la valise

22 décembre 2019 | décembre 2019 | brouillonne de vie | , , |

Tâche : recopier ici tout ce que j’ai pu écrire autour des valises, principalement des rêves.
Toute cette angoisse, ce type d’angoisse-là, la résumer, la chapeauter de ce seul terme : valise.
Écrire : l’avalise. Ou : l’avalyse.

Peut-être écrire à propos du train du livre d’Hélène Bonnaud récemment lu. Le corps, le meuble, le train. Non, ce n’est pas ça qu’elle disait, dont elle parlait, dans son livre, comment s’appelle-t-il, sur l’oubli, non sur l’attente. Monologues de l’attente.

Qui se passe dans des salles d’attentes de psy. Le train des pensées dans les salles d’attente de psy. Dans les gares aussi il y avait des salles d’attente, autrefois. Aujourd’hui, ce sont des halls. Transformés en espaces commerciaux. Plus de place pour l’attente nue.

Elle se souvient, Hélène Bonnaud, non pas elle, son personnage, l’un de ses personnages, dans une salle d’attente, d’une réflexion de Lacan sur les corps comme des meubles. Des meubles dans des trains, si je me souviens bien, dans des wagons, quelque chose qui évoque les trains de la mort, les trains des camps de la mort. Elle note ça, Bonnaud, comment cette phrase de Lacan évoque les camps. Enfin, ce n’est pas elle qui dit ça, mais son personnage. Et elle dit : heureusement que les corps c’est comme des meubles, sinon c’est trop de vie, sinon, c’est la peur. Ce qui est très curieux comme réflexion pour moi. Entassés dans des wagons, pour elle, les corps ne sont plus que corps, trop corps, trop en vie, trop en peur. Enfin, elle dit plus ou moins : vie =corps=peur. Ou corps=peur=vie. Et quand elle rentre dans le cabinet de celui qu’elle a choisi comme nouvel analyste, elle dit : il sera mon anti-corps. Alors, on lui souhaite quand même, qu’au contraire il lui fasse connaître un autre corps, un corps en vie qui soit de bienfaits, non de peur.

Aussi, elle a cette expression : je me trimballe mon corps. Train-balle.
Moi, je ne me train-balle pas mon corps. Mais je ne supporte pas qu’il le soit, train-ballé.
Quand les vacances arrivent, du déplacement, ce qui m’insupporte, c’est l’impression de le subir. Quelque chose se « métaphorise réellement » d’un insupportable, que je n’arrive pas à cerner.
Et qui résonne avec ce dont il est question dans ce livre, les camps, la mort. L’attente sur les quais. La valise.

La valise posée au sol. Soulevée. Transportée, changée de main. D’une main à l’autre. Lourde, trop lourde. Aujourd’hui, la valise à roulette, tirée. Étiquetée ou pas, qui devrait l’être. Qui pourrait être volée. Égarée, oubliée, perdue. À laquelle de nombreux objets pourraient manquer. As-tu bien fait tes valises. N’as-tu rien oublié ? Que ne contient-elle pas ? La soute à bagage, le compartiment à valise. Le temps de suspens du voyage. Les bagages.
Ce qui se métaphorise ? Quoi, de soi ? De sa vie ? De son être ? De son corps ? Du suspens? Oh temps suspens ton vol. Du déplacement ? De la vacance ? Vacance à soi ? Arrachement à sa quotidienneté ?
Voyager léger. On voudrait voyager léger. Se voit-on rappelé à son propre poids ? Rappelé à ses propres manques ? Oubli ?
Qu’est-ce qui se dé-fixe ?
S’agit il de souvenirs de vacances enfantines où l’on était subitement transporté ailleurs, dans l’inconnu, l’étranger.
Si c’est cela, précisément, qui m’insupporte, comment, à l’âge que j’ai, ne puis-je le surmonter ?
Transport dans l’inconnu. L’étranger.
Cet étranger, que métaphorise-t-il ?
Oui, mais quand on sait où on va, très bien, quand c’est un lieu où on ne cesse de retourner, pourquoi faut-il que l’angoisse subsiste ?

Qu’est-ce qui veut continuer à se réitérer. S’itérer à nouveau : une nouvelle fois avoir lieu comme si ça n’avait jamais eu lieu, à chaque fois neuf. Itération de l’oubli, de l’oubli de soi.
Alors l’étranger, le transport en wagon, comme un nom de la perte de soi, de grand oubli, de jouissance.
Jouissance, absence, d’autant plus grande si le train est train de la mort.
Tous les trains sont-ils (devenus) de la mort ?
(Une situation de la réalité recoupe quelque chose d’autre écrit à l’intérieur, quelque chose qui appartient au vocabulaire de l »inconscient. Tous les trains pour la mort. Pour toujours et à jamais. Toutes les valises ce qui s’ emporte en ces contrées. Comme disait mon père (sur son lit de mort), Tous juifs. Pardon à eux. De m’être emparée de leur malheur. Je ne l’ai pas choisi. C’est lui qui m’a prise. Et les étoiles sont jaunes de la nativité.)
Légende. Nos légendes.

La jouissance est un arrachement. Dès qu’il y a valise, y a arrachement. Ça s’arrache de ce qui fait l’ordinaire substantifique moëlle : les pensées quotidiennes. La jouissance est une séparation. La séparation veut la plus grande séparation.
En tai chi, j’apprends à m’arracher doucement. J’apprends le détachement lent.

mardi 28.9

28 septembre 2021 | septembre 2021 | brouillonne de vie | , , |

Hier, j’ai fermé le blog.

Après-midi Paris, après matinée parc chi
avec Alain Re
qui m’avait in
S’agissant du fait que je n’ai plus en
que je n’ai plus en vie
de voir l’analyste, eu
l’idée que

Je vais mal. Hier, j’ai fermé le blog.

S’agissant de cet été, du fait que je n’aie plus en vie
de
plus envie
de
voir l’analyste, dont je n’ai même plus
en
de citer le nom, eu l’idée que

Quelle idée

Cet été

Que cela était lié aussi aux
vacances.
Puisqu’également a
rrêté
faire tai. Cela qui probablement tous ans se ré
pète et qu’oublie j’ensuite, ridiculement. Je ne supporte pas l’ar
rêt des cours, de l’analyse. Et je combats, préviens ce

cette perte, en décidant d’a
rrêter

d’a
rrêter l’été

Cette année,

j’ai très tranquillement rrêté le tai chi. Et aussi tranquillement rrêté l’analyse d’ailleurs. Décidé d’a

A la rentrée, j’ai cependant fini par me réinscrire à un cours de tai, puis deux. Et j’ai revu l’analyste, une, puis deux.

Le problème avec l’a était cependant ré, ce serait posé indépendamment des cances, me suis a dressée, de ma plus belle
plume, à un autre a. Qui ne m’a pas ré, d’où, nant, jetzt, déprime forte.

Je ne sais quels mots mettre sur cette déprime.

Il est dû aussi à ce que ça m’enrage de voir E. jouer à des jeux vidéos toute la journée…


Samedi 28 janvier
— l'inhibition due à un simili travail de deuil // ce qui tient à l'ombre, tient à l'ombre avec force

28 janvier 2023 | janvier 2023 | brouillonne de vie | , , , , , , , , , |

samedi 28 janvier 2023
9:25 Hier, 3 gouttes + hhc (trop fort)

Dans le noir de la chambre
Étranges pensées cette nuit. Et sentiment de corps délocalisé. Je ne m’en suis pas rendue compte tout de suite, seulement quand j’ai décidé de m’éloigner de mes pensées en me concentrant sur corps. Mon corps n’était pas là où je m’attendais qu’il soit. Je voulais faire l’exercice de relaxation « lourd », lequel consiste à penser « lourd » et à envoyer cette pensée dans le corps, dans chacune de de ses parties, une à une, en essayant de n’en oublier aucune, en le remontant par exemple, depuis les pieds jusqu’à la tête –  orteils, pieds, mollets, genoux, cuisses, etc. Et là, je me suis rendue compte qu’il me fallait chercher chacune de ces parties. Déjà, ayant commencé par « fesses », la sensation s’est avérée très étrange. ample, creuse, étendue, profonde, comme emplie d’un liquide foncé. L’exercice que je tentais de faire était probablement utile,  par rapport aux pensées, mais cela ressemblait déjà à un état de relaxation avancé. Je me suis alors  concentrée sur les parties du corps qui touchaient le matelas. Mais, lorsque j’ai voulu trouver le dessus du corps, les parties du dessus,  je ne le trouvais pas, ça ne correspondait pas. Le dessus de la cuisse n’était pas en face du dessous. Et c’est sans parler de ce en quoi aurait pu consister l’intérieur. J’ai continué cependant. En me raccrochant au tantien, le centre du corps, que je sentais précisément. J’essayais soit de retrouver sensation « normale », soit de me laisser aller dans la sensation anormale.

Je suis alors allée vers des pensées assez raisonnables, il me semble.
Je pensais à la solitude, et je me demandais ce que je pouvais y faire. Sans trouver.
Je me demandais comment sortir de mon fauteuil (du coin de fauteuil où je passe mes journées).
J’avais eu des pensées inquiétantes quant à l’avenir et à la pension, puisque c’est d’actualité en ce moment, et au fait que je pourrais me retrouver seule et sans argent et à la rue. (En temps normal, je ne peux penser qu’au suicide comme recours, au suicide in due time.)
Je pensais à ce qu’il m’est impossible de faire, tout ce qu’il m’est impossible de faire.
Je pensais à ce qu’il m’est impossible de faire parce que j’attendrais de ma mère qu’elle le fasse pour moi (le maintien nécessaire de cette dépendance) et l’angoisse qui me prend dès que je prends son rôle. Et la peur de rater.
Cette relation de dépendance est (au fond) désangoissante pour moi.
Sortir de ce rôle, de ce schéma, c’est l’angoisse absolue.
Il arrive pourtant que j’y arrive.
Mais c’est peut-être plutôt quand F n’est pas là.
Comme lorsqu’il était à la clinique.

l’inhibition due à un simili travail de deuil

Dans le deuil, nous trouvions que l’inhibition et l’absence d’intérêt étaient complètement expliquées par le travail du deuil qui absorbe le moi. La perte inconnue qui se produit dans la mélancolie aura pour conséquence un travail intérieur semblable, et sera, de ce fait, responsable de l’inhibition de la mélancolie. La seule différence, c’est que l’inhibition du mélancolique nous fait l’impression d’une énigme, parce que nous ne pouvons pas voir ce qui absorbe si complètement les malades.

Sigmund Freud, Deuil et mélancolie

Je pensais à l’inhibition, à ce que j’avais lu hier dans Freud sur la nature inconnue de ce qui mobilise tellement le mélancolique dans son « travail de deuil », travail qui évoque la façon que j’ai de me consacrer à ma maladie, d’une certaine façon. Je me consacre à quelque chose, mais à quoi ? Qui paraît vital. Et dès que je m’éloigne de cet effort, de construction peut-être, comme lors des vacances, des voyages, l’angoisse me prend (m’avale). La certitude est que je ne dois pas me relâcher, que je dois me maintenir dans un effort, d’analyse, et ce que je fais en ce moment en écrivant le matin, ou plus récemment dans le blog, ce que j’aurais fait si j’avais été artiste, évoque ce travail de deuil. Être artiste m’aurait offert une identité, et cette identité est inacceptable (apparemment, inacceptable, quelque chose en moi n’en veut pas, contre quoi je sans recours).
Il s’agirait de trouver son identité à l’intérieur de cette  identité manquante, absente, de trouver son identité dans cet effort là. Et dès que je sors de cette quête, angoisse. De trouver son identité dans cette quête : ce que je fais, mais pour moi seule, une identité sans reconnaissance, secrète.

En quoi consiste cette identité absente : en l’impossibilité d’accoler mon nom à tout le reste de moi, de ma personne (corps, voix, etc.) et à tout cet effort, d’assumer en mon nom cet effort, ce travail, qui est travail de soute, de souterrain, je suis souterraine. Qui est travail de soute et doit le rester. Je suis rate. Travailleuse de l’ombre, rate. Rat au féminin. L’affamera. La femme rat. C’est en cet effort que consiste mon identité. My true identity. 

(Imaginaire.
Je suis, comme mélancolique, censée être en manque de consistance/d’identité imaginaire. Mais je ne comprends pas ce que ça veut dire, enfin je comprends que chez moi quelque chose tente de faire tenir ensemble le réel et le symbolique, sans la possibilité du recours à l’imaginaire (qui offrirait la structure, la structure en 3D). Ce blog, de par son épaisseur, sa monstruosité même, m’offre un semblant de structure imaginaire, avec ses couloirs, ses détours, sa toute écriture, sa partout écriture, mais illisible, sinon pour moi seule).  L’identité manquante, ce que j’ai  à forger pour y pallier, c’est de ce côté là que ça se trouve. Autre exemple : le tai chi m’a fourni un moment corps imaginaire par sa façon d’aller toucher directement le corps, d’y tracer par la sensation des circuits symboliques (circuits remontant à des temps immémoriaux) et de le recréer « littéralement », de le recréer en 3D, et en ne le limitant pas au sac de la peau, en incluant, à l’envi, la possibilité de l’infini, et de lui prêter une conscience, aussi, une conscience-à-soi, et de le donner comme source de bonheur, de plaisir.)

Mais quel rapport avec ma mère? Et l’identité trouvée dans ma dépendance à elle?
Cette identité la maintient à distance, nous met dans un rapport. Qui vaut mieux que l’absence de rapport, que l’identité, l’identique, le même.
Donc, il y aurait le travail de maintenir cette dépendance, afin de n’être pas engloutie par l’identité à elle, l’être elle, qui serait un trou. Puisque la dépendance nous donne un rôle à elle et à moi.
Tout en cherchant à trouver une identité viable qui me permette de sortir de son sillage.

Or ma  mère prit en charge tout ce qui concerne le nécessaire, le besoin, le réel en deçà de sa sublimation ou de son idéal. C’est une tentation une tentative de le dire. Elle a dédié le sublime à mon père et a pris en charge tout son deçà. D’où ma tentation de restituer ou d’apporter à cet en-deçà sa lettre sublimatoire, sa place du côté de l’idéal. De sorte que je puisse à mon tour l’assumer, tout en me distinguant d’elle. (Non pas y chercher l’indigne (mais l’insigne)). Ce que je fais, je veux faire, l’histoire de l’art, l’histoire tout court, l’a pourtant fait, déjà, avant moi. Mais il semble bien, que ce soit toujours à refaire. Qu’il y aura toujours de l’un peu plus sublime pour faire de l’ombre à ce qui ne vit que de cette ombre faite. Et dans cet effort, j’y perds beaucoup. Dans ce combat avec moi-même. Car ce qui tient, à l’ombre, tient à l’ombre, avec force. Et je pense que c’est cette force-là qui me précipite dans l’oubli des événements aussi bien que des mots. C’est une force anti-idéal. Une forte force. Or, là même, en cet instant-même, elle ne s’énerve pas, elle me laisse l’écrire. Jusqu’à un certain point, elle se laisse passer à la métaphore. Tout va bien tant que je ne parle que pour moi. (Quel rapprochement possible avec la féminité et le féminisme (et le Japon, et la Chine, et les arts martiaux)? ) 

J’élucubre ça maintenant. Et cette nuit, par rapport au fait que je ne pouvais pas être ma mère et donc faire ce qu’elle faisait, et par rapport au fait que ce qu’elle avait fait dans une sorte de sentiment de service à l’autre, de sacrifice, et dans un mépris intégral de sa propre personne, il y avait l’idée que je pouvais en sortir, peut-être, puisque telle se dessine ma volonté, en poursuivant et consacrant ce travail de restitution de valeur et de dignité aux tâches à raz du réel auxquelles elle se consacrait. C’est-à-dire de consacrer la grandeur de ces tâches. Et donc abandonner l’idée de désidentification d’une mère, pour se maintenir uniquement à la hauteur du réel. Je vois bien qu’il faudrait pouvoir préciser davantage, mais pas pour le moment. Choisir le raz du réel, s’y tenir, c’est n’avoir pas d’autre choix, c’est choisir d’attribuer une valeur à ce réel. 

Faut-il qu’il y ait (encore) de la grandeur ? Qu’il n’y ait plus la jouissance de l’indigne (au moins, à tout le moins). Et puis, pouvoir survivre (à tout le moins).

Et ce sacrifice de ma mère, curieusement, paradoxalement, me dégoute à un point, m’angoisse à un point, que j’en suis définitivement préservée – me semble-t-il. N’être pas elle. Malgré que je sois poursuivie par la culpabilité de ne pas le faire, ce sacrifice. Et malgré qu’il trouve d’autres guises, ce sacrifice, pour se faufiler, s’incarner dans ma vie. (Même s’il m’est de plus en plus difficile d’imposer un choix à moi, comme par exemple choisir un film, mais c’est, me semble-t-il, je l’espère, superficiel, et c’est pourquoi j’ai tellement besoin d’être seule.) Par ailleurs, je sais, je sens bien, que tout cela pourrait trouver encore à s’inscrire dans une histoire féministe. Or, il me semble que pour le coup j’y sacrifierais quelque chose de ce que je tente d’écrire ici. (Pour moi ce qui s’impose, de se conformer à un rôle, à un rôle dans la soumission, dans l’effacement, ne tient pas, ne peut tenir uniquement au patriarcat, à moins que je ne méconnaisse complètement la nature de ce patriarcat. Pour ce qui est de ma mère : elle a été angoissée, mais elle a été heureuse, vraiment, elle n’a jamais cessé de nous aimer, elle nous a toujours aimés, nous, ses enfants, son mari.)

J’ai déjà écrit ça.
J’ai déjà trouvé cette solution.
L’idée, cette nuit, était de trouver à me dégager de l’angoisse où me plonge n’importe quel faire.
Je n’ai de solution que par ce que j’appelle le réel. De toutes façons. Je n’ai que le raz du réel. C’est-à-dire chercher à faire le ménage dans la nudité du geste, dans l’oubli du passé, et dans une volonté de consacrer ce qui simplement va vous permettre de continuer à vivre, assumer votre subsistance. 
C’est ma limite possible à moi. Ce serait.

Je ne suis pas, jamais, sortie d’une certaine famille. Je n’ai pas grandi. Je suis toujours ramenée en arrière.

Me lever, saluer Jules.

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