rien ne nous est plus donné… Peut-être. Je suis souvent dans un incroyable sentiment de recevoir. Un recevoir dans le voir, oui, dans l’entendre, oui, un voir un entendre ce qui au voir et à l’entendre justement manque, et qui n’est pas monnayable.

 

Ils n’ont en vérité qu’un souci : ignorer notre condition présente et renouer avec le temps où conceptions, représentations et valeurs étaient disponibles. Le sachant ou non, ils se comportent comme s’ils étaient en mesure de savoir à quoi Heidegger et Freud ont dérogé et qu’ils n’auraient jamais dû méconnaître.

   

Sans doute eût-il été préférable que la pensée de l’être et celle de l’inconscient se gardent plus pures et plus assurées, plus décentes et plus secourables aussi. Mais penser ainsi revient à croire que l’histoire aurait pu s’arranger autrement. De même certains Français du XIXe siècle auraient voulu que le gaulois fût reconnu comme langue première de l’homme. C’est de la même inspiration : celle d’un déni de l’histoire et de la vérité.

 

 

Jean-Luc Nancy est philosophe.


Véronique M.

par Jean-Luc Nancy
Article paru dans l’édition du 04.11.05
par Véronique M.
Blog mis en ligne le 06.11.05

terrors of tinseltown

{

à  quoi je tends ce que je cherche
avec ces histoires de méta
(phores)
méto(nymies)
je ne __
je n’en.

seulement que ces métaphores métonymies
et ce que j’en ai lu
essentiellement ce que j’en ai lu
– d’ailleurs

ce qu’à  propos d’elles, méta_ méto_, j’ai (lu)
se trouve s’appliquer
à  ce que je
vis
observe. (la ville.)

le sens celui qui était servi par le nom-du-père,
et de façon univoque,
le mal est le mal le bien est le bien,
son déclin quant à moi je le situe, je ne trouve
à le situer qu’à  ce moment de l’histoire où dieu meurt.

à  quoi il a mis du temps.

dont la relève fut prise par les règles scientifiques.

comme il commençait son agonie,
faisons-la remonter au 17è s.,
le sujet, lui, naissait

( je pense : donc je suis).

let me tell you about the breath of vinyl. alors ne pointons pas trop vite
du doigt l’individualisme. puisque si vite,
au fur et à  mesure qu’il s’est individualisé, le sujet,

il perdait

la parole

qu’il ne sera resté que
sur le point de prendre,

s’inféodait-il à  la canaille,
ces nouveaux maîtres, qu’il convient d’appeler
par leur nom: capitalistes,
dont la science, en reine, mère, s’est fait la pute.

baby, are you paranoid, lost in the void. are you afraid of yourself. and everyone else. are you afraid to die. are you afraid to get hurt. so what makes you cry. are paranoid, lost in the void. or just destroyed. are you afraid of me. and the things that i said. are you afraid to say something case i walked away. i you afraid of truth. inside of your soul. are you paranoid. or just destroyed.
aucune parole qui (n’) échappe au sexe. qui puisse y échapper. vous les voyez parler à la télé cela vous suffit ils ne parlent pas ils ânonnent
les leçons bien apprises qu’ils vous apprennent à  leur tour maintenant que l’homme est seul à  savoir à  ce qu’il doit faire, il faut bien qu’il se l’entende dire. déclin du nom-du-père, déclin de l’autorité. liberté. liberté. pourvu que nous ignorions que nous logeons l’horreur.
ils ne parlent pas ils ânonnent ils servent
la nouvelle loi, celle qui ne mérite même plus ce nom, humain, de loi, elle qui fut le désir même, qui comprend cela pourquoi antigone est descendu vivante au tombeau, les lois non écrites, l’usage, la coutume, nulle part écrites, mais sur lesquelles on s’accordait, celles du bon sens, qui n’écoutaient que la vie, cela qui de la vie ne rentrait pas dans les petites cases, échappait au décret, restait inévaluable. échappait aux rapports, médicaux ou autres, échappait à  l’image. la loi du capitalisme aussi est virtuelle : elle exclut ce qui du corps échappe à  la science. elle exclut la parole quand celle-ci prend le risque du lapsus. elle réduit le désir au besoin en en préservant la capacité d’insatisfaction. elle coince la jouissance dans la satisfaction de la pulsion. elle éjecte la mort, elle éjecte la filiation, elle éjecte ce qui du sexe n’appartient pas au fantasme masculin, ne se laisse pas cadrer, ne va pas sans dire. tandis que dans l’oubli du temps, faire l’amour c’était le dire.
young flesh city got beautiful skin ne parlent pas, ce sont des images. ce sont des fantômes. ce sont des monstres.
i was the son of a black and white dream. in a technical world. i was a hollywood child.
où tout cela s’aperçoit le mieux, se conçoit le mieux, c’est dans les peintures de la renaissance flamande, avant donc le 17è, c’est l’annonce. c’est l’arrivée des commerçants. c’est l’arrivée des petites gens. c’est l’arrivée des pommes. c’est l’arrivée des natures mortes. des petites fleurs, des plats de poissons. le libéralisme, dieu s’éloigne, l’auteur vient au monde, regardez dürer, son autoportrait. dieu s’éloigne, tout va se mettre à compter. ça se voit plus vite dans la peinture flamande, parce qu’il n’étaient pas catholiques, qu’ils étaient moins idéalistes et que leurs contours géographiques, et politiques, étaient plus labiles. on sort de la grande fable. on sort de la croyance. rien, plus rien qui ne mérite d’être interrogé, observé. on est très vite très loin de la scène de la cita idéale, de ses vastes places vides. de la scène de la mise en scène. vous allez bientôt voir les choses déborder du cadre. dites choses, pensez métonymie. pensez petit a. c’est comme naît la bourgeoisie petite-capitalisante que l’objet va prendre le devant de la scène. objet à  quoi le sujet qui commençait à  peine de s’énoncer va aller à  s’identifier. we only live our live on the super screen. ce n’est pas l’individualisme, le coupable. le coupable c’est ce qui a éjecté ce que les mystères religieux occultaient, mais qui avait le mérite de faire exister cela même qu’il interdisait, le péché, comment ça cloche entre les hommes et les femmes. tous les jours, aujourd’hui la pomme est bouffée avec de la sauce à zéro pourcent de calorie.
we’re turning round and round in the terrors of tinseltown et c’est à  force de ce tout,
où les objets seulement s’additionnent,
s’enfilent,
que l’unité sémantique que formait la phrase a éclaté,
s’est dissoute.
que la phrase est passée au slogan.
que les majuscules se sont perdues.
et c’est à  force de ce tout,
que le rien s’est échappé.
quand le rien est perdu il ne reste plus qu’à s’y identifier. n’allez pas croire que nous en soyons tous à  nous la péter.
plus haut que notre cul.
ils sont nombreux ceux qui se dégoûtent tristes
broken dreams are blown away un corps ne se résume pas

à  ce que la science peut en dire

quels que soient ceux qui survivent

en salle de soins intensifs.

are you paranoid.

what are doing i a m talking to you
derrière la métonymie il y a l’objet (la valeur). il n’y a pas de métaphore sans métonymie préalable. derrière dessous la métaphore, il y a le sujet (inconnu). sujet qui n’est rien d’autre qu’une place, place qu’il n’a rien d’autre qu’à  prendre. et la prendre, c’est prendre la parole. aller contre le discours courant, disque courcourant. the world has changed. we saw it all on tv. the world has changed. all our dreams have been rearranged. the world has changed. very strange.dream factoryje suis triste aujourd’hui.

de l’autoroute (Lagandré vs Lacan, du nom-du-père à l’usage)

Ils se consacrent à l’aménagement d’une existence confortable, affranchie du besoin de sens, et à laquelle suffit amplement la perspective d’une prolongation indéfinie.1

[…] s’annonce un « monde » commode à tout point de vue, ajusté sans médiation aux usages humains et réduit de force à ces seuls usages : un monde sans arrière-fond, sans possibilités secrètes, pas même orienté vers un mieux, visant sa seule perpétuation.2

[…] le monde ne fait plus question, son fait mystérieux ne les concerne plus. L’heure est à son aménagement, à sa rationalisation pour l’usage des hommes.3

Lire, se demander ce qu’il en est de cet « usage » ?

Pour s’ en expliquer, Cédric Lagandré se réfère à l’autoroute. L’autoroute, explique-t-il, est à usage unique. Elle sert à passer d’un endroit à un autre aussi vite que possible.  Point barre. Une route de campagne, elle, offre bien d’autres possibilités. Sa consommation ne s’achève pas du seul fait de son parcours, il y a du reste :

L’exemple de l’autoroute fait apercevoir la chose d’un coup d’œil : l’autoroute n’est pas une chose, mais une fonction. Elle n’existe pas indépendamment de cette fonction. Et celui qui l’emprunte ne fait nullement une expérience du monde : une fois sur l’autoroute, il est pour ainsi dire déjà arrivé. Au-delà de cette puissance qu’elle actualise toujours, être parcourue, l’autoroute ne peut plus rien. Aucune virtualité ne se cache en elle. Elle est d’ores et déjà allée au bout de ses possibilités, qui s’incarnent dans sa fonction. Une route de campagne, pour faire la comparaison, en plus d’autoriser le parcours, autorise aussi le détour et le détournement, c’est-à-dire la « défonctionnalisation » : je peux m’y arrêter, par exemple, et son parcours m’insinue dans les plis du monde qui se découvre à mesure. Je ne peux actualiser toutes ses puissances en un seul usage: si je la parcours en auto, me manque l’expérience de son parcours à pied. Je ne l’ai donc pas « consommée ». Son identité à elle-même est complexe et jamais entièrement dépliée : son être-autre hante encore toutes ses actualisations.4

Lacan, je m’en souviens, parlait lui de la grand’route du Nom-du-Père ((  Les psychoses, chap. XXIII « La grand’route et le signifiant ‘être père' », p. 326 )), de la grand’route comme métaphore de ce signifiant qui manque dans la psychose, qui polarise, accroche les significations.

Est-ce qu’il y aurait par hasard le moindre rapport dans l’utilisation de l’autoroute comme métaphore chez l’un de l’usage, chez l’autre du signifiant « être père« ? On pressent qu’une sorte d’inversion, de retournement y est à l’œuvre.

Au contraire de Lagandré, Lacan refuse de voir la grand-route réduite justement à son seul usage :  « Vous pouvez avoir le sentiment qu’il y a là une métaphore banale, que la grand-route n’est qu’un moyen d’aller d’un point à un autre. Erreur. »  Pour Lacan, elle est ouvreuse d’un champ, d’un espace :  « La grand-route, dit-il, n’est pas quelque chose qui s’étend d’un point à un autre, c’est une dimension développée dans l’espace, la présentification d’une réalité originale. »

Lagandré

Autoroute
métaphore de l’usage

Jouissance Une

Usage (jouissance) unique –> Un (jetable) –> consommation sans reste/consommation du reste

Lacan

Grand-route
métaphore du signifiant « être père« 

Nom-du-père

Signifiant du désir,
désir en son fond impossible, non-consommé,  et
qui crée le reste,
reste qui se fait alors relance du désir.

C’est devenu un lieu commun que de dire que le monde contemporain a vu la  dissolution du nom-du-père (unique), de la fonction paternelle (exception), de la démultiplication des noms-du-père (comme autant de noms-du-pire) et  que le langage ne troue plus seulement le psychotique, mais  que « tout le monde est fou« , tout le monde vit sur le bord du trou. Aussi le hasard qui a voulu que Lagandré prenne l’autoroute comme métaphore de l’usage, quand Lacan l’avait prise comme métaphore du Nom-du-Père, trouve-t-il à s’en expliquer d’une façon qui n’est pas totalement, elle, due au hasard.

Et l’on s’aperçoit qu’il s’agit avec l’usage, dans l’acception de Lagandré, de la consommation, de la jouissance d’un reste du Nom-du-Père de Lacan – ce signifiant qui rendait possible la signification – séparé de toute signification, absolument insignifiant, dont seule la marque est restée, marque qui en fait la jouissance. Qu’en dire de cette marque ? Sinon qu’elle répondrait de ce que le langage a marqué le corps, l’a marqué hors sens,  y a fait trace, empreinte vide dont on ne sait rien. L’esprit a entendu les mots,  le corps a « entendu » également, mais autrement. Il l’a marqué de cette façon dont on ne peut aujourd’hui, à la suite de Lacan et de Miller, rien dire d’autre sinon qu’elle est jouissance. Qu’elle est ce à quoi il faut retourner, retourner malgré soi et dont le  corps est le support.

Du signifiant du désir, n’est resté que la jouissance, celle-là même qui manquait au signifiant, au nom-du-père et dont le manque relançait le désir. Cette jouissance est l’usage que désigne Lagandré.

Autrefois – dira-t-on, dans le monde ancien… – l’autoroute pouvait représenter l’ouverture d’un  champ de significations possibles, virtuelles, d’un réseau dont elle est la clé, sans laquelle il se dissout, aujourd’hui que ces significations n’existent plus, l’autoroute est devenue fermeture, enfermement dans un usage autiste, délié du sens, réduit à sa seule marque. On parle de marque parce qu’il s’agit d’indice de la rencontre du corps et du signifiant. Hors sens, cette marque, est jouissance. Hors sens, cette marque est remembrance, se souvient, répète la première rencontre du réel du corps et du signifiant, de la séparation du corps réel d’avec lui-même par le signifiant, sa refente. (Dans cette refente le sujet naît qui pourrait prendre la parole quand le silence aujourd’hui lui parle mieux que jamais. Or il y a, toutes les nouvelles formes de l’écriture, port aujourd’hui pour l’angoisse, lieu d’une liberté neuve caressée par l’image. Et silencieuse encore.)

Évidemment, j’élide malheureusement une bonne part de ce que CL cerne dans ses remarques sur l’usage. Il faudra que j’y retourne. De même, il me faudrait probablement retourner à cet espace que dit Lacan, qu’ouvre l’autoroute.

[ En cours : 14 janvier 2013 – 30 mars 2013 ]

Notes:
  1.  Cédric Lagandré, La plaine des asphodèles,  p.10. []
  2. Ibid., p.11 []
  3. Ibid., p. 15. []
  4. Ibid., p. 23. []
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